Du P!nk bloc
Avec le reportage Trans Express, Enquête donne avant tout une plateforme aux discours de groupes transphobes en invitant des pseudo-expert.e.s discrédité.e.s par leur milieu telle que Lisa Littman et sa théorie du « rapid-onset gender dysphoria ». Nous considérons que les choix éditoriaux de l’émission sont clairs, politiques et dangereux. Enquête ne présente pas ici une pièce d’enquête rigoureuse, mais une heure de sensationnalisme démagogue faisant écho à l’extrême-droite.
Radio Canada instrumentalise des expérences spécifiques de détransition pour renforcer leur discours transphobe. Cependant, les expériences de détransition sont multiples et s’opposent souvent à l’idée que le genre est obligatoirement stable. Dans tous les cas, la facilité d’accès au soin trans est un net positif. Alors que le système commence à peine à prendre la parole des personnes trans et leur savoir expérientiel au sérieux, le reportage semble vouloir le peindre comme étant un problème. Nous réaffirmons que les personnes trans devraient avoir la décision finale quant à leurs choix médicaux.
Il n’est pas non plus anodin que le reportage porte encore une fois sur la question des enfants dans une foulée de panique morale. La droite conservatrice utilise comme d’habitude la « protection » des enfants comme argument principal. Il est essentiel de souligner que leurs demandes ne sont en aucun cas liées à une réelle protection des jeunes, d’autant plus ceux trans et queers, mais à l’instrumentalisation de la figure de l’enfant comme porteur de leur projet pour une société plus oppressive.
Le reportage centre les voix des parents et des milieux médicaux, effaçant presque entièrement celles des jeunes trans (un seul jeune trans prend la parole pour moins de 5 minutes dans un reportage d’une heure). Le reportage tente de nous faire croire qu’écouter les jeunes trans est une erreur professionnelle majeuer. En ce sens, Enquête amplifie les manifestations d’extrême-droite de l’année dernière qui réclamaient plus de « droit parentaux », à comprendre le droit de contrôler la vie de leurs enfants. Au contraire, nous considérons essentiel de reconnaitre aux jeunes leur capacité de raisonner, de porter des réflexions sur leur identité et de prendre des décisions sur leur corps. La réele meilleure protection des jeunes est de leur assurer une agentivité et une autonomie.
Ainsi, nous sommes particulièrement alarmé.e.s par la diffusion de ce reportage dans ce climat de transphobie dans une plateforme supposément reconnue pour sa neutralité. Il nous faut dénoncer clairement les intentions transphobes des journalistes et l’absence flagrente d’éthique journalistique. C’est d’autant plus dangeureux que c’est une tentative de normalisation du discours transphobe par le « centre-gauche » en le présentant comme « du gros bon sens ».
C’est un glissement de terrain de penser que cette enquête présente des résultats légitimes pour déterminer les prises de position sociale sur l’accès au soin pour les enfants trans. Il ne faut absolument pas considérer ces résultats, qui démontrent une absence totale de méthodologie, comme équivalents à ceux des nombreuses recherches scientifiques sur les parcours de transition. Ces derniers montrent l’importance de l’accessibilité aux soins comme un facteur de protection pour les jeunes trans.
En donnant de l’acceptabilité sociale à l’extrême-droite, Radio-Canada propage la haine et la violence contre nos communautés trans. Cela n’est pas à prendre à la légère peu de temps après le meurtre de Nex. Celui-ci nous rappelle que ces discours sont bien plus dangereux pour le bien-être des jeunes que ne le sont les médecins qui les soutiennent. Il est également important de reconnaître que les médias institutionnels grand public, tel que Radio Canada, sont un outil de l’ordre social dominant, quelle que soit leur position sur l’échiquier politique. Cela s’est également manifesté dans leur traitement du génocide en Palestine, qu’ils ont totalement nié en ayant recourt constamment à la voix passive.
Pour ces raisons et bien d’autres encore, il est important de développer nos propres plateformes de discours et d’analyse qui centrent les voix marginalisées et révolutionnaires. Nous devons écouter celleux qui sont directement touché.e.s par le statuquo oppressif pour mieux le comprendre. Nous devons propager nos actes et nos paroles de résistance pour nous mobiliser et nous révolter collectivement contre les systémes qui nous oppriment toustes.