Tout d’abord, contrairement à ce qu’en pense la Mauvaise herbe, mon texte ne les visait pas directement. Il est d’ailleurs faux que la Mauvaise herbe soit « le seul zine anticiv à Montréal », dans la mesure où, bien qu’elle constitue un des seuls, sinon le seul groupe à publier du contenu anticiv original à Montréal, les publications anticivs sont omniprésentes dans le large éventail de zines distribués à Montréal. En effet, il est même impensable d’imaginer une foire de zines à Montréal sans zine « critique du progrès et de la civilisation »–raccourci donné par la Mauvaise herbe pour définir les idées anticivs. Plutôt que de m’en prendre à la Mauvaise herbe, mon propos visait davantage à faire avancer ou au moins stimuler les réflexions anarchistes relatives aux enjeux liés à la technique, car ceux-ci traversent les dernières luttes menées par des anarchistes et suscitent un engouement qui ne cesse de se manifester au sein de la gauche radicale montréalaise.
Je vois dans les idées développées au sein de la famille des anarchismes verts bon nombre d’éléments pertinents pour comprendre le monde et suis surpris que la Mauvaise herbe ne l’ait pas souligné dans sa critique. À mon sens, la plus grande force des différentes branches de l’anarchisme vert est d’avoir souligné la pertinence de comprendre la technique non pas en tant qu’addition relativement aléatoire d’outils et d’innovations individuelles, mais comme un tout, un système qui amène avec lui des conséquences sociales sur l’organisation des sociétés humaines et qui porte de manière inévitable des conditions, des besoins qui orientent significativement le développement des sociétés et les innovations techniques. De ce fait, quiconque voudrait conserver le produit d’une société technicienne étatisée dans un processus révolutionnaire, voire accélérer le potentiel des forces productives, devra inévitablement se soumettre à une série de règles difficilement réconciliables avec les principes de l’anarchisme. Penser toute l’organisation et la coordination que permet l’État sans État est pour le moins épineux, mais cela constitue la mission historique de toutes les déclinaisons théoriques de l’anarchisme. Conformément à une lecture ellulienne de la technique, à mesure que s’installe le règne de la technique, soit l’intégration des outils individuels à un ensemble technique auto-référenciel et autonome, le processus révolutionnaire se complexifie d’au moins deux façons: d’une part puisqu’il rend le monde irrécupérable tel quel sans la reproduction de tous ses maux et, d’autre part, parce qu’il rend l’abandon de ce monde de plus en plus difficile sans l’émergence de catastrophes majeures. C’est sur cette dernière difficulté que j’ai tenté de travailler dans le cadre de mon premier article critiqué par la Mauvaise herbe.
Puisque la technique et les conditions sociales qu’elle apporte sont perçues comme absolument irréconciliables avec l’anarchie, les anarchistes verts soutiennent que, si nous sommes véritablement sincères envers un projet de société anarchiste, on ne peut se permettre de faire de compromis avec l’organisation sociétale ayant émergé de l’industrialisation. Contrairement à d’autres militant.es anarchistes, les anarchistes verts sont au moins honnêtes lorsqu’iels soutiennent que, si on veut conserver la médecine moderne ou un réseau ferroviaire développé, on peut difficilement se passer de mines et de certaines formes d’usines, même si leur choix en fin de compte est d’abandonner ces produits de l’industrialisation. Le coeur de mon propos est de dire que cette réflexion se tient et est cohérente théoriquement en soi, mais qu’elle sous-estime systématiquement toute la violence qu’elle implique et la force réactionnaire de la technique face à une telle posture, tout comme elle romantise une vie qui ne me semble pas souhaitable. En ce sens, ma principale critique à l’égard des formes plus radicales de l’anarchisme vert est leur incapacité la plus totale à réfléchir aux moyens que nous nous doterons collectivement pour assurer la survie des milliards d’humain.es dont l’existence repose directement sur la civilisation et ses déclinaisons techniques.
Il ne s’agit pas strictement de blâmer le messager, comme le soutient la Mauvaise herbe, puisqu’en l’occurrence le message, c’est le projet de société. Il y a une différence significative entre des ouvriers communistes qui sabotent les machines dans une usine et des anticivs qui font le même geste, même si les conséquences sont les mêmes, puisque cela s’inscrit dans une finalité totalement différente. Alors que les communistes ne souhaitent généralement pas vivre sans développement industriel, les anticivs oui. Les anarchistes verts qui ne sont pas prêt.es à assumer les conséquences de leurs projets et horizons politiques doivent être traité.es comme des politicien.nes.
À mon sens, une des conséquences les plus engageantes du développement technique et de l’industrialisation est la hausse démographique. En ayant permis une croissance démographique sans précédent dans l’histoire humaine (passant de 1 milliard d’individus en 1800 à plus de 8 milliards aujourd’hui), la technique nous a en quelque sorte lié.es à certaines formes d’organisation sociale. L’idée n’est pas de faire renaître un malthusianisme répugnant, mais plutôt de faire voir l’importance qu’a l’ampleur des civilisations humaines dans leurs orientations politiques et l’horizon de leurs possibles. Un anarchisme qui se borne à appeler constamment à un retour à l’arbre à palabre est voué à l’échec par son incapacité à penser une société aussi complexe et développée que les nôtres. Toute l’autorité qui découle de la technique s’expose dans son incompatibilité avec les formes les plus radicales de démocratie : comment espérer que l’ensemble des individus participant à la gigantesque chaîne de production puisse, à toutes les étapes de cette dernière, se prononcer en assemblée générale pour y lancer leurs avis sans que cela n’ait d’impact sur la productivité ? L’activité technique est peu soucieuse des autres facteurs que l’efficacité et, si l’on veut conserver une part de cette efficacité, nous devrons conserver une part de l’autorité imprégnée dans l’agencement social que nous tentons de nous réapproprier. Il faut évidemment se garder de faire équivaloir efficacité et autorité. Toutefois, j’ai la conviction qu’une volonté de maximisation de l’efficacité ne peut se passer d’autorité; voilà pourquoi j’ai préféré parler d’un parti a-technicien.
Il me faut aussi réitérer que les nuances qui différencient les branches de l’anarchisme vert sont constamment surévaluées. En fait, trop insister sur les différences entre les anti-tech, les anticivs et les primitivistes revient souvent à s’enfarger dans les fleurs du tapis. Cela a surtout comme principal avantage de permettre aux anarchistes verts de s’acheter un passe-droit en renvoyant la balle à d’autres branches théoriques lorsqu’iels sont critiqué.es, alors que toutes les branches de l’anarchisme vert partagent des fondements théoriques communs, peut-être à l’exception de l’écologie sociale, qui constitue un cas à part, ce que j’avais déjà souligné. En ce qui a trait à la pratique, les similitudes entre les différentes branches de l’anarchisme vert sont encore plus saillantes. On a pu rire de mes caricatures de la pratique anarchiste anticivilisationnelle, mais il n’en demeure pas moins que les exemples donnés par la Mauvaise herbe de la pratique anarchiste verte à Montréal ne constituent en rien une pratique proprement anticiv, mais bien une pratique anarchiste! Il est assez rigolo de se faire rappeler que l’imprimerie a permis l’impression de livres racistes et antiféministes tout en me soulignant que la pratique des anticivs à Montréal est de s’impliquer dans une bibliothèque, dans un projet de librairie et dans la publication de zines…
Première ligne n’a certainement pas réglé la question de la théorie et de la pratique anarchistes et nous n’avons jamais eu cette prétention. Nous continuons à puiser dans l’histoire des mouvements révolutionnaires communistes et anarchistes pour nous inspirer et stimuler notre praxis. Or, s’il est une chose certaine, c’est que nos réponses aux faiblesses théoriques et pratiques de l’anarchisme vert illustrées ci-dessus ne se posent jamais en termes léninistes. Lorsque j’abordais l’État [rayé] et sa qualité d’a-technicien, j’appelais à réfléchir non pas un État ouvrier, mais une forme d’organisation sociale qui n’est pas l’État, qui n’est pas le gouvernement, qui n’est pas la bureaucratie, qui n’est pas la police ni les prisons, mais qui permet tout de même d’assurer une vie meilleure aux individus, de favoriser l’émergence de formes de coordination nécessaires pour lutter contre les changements climatiques, éviter la famine et vaincre les puissances capitalistes étatisées qui voudront empêcher notre processus d’émancipation. Lorsque j’abordais le parti, je l’abordais dans sa définition de « camp » davantage que dans sa déclinaison léniniste. De toute manière, un parti ou un État fidèles aux principes léninistes ainsi qu’à leurs legs historiques ne peuvent être autre chose que des organes techniciens en ce qu’ils sont fondés et sont constamment légitimés par leur capacité à tout rationaliser, tout organiser, tout imposer et tout systématiser conformément à leur planification. Un parti léniniste qui rejetterait sa vocation technicienne serait un très mauvais parti léniniste !
Lorsque je fais référence au parti et à l’État a-techniciens, j’évoque des formes d’organisation qui rejettent l’impératif d’efficacité comme principale préoccupation, non pas parce que l’efficacité est une mauvaise chose en soi, mais parce que je suis d’accord avec les anarchistes verts lorsqu’iels affirment que le parti de l’efficacité à tout prix est nécessairement irréconciliable avec le parti de l’anarchie.
Quelques pistes pour réfléchir à notre rapport aux idées ridicules de Première Ligne d’un point de vue anarchique
Je sais que plusieurs vont simplement décider d’ignorer d’un roulement des yeux le texte publié récemment par la revue « communiste anarchiste révolutionnaire » Première Ligne Entre obscurantisme et naïveté libérale, quelques pistes pour réfléchir notre rapport à la technique au XXIe siècle d’un point de vue révolutionnaire (signé Ana*) et ce ne sera pas par manque de quoi répondre. Déjà qu’après la tentative quand même pathétique du groupe éditorial de se distancer et se déresponsabiliser du matériel qu’il a lui-même commandé, supervisé, édité et publié, on ne nous blâmera pas de ne pas vraiment avoir envie de discuter avec un groupe qui a pratiquement affirmé qu’il ne fait que troller le milieu (voir Réponse à la « Réponse à Première Ligne », mtlcontreinfo.org/reponse-a-la-reponse-a-premiere-ligne/). Mais c’est aussi qu’à la longue on se tanne d’affronter les mêmes calomnies recyclées, venant souvent de personnes avec les mêmes patterns d’ultrasocialistes qui délirent, qui confondent le fanatisme et l’intransigeance dogmatique pour une sorte de rigueur révolutionnaire ou de radicalité militante qu’elles projettent sur tout.
Après avoir promu des idées doctrinaires de rééducation sexuelle dans son dernier numéro sur le genre, ce récent texte de Première Ligne (PL) nous annonce cette fois des réflexions sur la technique… Tenons-nous bien!
L’exercice rhétorique y est assez cheap. On y oppose une caricature d’utopisme technologique naïf, représenté par « l’accélérationnisme de gauche », à une caricature de « l’anarchisme vert » et surtout de « l’anarchisme anticivilisationnel », présentés comme des technophobies obscurantistes – tout en dénigrant les anars de Montréal – pour finalement nous mettre d’avant la plateforme de PL comme seule alternative raisonnable, évidemment. Cependant, bien que PL essaie de faire passer les autres pour des fous afin d’avoir l’air smart, la pertinence des idées qu’elle nous propose démontre assez vite pourquoi cette stratégie lui semblait nécessaire.
Si j’avoue que j’ai un certain plaisir à écouter PL se plaindre des tendances du milieu anarchiste de Montréal auquel elle se heurte, vue l’état de dispersion actuel de celui-ci je ne m’y fierais pas pour étouffer des discours aussi dérisoires qu’ils puissent paraître. Devant la présence anarchiste flétrissante et le populisme démagogique qui prospère si facilement, les communistes fanatiques y voient une opportunité. La naïveté et l’insouciance des anarchistes envers les communistes à répétitivement prouvé être mal avisée et je n’ai aucune envie de voir leurs idées toxiques proliférer de nouveau.
Face à l’inertie, PL sera contente d’entendre que mes « tendances grégaires » font défaut. La fausse camaraderie et ma tolérance envers les charlatans qui se disent anti-autoritaires en prônant des idées de domination aussi me font terriblement défaut. En fait, c’est d’une joie ravageuse que je viens ridiculiser et m’opposer fermement à des idéologues qui veulent nous faire croire qu’un proto-État ouvrier écocidaire imposé par une avant-garde de moines révolutionnaires chaste, ça a quelque chose à voir avec l’anarchie plutôt qu’un trip de cosplay trotskiste gone bad!
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*Notons que c’est la même signature que pour le texte Notre anarchisme dans le manifeste publié par Première Ligne en guise de premier numéro. Je vais donc me permettre de présumer qu’il s’agit bien ici des opinions de PL, surtout en ce qui concerne l’anarchisme. Je le mentionne parce que PL n’a pas hésité à se dissocier de Pour une éthique militante masculine et larguer son auteure après s’être fait critiquer pour avoir décidé de publier ce texte dans son 3e numéro. (voir mtlcontreinfo.org/reponse-a-la-reponse-a-premiere-ligne/)
Ça serait insultant si c’était pas si ridicule
Ça fait plus de 125 ans, depuis les premières publications des Naturiens au tournant du 20e siècle que la civilisation et le progrès sont critiqués et confrontés d’un point de vue anarchique : les réflexions nihilistes sur la société de masse, les anarchistes pacifistes critiques de la science, les analyses ellulienne de la technique, le primitivisme inspiré par l’anthropologie des années 60-70, l’anarchisme vert, l’écologie radicale, les « Fronts de libération » (ELF/ALF) et une partie de l’anarchisme insurrectionnel des dernières décennies, etc. S’il y a bien sûr des points en communs entre ces tendances, il y a aussi des divergeances et toute une diversité d’inspirations, de perspectives, d’approches et de pratiques. Les anarchistes « anticiv » en sont un amalgame. Soyons clairs, ce terme n’a jamais été autre chose qu’un raccourci pour dire au sens large « critique du progrès et de la civilisation ». Cependant, PL s’en sert tout au long du texte en l’interchangeant avec les termes « anarchiste vert » et « primitiviste », comme s’ils s’équivalaient, afin de tresser un homme de paille auquel s’attaquer. Évidemment, le but est d’en faire une idéologie avec une approche spécifique qui convient à la propagande de PL. C’est bien plus facile de s’en prendre à une parodie basée sur ses propres préjugés et idées préconçues que de chercher réellement à connaître et comprendre un vaste sujet afin d’acquérir une analyse sérieuse par un processus de remise en question.
C’est dans ce sens que PL se livre à des attaques sur la crédibilité des personnes qui critiquent la civilisation d’un point de vue anarchique. On nous affirme que « la radicalité des propositions théoriques des anticivs les isole à un point où toute action politique véritablement transformatrice devient impensable » et que « leur activité politique atteint rapidement un cul-de-sac où quasiment toute action rompt avec leurs principes de base ». Mais puisque ces affirmations, que les anticivs sont intrinsèquement des incapables, ne s’appuient sur rien d’autre qu’un pet de cerveau, PL laisse libre cours à son imagination flatulente dans toute sa verve en s’essayant à la fiction :
« Certaines décident de partir des mois par années dans le grand nord, souvent armées de fusils, pratiquer leur survivalisme en attendant de manquer de munitions ou un effondrement civilisationnel qui ne vient pas – ce qui n’ébranle pas grand-chose. D’autres décident de poursuivre leur vie en ville, vouées à malheureusement la vivre dans des espaces bétonnés, parfois publier des zines en petite quantité en espérant semer du désespoir le plus total un peu chez le voisin. D’autres, plus braves, décideront de mener des attaques violentes sur des cibles comprises comme jouant un rôle dans la reproduction de la civilisation, à savoir souvent des héoliennes, des barrages ou centrales électriques, des tours de télécommunication, etc. Ces actions restent fortement marginales et n’ont en toute vraisemblance aucune chance d’avoir un quelconque impact réel sur la société. Si c’était vraiment le cas, les États ne tarderaient pas à sortir les griffes et punir conséquemment ses adversaires – et lorsqu’iels pensent être plus fortes que l’état ou assez discrètes pour y échapper. Iels se fourvoient. Voilà comment se concrétise la vie militante des anticivs » conclut-on fatalement.
Un intérêt de longue date envers l’anarchie et les tendances critiques de la civilisation m’ont amené à croiser plusieurs « anticivs » au fil du temps, et pourtant jamais de survivaliste qui passe du temps dans le nord avec leurs fusils en attendant la fin de la civilisation. Certes, je ne connais pas tout le monde, mais c’est certainement pas typique. En fait, comme plusieurs le supposeront déjà, on y trouve toute sorte de personnes et il n’y a rien de typique aux « lifestyle » des anarchistes critiques de la civilisation. Bien qu’au début du texte PL admet s’affronter à un groupe hétérogène, on remarque vite que la convenance idéologique d’assimiler tout le monde à une caricature est plus importante que le souci de connaître le sujet. La fiction dénigrante qu’on nous propose est un montage plus convenable aussi pour la rhétorique du lifestylism récurrente dans le texte. Nous y reviendrons.
Vous avez déjà entendu parler d’attaques anticiv sur des barrages ou centrales électriques? Moi non plus. Par contre, on a déjà vu comment des individus et des petits groupes informels ont flambé des concessionnaires d’autos et des projets de développement, saboté machineries et moyens de transport, bloqué les routes et les voies ferrées, ou encore se sont attaqués aux cages où des êtres sont torturés pour notre convenance… Les initiatives individuelles n’en ont rien à faire d’attendre des grèves et des révolutions, ni de l’accord de l’avant-garde, de la logistique révolutionnaire ou des assemblées de quelconque rêverie de conseils ouvriers. Elles agissent selon leurs propres objectifs et capacités, limitées seulement par leur créativité.
Eh oui, bien sûr que les autorités lancent leurs campagnes de répression. L’écologie radicale est depuis longtemps au haut de la liste des préoccupations des agences de renseignement nord-américaines. L’infiltration, les rafles, les procès, les emprisonnements, les condamnations exemplaires… comme ils l’ont fait aussi avec les organisations révolutionnaires maoïstes quand elles ont été trop dérangeantes. Par contre, on remarque que si les actions individuelles ou de groupes informels n’ont jamais cessé de se propager, que reste-t-il aujourd’hui des organisations révolutionnaires?
Toutes ces expériences avec des conséquences réelles ont inspiré des débats, des positions, des stratégies, des actions… Et malgré la menace de la répression pendant les années du Green Scare, on a vu des anarchistes anticiv impulser des projets et des événements de toute sorte pour essayer d’apporter des perspectives écologistes plus radicales, parfois sous les calomnies et les menaces d’autres soi-disant anarchistes. On se souviendra des petits inquisiteurs de Hors d’Œuvre (une autre gang qui fantasmait d’une révolution ouvrière) qui passaient des tracts pour la « liquidation des primitivistes » avant d’envoyer des menaces de mort et un appel à la bombe contre un événement de la Mauvaise Herbe au Salon du livre anarchiste de 2007.
Justement, c’est drôle que PL tire une flèche contre la Mauvaise Herbe dans sa tentative de faire passer les anticivs pour des vaux rien. Pas besoin de le nommer, on le sait bien que c’est le seul zine « anticiv » à Montréal. Pourtant, trouvez-moi un zine anarchiste par ici, ou ailleurs, qui dure depuis plus de 20 ans avec presque 50 numéros publiés. Peut-être que PL devrait prendre la mesure des choses avant d’essayer de cracher sur les autres du haut de ses quatre zines. Et honnêtement, je préfère une revue qui prend pas son lectorat pour des caves et qui « sème du désespoir », au lieu d’une revue pleine de faux-espoirs et de bêtises qui servent seulement à étaler du branlage idéologique pseudo-intello sans humour, à la PL. De plus, à part tous les événements et projets auxquels elle à participé, collaboré, ou facilité, cette bande d’anticivs insignifiants fait aussi partie des groupes anars qui ont été actifs dans la reprise du bâtiment qui abrite le DIRA et se sont impliqués dans la librairie l’Insoumise.
En fin de compte, on dirait pas vraiment du monde isolé, paralysé par leurs principes et incapable d’actions concrètes, ces anticivs. Ce qui paralyse c’est de croire qu’on ne peut rien faire par soi-même, que l’action individuelle n’a pas d’impact, que nos actions n’ont de valeur que si elles s’inscrivent dans un but supérieur : sauver le monde, l’utopie, la révolution, la rédemption, l’organisation, le parti, Dieu, l’anarchie, etc.
Mais si la caricature que propose PL ne vous a pas encore convaincu que les anars anticiv c’est des pas bons, attendez de voir. Après nous avoir expliqué que les anticivs sont trop inutiles pour avoir « un quelconque impact réel », dans une pirouette rhétorique des plus tordues PL nous offre sa propre projection révolutionnaire d’une « hypothétique victoire de l’anarchie anticivilisationnelle » pour aussitôt accuser les anticivs du scénario génocidaire qu’elle vient elle-même d’imaginer :
« Si on veut dépasser la fatalité militante qui les attend et analyser les conséquences d’une hypothétique victoire, même partielle, de l’anarchie anticivilisationnelle, les jours ne sont pas plus heureux. Comment est-il possible d’imaginer fermer les mines, les pipelines et les barrages hydroélectriques alors que le rôle social qu’il joue dans la reproduction sociétale est autant majeur? Il va sans dire que la survie de milliards d’humaines dépend de ces institutions techniques et que les mettre à bas immédiatement équivaudrait à un acte meurtrier qui s’attaquerait d’abord et avant tout aux plus vulnérables. Dans l’histoire, l’exemple le plus abouti d’une révolution de cet ordre serait surement le mouvement de désertion des villes au profit des “communes agraires” qu’ont réalisé les khmers rouge au Cambodge. »
C’est le coup classique de s’en prendre au messager. Les anticivs essaient de faire allumer le monde sur le fait que tout ce truc ressemble à une mega-machine à tuer, et se font accuser d’être les génocidaires. Faut-il vraiment rappeler que les khmers rouge furent une organisation communiste révolutionnaire, beaucoup plus près politiquement et idéologiquement de PL que de n’importe quelle anticiv? Le plus absurde, c’est que quelques lignes plus loin on argumente que l’anarchisme anticiv « n’a rien à voir avec l’anarchisme auquel on fait généralement référence en parlant de “mouvement anarchiste” » puisqu’il ne s’intéresse pas à l’anarchisme « en tant que mouvement social révolutionnaire » et que « l’anarchisme à généralement des objectifs antagoniques aux siens, soit la mise en place d’un agencement de la civilisation différent et non son abolition ». Donc, faut-il en comprendre que PL rejette l’anarchisme anticiv parce qu’il ne partage pas les ambitions mégalomanes des khmers rouge? Mais on comprend que toute cette gymnastique idéologique est propre à un esprit doctrinaire qui ne voit le monde qu’à travers le prisme de ses propres fantasmes de prise de pouvoir et de contrôle, au point de faire de l’anarchisme une idéologie de conquête et de domination.
L’affinité des anticivs est avec les sorcières, pas les curés!
Si on ne vous a pas encore convaincus que les anticivs ce sont des pourritures, immédiatement après les avoir comparés au khmer rouge on les accuse, sans aucune explication, de vouloir remplacer la science par l’instinct pour nous plonger dans l’obscurantisme et le dogmatisme religieux. Le saviez-vous? L’anarchisme anticiv n’est pas seulement insignifiant et génocidaire… c’est aussi une sorte de fanatisme intégriste!
Malheureusement, l’accusation d’obscurantisme n’est pas nouvelle. Les socialistes qui détestent la critique du progrès et de la civilisation y on recourt ad hominem, gratuitement et sans références. J’ai toujours trouvé ça extrêmement ignorant et ethnocentrique, à part d’être colonialiste. PL nous en donne un parfait exemple :
« D’un point de vue épistémologique, s’attaquer à la science en tant que mode de développement des connaissances est aussi douteux. S’il est à la mode de condamner la rationalité occidentale, il est vraiment ridicule de prétendre vouloir baser notre système de développement des connaissances strictement sur nos instincts ou tout autre pseudo science. […] D’autre part, il faut rappeler que toute société fondée sur des critères non scientifiques n’est en rien garante d’émancipation. […] Fermer catégoriquement la porte au mode de développement scientifique des connaissances ouvre la porte à un obscurantisme favorisant l’émergence de nouveaux dogmes oppressifs ou le recyclage d’anciens sous de nouvelles formes. Comme les institutions techniciennes, la science a une importance majeure dans la reproduction de la société, dont la survie de milliards d’humaines dépend. »
Premièrement, on remarque déjà le manque d’argument quand en partant on a recours à de la tautologie rhétorique. Il ne s’agit que de savoir ce qu’est l’épistémologie pour comprendre que l’énoncé est d’une banalité évidente. Tout de même, cela nous révèle le « point de vue » académicien ethnocentrique que partage PL à propos du développement des connaissances. Ce qui est « vraiment ridicule » – pour ne pas dire colonialiste et carrément raciste – c’est de prétendre qu’en deçà de notre suprême rationalité occidentale et sa science, il n’y a que « l’instinct ou quelconque pseudo science ». Est-ce qu’il faut vraiment se replonger dans le débat de la controverse de Villadolid de 1550 quand les curés discutaient à savoir si les autochtones d’Amérique étaient des personnes capables de raison, ou des bêtes tiraillées par leurs vils instincts?
L’acquisition et le partage des connaissances basé sur l’expérience et l’observation du monde n’a pas été inventé par l’institution scientifique. Cela a existé bien avant la science et continue d’exister entre autres au sein des populations marginales qui n’ont pas encore été absorbées totalement par le progrès. Plutôt, les connaissances sur lesquelles les sciences sont basées ont été usurpées, contrôlées, standardisées et normalisées selon les besoins du progrès et du développement. Les civilisés ont enfermé la connaissance dans leurs institutions pour la baliser et y contrôler l’accès et la diffusion.
Les curés de la science argumenteront que ce réarrangement fut bénéfique pour l’humanité, mais dans leur dévotion sont incapables d’admettre que la science et le progrès technique ont toujours créé plus de problèmes qu’ils n’ont réglés. Regardons seulement l’exemple de l’évolution de l’agriculture qui nous a menés tout droit vers l’épuisement des sols et une famine mondiale où tu manges du pétrole sinon tu crèves de faim, et avec une population qui continue de croître. Tout cela bien sûr par la bénédiction des travaux scientifiques de grands héros de la civilisation tels que le prix Nobel de chimie Fritz Haber – aussi connu comme le « père de l’arme chimique », puisque dans ses recherches pour synthétiser l’ammoniac et permettre l’industrialisation des engrais chimiques, il a développé le chlore gazeux et dirigé sont déploiement sur le front lors de la Première Guerre mondiale. Ses recherches sur les pesticides furent aussi cruciales pour la production industrielle du Zyklon B. Ironie du sort et tragique exemple de l’impossibilité de prévision des conséquences de la technique, Haber était juif.
Faut-il encore rappeler que toute société fondée sur des critères scientifiques n’est en rien garante d’émancipation, elle non plus? Tous ces régimes communistes et fascistes technocrates, tous ces régimes qui ont massacré des populations avec leurs sciences d’ingénierie sociale et leur mégalomanie scientifique? Faut-il aussi encore rappeler que c’est à l’époque de la raison, en pleine exaltation de la science et du progrès qu’il y a eu de loin le plus de persécution pour sorcellerie?
Quand l’innovation technique des presses de Gutenberg permit une propagation beaucoup plus rapide et massive des idées et de l’information, c’est le Malleus Maleficarum, un manuel de chasse aux sorcières plein de fake news, de sexe morbide et d’hystérie misogyne, qui fut un des premiers bestsellers. Ce n’est donc pas si surprenant ce qui se passe sur les médias sociaux de nos jours. Le monde n’est pas nécessairement attiré par les idées bien pensantes. Il n’y a alors que le contrôle de l’information et l’hégémonie idéologique qui permettent au pouvoir de gérer une telle situation de communication de masse. Et c’est pour maximiser le contrôle et l’hégémonie institutionnelle qu’on a massacré les marginaux, les hérétiques et les sorcières qui osaient maintenir les traditions ancestrales, les pratiques subversives et transgressives, la connaissance de la contraception, des remèdes et des poisons.
C’est parce que les critiques anticiv de la science osent parler de ces choses qu’elles se font traiter d’obscurantiste par l’Inquisition scientifique. L’affinité des anticivs, c’est avec les sorcières, pas les curés!
Pendant qu’on y est, si l’on est d’accord pour dire que l’obscurantisme est une attitude qui refuse de reconnaître les choses démontrées, ne devrait-on pas alors considérer le communisme anti-autoritaire comme une forme d’obscurantisme?
Enfin, la conception doctrinaire de PL sera ébranlée d’apprendre que nombre d’anticivs, dont les plus primitivistes, se sont intéressés à des sciences telles que l’anthropologie, l’histoire, l’écologie et les sciences naturelles. Ces sciences nous démontrent entre autres que ce n’est qu’à l’aide de preuves flagrantes que la « rationalité occidentale » arrive aujourd’hui à reconnaître ce dont l’approche holistique des sagesses ancestrales primitives nous informait déjà depuis des millénaires à propos de notre environnement.
Une dernière chose qu’on peut apprendre des populations primitives – ainsi que des anarchistes – grâce aux sciences de l’anthropologie et de l’histoire, c’est que les moyens facilement reproductibles sont désirables si on veut plus facilement arriver à nos buts immédiats. On a besoin d’une certaine connaissance pour être efficace, mais pas besoin d’être scientifique pour propager le feu!
L’anarchisme montréalais entre « malaise » anticolonial et phobie technologique?
Avant de nous faire la démonstration de la supériorité de son point de vue révolutionnaire sur notre rapport à la technique, PL nous en dévoile d’abord une prémisse par un autre portrait dénigrant – de « l’anarchisme montréalais » cette fois.
Dans la dernière partie du texte, on nous affirme qu’à Montréal « l’extrême gauche – excluant les communistes étatistes – demeure largement hostile au développement technique » et que « leur opposition à l’étalement technique ne vient pas d’une analyse théorique approfondie et cohérente ou d’un projet politique primitiviste ». Bien sûr que non! Projets politiques et analyses cohérentes sont apparemment au-delà des capacités des anarchistes de Montréal. Selon PL c’est plutôt « un réflexe de confrontation avec tout ce qui émerge dans l’immédiat du Capital ou du colonialisme » qui d’une part viendrait d’un attachement « aux legs pratiques et théoriques de l’altermondialisme » (que PL associe à l’organisation locale, démocratique et à petite échelle, le DIY et le rejet des grosses compagnies) et d’autre part, du fait que « le contexte canadien est particulier puisque les militantes anarchistes settlers se trouvent prises avec le malaise d’occuper des terres qui ont été volées aux différents peuples autochtones et dont l’exploitation demeure capitale dans l’économie canadienne. Il est ainsi facile de condamner les tentatives de développement extractiviste ainsi que leurs maintiens en tant que ceux-ci passent nécessairement par la destruction environnementale ou encore l’expulsion brutale des communautés habitant un lieu considéré par l’État ou les capitalistes comme stratégique à exploiter ». Un contexte qui n’a pourtant rien de particulier dans un monde assiégé depuis des siècles par le colonialisme. Qu’il vienne de la part d’États capitalistes, de révolutionnaires communistes, de royaumes ou d’anciennes cités-États, c’est une dynamique incontournable de la civilisation. « Néanmoins, conclut-on, puisque le milieu anarchiste néglige souvent de se questionner sur les vocations du mouvement révolutionnaire sur le long terme et leurs implications/nécessités, il se retrouve souvent au final à exiger des demandes immédiates relativement similaires à celles que pourraient formuler des anarchistes verts. »
En d’autres mots, pour PL le milieu anarchiste montréalais est aussi insignifiant qu’une bande d’anticiv! Ou pire, puisque les anticivs ont le mérite d’avoir une analyse, si hérétique soit-elle. C’est presque à se demander si ces anarchistes sont capables de « rationalité occidentale »… Le milieu anarchiste montréalais serait-il en proie à l’obscurantisme génocidaire, ou encore pire, à la phobie technologique paralysante?!
« Comment sortir d’une phobie technologique paralysante, possiblement menaçante pour l’intégrité de larges franges de la population humaine, tout en ne tombant pas dans les pièges que nous avons associés à l’accélerationnisme de gauche? Nous croyons que cet enjeu est décisif à la fois pour nos mouvements que pour toute perspective révolutionnaire sérieuse, et doit passer par la formulation anarchisante d’une réponse à celui-ci. »
Et voilà, tout ce salissage des anticivs,ce mépris du milieu montréalais, aboutissent à cette accusation sans fondement, que PL ne fait qu’affirmer sans jamais le démontrer dans les faits. Cette fiction ridicule d’une « phobie technologique paralysante menaçante pour la population », c’est un enjeu décisif nous dit-on. Quelle bande de clowns! À travers ce cirque on voit bien que la perspective eurocentrique etles fixations marxistes de PL se sont confrontées à une certaine conscience anticoloniale et écologiste dans le milieu anar de Montréal. Que cette conscience soit qualifiée de « malaise » et de « phobie » par PL en dit beaucoup sur ses prétentions anti-autoritaires, et d’insinuer que la destruction écologique et le colonialisme sont des problèmes qui en reviennent surtout au modèle de gestion et d’exploitation capitaliste, c’est du délire idéologique. En fait, PL remarque qu’il n’y a que « les communistes étatistes » qui partagent sa vision du développement. Peut-être que c’est là le moment de se rendre comptequ’il n’y a absolument rien « d’anarchisant » dans vos idées?
Le parti
« Il nous semble impératif de reconsidérer notre rapport à la technique [puisque] la pérennité des conditions climatiques permettant la vie humaine [sont menacés et que] la complexité technicienne est difficilement compatible avec des projets anarchistes ou de conseils ouvriers qui refusent d’avoir recours à l’État tout au long du processus révolutionnaire. En ce sens, nous devons trouver des avenues politiques qui ne passent pas par un rejet total de la médiation technique ni de l’extractivisme, mais qui permettent tout de même de maintenir la technologie à un seuil contrôlable et réversible. Déterminer quels sont ces seuils et quelle forme d’État peut nous permettre de les faire fonctionner est la tâche collective à laquelle nous devons urgemment nous attarder. »
Tant d’efforts déployés dans les textes de PL, tant de contorsions pour conceptualiser l’absence d’État en tant qu’une nouvelle entité dominatrice avec le même rôle que l’État. Au lieu d’écrire des textes à propos d’un « État » comme des clowns, pourquoi pas simplement s’assumer et parler d’État révolutionnaire ou proto-État? Par contre, si PL s’intéresse à l’anarchie pour autre chose que son branding (j’en doute), peut-être qu’une idée à explorer serait de remplacer l’État avec… RIEN!
Mais voyons voir… De quelle avenue politique menant vers un État communiste extractiviste… pardon, un État gestionnaire des ressources et de la technique pourrait-il bien s’agir?
« La réponse à tous nos problèmes est entre nos mains. Plutôt qu’anti-technicienne ou pro-technicienne, nous devons faire valoir une pratique politique a-technicienne, c’est-à-dire une pratique où les variables d’efficacité et d’optimisation doivent être descendues de leur piédestal et être mises sur un pied d’égalité avec les autres critères d’évaluation du politique et de la politique contestataire. Il n’y a pas d’autres moyens d’éviter l’État technocrate totalitaire et ses camps de travail que de prendre et fonder un parti a-technicien. »
Évidemment, la seule solution, le bon vieux parti!
Malgré toutes leurs agences, organisations, centre d’études et commissions, les spécialistes peinent à acquérir une certaine capacité de prévision et d’endiguement de phénomènes techniques précis, et ce même en se concentrant seulement sur quelques aspects. Il semble donc bien évident qu’avant même de penser à contrôler tout l’ensemble du progrès technique, la capacité de percevoir toutes les conséquences de son application est déjà loin de notre portée. Mais la mission idéologique de PL ne s’enfarge pas de tels détails. Devant cette entreprise surhumaine que de maîtriser tout le phénomène technique, il suffirait apparemment d’une plateforme politique basé sur quelques considérations éthiques et « un rapport qui prend à la fois en considération que la survie de populations dépend de l’organisation actuelle des choses, tout en restant fortement critique de cet ordre social. [Une approche qui] a au moins le mérite de nous placer dans un état constant de tension, où notre rapport à la technique implique un certain degré de culpabilité, mais qui reste aujourd’hui nécessaire ».
Donc, il ne faut rien changer à la façon actuelle de fonctionner, mais soyons-en repentants… et le parti c’est notre salut? C’est une formule typiquement autoritaire d’utiliser la honte et la repentance pour le contrôle social. On l’a vu à grande échelle avec le christianisme, par exemple. On l’a vu avec le maoïsme et sa Révolution culturelle, dont la toxicité contamine la gauche jusqu’à nos jours. C’est aussi typique avec les sectes et les gourous qui cherchent à exploiter les sentiments d’infériorité, d’incapacité, de doute en soi et de culpabilité – dans ces conditions, l’individu accepte plus facilement une autorité morale extérieure. Alors, permettez-moi de douter que ces belles intentions et encore plus de technique par le politique et l’ingénierie sociale n’aboutiraient pas simplement qu’à une autre tentative de manœuvrer la puissance de la technique à des fins idéologiques.
Bien que PL allègue dans le texte une « perspective ellulienne » et une conscience de la notion de l’autonomie technicienne, j’entends déjà Ellul nous rappeler :
« L’homme dans son orgueil, l’intellectuel surtout, croit encore que sa pensée maîtrise la technique, qu’il peut lui imposer telle valeur, tel sens, et les philosophes sont à la pointe de cette vanité. Il est même bien remarquable de constater que les philosophies les plus fines de l’importance de la technique, et même matérialistes, finalement se replient sur une prééminence de l’homme. Mais cette grande prétention est purement idéologique. […] La Science et la Technique restent identiques dans un monde socialiste (y compris en Chine!) avec leurs effets et leurs structures, et c’est un simple tour de passe-passe idéaliste qui nous convainc de leur changement de signe, comparable à la croyance des chrétiens en un Paradis. Pour moi la non-neutralité de la Technique signifie qu’elle n’est pas un objet inerte et sans poids qui pourrait être utilisé n’importe comment, dans n’importe quel sens par un homme souverain. La technique a en soi un certain nombre de conséquences, représente une certaine structure, certaines exigences, entraîne certaines modifications de l’homme et de la société, qui s’imposent qu’on le veuille ou non. Elle va d’elle-même dans un certain sens. »
-Jacques Ellul, Le système technicien
Avec tout ce qu’implique un tel projet politique, les questions et les défis qu’il soulève, la seule et unique préoccupation dont on nous fait part c’est que « le danger évident d’une telle position est de conforter les militant-es dans des pratiques totalement inefficaces ou encore de survaloriser un lifestyle anarchiste ». PL nous affirme que « ce genre de repli et d’isolement ne constitue en rien une attaque à l’organisation sociale technicienne, mais plutôt une des formes les plus compatibles avec la reproduction de cette organisation sociale, en ce sens qu’elle n’incarne en rien une menace face à celle-ci, voire isole la résistance dans des foyers autodestructeurs. [Et que] les petites communautés « libérées » ne sont pas réellement indépendantes [puisque] leur existence repose sur l’exploitation du reste du prolétariat ».
Ce thème d’un supposé « lifestyle » anarchiste parasitaire qui ne s’intéresserait qu’à une esthétique de vie est récurrent tout au long du texte. On reconnaît facilement le vieux Bookchin qui chialait contre tout le monde qu’il comprenait pas ou qui pensaient pas comme lui, les accusant de « lifestyle anarchism ». S’il a bien fait rire de lui avec ses histoires ridicules de vieux déconnecté, d’autres communistes désespérés s’y sont évidemment retrouvés, partageant le même profond désir autoritaire de décider de la vie des autres qu’on retrouve de gauche à droite. Ça les perturbe tellement qu’on retrouve des individualités diverses et dynamiques qui s’intéressent à expérimenter, explorer et subvertir les liens, les interactions, les formes et les manières à partir de leur propre vie. En gros, leur discours de marde en revient à ce que tu dois te conformer en t’autoflagellant, aller travailler et payer tes comptes comme tout le monde, militer dans un syndicat ou un parti… Voilà à quoi ressemble l’action politique véritablement transformatrice par de vrais révolutionnaires! Tu les retrouves 10 ans plus tard, toutes des fonctionnaires pis des yuppies loser qui vivent dans des condos à regarder les « prolos » faire du vol à l’étalage. Mais sérieusement, quelqu’un qui pense encore aujourd’hui que le prolétariat est un sujet révolutionnaire, ça paraît que son seul contact avec des prolos c’est dans des livres d’histoire.
Si quelque doute subsiste encore sur le fake anti-autoritarisme de PL, attendez de voir la stratégie de son parti :
« L’époque où l’on pouvait écraser les forces militaires d’un tel tsar ou d’un tel État est révolue, malheureusement. […] La stratégie du parti a-technicien est donc d’un autre ordre : rendre l’État inutile par l’instauration progressive d’un État soutenu par la population, dont l’efficacité doit être mesurée non pas en termes de maximisation de la production, mais bien en fonction de seuils viables écologiquement et qui nous permettent de garder un contrôle sur l’organisation sociale. »
Au moins on s’assume. On a même laissé de côté la rature sur le mot État cette fois. L’instauration d’un État qui contrôle la technique et l’organisation sociale, et devient la mesure de l’écologie… voilà pour l’anti-autoritarisme de PL! Les principes prennent vite le bord quand il s’agit de faire la révolution. Si des anars anticiv étalait un tel plan, je suis sûr que les accusations d’écofascisme ne se feraient pas attendre.
Le texte continu en nous expliquant que le parti doit s’engager à « prendre possession des moyens de production [pour] les transformer et les adapter à nos désirs […] dans un seul geste révolutionnaire qui ne remet pas à plus tard le pouvoir populaire au nom de quelconque nécessité, mais prône l’autonomie ouvrière par la mise en place de conseils ouvriers – qui n’ont de raison de disparaître après la révolution qu’en fonction de leurs propres considérations pratiques dues à l’évolution du mouvement révolutionnaire ».
Des fantaisies trotskistes d’une Révolution permanente? Un écocide géré par des soviets? C’est ça la « formulation anarchisante » de PL? En fait, les prétentions anarchiste et anti-autoritaire de PL ne tiennent semble-t-il qu’à une sorte de communisme de conseil, mais sans aucune préoccupation envers le fait historique que cette forme d’organisation, avec un parti d’avant-garde pour mener la révolution et la société, comme le prône PL, a rapidement sombré dans l’autoritarisme après son renversement du pouvoir. La prétendue réflexion de PL sur la technique n’apporte d’ailleurs aucune considération à propos de problèmes évidents qu’amènent de telles mesures – par exemple, la complexité logistique et la bureaucratisation, ou encore la transmission et la standardisation de l’information viennent facilement à l’esprit – réduisant la technique de manière simpliste comme s’il ne s’agissait bêtement que d’une question de la volonté politique derrière la gestion de la production. Il est difficile de voir en quoi la position de PL diverge de celle des accélérationniste qu’elle dénonce, à part sa fixation sur les soviets. On retrouve aussi le même discours simpliste dans les textes qu’elle a adressé à Rage Climatique dans son 2e numéro : la révolution marxiste et les soviets sont la réponse aux problèmes écologiques par la magie de l’émancipation du prolétariat.
Si ce n’était pas encore assez clair, ce qui motive vraiment PL ce n’est pas quelconque préoccupation à propos de l’anarchie, de l’écologie ou de la technique. L’objectif de PL est un monde de contrôle social, de gestion de ressources et de développement industriel :
« La désindustrialisation du nord global […] et la construction de banlieues au détriment de la production agraire nuisent à notre faculté de contrôle sur la technique ainsi qu’à notre possibilité d’autonomie matérielle et ouvrière. Nous devons être hostiles face aux usines sur notre territoire uniquement dans la mesure où elles sont des lieux d’exploitation, d’aliénation et de destruction écologiques […] La construction d’usines ou leur réouverture sont nécessaires, ne serait-ce que dans une perspective d’équité avec les populations du sud […] La division scientifique du travail à l’échelle mondiale complexifie radicalement les scénarios d’émancipation libertaires et notre réindustrialisation pourrait y pallier au moins de manière partielle. »
Je sais pas pour vous, mais travailler dans des usines c’est pas vraiment mon idée de l’anarchie. Leur parti, que ferait-il du lumpen anticiv qui voudrait pas travailler dans ce Plan Nord communiste? Les populations locales qui ne voudront pas que les soviets viennent détruire ce qui reste des forêts, des montagnes, des cours d’eau et leurs écosystèmes? Laissez-moi deviner, « on pourra leur offrir un emploi dans le Nord autant que possible », comme disait l’autre? Ce qui est sûr en tout cas c’est que les communistes ne manquent pas d’expérience à envoyer la dissidence dans des camps de labeur dans le nord. La putride vision idéologique de PL est tellement déconnectée qu’on insinue que les usines, par la magie des conseils ouvriers, ne seraient plus « des lieux d’exploitation, d’aliénation et de destruction écologiques ». Apparemment que les usines vont cracher des fleurs pis le monde vont adorer leurs jobs de marde après avoir passé le reste du temps dans des AG!
Ils ne changent jamais ces marxistes! Toujours là pour amener à tout prix le développement industriel partout où les capitalistes l’ont négligé. Ce n’est pas assez de proposer le maintient du mode de vie extractiviste industriel, PL est carrément en train de militer pour l’ouverture d’usines à travers le monde et accélérer le saccage et la destruction des écosystèmes. Voilà pourquoi PL voit les anticivs, les « réflexes anarchistes verts », les initiatives individuelles, le « malaise » d’occuper des terres autochtones et l’hostilité envers le développement comme des entraves à ses fantasmes révolutionnaires. La seule révolution pour laquelle PL milite vraiment, c’est la révolution industrielle.
*****
Tout ce discours répugnant de prise de pouvoir, de contrôle social, d’expansion industrielle, cette ambition de devenir gestionnaire de la destruction et de l’asservissement de la nature est absolument antagonique à l’anarchie qui m’inspire; celle qui conspire, pas pour prendre le pouvoir, mais pour que le pouvoir ne puisse s’exercer; celle qui apporte le sabotage et la destruction au monde techno-industriel et tout son développement technique; qui laisse libre cours aux affluents de l’expérience individuelle et pointe sa mire contre toute autorité qui s’impose; celle qui est synonyme de chaos et de désordre, qui vient perturber la transmission, l’organisation et le fonctionnement de l’ordre social, sans appâts utopistes!
Le monde n’a pas besoin d’une de nos idéologies libératrices autant qu’il a besoin de se débarrasser de ce qui rend possible la transmission et l’application d’une idéologie à grande échelle. Regardez où nous en sommes. Nous ne sommes pas les sauveurs du monde. C’est assez évident, vous ne croyez pas?
Que nos approches sont totalement irréconciliables, c’est peu dire… À couteaux tirés, Premières Lignes!
Commentaires fermés sur Contre l’électrification du désastre
Sep292024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Non à la filière batterie !
Pour souligner la journée de manifestations Pour la suite du monde du 27 septembre 2024, nous avons déployé, tôt ce matin, une bannière devant les bureaux de Nouveau Monde Graphite. Cette entreprise s’apprête à creuser la plus grande mine de graphite à ciel ouvert en Amérique du Nord, à quelques kilomètres du village de Saint-Michel-des-Saints dans Lanaudière. Si notre monde doit avoir une suite, il ne la trouvera certainement pas dans le Nouveau monde d’extractivisme vert et de destruction électrifiée proposé par cette entreprise.
La filière batterie, soutenue par des investissements publics massifs, s’étend de l’extraction des ressources jusqu’à la production d’unités manufacturées. Son annonce grand bruit a provoqué une véritable ruée vers l’or. Les claims et les projets miniers se sont multipliés sur le territoire – de l’Abitibi à la Gaspésie, en passant par l’Outaouais, Lanaudière et le Nord-du-Québec – dans le but d’extraire les ressources dites stratégiques à la production des composantes de batterie. En parallèle, les entreprises sont invitées à s’installer sur le territoire et à profiter de l’accès aux matières premières, appuyées par des subventions étatiques et des tarifs hydroélectriques réduits – de la méga-usine de Northvolt au complexe industriel de Bécancour.
Ce Nouveau monde du graphite n’a pourtant rien de nouveau. À travers le discours de la «transition énergétique», l’État colonial québécois a su se renouveler et sauver in extremis l’industrie automobile nord-américaine. Sous couvert d’ambitions nobles en faveur d’une transition verte, nous devons plutôt y voir une fausse tentative de prendre au sérieux la catastrophe en cours et une manière de faire du Québec un nouveau pôle d’attraction pour des capitaux étrangers. On voudrait nous faire croire que pour se sortir de la catastrophe environnementale il nous faudrait ouvrir des mines toujours plus loin, multiplier les usines et décupler la production d’électricité pour alimenter ces projets. Le pétrole et la batterie sont pourtant les deux faces de la même pièce : celle d’un monde bâtit autour de l’extractivisme, du profit et de la surconsommation. Ce sont l’industrie automobile et l’étalement urbain qui doivent être radicalement remis en question, pas uniquement les énergies fossiles. Face au mensonge de la transition énergétique – qui voudrait nous inciter à continuer à extraire, produire et consommer – nous opposons : c’est le modèle capitaliste et colonial qui est responsable du désastre écologique qui attend les futures générations et la solution passe nécessairement par une transformation drastique de nos modes de vie.
Partout où ces mégaprojets miniers et industriels naissent, nous y voyons une destruction des territoires, la pollution des nappes phréatiques et des bassins versants, ainsi que des émanations de poussières dangereuses pour les habitant-es, la faune et la flore. Nous y voyons un saccage du vivant au profit de l’enrichissement. Nous y voyons une course effrénée vers l’épuisement des ressources et une avancée de l’État colonial sur des territoires non cédés.
Ce qui nous tue, nous sommes en droit de le défaire. Contre l’expansion de cette entreprise tentaculaire, nous devons bâtir un réseau de résistance – unir et lier les luttes locales en leur permettant de résonner entre elles et de s’amplifier. Ne laissons pas ces entreprises écocidaires accaparer les territoires et détruire les forêts, polluer les rivières et tuer les êtres qui les habitent. Ne laissons pas les fausses prétentions environnementales de l’État et des entreprises vider les sols et multiplier les profits.
Pour la suite du monde, mais surtout pour la fin de celui-ci.
Commentaires fermés sur Invitation de l’État à la Révolte!
Sep032024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Cette fin de semaine qui vient, la Municipalité d’Eastman, Québécor, Hydro-Québec, le reste du gouvernment du Québec et le Conseil des Arts du Canada vous invite à vous joindre à la Révolte !
Oui c’est pas un canular, mais bien le thème officiel de ces Correspondances d’Eastman, avec une panoplie de gentils écrivain-es, intellols et artisses de la haute société, qui nous chanteront sans doute leurs tentatives pitoyables de récupérer les beaux moments que nous avions passé ensemble (en présentiel ou à distance) à brûler des poubelles et parfois des chars dans les rues, à saboter des opérations de l’industrie écocidaire, à bloquer des trains et des oléoducs, à dénoncer des mecs abuseurs de notre entourage, à attaquer des grosses mardes de l’immobilier, comme d’ailleurs les grosses mardes en charge du gouvernment du Québec (salut à toi, Camarade Legault) et bien entendu ceux du Conseil municipal (de Eastman ou ailleurs).
Visiblement même le gouvernement et sa myriade d’institutions qu’il parraine se voit forcé de reconnaître ici que leur société vaut plus la peine d’être vécue… que le temps de la Révolte est revenu.
Et il y a en effet plusieurs terrains de stationnements à travers le village et ses environs que le gratin s’empresseront de remplir de leurs beaux chars de l’année et leurs superdutys. Puis une myriade de chalets de luxe et autres développements immobiliers -souvent laissés vides le plus clair de l’année- contribuant graduellement à la destruction d’écosystèmes et à la pollution d’hycrocarbures. Aussi pas mal de restos/bistros bien bobos, à commencer par leur Cabaret de banlieusards de marde.
Et si jamais vous vous sentez pas dedans pour des attaques, bien il est bon de savoir que (soi-disant) le courrier déposé dans les boîtes rouges des Correspondances sera affranchi au frais des Correspondances, peu importe la destination du courrier, or ça peut être une occasion opportune d’envoyer des lettres aux prisonnier-ères que vous chérissez. Autant que possible essayez de pas venir en char par contre, car c’est pas assuré que le vôtre va pas écoper aussi!
Sur les lieux:
Eastman est cet endroit magique… plutôt notoire, bien connu des gens dans le sud du Québec qui sortent parfois de leur patelin pour voyager sur la 112 ou l’autoroute 10 entre Montréal et Sherbrooke. Juste à côté du Parc du Mont Orford. Une de ces colonies de la petite bourgeoisie libérale (et moins libérale) de milieu rural; un autre Sutton, ou Bic, ou Waterville, ou Val David… mais avec ses propres cliques de petit bourgeois professionels, les vampires de l’immobilier et autres artisses de renom et bien connectés. Mais c’est pas qu’Eastman qui fait cette jolie communauté, mais les enclaves bourgeoises des environs, Orford-sur-le-Lac, Stukely, les Boltons et puis les Communes de chalets de bord de lac. Des opportunités à perte de vue!
Soit, juste pour votre info… si jamais le coeur vous en dit.
Commentaires fermés sur Berlin (Allemagne) : Attaque contre les foreuses de l’entreprise Bauer et les infrastructures extractivistes ! Solidarité avec la lutte anti-coloniale des Wet’suwet’en !
À travers le monde, d’innombrables communautés autochtones luttent contre des projets et des infrastructures extractivistes, comme des projets miniers, la fracturation hydraulique, la déforestation ou des pipelines. Dans le territoire occupé par l’État canadien, un énorme projet est par exemple en cours de construction : le Coastal GasLink Pipeline, qui doit transporter du gaz extrait par fracturation hydraulique. Ce projet ne détruit pas seulement des régions entières, mais menace également le mode de vie autochtone des Wet’suwet’en. Le gazoduc doit être construit sur leur territoire en traversant la rivière Wedzin Kwa, qui est essentielle à leur mode de vie en tant que source d’eau et de poissons. C’est pourquoi les Wet’suwet’en s’opposent depuis longtemps à ce projet avec une résistance acharnée en défendant ces terres. Leur résistance se heurte à une forte répression, mais bénéficie également d’une grande solidarité.
Nous voulons montrer que la lutte contre la colonisation, et donc contre l’industrialisation et l’extractivisme destructeur, ne connaît pas de frontières. C’est pourquoi nous avons attaqué une entreprise qui participe et s’enrichit directement sur la destruction des territoires indigènes : l’entreprise Bauer fournit les engins de forage nécessaires au gazoduc Coastal GasLink. Le 6 mai, nous avons donc attaqué par le feu deux de leurs énormes machines de forage sur un chantier de Berlin. Pour cela, nous avons placé sur leurs câbles des engins incendiaires, de l’essence et un pneu.
Le gazoduc Coastal-Gaslink n’est qu’un des nombreux projets extractivistes sur des terres indigènes volées au Canada et dans le monde. Qu’il s’agisse de pétrole, de gaz, de charbon, d’or, de lithium ou d’hydroélectricité et d’énergie éolienne (celles-ci devraient désormais produire de l’hydrogène « vert » au Canada, ce qui intéresse beaucoup l’Allemagne), tous ces projets industriels font partie d’un système colonial qui détruit la terre et élimine les modes de vie indigènes.
Nous sommes solidaires des luttes des Wet’suwet’en contre le projet colonial de gazoduc Coastal-Gaslink.
Que ce soit au Canada, au Chili, au Pérou, dans la forêt de Hambach ou au nord du Portugal, luttons contre les projets extractivistes destructeurs et mettons nos luttes en lien !
Switch off the system of destruction and colonisation !
Commentaires fermés sur Northvolt : l’arbre-empoisonné tombera
Mai152024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Que la hache, frappe à la racine, l’arbre-empoisonné tombera
Le dimanche 5 mai, cinq engins incendiaires ont été placés sur le site de construction du projet Northvolt au Québec. Cette action a été menée dans le but d’endommager les machines et de réduire la capacité du projet à se poursuivre. Malheureusement, ces engins n’ont pas pris feu. S’il y a une chose à retenir, c’est que lors du choix des matériaux, il faut tenir compte de la façon dont les conditions météorologiques (humidité élevée ou pluie) peuvent réduire les chances qu’un appareil s’enflamme. Plus la minuterie est longue, plus l’appareil est exposé aux facteurs environnementaux, ce qui réduit les chances de réussite.
Pourquoi chercher à attaquer et endommager de la propriété? Alors que Northvolt, une société transnationale, se présente comme le leader de la transition verte, elle en est en fait la pierre tombale. Les véhicules électriques que la compagnie planifie équipper avec ces batteries sont une fausse solution à la destruction environementale causée par la société industrielle; dans les faits, cette expension de l’industrie automobile ne fait que permettre aux effets dévastateurs de la production de voitures et des infrastructures qui soutiennent le transport en véhicules motorisés de perdurer. Avec ce projet, l’appétit insatiable du Canada pour les ressources naturelles ne fera que croître. L’exploitation minière du Lithium, étape essentielle dans le processus de production des batteries au Lithium Ion soit-disant « vertes » de Northvolt, empoisonne déjà des écosystèmes entiers et les communautés humaines qui les peuplent. Le lithium est déjà extrait de territoires autochtones non cédés ici au « Québec », avec de multiples mines supposées commencées leurs opérations dans les prochaines années. Avec ce type de mégaprojet, les lacs, les forêts et les zones humides disparaîtront sous de nouvelles routes et les mines à ciel ouvert. Les Premières Nations perdront l’accès à leurs territoires traditionels et avec cette perte, la possibilité de pratiquer et de maintenir leurs modes de vie ancestraux et les relations qui les attachent à la terre. Elles seront surveillées et harcelées par les travailleurs et les services de sécurité. Les animaux de ces territoires mourront ou devront migrer ailleurs au fur et à mesure que leurs habitats seront détruits.
A-t’on remarquer le calme anormale qui reigne aux alentours du chantier de Northvolt depuis qu’ils ont coupés la majoritée des arbres et détruit les zones humides? Un sinistre silence de mort.
Le Capitalisme et l’État se liguent, injectant massivement des fonds publiques dans les projets de corporations privées qui ne ferront qu’empirer la crise écologique à l’échelle mondiale. C’est pourquoi nous devont agir, et plus souvent qu’autrement sans tenir compte des loies imposées sur ces terres par les gouvernements. L’État québecois a déjà abandonné ses propres régulations environementales et ferme les yeux alors que Northvolt contrevient à nombre de loies et codes. C’est bien évidement parce que le gouvernement de Legault (comme tout autre gouvernement coloniale) a politiquement intérêt à ce que le projet ait de l’avant. Heureusement, le futur reste à écrire. Nous avons des choix à faire. Nous pouvons toujours agir! Nous ne devons pas nous laisser guider par d’injustes loies, mais par l’amour que nous et d’autres portons encore pour les êtres vivants, pour la terre et l’eau et par notre désir de nous battre pour un monde meilleur, à travers la lutte contre les structures coloniales. Armée de nos convictions, faisons nôtre la nuit et prenons les risques nécessaires pour combattre pour un future ou la vie est possible.
Malgré l’opposition de la communauté locale concernant la dégradation environnementale et l’inutilité du projet, le gouvernement du Québec insiste pour rallonger l’autoroute 20 de Notre-Dames-des-Neiges à St-Simon, ce qui implique la construction d’un pont passant au-dessus de la rivière Trois-Pistoles. Le Ministère des Transports du Québec persiste à vouloir étendre les tentacules de l’État et de l’industrie tout deux reliés au contracteur Englobe, une multinationale en ingénierie siégeant leur bureau entre autres dans la ville de Québec. En ce moment, des forages géotechniques ont lieu de chaque côté de la rivière Trois-Pistoles. Ces forages impliquent l’extraction d’échantillons du sol à l’aide d’équipement vulnérable se trouvant un peu partout autour du site et dans la ville de Trois-Pistoles et Notre-Dame-des-Neiges.
Durant la nuit, dans la deuxième semaine d’avril, des anarchistes ont saboté un camion de la MTQ qui transporte une machine de forage et l’ont couvert de graffitis.
Les anarchistes du Quebec et d’ailleurs sont invités a faire pareil. Nous devons nous battre contre ce projet d’autoroute pour défendre nos forêts et rivières.
Lundi dernier, une scène remarquable s’est déroulée près de Wemotaci. Des défenseurs de la terre Atikamekw ont érigé un blocus pour faire entendre leur voix contre la coupe à blanc de leur territoire, Nitaskinan. Face à la détermination des défenseurs, un dialogue tendu mais nécessaire a eu lieu. Découvrez notre vidéo pour voir comment ces moments se sont déroulés et comprendre l’importance de ces actions. Pour plus d’informations et soutenir leur cause, visitez https://gardiensduterritoire.com
Commentaires fermés sur Nouveau sabotage contre Northvolt – Aucun capitaliste n’est à l’abri
Mar082024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Cette semaine marquait le retour des oiseaux migrateurs en Montérégie et le début de la nidification pour plusieurs espèces. Le chantier Northvolt est désormais engagé dans une course contre la montre afin de remblayer un maximum de milieux humides d’ici le 10 mars avant d’être empêché par la réglementation fédérale protégeant les oiseaux migrateurs. Si les travaux de déboisement sont terminés du côté de Saint-Basile-le-Grand (8700 arbres abattus) des travaux similaires s’amorcent désormais dans la partie Est du terrain appartenant à McMasterville. C’est dans cette section que se trouve le dernier boisé encore intact, peut-être préservé de la coupe en raison des actions répétées de spiking qui y ont eu lieu.
Afin de freiner le saccage des milieux naturels, des militant·es se sont attaqués à la carrière Mont-St-Hilaire du groupe Michaudville, responsable jusqu’à maintenant du remblayage de plus d’une dizaine d’hectares de zones marécageuses essentielles à la survie d’espèces vulnérables comme le petit blongios, la tortue molle à épines et la chauve-souris rousse. En raison de l’artificialisation des sols et de l’étalement urbain, il ne reste plus, aujourd’hui, que 5% de milieux humides dans ce bassin versant. Non seulement ce projet industriel n’aidera en rien à la décarbonisation de notre économie (comme le prétendent nos ministres), mais il se fera, en plus, aux dépends de la biodiversité locale. Rappelons que la crise écologique n’est pas seulement une crise climatique, mais aussi une crise de la biodiversité toute aussi menaçante. C’est grâce à nos relations avec d’autres espèces si nous vivons, mangeons et respirons. Nous sommes entièrement dépendent·es de ces écosystèmes.
En début de semaine, une centaine d’engins cloutés ont été répandus sur le chemin menant à la carrière afin de cibler les camions transportant la terre et le gravier servant au remblayage. Dans les dernières semaines, ce sont au-delà de cent allers-retours qui s’y sont produits quotidiennement avec un passage de camion aux 3 minutes. Toute action qui perturbe la circulation et entrave l’unique voie d’accès à la carrière cause des pertes financières affectant la rentabilité du projet. Chaque heure de travail perdue est une victoire pour les opposants à Northvolt.
Le projet Northvolt ne sera jamais écologique. Avec la filière batterie, le gouvernement caquiste profite du dérèglement du climat pour faire des affaires. Tandis que l’État injecte aujourd’hui des milliards de dollars pour sauver l’industrie automobile, ces investissements nous obligent à assurer, pour les décennies à venir, la croissance d’un secteur économique tout aussi destructeur que l’économie fossile. L’électrification massive des transports et le tout-à-l’auto nécessitent la multiplication des mines dans les pays du Sud et sur le territoire des Premières Nations. Partout, les terres agricoles, les cours d’eau et les populations qui en dépendant seront empoisonnés par des rejets toxiques. Des forêts entières seront jetées à terre, des montagnes éventrées. La crise écologique est insoluble dans le capitalisme : notre unique voie de sortie passera par l’entraide, la création de communautés résilientes et la décroissance.
Aux entreprises qui collaborent avec Northvolt : personne n’est à l’abri!
Commentaires fermés sur Attaquons Northvolt, toujours, partout
Fév282024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Des anarchistes ont encore attaqué la machine de destruction capitaliste sur le site de Northvolt. Des pics d’acier ont été mis en place sur les différents chemins utilisés par la machinerie. En plus, de nouveaux clous ont été mis dans des arbres, cette fois sans les identifier, pour maximiser le potentiel de destruction sur la machinerie écocidaire. Les personnes ayant fait l’action n’ont pas peur de se faire prendre. Même si c’était le cas, elles demanderaient d’être jugées par leurs pairs. Par les tortues molles à épines, les petits blongios et les chevaliers cuivrés. Par toutes les espèces qui meurent parce que la destruction de la planète, c’est payant en crisse.
En effet, pour maintenir la croissance économique capitaliste, ça prend des bungalows de banlieue pitoyables de plus en plus grands et des chars de plus en plus gros. Pendant ce temps, on se ferme les les yeux et on se laisse bercer par les comptines des capitalistes qui prétendent que les chars électriques réduisent les émissions de gaz à effet de serre. Sous le prétexte hypocrite de la protection de l’environnement, L’État et ses amis des industries tentent un sauvetage désespéré de l’industrie automobile. Pour qu’elle survive après 2035, le moment où le fédéral interdira la vente de chars au gaz, ils remplacent les chars au gaz par des chars électriques. Les gouvernements s’arrangent alors pour réduire le prix des chars électriques, par des subventions directes et indirectes, pour qu’ils restent accessibles à la classe moyenne. Bref, la filière batterie, c’est le pillage des fonds verts par les gouvernements pour financer la croissance économique, pour permettre à l’industrie automobile de survivre aux changements climatiques qu’elle a causés. Le développement de la filière batterie, c’est pour qu’on continue de vivre dans des villes bruyantes, désagréables, dangereuses, où les centres-villes ont été transformés en autoroutes et en stationnements. Les anarchistes ne veulent rien savoir de leur monde, et c’est pour ca qu’iels tenaient à crisser une pelletée de sable supplémentaire dans ses engrenages.
Et il faut se rappeller que le char électrique, ce n’est qu’en ville qu’il peut prétendre être vert. Tout autour, ce sont les mines, toujours sur des terres autochtones, partout dans le monde. C’est la raffinerie toxique de Rouyn-Noranda. Ce sont les extensions de ports le long du fleuve Saint-Laurent. De l’Afrique à l’Amérique du sud, ce sont les exécutions contre les syndicalistes et les défeuseur·euse·s de la nature effectués au nom des minières canadiennes. À défendre la nature ici, on ne risque pas la mort. Se servir de nos privilèges pour défendre les plus vulnérables, ça veut dire agir ici. C’est un problème causé par les blancs, et il est grand temps qu’on prenne nos responsabilités.
C’était un moment triste pour faire une action. Sur le site de Northvolt, il reste à peine quelques arbres, dont ceux qui étaient identifiés comme ayant été la cible de cloutage la dernière fois. C’est donc dire que l’action directe fonctionne. En effet, ces clous ont probablement fait plus pour la protection de la biodiversité que la COP15, et toute la ribambelle d’autres COP. On voit clairement en action les mécanismes de compensation ridicules pour la biodiversité: d’un côté, on déboise massivement, alors que dans 4-5-6 ans, ou quand on aura le temps, on plantera une monoculture d’épinette noire sur 20 hectares, une armée de petits arbres en rangées qui seront coupés – de quoi faire du papier toilette à peine assez solide pour qu’on puisse se torcher avec, ne vous demandez pas pourquoi vos doigts passent en travers. D’un côté on remblaie les milieux humides, alors que dans 4-5-6 ans, ou quand on aura le temps, on creusera un trou dans un spot de sable pour y mettre deux-trois poissons et algues, pour se donner une tape dans le dos. On créera un étang à un autre endroit pour les animaux déjà emportés. Des animaux morts dans une flaque d’eau, c’est au mieux une soupe, ça ne pourra jamais compenser un écosystème vivant. Et ça, c’est s’il y a effectivement compensation, parce que c’est la première chose qui sera coupée si la rentabilité est menacée.
La lutte contre Northvolt ne fait que commencer. Il reste encore 2 ans avant la mise en service de l’usine. Les marges de profits ne seront pas extravagantes. Les coûts en sécurité, en relations publiques, en gestion de crise commencent déjà à s’accumuler. Déjà, l’image de la compagnie est fortement entachée, et il y a fort à parier que les investisseur·euse·s déchantent. Il reste encore 2 ans pour lutter et l’ennemi est vulnérable. On entre encore sur le terrain comme dans une passoire: on ne peut pas protéger plus d’un kilomètre carré avec quelques clôtures rouillées ainsi qu’un garde de sécu immobile qui joue à 2048 et qui fait dodo dans son auto. Les sous-traitant·e·s risquent de reconsidérer leurs relations étant donné les dangers encourus. Il ne faut pas les laisser aller. Le site de Northvolt avait été saccagé pour l’usine de CIL, mais la nature a repris ses droits. Continuons le combat jusqu’à ce que la vie revienne.