De la Convergence des luttes anticapitalistes
Les prisons n’ont pas toujours existées. Leur apparition s’inscrit dans un processus de gestion des corps et des vies humaines qui accompagne la naissance du capitalisme. Les prisons comme telles font bien-sûr partie d’un plus grand système carcéral, très développé dans notre société, qui ne sert pas seulement à punir une personne qui a commis un geste considéré illégal, mais permet aussi à l’État d’exercer un contrôle social.
Musique
- Marilyn Rambo – « Tomate cerise », tirée de l’album « Baleine à Nourrir » https://marylin-rambo.bandcamp.com/
- Sauf les drones – « Des montagnes comme des barricades », tirée de l’album « Lieux anonymes », https://sauflesdrones.bandcamp.com/releases
- Sloan Lucas – « Mauvaise nouvelle », tiré de l’album « oh shit ok », https://sloanlucas.bandcamp.com/
Toutes utilisées avec la permission des groupes.
Références
La définition de la justice transformatrice du gouvernement fédéral: https://www.justice.gc.ca/fra/jp-cj/jr-rj/index.html
Deux livres parus chez AK Press portant sur la justice transformatrice pour les personnes intéressé.e.s:
* Beyond Survival – Dixon
* We Will Not Cancel Us – adrienne maree brown
Transcription
Introduction Comme on l’a mentionné dans le dernier épisode, les prisons n’ont pas toujours existées. Leur apparition s’inscrit dans un processus de gestion des corps et des vies humaines qui accompagne la naissance du capitalisme. Les prisons comme telles font bien-sûr partie d’un plus grand système carcéral, très développé dans notre société, qui ne sert pas seulement à punir une personne qui a commis un geste considéré illégal, mais permet aussi à l’État d’exercer un contrôle social. Les répercussions de ce système sont néfastes pour les personnes emprisonnées et leur communauté aussi bien que pour le reste d’entre-nous qui vivons en connaissant les conséquences de ce qu’il représente.
Pour en apprendre plus, nous vous présentons une entrevue avec Helen Hudson.
Depuis une vingtaine d’années, Helen Hudson milite en solidarité avec des prisonnières et prisonniers. Elle habite sur le territoire Kanien’kehá:ka non-cédé, aussi connu sous le nom de Montréal, mais travaille principalement avec des prisonniers politiques aux États-Unis. Elle s’identifie comme une femme noire, queer et anarchiste.
Q: Aux niveaux politique et social, qu’est-ce que c’est la prison?
R: La prison n’est pas juste un endroit qui existe, c’est une institution sociale. C’est-à-dire, il y a une fonction que la prison sert dans notre société, et puis c’est lié avec toute autre institution dans notre société. Donc, c’est clair que c’est lié au gouvernement, à la police, mais il faut aussi être conscient que c’est lié à l’économie, à l’éducation, aux frontières, tout ce qui fait fonctionner la société a un lien avec la prison et c’est quoi la fonction de la prison? Pour moi, dans mon analyse, c’est un contrôle social spécifiquement quand la société, le capitalisme, l’État, causent la précarité. Il faut faire quelque chose avec ces gens précaires et il faut faire quelque chose pour faire en sorte que les gens comprennent qu’il y a des pouvoirs que l’État a sur eux, alors c’est ça la fonction de la prison, avoir un endroit pour garder un surplus de personnes, de travailleurs, et pour envoyer un message clair que la coercition est là comme menace pour le peuple.
Q: Peux-tu nous dresser un portait de la population carcérale au Canada? Qui se retrouvent en prison et quels sont les liens entre leur incarcération et les autres formes d’oppression auxquelles ces personnes font face?
R: Comme j’ai dit, la prison est là pour envoyer un message et contrôler les gens, alors ça ne surprend pas que les gens marginalisés, opprimés se retrouvent en prison en grand nombre. Au cours des dernières décénnies, mettons, les dernières quatres décénnies, on va avoir une augmentation en général du nombre de prison dans le monde occidental–c’est à dire dans des pays comme le canada, les états-unis, en europe, etc. Euh, Au Canada, on n’a pas vu augmenter notre population incarcérée, mais on a vu augmenter les personnes opprimées. Par exemple, en 2001, le pourcentage des personnes dans les prisons canadiennes fédéraux, où se retrouve le monde qui purgent une peine de deux ans ou plus, le taux des personnes autochtones étaient juste en bas de 20%. Là c’est juste en haut de 30%, 30,5%. Quand on regarde chez les femmes autochtones, c’est plus de 40% et avec les jeunes, les personnes jeunes peut importe leur genre, c’est aussi élevé comparé à ce 30%, qui est déjà élevé par rapport au 5% de personnes dans l’État du Canada qui est autochtone, et ça on voit aussi ça chez les personnes noires. Ca On parle donc de racisation des prisonnières mais aussi quand on regarde l’oppression, la pauvreté, les problèmes de santé mentale, l’analphabétisme, tout ça c’est surreprésenté en prison. Donc on voit clairement que les personnes opprimées sont les personnes qui se retrouvent derrière les barreaux.
Q: Comment la prison touche-t-elle la vie de gens qui ne sont pas elleux-mêmes emprisonnées?
R: Pour moi c’est très clair que la prison touche les personnes emprisonnées, mais touche des communautés. Quand une personne est en prison, cette personne laisse sa famille, laisse sa job qui sont souvent enracinées dans sa communauté. Mettons par exemple une communauté noire comme à Montréal-Nord, pour prendre un exemple. Je vais parler dans l’État canadien, mais la même dynamique se reproduit dans toute la société occidentale. Quand on enlève en grand nombre tout le monde qui peut travailler, tout le monde qui peut être tête d’une famille, tout le monde qui a les rôles dans une communauté et qui transmettent des savoir culturels, qui peut être le leadership–pour dire comme ça– d’une communauté, si ces gens sont derrière les barreaux, c’est pas juste eux qui sont affectés. C’est sûr que eux y sont affectés très concrètement, mais c’est aussi un cercle vicieux qui se produit dans le sens que les jeunes, les enfants, dans des communautés où beaucoup d’adultes sont emprisonnés vont voir leurs chances d’être emprisonnés aussi dans le futur augmenter.
Q: Donc, en plus de cibler et d’affecter les populations déjà les plus opprimées et les moins privilégiées de la société, le système carcéral perpétue ces oppressions. Au lieu de régler quoi que soit, la prison accentue les causes de la soi-disante criminalité. Pour toi, l’abolition des prisons est une réponse à ces injustices. Peux-tu nous expliquer ce qu’est l’abolitionisme?
R: L’abolitionnisme, c’est clair par son nom, il a pour but d’abolir la prison, de faire en sorte qu’on va avoir une société sans prison. Quand je mentionne ça souvent j’ai une réaction que c’est une idée ridicule ou un peu utopiste dans le sens que qu’est-ce qu’on peut faire pour régler ce qu’on appelle des crimes, c’est-à-dire des méfaits entre des personnes : quelqu’une blesse quelqu’une d’autre ou prend quelque chose qui appartient à quelqu’un d’autre. Comment est-ce qu’on peut régler ça sans prison ? Honnêtement, je n’ai pas de réponse très simple et concrète à ça, mais juste pour dire qu’il y a des sociétés où ça ne se fait pas de façon comme on règle ça dans nos sociétés — avec des prisons. L’autre chose à mentionner est que si on veut régler des problèmes entre les gens en dedans des communautés, c’est très différent d’y impliquer l’État, parce que avec les notions des crimes qu’on a, avec les courts, la police, les prisons, ce qui vient avec est toute la pression que je viens de mentionner, mais aussi que ce n’est plus conceptualisé comme un méfait contre une autre personne, mais plutôt un méfait contre l’État. Par exemple, si je prends ta bicyclette, avec notre conception du crime, ce n’est pas entre moi et toi, c’est entre moi et l’État. Ça devient complètement autre chose. Avec l’abolition des prisons, on veut toujours avoir une façon de régler ça entre moi et toi, entre tout le monde qui est affecté, mais ce n’est plus un méfait contre l’État. En plus, ce n’est plus question de punir, parce que voilà un autre aspect de l’abolitionnisme : c’est axé sur des solutions, c’est axé sur ce qu’on apppelle en anglais la « restorative justice ». C’est-à-dire de retourner à un état — une situation — où tout le monde est correct et où on a guéri l’injustice qui s’est produite. Autre chose que je voudrais mentionner avec l’abolitionnisme est que c’est à la fois pour faire en sorte qu’il n’y ait plus de prison et en même temps construire des alternatives ; il y a donc à la fois une lutte anti-carcérale et à la fois une lutte pour une vision d’une autre société.
Narration: « Restorative justice, en français la justice réparatrice, sert, en bref, à trouver un moyen pour la personne qui a causé un tort à une ou des personnes de réparer le mal qu’elle a causé, selon les besoins et les demandes de la ou des victimes. » Au soi-disant Canada, le gouvernement fédéral s’est approprié le de terme justice réparatrice en lui donnant une place dans son système carcéral punitif.[1] Aujourd’hui certain.e.s préfèrent donc parler de justice transformatrice, soit une forme de justice refusant toute collaboration avec l’État et misant sur la transformation des mentalités notamment par le biais de processus entre les victimes/survivantes et les personnes ayant causé du tort. Nous allons revenir sur ces notions dans un des prochains épisodes du Verger au complet, qui portera plus spécifiquement sur les formes de justices alternatives.
Q: Parmi les gens qui voudraient voir un monde sans prisons, il y en a qui sont critique du terme « abolitionisme ». Peux-tu nous en parler? Qu’est-ce que le mot abolition veut dire exactement pour toi?
R: Il y a deux aspects de cela: d’abord, tout à fait, on peut avoir une critique très réelle dans le sens que d’abolir la prison, ça veut dire quoi ? C’est une question tout à fait pertinente parce qu’on ne peut pas abolir une institution de la société et la faire disparaître. C’est sur que si c’est lié à la suprématie blanche, le capitalisme, le patriarcat, l’homophobie, toute sorte de choses, on ne peut pas juste l’abolir. C’est sur qu’il y a des personnes qui se disent abolitionnistes et qui n’ont pas une critique de toutes ces autres institutions mentionnées et donc ce n’est pas très réaliste pour moi de dire on va juste abolir les prisons et le reste de la société va rester comme elle est. Pour moi ce n’est pas réaliste et pas juste non plus. D’un autre côté, le terme abolitionnisme fait référence à l’abolitionnisme de l’esclavage et il y a beaucoup de gens dans les mouvements abolitionnistes qui font ces liens dans le sens que la prison est une institution profondément suprémaciste blanc et profondément coloniale. Alors quand il y avait le mouvement abolitionniste de l’esclavage, ce mouvement n’a pas tout à fait réussi : l’esclavage a légué le suprémacisme blanc, et le suprémacisme blanc est un des fondements de l’institution des prisons. Et donc, pour beaucoup d’abolitionnistes, c’est toujours le même mouvement. C’est une continuation du mouvement abolitionniste d’il y a un siècle et pour moi en tant que personne noire et antiraciste, c’est important de faire ce lien et c’est en partie pourquoi je me dis abolitionniste et pas seulement anti-prisons. L’autre chose est qu’il y a aussi l’abolitionnisme anti-prisons, mais il y a aussi l’abolitionnisme carcéral. Pour moi l’abolitionnisme carcéral est plus pertinent, c’est plus large dans ce sens qu’il y a d’autres institutions carcérales, il y a aussi d’autres façons d’enfermer des gens, c’est-à-dire les choses qui se disent des alternatives aux prisons, par exemple des bracelets GPS où des gens sont confiné.e.s chez eux mais toujours surveillés par l’État et incapables de partir de chez eux. Il y a des frontières, il y a des hopitaux psychiatriques fermés–et je mets hopitaux avec des guillemets parce que ce ne sont pas des vrais hopitaux pour moi, il n’y a personne qui va se soigner là-bas. Alors c’est ça l’abolitionnisme carcéral, c’est-à-dire l’abolitionnisme des prisons et de toute autre instance carcérale avec un lien historique avec l’abolition de l’esclavage.
Q: Tu voulais nous parler du féminisme carcéral?
R: En fait, en parlant je me suis rendu compte que dans une des autres questions j’aurais voulu parler un peu plus du patriarcat spécifiquement parce qu’une partie du discours pro-prisons très central est que les prisons sont là pour nous garder en sécurité, nous protéger des personnes emprisonnées. Parmi les luttes radicales, révolutionnaires, je pense qu’il y a des éléments réformistes qui ont comme réponse à leur oppression qu’il faut punir les gens et entre autres avec la prison. Mais surtout dans les luttes anti-patriarcales et contre les violences faites aux femmes, il y a des éléments qui exigent des peines plus longues, des lois plus sévères et il y a un nom pour ça : le féminisme carcéral. Et là, dans les années récentes, ça me donne beaucoup d’espoir de voir un dialogue en dedans des mouvements féministes comme quoi le féminisme carcéral est un grand problème et c’est pas une solution au sexisme d’enfermer les gens parce que ça n’améliore pas la sécurité des femmes. On voit avec les lois plus sévères que ce sont souvent les femmes qui se retrouvent derrière les barreaux pour se défendre. Donc voilà ce que je voulais ajouter parce que c’est souvent une question que les gens ont : comment est-ce qu’on va être en sécurité, comment est-ce qu’on va se protéger et c’est comme « a trap » de penser que la prison va nous protéger et de faire recours à ça dans nos revendications.
Q: Alors, être abolitioniste, ça implique quoi en termes concrêts, comme actions, comme stratégies ou comme engagement politique?
R: Pour moi, je commence par la fin : comme engagement politique, pour moi c’est central. Quand je me suis radicalisé, au début ce n’était pas contre les prisons. Je faisais du militantisme féministe, queer, antiraciste et ça m’a pris plusieurs années pour comprendre que les prisons sont centrales dans toutes ces luttes : c’est une façon d’opprimer les gens des mouvements. Beaucoup de mon travail avec les prisonniers c’était avec des prisonniers politiques dans le sens que c’étaient des prisonniers incarcérés pour le rôle dans d’autres mouvements sociaux. Si on est sérieuses à opposer et à vaincre le patriarcat, le capitalisme, le suprémacisme blanc, le colonialisme et la transphobie et là je peux continuer la liste avec toutes les formes d’opporession, toutes les structures qui nous oppriment. C’est important de ne pas avoir des murs en dedans de nos luttes. C’est d’inclure tout le monde incluant les prisonniers et les prisonnières dans nos luttes et de viser l’institution des prisons comme une cible de toutes ces luttes. Là c’est une réponse un peu plus théorique. Pour aller un peu plus dans le concret, comme j’ai mentionné plus tôt, il ya comme deux pistes : il y a la piste abolitionniste comme lutte en tant que telle et il y a aussi le côté plus visionnement des alternatives. Honnêtement, moi je suis moins impliquée dans la partie vision mais je trouve important de le mentionner. Mais en termes de ce qui est le côté plutôt « anti » c’est de surtout prendre le leadership des prisonniers et prisonnières, donc de soutenir les luttes qui se font en dendans des prisons. Et il y en a plein : il y a des grèves de la faim, des grèves de travail où les prisonniers refusent de travailler, toute sorte d’autres action. D’être en lien avec toutes ces luttes-là et de prendre le leadership de ces gens et ça veut dire des fois de faire des choses qui n’ont pas juste la destruction complète des prisons comme exigence et comme but. Des fois, il y a des prisonniers et prisonnières qui réclament des conditions un peu moins sévères et des fois nous les militantes en dehors des prisons on peut trouver ça un peu réformiste mais c’est une lutte très concrète pour améliorer les conditions de vie de nos camarades. Donc d’être en solidarité avec ces luttes c’est très important et d’y apporter un regard abolitionniste, c’est d’avoir un dialogue comme quoi ces luttes font partie d’une lutte plus large. Aussi, très important concrètement, c’est d’opposer tout ce qui est l’expansion des prisons, c’est jours-ci il y a beaucoup de surpopulation dans les prisons qui existent, beaucoup de prisons sont très vieilles donc des fois on peut avoir des revendications pour des nouvelles prisons, des prisons qui sont dites « meilleures », mais c’est très important d’être opposé.e.s à ça dans le sens que quand on construit des nouvelles prisons, on va les remplir. On voit ça très clairement quand on regarde l’histoire plus ancienne et l’histoire plus récente que c’est toujours très important d’opposer ça. Et c’est une des choses que les abolitionnistes font beaucoup. Je sais qu’actuellement à Montréal il y a une campagne contre une nouvelle prison de migrant.e.s qui s’est faite. Donc voilà je pense que je vais terminer là.
Conclusion Bref, plutôt que d’être une lutte secondaire, militer pour l’abolition des prisons constitue une nécessité en soi pour quiconque souhaite réellement s’attaquer au système capitaliste. Leviers de reproduction des inégalités sociales, les prisons oppriment, marginalisent et se basent sur une vision patriarcale et suprémasciste de la société pour punir. Édifier un monde antiautoritaire passe donc nécessairement par l’abolition des prisons et, de manière plus juste, du sytème carcéral qui se reproduit par l’enfermement des personnes stigmatisées comme « indésirables ». S’il peut sembler à première vue irréaliste de régler le tort commis par les membres d’une communauté sans avoir recours à l’État, comment s’empêcher d’arriver au même constat avec le système carcéral? N’est-il pas fondamentalement irréaliste d’espérer régler tous nos problèmes sociétaux en enfermant toutes les personnes ayant causé du tort?
S’il faut lutter activement pour l’abolition et contre l’extention du système carcéral, oublier les personnes y étant actuellement enfermées apparaît cependant comme non-souhaitable et ce surtout pour les personnes n’ayant jamais été emprisonnées ou n’étant pas en contact avec des personnes emprisonnées. De la réduction des méfaits à l’autonomie radicale des collectivités, sans oublier les formes de justices alternatives comme la justice réparatrice ou transformatrice, de nombreux exemples de communautés refusant d’avoir recours au système punitif pour régler le tort causé se doivent d’inspirer nos trames de résistances collectives.
Un dernier mot pour vous inviter à la manifestation anticapitaliste du 1er mai, à 16h au parc Jarry, coin St-Laurent et Gary-Carter. La manifestation de cette année a pour thème: « pas de retour à la normale » parce que nous refusons autant le monde prépandémie que l’avenir néocapitaliste qui se dessine. On se voit dans la rue!
Translation
As mentioned in the last episode, prisons have not always existed. Their appearance is part of a process of management of human bodies and lives that accompanies the birth of capitalism. Prisons as such are of course part of a larger prison system, highly developed in our society, which not only serves to punish a person who has committed an act considered illegal, but also allows the state to exercise social control. The repercussions of this system are harmful for the imprisoned persons and their community as well as for the rest of us who live knowing the consequences of what it represents.
To learn more, we present an interview with Helen Hudson.
Helen Hudson has been an activist in solidarity with prisoners for the past twenty years. She lives in the Kanien’kehá:ka Non-Cede territory, also known as Montreal, but works primarily with political prisoners in the United States. She identifies as a black, queer and anarchist woman.
Q: On a political and social level, what is a prison?
A: Prison is not just a place that exists, it is a social institution. That is to say, there is a function that the prison serves in our society, and then it is linked with every other institution in our society. So, it is clear that it is linked to the government, to the police, but we must also be aware that it is linked to the economy, to education, to borders, everything that makes society function has a link with the prison and what is the function of the prison? For me, in my analysis, it’s a social control specifically when society, capitalism, the state, cause precariousness. You have to do something with these precarious people and you have to do something to make people understand that there are powers that the state has over them, so that’s the function of the prison, to have a place to keep a surplus of people, of workers, and to send a clear message that coercion is there as a threat to the people.
Q: Can you give us a snapshot of the prison population in Canada, who ends up in prison, and what are the links between their incarceration and other forms of oppression they face?
A: As I said, prison is there to send a message and control people, so it’s not surprising that marginalized, oppressed people end up in prison in large numbers. Over the last few decades, say, the last four decades, we’re going to see an increase in the number of prisons in general in the western world–that is, in countries like Canada, the United States, Europe, etc. Uh, in Canada, we haven’t seen an increase in our incarcerated population, but we have seen an increase in the number of oppressed people. For example, in 2001, the percentage of people in Canadian federal prisons, where the world is, who are serving a sentence of two years or more, the rate of Aboriginal people was just under 20%. Now it’s just over 30%, 30.5%. When you look at Aboriginal women, it’s over 40% and with young people, young people of any gender, it’s also high compared to that 30%, which is already high compared to the 5% of people in the state of Canada who are Aboriginal, and we also see that with Black people. So we’re talking about the racialization of women prisoners, but also when we look at oppression, poverty, mental health issues, illiteracy, all of that is overrepresented in prison. So you can clearly see that the oppressed people are the people who end up behind bars.
Q: How does prison affect the lives of people who are not themselves in prison?
A: For me it’s very clear that prison affects people in prison, but it affects communities. When a person is in prison, that person leaves his or her family, leaves his or her job, which are often rooted in the community. Let’s take a black community like Montreal North, for example. I’m going to speak in the Canadian state, but the same dynamic is reproduced in all of Western society. When you take out in large numbers all the people who can work, all the people who can be the head of a family, all the people who have roles in a community and who pass on cultural knowledge, who can be the leader–to put it that way–of a community, if these people are behind bars, it’s not just them who are affected. Of course, they are affected very concretely, but it is also a vicious circle that occurs in the sense that young people, children, in communities where many adults are imprisoned will see their chances of being imprisoned in the future increase.
Q: So, in addition to targeting and affecting the already most oppressed and least privileged populations in society, the prison system perpetuates these oppressions. Instead of solving anything, prison exacerbates the causes of so-called crime. For you, the abolition of prisons is a response to these injustices. Can you explain what abolitionism is?
A: Abolitionism, it’s clear by its name, its goal is to abolish prison, to make sure that we will have a society without prison. When I mention this, I often have the reaction that it’s a ridiculous idea or a bit utopian in the sense that what can we do to solve what we call crimes, that is to say misdeeds between people: someone hurts someone else or takes something that belongs to someone else. How do you deal with that without jail? Honestly, I don’t have a very simple and concrete answer to that, but just to say that there are societies where it’s not done in the way we deal with it in our societies — with prisons. The other thing to mention is that if you want to solve problems between people within communities, it’s very different to involve the State, because with the notions of crimes that we have, with the courts, the police, the prisons, what comes with it is all the pressure that I just mentioned, but also that it’s no longer conceptualized as a misdeed against another person, but rather a misdeed against the State. For example, if I take your bike, with our conception of crime, it’s not between me and you, it’s between me and the state. It becomes something completely different. With the abolition of prisons, we still want to have a way to settle it between me and you, between everyone who is affected, but it is no longer a misdemeanour against the State. Moreover, it is no longer a question of punishment, because here is another aspect of abolitionism: it is focused on solutions, it is focused on what is called « restorative justice ». That is, to return to a state — a situation — where everyone is okay and the injustice that occurred has been healed. Another thing I would like to mention with abolitionism is that it is both to make sure that there are no more prisons and at the same time to build alternatives; there is So there is both an anti-prison struggle and a struggle for a vision of another society.
Narrative: « Restorative justice, in short, serves to find a way for the person who has caused harm to a person or persons to repair the harm he or she has caused, according to the needs and requests of the victim or victims. » In Canada, the federal government has appropriated the term restorative justice by giving it a place in its punitive prison system. 1] Today, some people prefer to speak of transformative justice, a form of justice that refuses all collaboration with the State and that focuses on transforming mentalities, particularly through processes between victims/survivors and those who have caused harm. We will come back to these notions in one of the next episodes of The Complete Orchard, which will deal more specifically with alternative forms of justice.
Q: Among those who would like to see a world without prisons, there are those who are critical of the term « abolitionism ». Can you talk about this? What exactly does the word abolition mean to you?
A: There are two aspects to this: first, quite frankly, there is a very real critique in the sense that abolishing prison means what? It’s a very relevant question because you can’t abolish an institution of society and make it disappear. Of course, if it’s related to white supremacy, capitalism, patriarchy, homophobia, all sorts of things, you can’t just abolish it. Of course there are people who call themselves abolitionists who don’t have a critique of all these other institutions mentioned and so it’s not very realistic for me to say we’re just going to abolish prisons and the rest of society is going to stay the way it is. To me that’s not realistic and not fair either. On the other hand, the term abolitionism refers to the abolition of slavery and there are a lot of people in the abolitionist movement who make these connections in the sense that prison is a deeply white supremacist and deeply colonial institution.
So when there was the slavery abolitionist movement, that movement didn’t quite succeed: slavery bequeathed white supremacism, and white supremacism is one of the foundations of the prison institution. And so, for many abolitionists, it’s still the same movement. It’s a continuation of the abolitionist movement from a century ago and for me as a black person and an anti-racist, it’s important to make that connection and that’s part of why I call myself an abolitionist and not just anti-prison. The other thing is that there is also anti-prison abolitionism, but there is also prison abolitionism. For me prison abolitionism is more relevant, it is broader in the sense that there are other prison institutions, there are also other ways of locking people up, that is to say things that are called alternatives to prisons, for example GPS bracelets where people are confined to their homes but still monitored by the police. but still monitored by the state and unable to leave their homes. There are borders, there are closed psychiatric hospitals–and I put hospitals with quotation marks because they are not real hospitals for me, there is nobody who goes there to be treated. So that’s prison abolitionism, that is to say abolitionism of prisons and of any other prison instance with a historical link to the abolition of slavery.
Q: You wanted to talk to us about prison feminism?
A: Actually, as I was talking I realized that in one of the other questions I would have liked to talk a little bit more about patriarchy specifically because part of the very central pro-prison discourse is that prisons are there to keep us safe, to protect us from the people in prison. Among the radical, revolutionary struggles, I think there are reformist elements that have as a response to their oppression that they need to punish people and among other things with prison. But especially in the anti-patriarchal struggles and against violence against women, there are elements that demand longer sentences, harsher laws and there is a name for that: prison feminism. And now, in recent years, it gives me a lot of hope to see a dialogue within the feminist movement that prison feminism is a big problem and that it’s not a solution to sexism to lock people up because it doesn’t make women safer. We see with tougher laws that it’s often women who end up behind bars to defend themselves. So that’s what I wanted to add because it’s often a question that people have: how are we going to be safe, how are we going to protect ourselves and it’s like « a trap » to think that prison is going to protect us and to use that in our demands.
Q: So, what does being an abolitionist imply in concrete terms, as actions, as strategies or as political commitment?
A: For me, I start at the end: as a political commitment, for me it’s central. When I became radicalized, at first it wasn’t against prisons. I was doing feminist, queer, anti-racist activism and it took me several years to understand that prisons are central to all of these struggles: it’s a way of oppressing people in movements. A lot of my work with prisoners was with political prisoners in the sense that they were prisoners incarcerated for their role in other social movements. If we are serious about opposing and overcoming patriarchy, capitalism, white supremacism, colonialism, and transphobia, and I can go on and on with all the forms of oppression, all the structures that oppress us. It’s important not to have walls within our struggles. It is to include everyone including prisoners in our struggles and to target the institution of prisons as a target of all these struggles. This is a more theoretical answer. To go a little more concrete, as I mentioned earlier, there are like two tracks: there is the abolitionist track as a struggle as such and there is also the more visionary side of the alternatives. Honestly, I’m less involved in the visioning part but I think it’s important to mention it. But in terms of what’s the more « anti » side, it’s mostly about taking leadership from prisoners, so supporting the struggles that are going on inside prisons.
And there are plenty of them: there are hunger strikes, work strikes where prisoners refuse to work, all sorts of other actions. To be connected to all these struggles and to take leadership of these people and that means sometimes doing things that don’t just have the complete destruction of prisons as an exi and as a goal. Sometimes, there are prisoners who demand less severe conditions and sometimes we activists outside of prisons may find this a bit reformist but it is a very concrete struggle to improve the living conditions of our comrades. So to be in solidarity with these struggles is very important and to bring an abolitionist perspective, it is to have a dialogue as if these struggles are part of a larger struggle. Also, very important concretely, is to oppose everything that is the expansion of prisons, these days there is a lot of overcrowding in the prisons that exist, a lot of prisons are very old so sometimes we can have demands for new prisons, prisons that are said to be « better », but it’s very important to be opposed to that in the sense that when we build new prisons, we are going to fill them. We see that very clearly when we look at the older history and the more recent history that it is always very important to oppose that. And that’s one of the things that abolitionists do a lot. I know that in Montreal right now there is a campaign against a new migrant prison that has been done. So I think I’ll end there.
Conclusion In short, rather than being a secondary struggle, campaigning for the abolition of prisons is a necessity in itself for anyone who really wants to attack the capitalist system. As levers of reproduction of social inequalities, prisons oppress, marginalize and rely on a patriarchal and supremacist vision of society to punish. Building an anti-authoritarian world therefore requires the abolition of prisons and, more justly, of the prison system that reproduces itself through the confinement of people stigmatized as « undesirable. While it may seem unrealistic at first glance to address the harm done by members of a community without recourse to the state, how can one help but arrive at the same conclusion with the prison system? Is it not fundamentally unrealistic to expect to solve all our societal problems by locking up all the people who have done wrong?
While we must actively fight for the abolition and against the expansion of the prison system, forgetting about those who are currently locked up seems undesirable, especially for those who have never been imprisoned or who are not in contact with imprisoned people. From harm reduction to radical community empowerment, not to mention alternative forms of justice such as restorative or transformative justice, there are many examples of communities refusing to resort to the punitive system to address the harm done that should inspire our collective resistance.
A final word to invite you to the May 1st anti-capitalist demonstration, at 4pm at Jarry Park, corner of St-Laurent and Gary-Carter. The theme of this year’s demonstration is « no return to normal » because we refuse both the pre-pandemic world and the neo-capitalist future that is taking shape. See you in the streets!