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Avr 102025
 

Soumission anonyme à MTL Contre-info

Communiqué des organisatrices de la vigile en l’honneur des trois personnes tuées par la police entre le 29 et le 30 mars 2025 au soi-disant Québec

La police continue de tuer, abolition maintenant !

Lors de la fin de semaine du 29-30 mars 2025, trois personnes ont perdu la vie aux mains des forces policières au Québec, Abisay Cruz et deux autres personnes dont nous ignorons encore le nom. Cette vigile est d’abord un temps pour offrir nos condoléances et prêter nos forces à la famille et aux proches. Nous nous réunissons afin d’exiger une justice pour les personnes tuées par la police. Ces personnes ont droit à la reconnaissance de leur vie, de leur histoire et de leur humanité. Nous ne laisserons pas les médias, la classe dirigeante ou la police les dépeindre autrement que comme des personnes méritant la vie et notre soutien.

Selon les informations diffusées par la famille d’une des victimes et en lisant entre les lignes des communiqués — remplis d’euphémismes — du Bureau d’enquête indépendant (BEI), on comprend que le Service de police de Montréal (SPVM) a encore une fois usé de la force illégitime et du permis de tuer que lui accorde l’État. La police a reçu un appel concernant une personne en détresse et a réagi avec les outils dont elle dispose : elle a menotté l’homme en détresse, Abisay, et l’a plaqué au sol avec son genou alors qu’il luttait visiblement pour respirer.

Nous devons commencer par reconnaitre que la police s’ancre dans un héritage sanglant : elle repose sur des systèmes d’oppressions et d’exploitation colonialistes, capitalistes, racistes, sexistes et transphobes. Historiquement, elle a servi — et continue de servir — à contrôler autant le corps que les mouvements de résistances des populations autochtones, noires et racisées. La police ne répond pas aux besoins de la société : elle surveille nos quartiers et maintient les plus vulnérables d’entre nous dans des cycles de précarité en ciblant, judiciarisant et brutalisant des communautés historiquement opprimées. Elle préserve en même temps une forme de confort en déresponsabilisant le reste de la société de la nécessité de partager les ressources et de prendre soin collectivement.
La police dira que cette surveillance, ce contrôle et cette violence sont aberrants – ils se produisent rarement et accidentellement – ou qu’ils sont nécessaires pour protéger la société. Mais la violence est l’outil de la police – c’est sa spécialité et sa raison d’être.

Et la police ne protège pas : la police produit et entretient des discours qui légitiment son usage de la violence — une violence présenté comme nécessaire pour “gérer des situations” et pour punir les personnes construites comme criminelles. La police n’intervient pas : elle arrive sur les lieux, et nie aux personnes la reconnaissance de leurs histoires et leur refuse toute forme d’agentivité. Pour elle, ces personnes sont perçues comme criminelles, dangereuse ou sans importance. Elles peuvent réagir à une personne en détresse en l’immobilisant, en contenant le « danger » ou en ne réagissant pas du tout.

La police ne réfléchit pas : elle ne cherche pas à comprendre ou à remettre en question ce qu’elle qualifie de criminel. Elle laisse la classe dominante, les capitalistes et les systèmes colonialistes le rôle de le définir au détriment du bien-être des communautés.

La police ne prévient pas : elle aggrave les épisodes de violence. Elle mobilise la force contre les communautés racisées, les personnes en situation d’itinérance, les personnes vivant avec des enjeux
de santé mentale et les autres communautés précarisées. La police ne désescalade pas et ne pourra jamais le faire : elle détient le monopole de la violence — une violence, encore une fois, légitimisée par l’État, une violence amplifiée par un budget sans cesse croissant, par des technologies toujours plus violentes.

La police n’est jamais punie : elle se protège en blâmant les victimes, et en utilisant à leur avantage la dichotomie bonnes et des mauvaises personnes.

La police punit, contrôle, bât et déshumanise. La police tue.

La police ne pourra pas être réformée : on a bien vu que la « police communautaire », implantée dans les année 1980s, a été un échec sur toute la ligne et que tous les changements demandés dans les dernières années n’ont pas porté fruit. La police continue de se servir de contexte de précarité grandissant afin de s’accaparer nos ressources collectives pour grossir toujours plus son budget, ses effectifs et son pouvoir. Le problème, ce ne sont pas les cas isolés, c’est la police dans son semble. C’est le système qui légitimise et perpétue sa violence.

Nous refusons de voir la police comme un mal nécessaire. La police est une des formes de violences les plus profondes de notre société. Nous ne serons jamais capable de médier et de prévenir la violence si nous ne reconnaissons pas ce fait et que nous ne l’abolissons pas. Nous revendiquons des alternatives dès maintenant. Nous réclamons l’abolition de l’institution policière. Nous nous devons d’imaginer un monde sans police. Un monde où nous nous redonnerons les capacités d’offrir des soins, de prévenir la violence et d’intervenir en garantissant la sécurité de nos communautés. Un monde où les communautés sont fortes de leur solidarité, de leur partage des ressources et de leur remise en question continuelle de leurs interventions. Un monde qui redéfinira la justice comme permettant aux personnes de changer, qui s’inspirera de la justice transformatrice. Un monde qui traitera la suprématie blanche avec tout le sérieux nécessaire à sa destruction.

Nous appelons toutes personnes ayant à cœur la réelle protection des communautés de lutter activement pour ce monde. Ce ne sont pas des bodycams ou d’autres énièmes reformes qui nous y mèneront, mais la lutte, l’entraide que l’on s’offre et les liens que nous créons sans et contre les violences policières.

Repose en paix Abisay Cruz.

Reposez en paix tous ceux qui ont péri aux mains de la police.