Montréal Contre-information
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Mar 042023
 

Du Collectif Emma Goldman

Il y a 9 ans, le 23 janvier 2014, un incendie épouvantable brisait la quiétude nocturne du village de l’Isle-Verte dans le Bas-du-fleuve. La résidence privée de personnages âgées (RPA) du Havre allait montrer quelques unes des défaillances d’un modèle capitaliste de traitement envers les personnes âgées dans notre société. 32 personnes âgées ont péri dans le brasier. Le profit passant avant la vie ; l’enquête du coroner montra qu’il n’y avait aucun système de gicleurs dans des sections habitées par des patients et patientes non autonomes et qu’il y avait un manque de formation et de préparation pour intervenir dans une telle situation, en plus d’un manque d’effectif chez les pompiers volontaires du village.

9 ans après, non seulement faut-il avouer que le drame s’est avéré inefficace pour changer les mentalités dans le marché des résidences pour aîné-e-s, mais des dizaines de propriétaires de RPA menacent actuellement de fermer leur établissement si Québec maintient son échéancier d’obligation pour les gicleurs d’ici décembre 2024 (une échéance, il faut rappeler, que le gouvernement a déjà repoussé face aux pressions). À Québec, plus d’une centaine de résidents et résidentes de la RPA Villa Sainte-Foy viennent d’apprendre par courrier que le bâtiment qu’ils et elles habitent vient d’être vendu et sera converti en logements locatifs. Le propriétaire a décidé de vendre, simplement car il trouvait les coûts pour se conformer aux nouvelles normes trop importants. Ce que le marché permet est absolument horrible pour la centaine de personnes qui comptait sur ce toit.

Les propriétaires de RPA font actuellement un bras de fer avec le gouvernement pour obtenir plus de soutien. Ils ne sont pourtant pas à plaindre avec des loyers mensuels moyens atteignant plusieurs milliers de $ et des coûts qui augmentent à la carte de façon drastique. Ce sont les personnes âgées qui sont prises au piège, trop souvent sans protection et en situation de dépendance, dans la macabre soif de profit de ces propriétaires. Malgré cela, Québec aide déjà considérablement, voire beaucoup trop, les RPA privés. Comme le révélait l’émission Enquête à l’automne 2020, les RPA sont considérés depuis déjà plusieurs années comme un bon placement par les investisseurs, l’“or gris”. Ce qui les intéresse n’est pas de veiller à offrir des conditions dignes à leurs résidents et résidentes, mais d’obtenir le plus de retour possible sur leurs investissements : des profits autrement dit. Ils profitent pour être clair d’un système âgéiste, soit un rapport social de domination qui assigne socialement une position de pouvoir aux individus, différenciée en fonction de leur groupe d’âge. Ils ne rechignent certainement pas devant l’appauvrissement des personnes âgées, le refus de mettre en place les mesures de sécurité les plus élémentaires pour les personnes non autonomes, les coupures dans les services et ils inculquent leur vision marchande de la personne au personnel qui voit le ratio soignant-patient sans cesse augmenter.

Les maigres campagnes visant la défense des droits des personnes âgées et la dénonciation des abus pourront faire bien peu dans ce contexte. Il faudra certainement continuer de dénoncer les cas d’abus envers et contre les institutions qui cherchent à les faire taire, mais il faudra également mettre le doigt sur les racines du problème : les mécanismes de la domination âgéiste profondément ancrés dans notre système politico-économique et ses institutions.

Au-delà des prises de conscience, il sera nécessaire de construire des convergences avec toutes les personnes âgées qui en ont ras-le-bol et soutenir le développement d’initiatives et l’auto-organisation dans leurs milieux et combattre le système.

Pour compléter l’analyse au sujet de l’âgéisme envers les personnes âgées, les deux articles suivants sont à consulter:
L’âgéisme : un autre système d’oppression à combattre ici et maintenant !
Âgéisme : Que veulent les personnes âgées ?

Un anarchiste du Pekuakami