Il y a 80 ans, les nazis envahissaient la Pologne et déclenchaient par le fait même la Seconde guerre mondiale. Mark Bray, l’auteur de L’antifascisme son passé, son présent, son avenir souligne que : « Pendant les cinq ans suivantes, les nazis et leurs alliés vont tuer environ 200 000 Roms, 200 000 personnes handicapés ainsi que des centaines de milliers d’homosexuels et de militants de gauche et autres dissidents. »(p.82) et bien sûr environ six millions de juifs et de juives soit les deux tiers de la population juive du continent européen.
Afin de souligner ce triste anniversaire, le polémiste du Journal de Montréal, Mathieu Bock- côté, s’est empressé d’écrire une chronique sur le sujet pour glorifier encore une fois les grands héros de l’histoire officielle, c’est-à-dire les chefs d’état et les dirigeants. A contrario Bock-Côté passe à côté des antifascistes qui, en Allemagne et dans les pays sous occupation, ont résisté aux nazis et aux fascistes, via les différentes cellules de résistance qui comprenaient de nombreux anarchistes et communistes, les réseaux souterrains, les ouvriers et ouvrières qui ont fabriqué des armes défectueuses, les étudiant.e.s pamphlétaires de la rose blanche, les familles qui ont caché des juifs dans leur grenier ou leur cave, les pirates de l’Edelweiss qui regroupaient plusieurs groupes de jeunes allemand.e.s âgé.e.s de 13 à 18 ans qui ont lancé « une guerre éternelle contre les jeunesses hitlériennes » (p.83), les grévistes néerlandais de 1941 ainsi que ceux et celles qui sont tombé.e.s les armes à la main dans les soulèvements des camps de concentration et des ghettos.
Évidemment, le polémiste ne pouvait terminer son billet sans déformer la réalité pour mieux servir son agenda politique.
Mais comme le souligne Mark Bray : « Doit-on attendre que les croix gammées battent au vent des bâtiments publics pour se défendre? » (239) Bien que de nouvelles chemises noires ne sont pas entrain de défiler dans nos rues en masse, la violence des fascistes ou des groupes fascisants est bien réelle et « Même en dose très faible, elle peut être dangereuse […] les victimes de violence transphobes ou racistes s’en rendent compte dans la douleur.» (p.255) L’attentat à la grande mosquée de Québec le 29 janvier 2017 devrait être suffisant pour nous en convaincre. Mais pour être certain, voici une liste non exhaustive de la violence, du terrorisme et de la progression de l’extrême-droite depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale…
En Italie, des groupes fascistes ont lancé à partir de 1969 une stratégie de tension insurrectionnelle qui visait à déstabiliser la société (avec l’appui de la CIA) et ainsi provoquer un retour au fascisme pour rétablir l’ordre. Leurs actions ont entraîné la mort de nombreuses personnes. Le 12 décembre 1969, une explosion à la piazza Fontana tue 17 personnes et en blesse 88. En 1974, une bombe a explosée lors d’un rassemblement antifasciste à Brescia, tuant huit personnes en plus d’en blesser une centaine d’autres . En 1980, la violence meurtrière des fascistes italiens a atteint un sommet lors des attentats à la gare de Bologne qui ont fait 80 victimes. (p.119)
En France, des bandes de skinheads racistes ont attaqué des concerts punk et lancé ce qu’ils ont appelé « une chasse aux beurs » qui a coûté la vie à 23 personnes en 1983.
En Allemagne, entre 1990 et 2017 au moins 169 assassinats ont été commis par l’extrême-droite. Pour la seule année 1993, 23 000 crimes liés à l’extrême-droite ont été enregistrés. (p. 107)
En Grèce, « [le parti néonazi ] Aube Dorée a débarqué de nulle part pour devenir une force politique majeur prête à diriger un gouvernement, avant que des condamnations judiciaires déciment la direction du parti en 2013. » (p.257) Pour en savoir plus sur l’histoire d’Aube dorée, vous pouvez consulter le texte: Comment la Grèce en est-elle arrivée à élire des députés néonazis ?
En Norvège, 77 personnes sont assassinées par un militant d’extrême-droite lors d’un rassemblement de la Ligue des jeunes travaillistes le 22 juillet 2011 .
Le 15 mars 2019, 52 personnes perdent la vie après des attentats dans deux mosquées en Nouvelle-Zélande. Le 4 août dernier, un suprémaciste blanc a tué 22 personnes à El Paso, près de la frontière entre le Mexique et les États-Unis.
Et la liste continue…
« On ne débat pas du fascisme, on le détruit » – Buenaventura Durruti
L’histoire nous a démontré que les institutions ont échoué à endiguer le fascisme. En Italie , le roi a donné le pouvoir à Benito Mussolini et en Allemagne les nazis ont été élus démocratiquement au Reichstag. N’en déplaise à Bock-Côté, il demeure impératif de tirer les bonnes leçons de l’histoire et d’empêcher chaque avancée potentielle d’une nouvelle peste brune. Nous le devons à toutes les victimes de la haine et du fascisme d’hier à aujourd’hui.
«¡No pasarán! »