Montréal Contre-information
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Août 162023
 

Soumission anonyme à MTL Contre-info

Pour s’engager à participer à la grève, remplissez ce formulaire rapide. 5 000 engagements sont nécessaires. De plus amples informations, y compris des lettres types, des graphiques, des fichiers PDF et des événements, seront publiées ici. Pour soutenir la grève, accroche une bannière sur ton balcon. Un événement à venir, un BBQ au Parc Lafontaine (coin Panet/Sherbrooke), à 12h, ce samedi (19 août) abordera les points suivants en détail. Pour toute question sur la grève, envoyez un courriel à slam.matu@protonmail.com.

Le 2 août, le Syndicat des locataires autonomes de Montréal (SLAM) a lancé un appel à une grève des loyers à l’échelle de la ville. La grève est contre le nouveau projet de loi 31 du gouvernement, contre les hausses de loyer et pour le logement pour toustes. L’appel comprenait un formulaire d’engagement qui exigeait que 5 000 locataires à travers l’île s’engagent à se joindre à la grève avant que celle-ci ne puisse officiellement commencer.

Pour plusieurs, l’appel à une grève des loyers de 5 000 locataires montréalais.es peut sembler ambitieux et risqué. L’objectif de ce texte est de répondre aux préoccupations de nature juridique et politique. Nous espérons que ce texte aidera les sympathisant.e.s à mieux comprendre la grève. Une liste de moyens pour soutenir la grève est fournie à la fin du texte. Vous pouvez aussi communiquer avec nous immédiatement si vous êtes intéressé.e.s.

Des centaines de locataires sont actuellement en grève des loyers à travers l’Ontario. Au cours des six dernières années, les grèves de loyers se sont répandues de Los Angeles à Parkdale, ainsi qu’à New York, et, pendant la pandémie de COVID-19, dans toute l’Amérique du Nord. Ces grèves ont prouvé que le refus de payer le loyer est notre arme la plus efficace en tant que locataires. Une grève générale des loyers à Montréal ne ferait pas exception à la règle en contribuant à déclencher un mouvement social et en menaçant les intérêts des gouvernements et des entreprises.

Par conséquent, nous pensons qu’il faudrait mettre de l’avant le large consensus sur le fait que si nous pouvons organiser une grève de cette ampleur et la gagner, ce serait une bonne chose. Nous pensons que la plupart des désaccords portent sur la question de savoir si une telle grève est possible ou sans risque pour les locataires.

Le texte qui suit est long. Il se veut le plus complet possible à l’heure actuelle. Vous pouvez le parcourir en vous arrêtant aux sujets qui vous intéressent particulièrement. Il est probable qu’il manque des réponses à certaines questions ou que certaines parties manquent de clarté. N’hésitez pas à nous faire part de vos réflexions et de vos recommandations pour la suite de nos travaux. Pour trouver un résumé beaucoup plus court, nous vous recommandons de consulter notre guide sur la grève, disponible sur Instagram.

Ce qui détermine si une telle grève des loyers est possible ou sûre, c’est essentiellement l’intégrité et le sérieux de nos plans de grève, les précédents historiques de ce type de grève, et le risque d’expulsion auxquels les locataires pourraient être exposés. 

Résumé du plan de grève des loyers

Notre plan décrit comment plus de 5 000 personnes pourraient faire la grève des loyers à Montréal sans qu’aucune ne soit expulsée. Une grève des loyers de cette ampleur permettrait d’accroître considérablement le pouvoir des locataires, jetterait les bases de futures grèves des loyers dans la ville et serait notre meilleure chance de contrer le projet de loi 31 et la hausse rapide des loyers.

Principaux éléments : La grève des loyers que nous projetons a quatre composantes principales : 1) un engagement en ligne à se joindre à la grève des loyers; 2) des bannières sur les balcons contre le PL 31 et en faveur d’une grève des loyers; 3) des assemblées de grève régulières des signataires de l’engagement et l’élection de capitaines de grève pour chaque quartier de Montréal; 4) des activités régulières d’éducation populaire, des brochures et des affiches sur la manière de faire la grève en toute sécurité et sur les précédents historiques; 5) un fonds de grève pour soutenir les locataires en grève.

L’engagement en ligne est un formulaire (comme un formulaire Google mais sur cryptpad) que les gens signent pour s’engager à faire la grève des loyers si 5 000 autres personnes signent l’engagement. Si moins de 5 000 personnes signent, il n’y aura pas de grève des loyers. Le formulaire recueille des coordonnées, notamment le numéro de téléphone et l’adresse électronique, ainsi que le quartier de résidence. Une fois qu’une personne s’est engagée, nous la contactons pour l’inviter à participer à des activités préparatoires à la grève.

Les bannières sur les balcons (ou les pancartes sur les fenêtres) : Une activité est organisée pour encourager et aider les gens à accrocher sur leurs balcons des bannières « Contre le projet de loi 31 / Pour une grève générale des loyers ». C’est une bonne tactique de mobilisation générale contre le projet de loi et cela encouragerait les gens à s’informer sur la grève des loyers. La distribution de tracts à l’extérieur des stations de métro, la tenue de tables d’information, les médias sociaux et les activités de fabrication de bannières servent à encourager les gens à accrocher des banderoles à leur balcon ou à placer des pancartes à leurs fenêtres.  

Les assemblées de grève rassembleront les signataires du formulaire d’engagement. Nous comptons annoncer bientôt notre première assemblée de grève pour les signataires. Ces assemblées se tiendront régulièrement à partir de septembre, et une assemblée de grève majeure aura lieu lorsque 1 000 promesses auront été reçues, et une autre assemblée majeure lorsque le chiffre de 4 000 aura été atteint. Les assemblées de grève serviront à coordonner 1) la distribution de tracts, 2) l’installation de bannières; 3) le partage sur les médias sociaux; 4) les ateliers sur la grève des loyers; 5) l’affichage; 6) l’organisation dans les quartiers, les rues et les immeubles pour discuter du projet de loi 31 et de l’augmentation du coût des loyers; 7) à l’approche de la grève, une campagne d’appels téléphoniques pour reconfirmer auprès des personnes qui ont rempli le formulaire d’engagement qu’elles souhaitent toujours participer à la grève des loyers. Des mandats de « capitaine de grève » et des comités pour chaque quartier de Montréal seront organisés dans le cadre de ces assemblées. Une fois la grève commencée, les assemblées de grève auront la responsabilité de coordonner l’entraide entre grévistes, la collecte de  fonds pour la grève (pour payer les intérêts et les frais de justice) et de cibler les propriétaires et les tribunaux qui essayent d’expulser les locataires.    

L’éducation populaire sera régulièrement encouragée pour donner aux gens plus de détails sur la grève, répondre aux questions les plus fréquentes et échanger des informations sur les activités et événements à venir.

Un fonds de grève, que nous comptons établir et rendre fonctionnel sous peu, servira à soutenir les locataires en grève qui font face à des procédures d’expulsion. Il servira également à aider les locataires confrontés au harcèlement ou à l’attitude conflictuelle de leur propriétaire parce qu’iels soutiennent la grève avant et pendant celle-ci. 

Mais que se passe-t-il si je suis le ou la seule locataire de mon propriétaire en grève des loyers? Même avec 5 000 personnes en grève des loyers, il y aura toujours des locataires dont les voisins du même propriétaire ne sont pas en grève. L’un des objectifs des réunions de grève serait de coordonner l’organisation des immeubles et l’organisation de la rue dans le cas des duplex et des triplex, afin que les gens puissent attirer leurs voisin.e.s. Il est beaucoup plus facile de convaincre le voisinage de suspendre le paiement du loyer si le mouvement est visible à l’échelle de la ville et si des centaines de personnes ont des bannières contre le PL31 sur leurs balcons. Même si vous êtes seul.e, dans les grèves des loyers, y compris pendant la pandémie, on a souvent vu des locataires individuel.le.s se joindre à des milliers d’autres en grève sans que leurs voisin.e.s ne soient nécessairement engagé.e.s dans le mouvement. Les protections légales restent les mêmes (tant que vous payez votre loyer avant qu’un juge ne rende une décision, il est beaucoup plus difficile de vous expulser, surtout le premier mois). Avec 5 000 personnes ou plus en grève des loyers, le système des tribunaux serait considérablement encombré. Il pourrait s’écouler plusieurs mois avant la tenue d’une audience. Les propriétaires auraient également peur de demander l’éviction. S’ils le faisaient, le comité de grève en entendrait parler et organiserait des actions contre tout propriétaire qui tenterait d’évincer des locataires durant la grève des loyers. Des actions pourraient également être organisées au TAL pour condamner la procédure d’éviction. Si le pire se produisait, ce dont nous doutons, le comité de grève aurait des fonds pour couvrir les frais de déménagement et les frais juridiques et subventionner une partie du loyer. 

Que se passe-t-il si des gens ne font pas la grève des loyers mais s’engagent à la faire? Cette question est sujette à discussion, mais une campagne d’appels jouerait un rôle important. Si le chiffre de 5 000 promesses est atteint, nous convoquerons une assemblée générale. Nous coordonnerons alors une campagne d’appels pour confirmer auprès des gens s’ils sont toujours intéressés par une grève des loyers à présent que cette possibilité se concrétise. Si 5 000 personnes sont toujours prêtes à participer, la grève des loyers aura lieu le 1er jour du mois suivant (à condition qu’il y ait suffisamment de temps pour se préparer). On peut s’attendre à ce qu’un bien plus grand nombre de personnes se joignent à la grève des loyers si la grève se poursuit pendant un deuxième mois.

L’histoire des grèves des loyers et lutter « seul-e » contre le pouvoir 

La victoire de la grève des loyers de 2017 à Toronto, menée par 300 locataires contre MetCap Living, est un exemple important de la manière dont les grèves des loyers peuvent permettre d’obtenir bien plus que ce que nous concède le système judiciaire. Les grèves des loyers se poursuivent à Toronto, avec 300 autres locataires en grève des loyers recensés au mois de mai de cette année. D’autres exemples récents dans des villes comme Los Angeles montrent indéniablement que les grèves des loyers sont notre meilleure chance d’obtenir collectivement des concessions majeures.

Le problème est que la grève des loyers que nous proposons couvrirait un grand nombre de propriétaires différents. Selon notre modèle, même si nous encourageons et aidons les locataires d’immeubles à s’organiser, il est possible que certain.e.s locataires soient les seul.e.s à faire grève contre leur propriétaire. Toutefois, une telle situation n’est pas rare dans l’histoire des grèves des loyers réussies. 

En fait, l’histoire de grèves des loyers importantes semble montrer qu’une masse de locataires en grève contre un propriétaire commun, comme à Parkdale, est une exception. Les grèves des loyers ont souvent été des mouvements sociaux généralisés contre divers propriétaires. Un bref rappel historique des grèves des loyers est disponible ici

Des exemples liés à la pandémie de COVID-19 illustrent bien ce qui précède, puisque des milliers de locataires de différentes villes se sont mis.es spontanément en grève des loyers. Nous avons plusieurs exemples de locataires montréalais.es ayant mené des grèves des loyers et ont réussi en solitaire pendant la pandémie (et, en fait, des locataires ont fait la grève des loyers en solitaire après xxle pic de la pandémiexx, sans un contexte plus large d’organisation, et ont gagné). Aux États-Unis, par exemple, une association de propriétaires a estimé que 31 % des locataires ont fait la grève des loyers au mois de mars 2020. Parkdale Organize, qui a organisé la grève de 2017 à Toronto, a également organisé des grèves analogues contre plusieurs propriétaires. Selon Keep Your Rent Toronto, 100 000 personnes ont utilisé leurs formulaires pour informer leur propriétaire de leur intention de retenir le loyer, c’est-à-dire de garder l’argent du loyer de côté. Ces grèves ont permis d’éviter aux locataires d’avoir à payer leur loyer au pic de la pandémie, même dans les villes où il n’y avait pas de moratoire sur les expulsions. Les grévistes ont eu recours à des systèmes d’entraide et ont occupé les audiences des tribunaux pour les locataires provenant de différents immeubles. Ces grèves ont été marquées par l’unité des grévistes, bien qu’iels n’aient pas le même propriétaire. C’est à cela qu’il faut s’attendre lorsque des milliers de personnes se retrouvent dans le même bateau de la grève des loyers. 

Autres exemples : la grève des loyers de Harlem en 1963, le mouvement italien d’autoréduction dans les années 1970, la grève des loyers de Barcelone en 1931 et la guerre agraire (Land Wars) en Irlande. À Harlem, par exemple, les locataires de plus de 50 immeubles de logements délabrés ont lancé une grève des loyers. Une grande victoire a été remportée par de nombreux locataires, dont le loyer a été temporairement fixé à 1 dollar par mois. Pendant la grève des loyers à  Barcelone, les locataires bloquaient les rues pour empêcher les expulsions et réintégraient les locataires dans leur logement, en faisant appel aux comités de quartier et aux comités de travailleur.euse.s.

À New York, la défense contre les expulsions est actuellement un outil populaire qui a été utilisé pour empêcher l’expulsion de locataires. Les exemples les plus connus sont ceux de locataires qui ont résisté par des blocages physiques à l’extérieur de leur appartement. Ces blocages sont défendus par des réseaux de défense contre les expulsions (et généralement pas par d’autres locataires du même propriétaire). Bien qu’elle repousse bien plus loin les frontières imposées par le cadre légal et se situe dans une zone plus grise sur le plan juridique, cette stratégie de défense contre les expulsions a connu un énorme succès à New York et ailleurs.

Dans le monde du travail et dans celui des locataires, les grèves sauvages, les boycotts, la désobéissance civile, le refus de travailler dans des conditions dangereuses, les débrayages et les grèves comme la grève générale d’Oakland en 2011, ont permis à des travailleur.euse.s spontané.e.s, voire isolé.e.s, d’entrer en grève contre leur employeur.euse ou leur école, avec la protection d’un syndicat ou d’un mouvement de masse plus large, malgré la diversité des employeur.euse.s visé.e.s. À Montréal, vous pouvez vous adresser à l’IWW si votre employeur vous vole votre salaire. L’IWW peut alors mobiliser ses membres pour communiquer avec votre employeur.euse. Le syndicat s’appuie sur le soutien collectif de travailleur.euse.s provenant de différents lieux de travail pour aider des gens qui, autrement, seraient seuls face à leur patron. 

Dans la situation actuelle, l’avantage est que, contrairement à ce qui s’est passé au moment de la pandémie, nous avons quelques mois supplémentaires pour préparer la grève des loyers. Nous pouvons organiser des comités de quartier pour coordonner l’entraide et la défense contre les expulsions. Nous pouvons proposer d’autres actions pour intensifier la lutte. Nous pouvons également nous réunir en personne et nous sommes plus souples dans notre capacité à mener des actions de rue. Cette fois-ci, les réunions de masse et de quartier de celleux qui participent à la grève des loyers seraient possibles. 

Protections juridiques 

Ce n’est pas comme si nous étions dépourvus de protections juridiques pendant la grève des loyers. L’une des protections qui existe au Québec, Article 1883 du Code Civil, est analogue à celle sur laquelle se sont appuyé.e.s les locataires qui ont fait grève à Toronto en 2017. Si un.e locataire avait un dossier ouvert contre lui, il ou elle ne pourrait pas être expulsé.e pourvu qu’il ou elle rembourse son loyer avant qu’un juge soit en mesure de rendre une décision. Une tactique consiste à rembourser tous les loyers impayés à la date du procès. Une autre façon de faire consiste à demander à une association sans but lucratif ou à un avocat de garder l’argent en fiducie et de le payer à cette date. 

Cette stratégie juridique a ses limites. Nous comprenons que des retards fréquents, s’ils causent un préjudice sérieux au propriétaire, peuvent constituer un motif légal justifiant l’expulsion d’un.e locataire. C’est pourquoi il peut être idéal de ne faire une grève des loyers que pendant un mois. Cette décision sera prise par l’assemblée de grève. Nous nous assurons que les locataires et nos membres connaissent le fonctionnement du TAL en matière d’éviction.

Des juristes, notamment Seema Shafei, ont également soutenu que le droit de grève des loyers est incorporé dans notre droit constitutionnel à la grève ou dans des protections associatives analogues. La grève au travail, par exemple, est reconnue comme étant protégée par la Constitution.

Protections pratiques

Au-delà des protections juridiques, il y a les questions pratiques auxquelles un propriétaire devra faire face s’il tente d’évincer un.e locataire en grève des loyers. Si 5 000 personnes sont en grève des loyers, et capables de se coordonner et de s’organiser entre elles, il pourrait s’avérer … difficile de tenter d’évincer un.e locataire. Si les capitaines de grève de quartier et le comité de grève principal sont suffisamment organisés, le public saurait qui sont les propriétaires essayant d’expulser un.e locataire en grève des loyers. Nous pourrions tirer parti de la puissance du nombre pour faire comprendre à chaque propriétaire qu’iel devrait attendre la fin de la grève au lieu de demander l’expulsion. Le SLAM a utilisé avec grand succès un ensemble d’actions de rue et d’actions collectives pour faire pression sur les propriétaires et ce, avec des groupes beaucoup plus petits. 

Une autre protection concrète est l’engorgement des tribunaux. En effet, il serait difficile, voire impossible, pour les tribunaux de traiter 5 000 demandes d’expulsion. Les audiences prendraient beaucoup plus de temps que prévu. 

Comme dans le contexte de la pandémie de COVID-19, les propriétaires sauront que les grévistes ont l’intention de payer les loyers dus éventuellement. Iels connaissent leurs locataires qui, en temps normal, paient leur loyer. Contrairement au contexte habituel d’une éviction, les défauts de paiement n’ont pas une cause financière, mais sont un geste politique. Bien que plusieurs propriétaires aimeraient trouver n’importe qu’elle raison pour évincer un.e locataire, plusieurs autres propriétaires préféreraient garder un.e locataire qui va recommencer à payer son loyer régulièrement une fois que la grève des loyers est terminée. 

Enfin, même si nous avons mis l’accent sur le cas d’un locataire qui ferait la grève des loyers sans ses voisin.e.s, l’un de nos principaux efforts consistera à étendre les grèves des loyers dans les immeubles où se trouvent des locataires désirant entrer en grève. Une fois qu’un locataire d’un immeuble s’est engagé à faire la grève des loyers, il est beaucoup plus facile de convaincre les autres. C’est possible grâce à la stratégie habituelle du syndicat des locataires de Montréal, qui consiste à organiser les immeubles et des actions dans la rue (réunions communes, porte à porte, rencontres individuelles), et parce que les gens seront plus optimistes à propos de la grève des loyers s’ils savent que 5 000 autres personnes et au moins un voisin sont en grève des loyers. Les bannières sur les balcons, les manifestations de rue et la couverture médiatique inspireraient également une plus grande confiance. Si plusieurs locataires d’un immeuble font la grève des loyers, la réaction « Mais je ne peux pas tous les évincer en même temps! » est la plus prévisible parmi les propriétaires (pour citer un propriétaire pendant les grèves menées durant la pandémie de COVID-19).

Faible participation

Il est possible que la participation à la grève des loyers soit faible. Ce problème ne concerne que les organisateur.ice.s de la grève, plutôt que les sympathisant.e.s. Si 5 000 locataires ne s’engagent pas à faire grève, il n’y aura tout simplement pas de grève. Nous mènerons une campagne d’appels téléphoniques et de SMS si le chiffre de 5 000 est atteint pour confirmer que l’intérêt se maintient et que les 5 000 promesses ne sont pas un chiffre fantôme. Toutefois, même si le nombre de 5 000 grévistes n’est pas atteint, l’éducation populaire, la distribution de tracts, le partage d’informations, la menace d’une éventuelle grève pour le gouvernement ne disparaîtront pas. En fait, si le chiffre de 5 000 grévistes n’est pas atteint, nous aurons tout de même réussi à faire connaître les tactiques de résistance et à donner de l’assurance aux locataires. Si l’échec d’un vote de grève peut être démoralisant, cela peut également être une excellente occasion de faire de l’éducation populaire et de former de nouvelleaux organisateur.ice.s. Bien que la représentation sous sa forme actuelle ne nous inspire aucune confiance, permettons-nous de rappeler que la stratégie des partis politiques de lancer des campagnes qui risquent fortement de ne pas leur permettre de remporter une élection est utilisée avec succès par eux pour se constituer progressivement une base. Mais là encore, le succès ou l’échec des 5 000 promesses de grève est l’affaire des organisateur.ice.s, non des autres locataires. 

Une fois que 5 000 personnes se sont engagées et ont confirmé leur intérêt pour une grève des loyers, si la grève dure plus d’un mois (une décision qui revient aux comités de quartier et à l’assemblée des grévistes), on peut certainement s’attendre à ce que d’autres locataires se joignent à la grève. Dans toutes les grèves dont nous connaissons l’histoire, le nombre de locataires en grève a augmenté de manière important au deuxième mois de grève.

Mais la grève des loyers est-elle risquée ?

Faire la grève des loyers présente certainement des risques. Les tactiques décrites ci-dessus pourraient ne pas fonctionner, la répression gouvernementale pourrait être trop forte contre la grève, les protections juridiques en place pourraient tomber à l’eau et un certain nombre de personnes, voire plusieurs dizaines, pourraient être évincées. Les relations entre locataires et propriétaires pourraient prendre une tournure négative, ou les propriétaires pourraient sortir des limites de la légalité ou exploiter leurs privilèges juridiques en représailles contre les grévistes. Ce sont des possibilités. Nous avons décrit ci-dessus les nombreuses raisons pour lesquelles nous pensons que ces risques peuvent être atténués. Cependant, ce qui est probable, c’est que sans un mouvement organisé de locataires qui acceptent de prendre certains risques en utilisant des tactiques plus audacieuses, Montréal sera le prochain Toronto ou le prochain Vancouver. Nos loyers dépasseront nos revenus, les personnes âgées et les pauvres seront toujours plus nombreux à être harcelés et expulsés de leur logement. L’itinérance continuera d’augmenter. Dans dix ans, nos loyers actuels sembleront une chimère. Tout cela pour dire que nous sommes devant des risques contradictoires : le risque d’une action audacieuse contre le risque de l’inaction. L’un et l’autre pourraient être synonymes d’éviction, de pauvreté, de déplacement forcé et d’embourgeoisement des quartiers. Pour les raisons que nous avons évoquées plus haut, nous pensons qu’il peut être extrêmement payant de prendre le risque d’être audacieux.se. Nous pouvons vraiment atténuer les risques. Il est tout à fait possible, et cela s’est déjà produit, que 5 000 personnes fassent la grève des loyers et qu’il n’y ait aucune éviction. Nous prenons des risques pour nous rapprocher d’un monde meilleur et pour éviter les risques de nous retrouver dans un monde pire que celui-ci. 

Nous ne sommes pas des professionnel.le.s. Cela devrait être clair. Nous avons des organisateur.ice.s expérimenté.e.s issu.e.s de différents milieux. Cependant, nous n’acceptons pas la responsabilité des professionnel.le.s. Notre objectif est de fournir une stratégie au mouvement des locataires : la grève des loyers. Si elle est acceptée par les locataires de la ville, nous ferons de notre mieux en utilisant certains des objectifs et tactiques décrits ci-dessus. Mais tout ce qui se fera dépendra des locataires .e.s. Nous aiderons à organiser les assemblées, les activités d’éducation populaire et les actions. Comme dans n’importe quel soulèvement, nous ne serons responsables ni de toutes les victoires obtenues ni de toutes les erreurs commises en cours de route. Lors du soulèvement étudiant de 2012 au Québec, plus de 3 000 personnes ont été arrêtées, des personnes ont été soumises à des mesures disciplinaires par leur université, des personnes ont subi des blessures graves et plus de 400 ont fait l’objet d’accusations criminelles. Mais les organisateur.ice.s de la grève de 2012 ne sont en rien responsables de cette répression. Nous ne pouvons même pas dire que « cela en valait la peine ». Tout ce que nous pouvons dire, c’est que parfois les gens se lèvent, acceptent les risques ou décident de les ignorer. Ce sont des décisions prises en toute connaissance de cause, par des adultes. Ce sont des risques nécessaires au progrès social, que tout mouvement social prend. En d’autres termes, nous ne pouvons pas éviter les risques et il est sain pour un mouvement social de prendre des risques; par contre, nous sommes responsable de les atténuer autant que possible.

Conclusion

Nous vous remercions d’avoir lu notre proposition de grève générale des loyers à Montréal en 2023. Voici les moyens proposés par le syndicat des locataires pour soutenir leur travail:

Si t’es dans un organisation, il peut se joindre à notre syndicat de locataires dans l’appel à la grève et ajouter leur nom aux organisations favorables à la grève des loyers à Montréal. Pour ce faire, envoyez-nous un courriel à : slam.matu@protonmail.com

Le plus simple : Vous pouvez partager nos événements Facebook, en particulier l’événement à venir sur le thème « Pourquoi et comment » faire la grève des loyers contre le projet de loi 31 (samedi 19 août, de 12 h à 14 h). En ce moment, notre jeu sur Facebook a besoin d’un coup de pouce.  

Tu peux te joindre à nous lors de notre prochain événement sur le thème « Pourquoi et comment » faire la grève des loyers contre le projet de loi 31. Il aura lieu au Parc Lafontaine, le samedi 19 août, de 12h à 14h, coin Sherbrooke/Panet. Il y aura un BBQ!

Tu peux personnellement signer l’engagement.

Tu peux accrocher une bannière à ton balcon contre le projet de loi 31 et en solidarité avec la grève des loyers. Nous avons des bannières supplémentaires, envoyez un courriel à slam.matu@protonmail.com pour en obtenir une.

Le texte ci-dessus n’est pas une publication officielle du SLAM. Il s’agit d’une lettre rééditée, reçue par de nombreuses organisations radicales, expliquant la grève.