Montréal Contre-information
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Entrevue avec un organisateur.ice antifasciste à Montréal

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Mar 232018
 

MTL Contre-info a envoyé quelques questions à des personnes impliquées dans les activités anti-fascistes en cours, pour adresser certaines idées fausses qui circulent communément à propos de ces luttes. Voici ce qu’il.les avaient à dire.

Pouvez-vous me parler de l’organisation anti-fasciste à Montréal et de son rôle, particulièrement ces temps-ci ?

L’activisme anti-fasciste a une longue histoire à Montréal, qui remonte jusqu’aux années 1980. Mais avant 2017, les choses avaient été relativement tranquilles pendant quelques années, la plupart des activités ne se déroulant pas de façon publique.

L’extrême droite s’est enhardie à la suite du massacre raciste à Québec le 27 janvier 2017. Ils ont commencé à prendre la rue et à s’organiser avec une énergie sans précédent. Ainsi, plusieurs d’entre nous ont commencé à s’organiser de explicitement selon des principes anti-fascistes.

Le rôle de l’anti-fascisme est d’exposer et de neutraliser la menace que pose l’extrême-droite. Il s’agit de supporter les communautés et les individus visé.es par l’extrême-droite. Ultimement, il s’agit de supporter et de se joindre à ceux et celles qui se battent contre ce qui est à la racine de l’extrême-droite, c’est-à-dire, dans le contexte canadien, le racisme, le patriarcat, le colonialisme et le capitalisme.

Pourquoi est-il important de combattre le fascisme aujourd’hui ?
Depuis que six personnes ont été tuées et dix-neuf sérieusement blessées par un tireur raciste à Québec plus tôt cette année (2017), l’extrême-droite est sortie de l’ombre et essaie de gagner en légitimité en tant que force politique dans la société québécoise. Ce qui se passe ici s’inscrit dans une plus tendance large, qui a franchi une étape importante lors de l’élection de Donald Trump et que nous voyons à l’oeuvre à travers les pays historiquement racistes d’Europe et d’Amérique du Nord, alors que la crise économique provoque une avalanche de racisme blanc.

L’enjeu, c’est que les solutions proposées par le fascisme — blâmer les immigrants, les Juifs et les personnes de couleurs — ne font que détourner l’attention de la cause réelle des problèmes vécus par les gens, à savoir un système économique injuste et une austérité grandissante.

L’Histoire montre que si nous ne combattons pas efficacement l’extrême-droite, les gens finissent par mourir. Les enjeux sont élevés et nous n’avons pas l’intention de rester les bras croisés pendant que les choses empirent.

Quelles sont les idées fausses répandues à propos des Antifa ?

Les gens politiquement ignorant-es croient que nous sommes la cause derrière la montée de l’extrême-droite. On devrait pouvoir régler cette question en jetant un simple coup d’oeil à ce qui est arrivé en premier.

L’extrême-droite croit que nous sommes secrètement payé.es par George Soros ou par le gouvernement. Alors que la plupart des gens trouvent cette idée ridicule, elle s’aligne bien avec la façon dont l’extrême-droite a toujours expliqué les choses, c’est-à-dire en situant des forces obscures ou quelque Juif millionaire étranger comme étant à l’origine de tout ce qu’il.les n’aiment pas.

Les gens de gauche croient parfois que nous ne sommes intéressé.es que par la violence ou que les attaques sur les nazis constituent la totalité de ce dont nous nous soucions. C’est une autre idée fausse : nous sommes en fait souvent des gens qui sont aussi impliqué.es dans des activités moins sensationnalistes, luttant contre les coupures du gouvernement, la brutalité policière, le racisme ainsi que d’autres aspects de la vie régie par le capitalisme.

Plusieurs sont confus.es et pensent qu’il existe une organisation appelée « antifa ». En fait, « antifa » n’est que le mot médiatique de l’heure, une contraction allemande du mot « anti-fasciste ». Depuis l’élection de Donald Trump, on a vu la prolifération de groupes anti-fascistes à travers l’Amérique du Nord, ce qui est une bonne chose. Mais, pour le meilleur ou pour le pire, il n’existe pas d’organisation unitaire, ni même de réseau incluant tous ces groupes ou d’idéologie unique à laquelle nous adhérons tous et toutes. Il s’agit d’un mouvement de masse et, comme tous les mouvements de masse, il ne peut être réduit à une seule entité.

Une autre forme de confusion qu’il vaut la peine d’adresser réside dans la raison pour laquelle certain.es d’entre nous portent des masques pendant les manifestations. Ce n’est pas un uniforme, c’est une simple précaution, prise à la fois contre le potentiel d’arrestation et contre la vengeance de nos opposant.es. Ce n’est pas tous les anti-fascistes qui portent des masques et toute personne portant un masque ne s’identifie pas nécessairement d’abord comme anti-fasciste.

Selon vous, quelle menace posent les groupes anti-immigrants qui semblent gagner en force au Québec (et ailleurs)?

Ces groupes posent une menace, mais il faut être clair : ils n’existent de façon significative que parce que, depuis des années, des politicien.nes conventionnel.les et des personnalités médiatiques préparent le terrain à leur racisme agitateur. Ce n’est pas une coïncidence si la Meute a été fondée par des hommes qui avaient été envoyés pour faire la guerre en Afghanistan. Ce n’est pas une coïncidence si cette organisation est devenue si importante dans la province où une « Charte des Valeurs » avait été proposée par le gouvernement et est presque devenue loi. Ces groupes ne sortent pas de nulle part and les prendre au sérieux nécessite de les considérer à l’intérieur d’un contexte plus large.

Les organisations d’extrême-droite dégagent un espace politique pour les idées racistes et d’exclusion à travers le spectre politique. En comparaison, le racisme des politicien.es conventionnel.les semble soudainement « modéré ». Pendant tout ce temps, ces dernier.es agissent comme des chambres d’incubation pour les individus et les groupes plus extrémistes.

À un niveau humain de base, concrètement les coûts peuvent être élevés. Six personnes se sont fait prendre leurs vies à Québec, en janvier ; quel est le message envoyé lorsque des centaines de membres de la Meute prennent la rue moins de sept mois plus tard ? Les réfugié.es au stade olympique sontsujets à l’intimidation par le groupe néo-nazi Atalante. Les gens qui traversent la frontière doivent faire face à la possibilité que des organisations de pacotille comme Storm Alliance soient présentes pour les intimider. Voilà plusieurs exemples de la violence contre laquelle nous nous battons.

Quel est votre rôle dans la riposte face à ces groupes, particulièrement à Montréal et dans la province de Québec ?

Nous avons l’intention d’exposer et de neutraliser cette menace. Nous allons documenter et révéler les liens entre les organisations, incluant les liens qui seraient autrement gardés à l’abri du regard du public. Par exemple, le néo-nazi Shawn Beauvais-MacDonald, qui était un des responsables de la Meute, a assisté au récent rassemblement haineux de Charlottesville. Ou alors l’implication de racistes derrière le scandale de fake news à propos de musulmans dans un zoo populaire, il y a quelques mois. Ou bien les suprémacistes blancs avoués qui étaient derrière la tentative de manifestation anti-réfugié.es du stade olympique du 6 août, que les gens ont réussi à empêcher.

Sur le terrain, quand les racistes tentent d’agir, nous avons comme objectif d’être physiquement présent.es pour faire ce qui est nécessaire afin de les en empêcher.

Si vous voulez en apprendre davantage sur ce que nous faisons, nous vous encourageons à consulter régulièrement les sites web Montréal Contre-Information et Montréal Anti-fasciste.

Que pensez-vous de la manifestation du 20 août à Québec et du narratif des médias de masse selon lequel les actions des contre-manifestant.es pourraient contribuer à produire un effet inverse sur la cause ?

La manifestation de la Meute à Québec était la plus grande manifestation d’extrême-droite à avoir lieu au Canada depuis les années 1930. Il faut assumer la réalité.

Notre travail était d’empêcher la Meute de prendre la rue. Il.les se sont caché.es pendant toute la journée derrière la police, dans un garage, et ont attendu que nous soyons parti.es pour marcher rapidement autour du bloc. Évidemment, la prochaine fois, nous devrons rester plus longtemps.

L’Absurdité du monde: Les Frontières

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Mar 182018
 

Du SITT-IWW

Les frontières et leurs histoires

Aujourd’hui je vous parle des frontières et je pars déjà en étant en beau maudit suite à la déportation du camarade Éléazar du Canada, hein, le plusse beau pays du monde. En plus, il habitait dans la merveilleuse ville « sanctuaire » de Denis Coderre, faudrait peut-être le dire à ses chiens du SPVM que Montréal est supposément une ville sanctuaire, parce qu’ils continuent à livrer des sans papiers au gouvernement canadien. De la bonne vieille bullshit libérale.

Le problème c’est ça, un moment donné, à la fin du moyen-âge, les royaumes ont pris de l’expansion et ont commencé à se transformer en États. Pis le capitalisme est arrivé et pour fleurir véritablement, il avait besoin d’un État fort. Pis un État, bin il faut que ça gère un territoire, on a donc commencé à créer artificiellement des frontières pour délimiter ce qu’on a appelé les États nations (une nation par État.) Bien qu’on sache dès le début que le concept d’État nation est de la pure bullshit, ça n’a jamais empêché le système en place de nous le vendre comme une vérité naturelle. Des pays comme la France, l’Italie, l’Espagne sont formés par toutes sortes de petites peuplades avec des dizaines de langues différentes annexés par la force armée. Et que dire du Canada ? On est sensé croire que les francophones, les anglophones et les dizaines de nations autochtones différentes, on forme un beau grand État-nation ?

Bref, l’État nation, c’est d’abord et avant tout, une police, une armée, une douane et d’autres forces répressives qui contrôlent un territoire donnée au nom du capitalisme. Ça crée évidemment des guerres frontalières avec des zones disputées par différents pays. On n’a qu’à regarder ce qui se passe en Ukraine pour se convaincre avec une situation actuelle. Et qui dit dispute territoriale, dit souvent guerre aussi. Et qui dit guerre dit généralement milliers de personnes de la classe ouvrière qui s’en vont se battre contre d’autres milliers de personnes de la classe ouvrière pour les intérêts bourgeois et nationaux qui leur sont complètement étrangers. Ha c’est beau la nation !

Les frontières et l’intolérance

Ça crée aussi toutes sortes de phénomènes, comme le nationalisme. Tsé, ce sentiment de fierté envers notre état nation ou encore un état-nation nouveau qu’on pourrait créer grâce à un mouvement indépendantiste. Comme on dit souvent au PQ, On va l’avoir notre pays ! Encore une fois, on mobilise des gens de la classe ouvrière en leur faisant croire qu’ils ont plus d’intérêt commun avec leurs patrons québécois qu’avec les travailleurs et travailleuses qui ne parlent pas la même langue qu’eux. Parce que comme on dit souvent au PQ, l’exploitation, EN FRANÇAIS SVP ! Pas pour rien d’ailleurs que ce parti a finit avec le boss d’une des plus grosses business du Québec, doublé d’un des patrons les plus trou-de-cul comme chef.

Un autre phénomène qui rime aussi avec nationalisme, c’est le concept de xénophobie, qui devient une hostilité à ce qui étranger à sa nation, et ça aussi on est familier avec ça au PQ avec sa charte des valeurs, et comme on a pu le voir cette semaine, son opposition à une commission sur le racisme systémique au Québec. Un peu partout en occident, on voit une montée de la xénophobie avec une peur irrationnelle d’être envahi par des méchants réfugiés qui se font bombarder ou qui crèvent de faim dans leur pays. Pis leu plus drôle là-dedans, c’est qu’on entend des rednecks québécois nous dire qu’on va se faire envahir à cause de l’immigration. Hey ! Comme si les français étaient pas débarqués ici en envahissant les premières nations, et comme si le Canada avait toujours été peuplé par des personnes blanches d’origine européenne. Louis Riel doit se revirer dans sa tombe.

Les frontières et le capitalisme

Si on continue encore la marche de l’histoire des frontières on arrive aux années 1980 ou commence à émerger l’idée des traités de libre-échange à grande échelle et, par conséquent, la suppression des frontières pour ce qui est de la circulation des marchandises. Ces programmes de libre-échange nous étaient d’ailleurs vantés par nul autre que Jacques Parizeau et Bernard Landry, anciens premiers ministres du Québec et chef du… Parti Québécois ! Ce qu’on doit en retenir, c’est que d’avoir du libre-échange avec des pays où le salaire minimum est à moins de 2$ de l’heure et donc de délocaliser la production dans ces pays parce que ça coûte moins cher aux patrons, c’est une bonne chose. Mais pas question que les humains, eux, puissent circuler librement dans ces zones. Oh que non ! La marchandise, oui, les humains, qu’ils mangent de la marde.

Des dizaines d’années après l’implantation de ces politiques de libre-échange, on se rend bien compte que nos salaires et nos conditions de travail n’ont simplement pas évolué alors que les marges de profits des entreprises, elles, ont grimpé comme jamais auparavant. Bref, les seuls à qui profitent ce genre de politique, ce sont les patrons, les actionnaires et les banquiers.

Le syndicalisme ne sera pas restreint par les frontières

Ce qu’il faut retenir de tout ça, c’est qu’en tant que travailleurs et travailleuses, nous devons avoir une vision internationaliste de notre lutte. Les systèmes qui nous oppriment, dont le capitalisme, sont internationaux et se foutent bien de la religion ou de la couleur de cheveux de la personne opprimée. Nous aurions un bien meilleur rapport de force si nous étions uni-e-s, en tant que classe ouvrière, au niveau international qu’en se vautrant dans la xénophobie et le nationalisme comme Rambo Gauthier, par exemple. Quand on pense, par exemple, à une multinationale bien de chez nous, comme Bombardier, qui n’a aucun scrupule à voler l’argent public ici, délocaliser ses emplois au Mexique pour finalement augmenter les bonus des dirigeants. N’aurions nous pas tout à gagner à nous allier avec les employé-e-s des usines mexicaines de Bombardier pour augmenter le rapport de force face à cette compagnie ? Tout le monde y gagnerait, les employés d’ici, les employés du Mexique et les contribuables en général.

Bref, les xénophobes et autre nationalistes ne cherche qu’à nous faire adhérer à un système dans lequel nous avons des intérêts communs avec des patrons québécois. Nous n’avons rien en commun avec un quelconque patron, peu importe sa nationalité. Par contre, nous avons beaucoup en commun avec les travailleurs et travailleuses de partout dans le monde. Ne nous laissons pas berner, la solidarité syndicale ne doit pas connaître de frontières, car nos oppresseurs n’en connaissent pas. Ripostons coup pour coup aux multi-nationales. Souvenons-nous que nos grèves seraient beaucoup plus rapidement gagnées si quand une usine se met en grève dans une entreprise, des dizaines d’autres suivent en solidarité partout dans le monde.

Éric Sédition, pour Action en direct.

Crédit photo: https://commons.wikimedia.org/

De La Passe à l’Impasse

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Mar 052018
 

De Littoral

Une lettre du collectif de l’Impasse

Pour donner suite à l’annonce de notre départ des locaux que nous occupions au sous-sol de l’église Saint-Enfant-Jésus, de notre séparation de la Médiathèque littéraire Gaëtan Dostie et du changement de nom du collectif forcé par cette situation, nous tenons à communiquer quelques lignes sur les dynamiques qui ont mené à ce mouvement précipité. Si la Passe a survécu une expulsion déjà, c’est grâce aux gens qui n’ont jamais cessé de croire en ses possibles – et qui nous ont motivés à persister, contre vents et tempêtes.

La Passe a toujours été une drôle de machine : tantôt librairie, tantôt atelier, tantôt lieu de concerts, de lectures ou commissaire d’expositions. Ses contours flous, son caractère bigarré et mouvant appartiennent à son essence même, qui est de se risquer dans le rassemblement de l’hétéroclite et les paris les plus improbables; dont le plus important est sans doute de tenir au caractère indissociable de ce qu’on appelle « l’art » et « le politique ».

Ce pari avait donné lieu à une effervescence palpitante au 1214 de la Montagne, où une contre-culture battante s’était installée au beau milieu d’un musée littéraire. Lorsque la commission scolaire de Montréal, sans doute inquiète de voir son bâtiment investi par ce joyeux bordel, a entrepris de nous foutre à la porte, nous avons fait le pari de poursuivre cette composition qui, bien que contingente, ouvrait des espaces dans lesquels nous n’étions pas redevables envers les institutions dominantes.

Lorsque nous avons été contactés par un prêtre de l’Église Saint-Enfant-Jésus du Mile-End, nous étions à la fois curieux et dubitatifs. L’institution catholique fut historiquement l’ennemie principale de tout ce qui nous tient à cœur – il y a 50 ans à peine, elle nous aurait mise à l’index. Mais voilà, elle est aujourd’hui décrépie et désertée, et en tant que vestige d’une forme de pouvoir archaïque, elle demeure l’une des seules poches institutionnelles – et propriétaire d’ô combien de bâtiments – où l’exigence de la valorisation capitaliste n’est pas surdéterminante. À l’heure où même le Divan Orange et le Cagibi n’arrivent plus à payer leur loyer, il nous fallait tenter cette aventure risquée, et installer nos quartiers grévistes en terrain hostile.

Sans pour autant jouer aux enfants de chœur, nous avons tenté d’y aller « de bonne foi ». Nous avons organisé le déménagement de l’ostie de shitload de boîtes de la collection Dostie, nous avons fait les rénovations minimales dans ce sous-sol glauque qui nous était offert à rabais. Et nous avons rapidement commencé à faire ce pour quoi nous avions bougé là : organiser des lancements de bouquins, des concerts, des shows de théâtre, des événements féministes, écologistes, militants, trans/queer et de belles fêtes. Rien de surprenant, quoi.

Eh bien non : il a vite fallu se rendre à l’évidence que le terrain était non seulement moisi, mais miné de toutes parts. Nous avons fait l’expérience des restes agonisants d’une forme de surveillance paternaliste qui nous reprochait exactement ce que nous voulions faire. À chaque pas, la réaction se manifestait en proportion à notre vitalité : on nous reprochait par-dessus tout de vouloir devenir un lieu de passage

En dépit de tout cela, nous avons décidé de persister encore un peu, en hébergeant un concert-bénéfice pour le fonds légal de Junexit – le blocage des infrastructures d’exploration pétrolière près de Gaspé, l’été dernier. Ce fut un événement extraordinaire, avec une ambiance électrisante et près de 400 personnes. En début de soirée, néanmoins, les flics sont venus pour faire savoir qu’ils avaient l’événement à l’œil. Nous savions qu’ils suivent le dossier, précisément du fait du succès de cette lutte cruciale pour la protection du territoire.

Quelques semaines plus tard, le couperet est tombé : l’Église, réalisant que nous ne faisions pas que de la musique de chambre, nous a demandé de justifier pourquoi nous utilisions le sous-sol pour organiser des activités politiques, et non pas exclusivement culturelles, et nous en barrèrent l’accès jusqu’à nouvel ordre. La police les avait vraisemblablement « prévenus » de nos perspectives politiques, et ont entrepris d’effrayer les curés – ce qui n’est manifestement pas bien difficile.

Dans ce contexte de méfiance et d’intimidation policière, nos partenaires, soucieux de conserver leurs acquis, se sont empressés de se désolidariser de la Passe, trahissant les idéaux contre-culturels d’un passé muséifié en prenant peur devant les manifestions actuelles de cette révolte. Devant ce retour de la Sainte-Alliance nationalo-cléricale – qui aurait vu Gauvreau se retourner dans sa tombe et Lionel Groulx s’en frotter les mains – la Passe ne pouvait que décider de sacrer le camp : to hell with it!

Ce qu’on nous reprochait, c’est notre refus de séparer lutte politique et création artistique. Or c’est justement la force de ce lien, son caractère inséparable, qui nous rassemble : que l’expérimentation apparaisse comme une zone fertile où art et politique se mêlent. Cette décompartimentation des catégories qui séparent l’action radicale des formes esthétiques, nous ne la lâcherons pas, n’en déplaise aux polices politiques de tout acabit, anarcho-puristes inclus.

Merci à toutes celles et ceux qui nous ont supportés durant ces mois de transition. Malgré les pointes d’amertume que cette histoire nous a laissées, elle aura tout de même permis d’accueillir bon nombre d’événements et de belles fêtes. En attendant de trouver un lieu propice (vos bons plans sont bienvenus!), l’Impasse prendra la forme d’une série d’événements itinérants.

Nous avons tenté de trouver, à travers notre passage dans deux bâtisses délabrées portées par des institutions en ruine, une zone hors marché, un petit havre en dehors des mailles des filets de la gentrification. Devant l’impasse à laquelle nous faisons face, nous avons décidé d’en faire notre nom, et de reprendre nos recherches pour ouvrir un nouvel espace autonome à Montréal. La Passe est morte, vive l’Impasse!

Communiqué après le dernier article de La Presse sur Montréal Contre-Information

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Jan 292018
 

De MTL Contre-Info

Montréal Contre-Information est une plateforme de diffusion autonome qui reçoit plusieurs soumissions anonymes ainsi que des textes diffusant les idées anarchistes de différentes tendances. Nous ne condamnons en aucun cas ce qui est publié sur ce site. Nous ne sommes pas les auteurs des soumissions envoyés à ce site.

Hier soir un article dans le journal La Presse nous apprenait que le SPVM enquêtait sur le site web afin de tenter de remonter aux auteurs de différentes actions qui ont ensuite été communiqués sur Montréal Contre-Information. Il s’agit du deuxième en l’espace de quelques mois. Tout ce cirque, qu’il soit médiatique ou policier tente d’isoler les idées qui sont derrière Montréal Contre-Information, on cherche  à instiguer la peur chez les gens qui consultent le site web pour ainsi rendre la diffusion d’informations subversives plus difficile à travers internet ou les réseaux sociaux.

Plusieurs craintes ont été émises par rapport à la page Facebook : « le SPVM a demandé l’ensemble des données de connexion (adresses IP) depuis la création du profil Facebook associé au site afin de maximiser ses chances d’identifier le ou les internautes qui le gèrent ». Ce n’est pas parce que le SPVM lance une campagne de peur que nous allons céder à la pression et fermer la page. Nous pensons que plus il y a de gens qui consultent la page plus le risque de répression sera diffus. En utlisant Facebook le but est de justement pouvoir aller atteindre plus de gens qui ne sont pas nécessairement dans les sphères militantes. Ne cédons pas à la panique, ce serait jouer le jeu de la répression.

N’oublions pas non plus que ce sont les grands médias qui contribuent grandement à cette campagne de peur qui vise à démoniser le site web. Et bien certainement les journalistes s’abreuvent des campagnes policières et continuent à demander des arrestations pour pouvoir remplir leurs chroniques.

Solidairement,

Montréal Contre-Information

 

Appel pour présentations: La Conférence du Réseau d’études anarchistes d’Amérique du Nord

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Jan 142018
 

Du Réseau d’études anarchistes d’Amérique du Nord

1-2-3 juin 2018, à Tiotia:ke (Montréal, Canada)

Le Réseau d’études anarchistes d’Amérique du Nord attend votre proposition de présentation pour notre 9ième conférence, qui se déroulera les 1-2-3 juin 2018, à Tiotia:ke, aussi connu sous le nom de Montréal, au soi-disant Canada.

En accord avec l’esprit fluide de l’anarchisme, nous ne limitons pas l’appel à des sujets spécifiques de discussion ; nous encourageons, au contraire, à soumettre des propositions de présentation sur des sujets diversifiés, qu’ils soient historiques, d’actualité ou utopiques.

La Conférence du Réseau d’études anarchistes d’Amérique du Nord espère accueillir des projets qui porteront sur des sujets comme l’indigénisme, l’ethnicité, le genre, le capacitisme, la sexualité, les cultures jeunes et urbaines, le tout dans un croisement d’approches et de champs d’études, y compris (mais pas seulement) la philosophie, la théorie politique, la psychologie, la musicologie, les études littéraires, l’anthropologie, la sociologie, la géographie, les études critiques du racisme, les études critiques indigénistes, les études trans et queer, les études de genre, les études sur le travail, les études sur la capacitisme, les arts visuels, plastiques et le design graphique. Nous encourageons aussi les spécialistes des sciences « dures» et de tous les champs d’études de discuter de l’influence et de la pertinence de l’anarchisme dans leur domaine.

Lors d’éditions précédentes, la Conférence a accueilli des présentations au sujet de l’histoire, des luttes populaires, des mouvements sociaux et paysans, de la décolonisation et de la résurgence indigéniste, des frontières et de l’impérialisme, du racisme, de la violence policière, de la torture, de la surveillance, de la technologie, de la contre-culture anarchiste ainsi que des biographies et des récits oraux.

Nous espérons offrir l’occasion d’entendre des voix de militantes et militants, d’artistes et d’universitaires. Le Réseau d’études anarchistes d’Amérique du Nord (North American Anarchist Studies Network— NAASN) est engagé dans la production de la connaissance à la fois à l’intérieur et à l’extérieur des murs des institutions. Nous espérons tout particulièrement inclure des voix et des perspectives marginalisées, et encourager à effacer les frontières entre les disciplines ainsi qu’entre les universitaires et les non-universitaires et même les anti-universitaires. De la rue à la salle de séminaire, nous encourageons toute personne intéressée par la praxis de l’anarchisme à soumettre une proposition.

Le Réseau d’études anarchistes d’Amérique du Nord se veut un espace où l’étude et la résistance peuvent converger sur l’Île de la Tortue (ou l’Amérique du Nord). Nous prendrons en considération les propositions de tables rondes, de présentations individuelles, d’ateliers, de discussions au sujet d’un livre, ainsi que les propositions d’autres formes d’activités.

POUR SOUMETTRE UNE PROPOSITION, OU POUR PLUS D’INFORMATION (vous pouvez
écrire en français): naasn2018@riseup.net

S’il-vous-plaît, assurez-vous d’inclure dans votre proposition:

Un résumé (pas plus de 300 mots — maximum).

Une courte biographie (150 mots).

La langue dans laquelle se déroulera l’activité (pour nous aider à prévoir la traduction simultanée).—> Les langues d’usage sont l’anglais, l’American Sign Language (ASL)l’espagnol, le français et la Langue des signes du Québec (LSQ).

Présence : nous avons conscience des limites qui représentent la distance (transport) et les frontières étatiques. Si vous pensez ne pas pouvoir être sur place en personne, n’oubliez pas de nous en informer dans votre proposition ; si votre proposition est retenue, nous pourrons alors vous inviter à soumettre une présentation préenregistrée que nous
pourrons diffuser à la conférence. Nous vous proposerons aussi sans doute, dans ce cas, d’être disponible au moment de la présentation pour pouvoir participer — à distance — aux échanges (questions et réponses), si la technologie le permet.

Si vous avez une idée de la durée de votre activité (par exemple : 20 minutes ou 40 minutes), merci de le préciser. Nous essaierons de vous accommoder, dans la mesure du possible (cela dépendra du nombre d’activités sélectionnées).

DATE LIMITE : merci de soumettre votre proposition au plus tard le 31 janvier 2018 ; nous nous engageons à répondre à toute personne ayant soumis une proposition au plus tard le 28 février 2018.

La Conférence se déroulera sur des territoires non-cédés des Kanien’kehá:ka. Les Kanien’kehá:ka sont les gardiennes et gardiens de la Porte de l’Est de la Confédération Haudenosaunee. Dans la langue Kanien’kehá:ka, Tiotia:ke est le nom de l’île qui sera nommée Montréal, un lieu qui a longtemps été un espace de rencontres pour les peuples autochtones, y compris le peuple Algonquin.

CONTACT — TOUTE DEMANDE D’INFORMATION ET PROPOSITION D’AIDE: naasn2018@riseup.net

Si vous pouvez aider avant et pendant l’événement, en particulier avec la traduction, merci de nous le faire savoir — nous avons besoin de vous! NB: N’hésitez pas à nous soumettre vos questions au sujet de l’accessibilité et de la sécurité, que vous soumettiez ou non une proposition. L’inclusion nous importe.

Pour plus d’information au sujet du Réseau et pour vous inscrire à la liste courriel, visitez notre site : www.naasn.org.

La fausse nouvelle de TVA et la panique islamophobe à l’extrême droite

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Déc 152017
 

De Montréal-Antifasciste

Le mardi 12 décembre, TVA Nouvelles rapportait que des travailleuses de la construction embauchées sur un chantier routier devant la mosquée Ahl-Ill Bait à Côtes-des-Neiges avaient été réassignées à distance de la mosquée en réponse à une requête formulée par la direction de la mosquée. TVA a initialement affirmé avoir obtenu copie du contrat de travail stipulant cette clause qui, si elle s’avérait, serait sexiste et illégale.

En moins de quelques heures de la diffusion de ce reportage, une vague d’indignation s’est répandue dans les médias sociaux. En moins de temps qu’il ne faut pour crier « fake news », plusieurs personnalités islamophobes et d’extrême droite ont dénoncé agressivement, non seulement la mosquée Ahl-Ill Bait, mais l’ensemble des musulmans ainsi que divers politiciens qui apparemment ne prenaient pas position assez rapidement, sans parler de la Fédération des femmes du Québec, qui a été accusée de garder le silence parce que sa nouvelle présidente, Gabrielle Bouchard, est une femme trans (et donc, veut-on nous faire croire, indifférente au sexisme).

Avant la fin de la journée, des faits contredisant le récit de TVA ont commencé à sortir. Le conseil exécutif de la mosquée ont expliqué qu’ils n’avaient jamais formulé une quelconque requête pour retiré les travailleuses du site. «Nous avions effectivement demandé l’accès au stationnement, sur l’heure du midi les vendredis, mais n’avons jamais demandé l’exclusion de personne. Cette requête, si elle existe, ne provient pas de notre organisation», a affirmé le porte-parole Moayed Altalibi par communiqué. Ceci a été confirmé par Serge Boileau, le président de la Commission des services électriques de Montréal (CSEM), qui gère le chantier, qui a d’ailleurs indiqué que la personne qui surveille le chantier pour la CSEM est une femme. «Elle est là depuis trois ou quatre semaines, et n’a pas été informée de quelque demande que ce soit, ni été importunée par quiconque.»

Malgré ces faits contredisant clairement les mensonges de TVA, les réseaux sociaux liés à l’extrême droite ont continué à répandre l’information fausse voulant que des femmes avaient été retirées du chantier à la demande de musulmans. En fait, le fait que le porte-parole de la mosquée insiste pour dire que la mosquée n’a aucun problème avec la présence des femmes a été cité comme preuve que les musulmans sont des menteurs à qui l’on ne peut faire confiance.

Ça n’est pas la première fois qu’un reportage malhonnête à propos des musulmans au Québec devient viral. Ça n’est pas la première fois que l’extrême droite se mobilise sur la base de fausses informations. Et ça n’est pas la première fois non plus qu’une nouvelle semble découler directement de la désinformation de l’extrême droite : les captures d’écran de Mark-Alexandre Perreault (qui semble être la source initiale de cette histoire) montrent que cet individu n’est pas un intervenant neutre et désintéressé dans cette histoire :

 

Suite au reportage de TVA, la madone d’extrême droite sur les médias sociaux, Josée Rivard, s’est dépêchée à mettre en ligne une vidéo où elle fustige la présidente de la FFQ, Gabrielle Bouchard, dans une invective transphobe, avant de tourner son fiel vers les musulmans qui seraient responsable d’avoir fait perdre une journée de travail à une travailleuse de la construction. À partir d’une vision faussée des relations ethniques au Québec, elle vocifère : « On a toujours reçu tout le monde, on n’a jamais eu de problèmes tout d’un coup il y a un gang de morons qui s’en viennent défaire toutes les affaires. »

Peu de temps après, deux femmes proches de La Meute, « Sue Elle » (aka Sue Charbonneau) et « Kat Baws » (aka « Kat Akaia »), ont lancé un appel à manifester devant la mosquée Ahl-Ill Bait dans l’intention explicite de perturber la prière du vendredi le 15 décembre. Sue Elle a été impliquée dans de nombreuses mobilisations racistes en 2017, participant à des manifestations organisées par CCCC, le Front patriotique du Québec, Storm Alliance et La Meute. En étroite collaboration avec des boneheads néonazis proche des Soldats d’Odin et d’Atalante, elle a aussi essayé d’organiser une manifestation contre les réfugié-e-e haïtien-e-s au Stade olympique le 6 août dernier, un événement que les organisateurs ont été forcés d’annuler en raison de la contre-mobilisation antiraciste.

Kat Baws est elle aussi proche de La Meute (son partenaire « Pat Wolf » occupe un poste officiel dans le Klan 16 – Montérégie) et de Storm Alliance, et étaient l’une des organisatrices de l’événement « Tous unis pour les démunis », une opération (ratée) de relations publiques menée à Montréal le 9 décembre dernier.

En plus de La Meute et de Storm Alliance, Baws est sympathisante de Atalante, l’organisation néofasciste basée à Québec, comme en fait foi son appréciation de nombreuses pages spécialisées dans l’identification et les attaques contre des antifascistes :

Storm Alliance que La Meute se sont dépêchées d’endosser l’appel à manifester devant la mosquée le 15 décembre. Pendant ce temps, sur la page Facebook de l’événement, l’idée a été poussée par Isabelle Roy (aka Seana Lee Roy), l’ancienne cheffe de Storm Alliance Montréal et coorganisatrice du flop Unis contre les démunis, et de nombreux autres se sont mis à proposer de chanter des hymnes de noël pour perturber la prière du vendredi, de distribuer du bacon ou des sandwiches au jambon, etc.

En même temps, mais parallèlement, l’Association des Travailleurs en Signalisation Routière du Québec a annoncé qu’elle aussi participerait à une manifestation vendredi devant la mosquée Ahl-Ill Bait. S’organisant par Twitter, l’ATSRQ a demandé à ses membres de quitter les lieux avant la manifestation de 13 h 30 (qui, selon eux, pourrait mal tourner). Plus tard, alors que de plus en plus de nouvelles et de reportages sortaient mercredi jetant un sérieux doute sur les allégations islamophobes de TVA, l’ATSRQ a finalement annulé ses plans jeudi matin. Cela dit, tout en insistant qu’elle agit seule et non en tant que membre d’un groupe, Marie-Josée Chevrier avait déjà lancé un appel public à soutenir la manifestation du syndicat, un appel endossé par de nombreux individus de divers réseaux, dont certains proches du Front patriotique du Québec. Au moment d’écrire ceci, tout indique que des gens vont se pointer sur place vendredi matin avant la plus grande manifestation raciste prévue en après-midi. il est utile de souligne que Chevrier, malgré son désaveu, est membre de certains groupes Facebook fort intéressants :

Il appert que La Meute, Storm Alliance et le Front patriotique du Québec organiseront la « sécurité » pour la manifestation de vendredi:

En même temps, de nombreux appels ont été lancés sur Facebook pour des actions plus sordides. Isabelle Lavigne (membre du groupe Facebook de Storm) a publié une vidéo où, tout en insistant qu’elle ne lance pas un appel à la violence, avertit l’exécutif de la mosquée qu’elle a obtenu leur adresse sur un site gouvernemental. Sébastien Cormier, dont les problèmes d’immigration de sa famille ont été exploités par Storm Alliance lors de la manifestation du 25 novembre à Québec, a lui aussi publié une vidéo pour se plaindre du fait que les Québécois ont été endoctrinés à l’islamophobie par le gouvernement, tout en mettant les musulmans en garde que s’ils continuent à faire des demandes « d’accommodements déraisonnables », les choses pourraient exploser. (On a l’impression que « Seb » ne sait pas vraiment dans quoi il s’est embarqué en acceptant l’appui de personnes qu’il semble lui-même percevoir comme des racistes.) La membre de La Meute, Patricia Celtique Gagnon a publiée une vidéo où elle lance un appel à manifester devant les mosquées à la grandeur du Québec ce vendredi, une proposition accueillie favorablement et relayée par d’autres individus dans les réseaux sociaux.

On a observé de nombreux appels à vandaliser et attaquer les mosquées, parmi un miasme de memes et de commentaires racistes :

Et tout cela n’est bien sûr que la pointe de l’iceberg.

La mobilisation d’extrême droite autour de cette histoire, même si elle est clairement appuyée sur de la désinformation, n’est pas complètement étonnante. Au Québec, un élément clé de l’organisation raciste au cours des dix dernières années a été le cadre des droits des femmes. Cela peut prendre une forme à la fois raciste et antisexiste, ou une forme carrément paternaliste sur le thème de « la protection de NOS femmes » et « au Québec, les femmes, c’est sacré ». Cela fait partie d’un phénomène plus large où, après des années d’agitation raciste par certains médias et politiciens, la grogne populaire (même autour de vrais enjeux) s’exprime de plus en plus fréquemment par des personnes blanches dans un discours islamophobe.

À propos de ces féministes instantané-e-s de l’extrême droite, on ne peut s’empêcher de constater le caractère sélectif de leur indignation. Qu’une femme perde une journée de travail en raison de contraintes sexistes, c’est effectivement quelque chose qui ne devrait jamais se produire. Mais une grande mobilisation contre un incident isolé, dans une société où une femme gagne encore en moyenne 88 cents pour chaque dollar que rapporte un homme (ce qui se traduit par 28 jours de travail non payé par année), ne porte clairement pas vraiment sur l’égalité de sexes.

L’exclusion des femmes de quelque domaine que ce soit est par définition une forme d’oppression et de sexisme à laquelle nous nous opposons fermement. Nous sommes toutefois bien trop familiers avec la manière par laquelle des nouvelles fabriquées de toutes pièces ou montées en épingles par des médias comme TVA deviennent soudainement quelque chose que « tout le monde sait bien » et qui tombent sous le « sens commun », même lorsque la nouvelle est contredite par les faits. Dans ce cas-ci comme dans de nombreux autres cas, ce sont des mensonges qui alimentent la panique antimusulmane.

Nous allons faire un suivi de cette histoire dans les prochains jours.

 

Les assauts de l’extrême gauche se multiplient au Québec: Philippe Teisceira-Lessard serait-il à blâmer?

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Déc 062017
 

Soumission anonyme à MTL Contre-info

Des details croustillants révélés en primeur sur les modus operandi de l’extreme gauche, un usage abondant d’une grammaire simpliste, mots sortis tout droit du dictionnaire: il semblerait y avoir eu une forte recrudescence des articles signés Philippe Teisceira-Lessard dans la Presse au cours des derniers mois.

En date du 23 novembre 2017, Philippe Teisceira-Lessard aurait supposément publié un article décrivant des actions alléguées de « l’extrême-gauche » au soi-disant « Quebec ». Grâce a des interviews de nazis repentis (Maxime Fiset) et d’enquêteurs a la retraite du SCRS, le journaliste explore les bas-fonds de la mouvance « anarchiste » et nous gratifie d’une analyse pénétrante des motivations profondes présidant aux actions criminelles de la gauche.

Perplexes devant les conclusions subtiles et raffinées sur les idées des différents acteurs publiant des communiqués sur Montréal Contre-Information auxquelles est parvenu Philippe Teisceira-Lessard, nous avons décidé de mener notre propre enquête. Une source ayant requis l’anonymat nous a ainsi déclaré : « Philippe Teisceira-Lessard dispose visiblement d’informations privilégiées. Autrement, je ne vois vraiment pas comment il pourrait être à ce point au fait de leurs tactiques et de leurs intentions. Par exemple, comment a-t-il fait pour savoir qu’une source majeure d’inspiration pour eux se trouve dans les sites web djihadistes? »

Il y a eu une forte recrudescence des contributions journalistiques de M. Teisceira-Lessard. En 2017, plus de 54 articles auraient été signes de sa plume. En comparaison, en 2015, seulement 13 articles auraient été l’oeuvre du journaliste d’enquête. En épluchant attentivement ses articles de la période 2016-2017, nous avons démontré une frappante ressemblance entre leur style et celui des communiqués anonymes présentés sur Montréal Contre-info.

« Similaire à un blogue anarchiste »

Au cours de notre enquête, nous avons fait appel à différents experts en technologie oeuvrant avec des algorithmes dernier cri pouvant comparer la syntaxe et les schémas linguistiques des articles de Teisceira-Lessard et ceux de plusieurs posts sur Montréal Contre-info. Les résultats ont été pour le moins inquiétants.

Dans 99,2 % des comparaisons, autant Teisceira-Lessard et les contributeurs anonymes ont utilisé abondamment les structures de phrase suivantes : simple, composée et complexe. Tous les deux ont employé des verbes s’accordant avec des sujets, parfois liés par les conjonctions « et » ainsi que « ou ». Le plus étonnant, c’est qu’une clause indépendante était parfois liée à une clause dépendante par l’usage de la conjonction « parce que ».

Après des triangulations linguistiques répétées entre les contributions de Teisceira-Lessard à la Presse et les communiqués soumis à Montréal Contre-info, l’éminent chercheur en symbologie de l’extrême-gauche, Ian Lafrenière, a noté avec inquiétude que « ses articles sont nettement similaires au contenu d’un blogue anarchiste ». Nous soulignons ci-bas quelques exemples des similarités entre l’écriture de Teisceira-Lessard et ces communiqués anonymes :

« Un site baptisé Montréal Contre-information est devenu une plaque tournante de la mouvance et diffuse les communiqués de revendication de plusieurs attaques contre des personnes ou des biens. »

« Une vidéo diffusée sur la plateforme montre deux individus s’approchant de la voie ferrée et activant des extincteurs remplis de peinture. »

« Plusieurs yuppies décident de démontrer leur richesse autrement que par des BMW et des Mercedes. »

Ndlr : Dans les faits, les sites faisaient l’usage plus fréquent des formats composés–complexes que Teisceira-Lessard, qui semble ne pas vouloir obscurcir son oeuvre ou semer la confusion dans son public avec plus que deux clauses.

L’internet comme moyen de communication

Lapresse.com, mtlcounter-info.org, ISIS.net/recruitment. Tous les trois sont des sites web. Ils publient et distribuent des articles et des opinions éditoriales à un public large, qui ont accès à ces informations par l’internet.

De son propre aveu, la Presse utilise l’internet pour diffuser sa propagande depuis 1999, et tout récemment en 2015 s’est convertit à une modèle de distribution presqu’entièrement basée sur l’internet. On ne peut pas voir comme simple fruit du hasard que Montréal Contre-info choisit aussi de diffuser l’information principalement sur le Web, en conservant une petite base de distribution format papier.

Le ou les gestionnaires du site de la Presse n’ont pas répondu à nos courriels. Leur hébergeur, l’entreprise canadienne Namespro Solutions, n’a pas voulu révéler leur identité à notre expert en science de l’informatique, Daniel Lecavalier.

Un passé criminel

Teisceira-Lessard n’est pas étranger aux actes violentes de l’extrême gauche. En avril 2012 il a lui-même été arrêté et accusé d’entrée par effraction et de méfaits pour son « rôle essentiel » dans l’occupation et le saccage du bureau du ministre Line Beauchamp à Montréal.

En entrevue après les événements, Teisceira-Lessard a avoué sa participation. « Quand le policier a parlé de méfaits, de vols et d’entrée par effraction, j’étais sous le choc par ces mots-là qui sonnent fort [sic]. Ce n’est pas de petits chefs d’accusation », a-t-il dit, avec une pointe de fierté. Depuis, il semble que Teisceira-Lessard s’est fait discret en se repliant dans l’underground sombre de la blogosphère extrémiste.

Des victimes sans défense

Bien qu’il est techniquement vrai que l’idéologie de l’extrême droite a directement mené à l’assassinat de huit hommes musulmans, des attaques racistes constantes contre des mosquées, et une hausse des agressions contre les personnes racisées, nul ne peut ignorer l’impact des actions de l’extrême gauche. « On est aux prises avec une situation où l’extrême gauche fait autant partie du problème que l’extrême droite », indique Michel Juneau-Katsuya, expert en sécurité nationale et ex-agent de la SCRS.

Nous nous sommes entretenus avec plusieurs chargeuses frontales et caméras de surveillance, qui ont accepté de nous parler seulement sous couvert de l’anonymat. Dans un de leurs témoignages percutants, une vitrine de commerce a raconté la suivante :

« Ces gestes violents sont totalement inacceptables et n’ont pas leur place dans une société de droit… d’aucune façon je ne peux accepter que l’on s’attaque à ma famille, à leur sécurité et à leur sérénité. »

Notre enquête et notre analyse minutieuse mènent à une conclusion incontournable : si l’on ignore l’idéologie et le contenu, il y a beaucoup trop de similarités entre les articles signés Teisceira-Lessard et ceux qui apparaissent sur Montréal Contre-info pour accepter qu’ils auraient été écrit par différents auteurs. Nous avons contacté le SPVM pour demander un appui supplémentaire de 524 937,50 $ afin de poursuivre notre enquête, mais leur petite caisse a récemment été épuisé.

Nous avons essayé de contacter Teisceira-Lessard pour faire la lumière sur ces nouvelles allégations inquiétantes, mais il nous a répondu seulement « aucun commentaire », une expression qu’il a sans doute appris lorsqu’il était en prison.

Bilan de la contre-manifestation du 25 novembre à Québec

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Déc 032017
 

De Montréal-Antifasciste

La manifestation conjointe de La Meute et Storm Alliance le 25 novembre 2017 s’annonçait comme la plus grosse manifestation d’extrême droite au Québec depuis les années 1930. Ses organisateurs attendaient un millier de personnes pour dénoncer la commission publique contre le racisme systémique, ironiquement déjà annulée le 18 octobre dernier par le gouvernement libéral).[i] Au final, si quantitativement les deux groupes et leurs alliés des groupuscules nationalistes, des Three Percenters, de la Northern Guard et des boneheads des Soldats d’Odin et d’Atalante, tous ensemble, n’auront même pas réussi à atteindre la moitié de cet objectif (de 300 à 400 tout au plus), qualitativement et symboliquement, cette mobilisation aura peut-être marqué un jalon pour la dérive fasciste dans la province. Une dérive soutenue de plus en plus activement par les forces policières, et dont plusieurs acteurs politiques « mainstream » se font complices.

Si cette année, à Montréal, le SPVM nous a habitué-e-s à servir de force de protection spéciale pour La Meute et d’autres groupuscules identitaires, jamais la complicité entre la police et les organisations d’extrême droite n’aura été aussi flagrante qu’à Québec ce samedi passé. Il n’est absolument pas exagéré de dire que le Service de police de la Ville de Québec (SPVQ) a brutalement réprimé les antifascistes -à coups de bâtons et de boucliers, de gaz-poivre et d’arrestations « préventives »- DANS LE BUT PRÉCIS de permettre aux identitaires et aux fascistes (dont certains étaient ouvertement armés) de répandre leur haine et leur racisme sans opposition dans la Capitale. En diabolisant par divers moyens les contre-manifestant-e-s antifascistes, le traitement médiatique pré- et post-manif aura lui aussi contribué à légitimer et normaliser le discours toxique des groupes identitaires.

Quant à la mobilisation antifasciste et antiraciste, force est de constater qu’il resteénormément de travail à faire pour faire comprendre l’urgence et le danger du glissement actuel vers l’extrême droite, les différents groupes militants impliqués n’ayant pas réussi à mobiliser plus de 250 personnes pour contrer les fachos sur la colline parlementaire.

Une faible mobilisation du côté antifasciste

Premier constat important : le Rassemblement populaire contre la manif de La Meute et Storm Alliance à Québec!, judicieusement et fort habilement organisé par les camarades du collectif antiraciste ad hoc CO25 de Québec, n’a attiré que quelques centaines de personnes, y compris celles qui avaient fait le voyage de Montréal et comptaient pour un peu moins de la moitié du groupe. Des camarades du Saguenay, d’Estrie et d’ailleurs en province s’étaient aussi déplacé-e-s, mais en nombres assez modestes.

Si plusieurs facteurs objectifs ont effectivement nui à la mobilisation (le temps de l’année, la température et le temps de marde, l’heure de départ extrêmement matinale des bus de Montréal, etc.), il nous faut considérer sérieusement un certain nombre de facteurs complémentaires.

Il n’est pas fortuit que les médias grand public aient publié une série d’articles diabolisant « l’extrême-gauche » dans les jours précédant immédiatement la manifestation. Ce traitement négatif des militant-e-s antifascistes assimilé-e-s à l’extrême gauche s’inscrit dans une tendance lourde qui s’est empiré justement à Québec, le 20 août dernier. Une image négative des antifascistes est cultivée depuis un certain temps dans le domaine public, qui repose en grande partie sur une compréhension biaisée de la violence politique et sur la fausse équivalence entre extrême gauche et extrême droite.

À ce chapitre, il est indéniable que les événements du 20 août dernier, et certains incidents en particulier, ont beaucoup nui à la réputation du mouvement antifasciste, même dans certains cercles a priori sympathiques à la cause. Par contre, tout ne peut pas s’expliquer par l’action des médias. Il est clair que nous avons collectivement énormément de difficulté à briser l’hégémonie d’un certain discours légaliste, pacifiste et agressivement non-violent, que l’on pourrait qualifier d’« extrême centriste ». Cette espèce de monopole idéologique, caractérisé par une rigidité pseudo-éthique autour d’un centre mou idéalisé, profite essentiellement à l’extrême droite qui, dans son offensive de légitimation, prend grand soin de collaborer avec la police et de projeter une image de loi et d’ordre, malgré la violence infiniment plus grande et plus sinistre que contient son programme.

Autrement dit, puisque les forces étatiques, l’extrême droite, les médias et même certains acteurs progressistes se liguent pour diaboliser les mouvements antiracistes et antifascistes radicaux, ces derniers ont une énorme pente à remonter en matière d’éducation populaire et de déconstruction des mythes centristes.

En même temps, force est de constater que le racisme jouit d’un seuil de tolérance très élevé au Québec, surtout à l’extérieur de Montréal. Rappelons que la fameuse commission publique contre le racisme systémique – laquelle ne représentait d’aucune façon une menace radicale à quoi que ce soit – a été fortement critiqué par les deux principaux partis d’opposition et ensuite abandonné par le parti libéral, qui pour des raisons bassement électoralistes lui a substitué le concept bidon d’un « Forum sur la valorisation de la diversité et la lutte contre la discrimination ». La même semaine, les libéraux ont passé une loi islamophobe, la Loi 62, présentement contesté dans les tribunaux pour son caractère inconstitutionnel. Systématiquement, les sondages menés au Québec confirment une forte sympathie pour des thèses anti-immigrants et islamophobes au sein de la population, surtout dans des communautés où il y a peu (ou pas) de musulman-e-s ou d’immigrant-e-s, mais qui sont saturés par l’influence des médias poubelles qui sèment la peur de l’autre. Dans un tel contexte, l’hostilité aux antifascistes ne puise pas uniquement dans un conservatisme anti-gauchiste, mais aussi dans la xénophobie qui rejette et méprise tout ce qui n’est pas « de souche ».

Par ailleurs, la structure même des médias sociaux, dont nous dépendons trop souvent dans notre organisation, favorisent la création de chambres d’échos où les utilisateurs et utilisatrices finissent inévitablement par n’interagir presque exclusivement qu’avec des personnes partageant leurs idées et valeurs. Ce phénomène n’est certainement pas étranger à l’isolement accru de l’extrême gauche et de ses idées. La chambre d’échos identitaire semble actuellement beaucoup plus grande et influente que la chambre d’échos antiraciste, et chaque jour elle semble incorporer plus de monde. Il nous faut donc trouver d’autres moyens, et NÉCESSAIREMENT sortir des médias sociaux pour aller directement à l’encontre des communautés et casser cette tendance, à défaut de quoi l’antifascisme radical est peut-être condamné à une marginalisation chronique. Cela implique également, par nécessité, d’organiser et d’agir dans les mêmes communautés, villes et quartiers où l’extrême droite cherche à recruter.

Un rassemblement antiraciste « dans le sens du monde »

Sur une note beaucoup plus positive, nous voulons saluer le travail exemplaire des camarades de CO25. Le rassemblement populaire, s’il a finalement attiré peu de monde, a tout de même été un franc succès sur le plan organisationnel. Le repas préparé collégialement par des membres de l’IWW, du Collectif de minuit et de Bouffe contre le fascisme a été apprécié de tout-e-s, les discours étaient pertinents et appropriés, la sécurité au point et la piñata, une sympathique conclusion. De manière générale, la coordination entre les villes a profité d’une nette amélioration de nos communications! Mais il est évident que les conditions étaient loin d’être idéales… c’est rendu que même pour un innocent pique nique organisé pour dénoncer le racisme, il faille s’attendre à se faire poivrer! Si le rassemblement populaire s’est bien déroulé, on ne peut pas dire autant de la suite des événements.

Un face-à-face plus déséquilibré que jamais… bref récit des événements

Les paramètres « populaires » du rassemblement ayant été clairement communiqués, les participant-e-s à la mobilisation qui voulaient essayer de bloquer physiquement le cortège d’extrême droite ont attendu un peu après midi pour tenter un déploiement.

Suivant le leadership improvisé d’un petit groupe de manifestant-e-s, environ 200 personnes ont (trop lentement) contourné quelques flics désorganisés pour prendre la rue en direction de René-Lévesque. L’antiémeute du SPVQ s’est grouillée le cul juste assez pour improviser un cordon précaire à l’intersection de René-Lévesque et Honoré Mercier, et compte tenu du manque de combativité (peut-être suivant une appréciation prudente des conditions objectives…), les forces antifascistes n’ont pas insisté pour briser la ligne d’anti-émeute et ont plutôt décidé d’occuper l’intersection aussi longtemps que cela serait possible. Le cortège de la Meute et de Storm Alliance se trouvait à ce moment à quelque 150 mètres, devant le Centre des congrès.

Presque immédiatement, les flics ont reçu l’ordre de mettre leur masque à gaz, ce qui présageait d’emblée l’usage d’irritants chimiques. Après une dizaine de minutes, l’antiémeute s’est mise à avancer sur les antiracistes et à les repousser de plus en plus violemment vers la fontaine de Tourny, aspergeant généreusement la première ligne de gaz poivre, LITTÉRALEMENT pour dégager la place et permettre aux racistes de se rendre devant l’Assemblée nationale tel que prévu. L’attachement des flics au droit de manifester DES RACISTES en était presque émouvant.

Les camarades ont résisté courageusement, autant qu’elles et ils ont pu, mais ont éventuellement été repoussé-e-s vers la fontaine. Des clôtures de métal ont été traînées dans le chemin des flics et une solide volée de balle de neige est partie dans la direction des flics et des identitaires. C’était toutefois peine perdue, la majorité des contre-manifestant-e-s s’étant déjà dispersée à ce moment. La rumeur d’une souricière imminente a semé d’autant plus la confusion dans nos rangs et un repli s’est opéré vers les plaines d’Abraham, où un caucus a été improvisé, suite à quoi une partie des irréductibles est repartie dans la direction opposée pour tenter de contourner la flicaille et confronter La Meute plus loin. Une tentative louable, mais qui s’est malheureusement soldée par un échec. Presque au  même moment, la police procédait à l’arrestation de 23 camarades.

Le cortège d’extrême droite a ainsi pu revenir à son point de départ pratiquement sans opposition, toujours sous forte escorte policière.

La police et les médias ont plus tard rapporté que 21 autres personnes avaient été arrêtées « préventivement » en marge du rassemblement, peu après midi. Celles-ci sont accusé-e-s de complot dans le but de former un attroupement illégal et de port d’un déguisement dans un dessein criminel. La police a pourtant elle-même admis qu’aucun acte criminel n’avait été commis. Minority Report much? Certains camarades ont des accusations supplémentaires. 

La Meute, Storm Alliance, Atalante; même combat! La police au service des fascistes!

Le caractère historique de la mobilisation du 25 novembre, à notre avis, concerne la convergence ouverte et assumée de pratiquement tout ce que le Québec comporte de forces d’extrême droite. La Meute, et dans une moindre mesure Storm Alliance, par soucis de soigner leur image, avait jusque-là essayé de conserver une distance respectable avec des groupes ouvertement fascistes et suprémacistes comme Atalante et la Fédération des Québécois de souche. Cette fois-ci, ils n’ont pas hésité à les inviter cordialement à leur petit party dans la Capitale. Et aujourd’hui, sur la page Facebook Atalante Québec, les commentaires élogieux se comptent par dizaines de la part de membres affiché-e-s de la Meute, des SA, de Soldiers of Odin, etc[ii]. Voilà qui est très éloquent.

Soyons clairs : les militant-e-s d’Atalante sont des suprémacistes blancs, néofascistes purs et durs. Il n’y a aucune place à l’ambigüité ; ce groupe a été fondé en 2016 par des boneheads du milieu « Quebec Stompers », proche de Légitime Violence, un groupe musical avec des paroles édifiantes tels, « Ces petits gauchistes efféminés qui se permettent de nous critiquer n’oseront jamais nous affronter. On va tous les poignarder », et pour être plus clair encore, «Déroulons les barbelés, préparons le Zyklon B!», en référence au gaz utilisé dans les camps de concentration de l’Allemagne nazie. Atalante entretient des liens amicaux avec la scène de musique fasciste « Rock Against Communism », ainsi qu’avec le mouvement néofasciste Italien Casa Pound et, ici au Québec avec la Fédération des Québécois de souche et les cathos traditionalistes de la Société St- Pie X.

On a aussi constaté le présence des pseudo-miliciens des Three Percenters (III%), lesquels ont été aperçus à la manif munis de gants tactiques renforcés, de bâtons télescopiques et vraisemblablement de gaz poivre et d’autres armes dissimulées. Ce groupe est plus récemment établi au Québec; il s’agit d’une organisation basée surtout aux états unis mais avec des sections au Canada anglais, qui rassemble des conspirationnistes et des survivalistes derrière une paranoïa antimusulman et « antimondialiste ». Quelques jours à peine après leur sortie de samedi à Québec, plusieurs membres des « threepers » font partie du ramassis de salopards qui ont annoncé leur intention de faire une manifestation en faveur des armes à feu à l’école Polytechnique de l’Université de Montréal le 2 décembre 2017, soit quatre jours avant la commémoration annuelle de la tuerie de 1989 où 14 femmes ont été assassinées par l’antiféministe Marc Lépine.

On est d’ailleurs en droit de se demander pourquoi ces derniers n’ont pas été arrêtés à Québec (ou à tout le moins pourquoi leurs armes n’ont pas été confisquées) alors que la police a arrêté 21 contre-manifestant-e-s antifascistes sur une base strictement préventive, soulignant dans leur rapport aux médias avoir trouvé des armes dans les effets de certain-e-s militant-e-s… Et pourquoi les boneheads d’Atalante et des Soldats d’Odin ont pu se réunir et longuement s’exciter l’identité sur les remparts de l’esplanade sans être le moins du monde embêtés par la police… alors que l’anti-émeute s’acharnait à tours de bras sur les antifascistes à quelques mètres de là.

Ne serait-ce que la disposition physique des policiers dans l’espace suggère une complicité et une belle symbiose. Pendant toute la durée de l’événement, les policiers qui escortaient le cortège d’extrême droite faisaient dos aux manifestant-e-s identitaires et face aux militant-e-s antiracistes. Le SPVQ nous avait déjà un peu fait le coup le 20 août en communiquant aux organisateurs de La Meute des renseignements privilégié au sujet des militant-e-s de Montréal, extirpés de manière douteuse à un chauffeur d’autobus, les aidant ainsi à faire leur manif. Mais là, franchement, la complicité crevait les yeux!

Pas étonnant que les identitaires eurent applaudi chaudement les flics à la fin de leur manif…

Des médias complices…

Comme on pouvait s’y attendre, le traitement médiatique de ces événements laisse à nouveau fort à désirer, présentant encore généralement les antifas comme les méchants habituels, alors que nous étions objectivement les seul-e-s à subir de la violence! La plupart des médias ont repris sans poser de question les points de presse du SPVQ mettant par exemple l’accent sur les armes saisies et l’utilisation bien commode du mot « complot ». Nous avons également remarqué une différence importante entre les traitements de la manif produits par la presse anglophone et la presse francophone. La première n’a pas hésité, notamment, à qualifier la manif de la Meute et SA d’extrême droite, alors que la presse franco jouait d’euphémismes et tournait autour du pot… quand les journalistes ne confondaient pas carrément les différents groupes et leurs positions respectives (une journaliste de TVA a même dit que les gens d’Atalante étaient des antifas venu-e-s manifester contre La Meute!).Xavier Camus a produit un excellent billet sur le bien curieux traitement médiatique entourant les événements du 25 novembre.

Seule la CBC a cru bon relever que la police avait fait le sale travail pour les groupes d’extrême droite. Houssein Ben-Ameur, à notre connaissance, dans une chronique judicieusement intitulée À bas le fascisme!, a été le seul chroniqueur à remettre les pendules à l’heure sans se sentir obliger d’écorcher à la fois les racistes et les antiracistes.

Comme d’habitude, c’est du côté des médias indépendants qu’il faut se tourner pour avoir un point de vue un peu plus fidèle à ce qu’ont vécu et ressenti les militant-e-s antiracistes et antifascistes sur le terrain. La vidéo de MADOC est à ce titre exemplaire.

Dur bilan

Au final, il est difficile de conclure au succès du camp antifasciste et antiraciste. Il est certain qu’une mobilisation modeste vaut mieux que pas de mobilisation du tout, et que nous avons en dépit de toute l’adversité réussi à exprimer une opposition claire à la venue de ces groupes racistes à Québec. Si samedi ne fut pas une victoire pour nous, ça aurait été bien pire s’il n’y avait eu aucune opposition. Il est aussi vrai que sans l’action de la police collabo, même cette modeste mobilisation aurait sans doute considérablement perturbé l’adversaire. Mais ça ne suffira pas. Pour endiguer la dérive fasciste, il nous faudra redoubler d’effort, autant sur le plan de la mobilisation que sur celui de l’information et de l’éducation. De plus, il nous faudra trouver de nouveaux moyens d’intervention, de nouvelles pistes pour mobiliser et sortir des rangs de la gauche convaincue pour aller rencontrer et échanger avec de nouveaux et nouvelles camarades.

Le principal point positif qui ressort de cette mobilisation est le resserrement des liens entre les militant-e-s antiracistes et antifascistes de Montréal et de Québec, et aussi d’ailleurs dans la province. Il va sans dire que nous avons le devoir de bâtir sur cette nouvelle base des réseaux toujours plus solides et efficaces.

Quelques réflexions en vrac :

  • La complicité de la police est un problème qui n’est pas près de disparaître. Le fait que le nouveau chef de la sécurité de La Meute soit lui-même un ancien policier de carrière (de la région de Québec) ne devrait pas nous étonner. Il devient de plus en plus difficile d’ignorer le fait que ces groupes identitaires doivent très certainement compter dans leurs rangs des membres des forces de police, et possiblement du système de justice. Des recherches plus soutenues doivent être menées à cet égard.
  • La convergence des forces d’extrême droite observée le 25 novembre peut paraître inquiétante, mais elle n’est pas sans comporter certains avantages. Le masque tombe : certaines prétentions des chefs de La Meute perdent en crédibilité, et les allégeances racistes sont de plus en plus évidentes. Il nous faut insister sur ces liens et ces allégeances.
  • Il faut mieux nous entraîner aux déploiements tactiques. Certaines décisions prises dans le vif de l’action se sont avérées assez discutables. Notamment, avant de crier à l’encerclement imminent, il est important d’en être tout à fait certain, parce qu’une telle alerte a toujours automatiquement un effet démobilisateur et il est évidemment malheureux que nos cortèges se démembrent parce que de mauvais câlls ont été lancés. Dans le même ordre d’idée, il serait important qu’une meilleure communication, ou éventuellement un transfert de compétences, s’opère entre les militant-e-s ayant plus d’expérience et les plus nouveaux et nouvelles. Ceci présente évidemment des défis en matière de sécurité auxquels il faut aussi réfléchir avec sérieux.

 

[i] Et aussi comme feuille de vigne en appui à « Seb », un homme québécois dont la femme (une « immigrante potentielle légitime ») à de la misère à immigrer au Canada

[ii]              Rappelons d’ailleurs que Dave Tregget, le boss de Storm Alliance, était lui-même président des Soldats d’Odin il y a à peine un an et ne se cachait pas d’être en bons termes avec les stompers et Atalante. Tregget a passé les derniers mois à nier être raciste sur toute les tribunes, mais qui ose encore le croire quand lui et ses chummys sautent dans le même lit qu’Atalante à la première occasion? Tregget est un menteur et un manipulateur, et il serait temps que les médias s’en rendent compte.

Les Gunnies et l’Extrême Droite

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Déc 022017
 

De Montréal-Antifasciste

Le texte suivant est le message intégral d’un tract que des antifascistes avaient compté distribuer lors d’une contre-manifestation ciblant un groupe de personnes qui avaient planifié un rassemblement pro-armes à la Place du 6 décembre ce samedi 2 décembre. Ce rassemblement a maintenant été déplacé hors de Montréal, et la contre-manifestation prévue est donc annulée. Nous trouvons encore pertinent de distribuer ce texte, qui explique les liens du rassemblement – et des “gunnies” – avec l’extrême droite Québécoise. Un texte plus approfondi à ce sujet suivra.

Aujourd’hui, des gens s’identifiant comme les “gunnies” avaient planifié un rassemblement au site mémorial pour les victimes de la tuerie au collège Polytechnique en 1989, durant laquelle 14 femmes ont été assassinées par Marc Lépine, un tireur antiféministe.

Nous sommes ici pour partager notre solidarité et notre colère par rapport à cette provocation misogyne.

Dans la dernière année, nous avons été témoin.es d’une montée dégoutante de crimes haineux et de mobilisations d’extrême droite à travers le Québec. Ceci fut déclenché notamment par la tuerie du 29 janvier au Centre culturel Islamique de Ste-Foy. La vague d’activité actuelle de l’extrême droite a beau mettre le focus sur les Musulmans, elle demeure hostile à tout ce qui peut servir de menace à la société Québécoise “traditionnelle” de leur imaginaire – une société composée de Catholiques blanc.hes, francophones, et hétérosexuel.les, les hommes “protégeant” les femmes et déterminant les règles du jeu.

Le rassemblement des soi-disant “gunnies” fut organisé par le collectif Tous contre un registre québécois des armes à feu, et spécifiquement par des officiaux du Parti conservateur, Guy Morin et Jessie McNicoll. Il n’est pas du tout surprenant que McNicoll et Morin, ensemble avec plusieurs personnes ayant indiqué leur intérêt à assister à l’événement, appuient également plusieurs groupes d’extrême droite, comme Storm Alliance, La Meute, et les Three Percenters.

Les Three Percenters forment un groupe auquel plusieurs personnes comptant participer à ce rassemblement, incluant Guy Morin, sont associées. La milice du III%, comme on les appelle souvent, sont un groupe paramilitaire, fondé en 2008 aux États-Unis, qui promet une résistance armée contre tout effort pour enfreindre à la possession d’armes à feu. Or, leur agenda politique concerne beaucoup plus qu’une position pro-armes. Aux États-Unis, les Three Percenters ont été impliqués activement dans des patrouilles illégitimes le long de la frontière avec le Mexique, bloquant des autobus remplis d’immigrant.es déjà détenu.es et organisant des rassemblements anti-refugié.es. Des membres de la milice du III% ont manifesté devant des mosquées, et ont été impliqués dans plusieurs actes violents, incluant un incident, en novembre 2015, lorsqu’un sympathisant du groupe a tiré sur cinq personnes à un rassemblement Black Lives Matter à Minneapolis. Au Canada, des membres de la milice du III% ont entrepris une surveillance de mosquées et tentent d’intimider les contre-manifestants à leurs rassemblements anti-musulmans et anti-immigrants.

Il existe un chevauchement clair entre le collectif Tous contre un registre québécois des armes à feu, les Three Percenter, et autres groupes d’extrême droite, incluant Storm Alliance et La Meute. Plusieurs membres de la milice du III% armés de matraques et affichant les symboles du groupe ont été identifiés comme membres du détail de sécurité pour la récente manifestation raciste organisée par ces deux groupes le 25 novembre à Québec. De plus, avant la descente de l’événement Facebook pour le rassemblement “gunny” du 2 décembre, plusieurs membres de Storm Alliance et de La Meute avaient indiqué leur intérêt à y participer. En même temps, un des « gunnies », Martin Leger, qui a fait une vidéo insultante accusant les victimes du massacre de Lépine d’être des « polypleurniches », est un ancien membre de la scène néo-nazie des Québec Stompers dont le groupe Atalante est issu (qui étaient également présents le 25 novembre).

Le fait de planifier un rassemblement “gunny” au site mémorial des victimes de Polytechnique s’agit d’une provocation antiféministe évidente. Alors que des groupes comme Storm Alliance et La Meute prétendent favoriser l’égalité entre les hommes et les femmes, ils dénigrent systématiquement le féminisme pour avoir “ruiné” des femmes au Québec, ou comme étant partie d’une conspiration de gauche visant à affaiblir la nation québécoise. Ces groupes racistes s’intéressent majoritairement à positionner les hommes blancs Québécois comme protecteurs des femmes blanches contre la “menace” qu’ils croient posée par “d’autres” hommes. Et pourtant, depuis le 6 décembre 1989, plus de 1500 femmes et filles ont été assassinées au Québec, généralement par des hommes blancs, et plus souvent que rarement par des hommes dans leur propre entourage. Le racisme et la misogynie démontrés par Storm Alliance, La Meute, et les Three Percenters ne saura protéger personne – au contraire, ils mèneront tout simplement à une violence accrue envers les femmes, incluant spécialement les femmes issues de communautés ciblées par ces groupes.

Nous sommes déterminé-e-s à résister par tous les moyens nécessaires à la montée de l’extrême droite et à son programme identitaire raciste, sexiste, homophobe et transphobe.

Montréal Antifasciste: Uni.es contre le racisme, le patriarcat et le colonialisme

Maxime Fiset et son centre de « prévention de la radicalisation » ne nous représentent pas!

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Nov 272017
 

De Montreal-Antifasciste

En tant que militantes et militants antifascistes et antiracistes actifs, dans certains cas, depuis des dizaines d’années dans les luttes contre l’extrême droite à Montréal, à Québec et ailleurs au Québec et au Canada, nous tenons à nous dissocier de la façon la plus claire possible des positions et propos tenus dans les médias ces derniers temps par Maxime Fiset, porte-parole du Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence (CPRMV), notamment dans l’article paru aujourd’hui dans La Presse sous le titre Les assauts de l’extrême gauche se multiplient au Québec.

Nous connaissons bien le goût des médias grand public pour les récits simplistes ainsi que leur affection particulière pour les spécialistes patentés (toujours les mêmes) appelés en renfort pour cautionner ces récits biaisés. Mais la cause que nous défendons est trop importante pour que nous laissions aux médias et à leurs soi-disant experts le loisir d’en fausser le sens au nom d’une doctrine simpliste et contre-productive qui n’est pas et n’a jamais été la nôtre.

Il convient d’abord de rappeler que monsieur Fiset était lui-même toujours actif dans les réseaux fascistes, notamment comme membre fondateur de la Fédération des Québécois de souche et comme modérateur local du forum suprémaciste Stormfront, quand certains et certaines d’entre nous se battaient littéralement contre ses petits amis néonazis dans les rues de la métropole ou subissaient des attaques au couteau dans la capitale.

Bien que nous n’ayons a priori aucune raison de douter de l’authenticité de son retournement idéologique, vous comprendrez le malaise que certain-e-s d’entre nous éprouvent de le voir aujourd’hui sur toutes les tribunes s’exprimer en leur nom.

Si monsieur Fiset était autrefois décidément néonazi, le discours qu’il porte aujourd’hui est davantage « extrême centriste » que de gauche. Il s’imagine au-dessus de la mêlée et suppose une symétrie entre l’extrême droite et l’extrême gauche et, ainsi, relativise la violence et le danger que représente réellement la première par rapport à la seconde. Par définition, ce discours ne correspond aucunement aux positions politiques d’un très large pan de l’opposition antiraciste et antifasciste, laquelle est historiquement et jusqu’à ce jour communiste, anarchiste et explicitement radicale.

La gauche dans la ligne de mire des antiracistes d’État

Cette contradiction ne devrait surprendre personne, car Fiset n’a jamais caché le fait qu’il agit en tant que représentant d’un organisme parapolicier, le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence (CPRMV). Cet organisme a été mis sur pied par le gouvernement en 2015 dans le but de contrer la « radicalisation » de quelques jeunes musulman-e-s dans certains cégeps montréalais.

Fiset a déjà expliqué que le CPRMV comporte quatre axes de recherche : la droite, la gauche, les religieux/euses, ainsi que des individus qui se radicalisent autour de leur propre vendetta. Il n’y a donc aucune place à l’ambiguïté : la gauche (et à plus forte raison l’extrême gauche) ne fait pas partie des alliés du CPRMV, mais de ses cibles.

Le CPRMV définit la « radicalisation » seulement par rapport aux gestes violents qui menacent la « vie en commun » dans la société.  Une formule dont l’interprétation dépend nécessairement des critères idéologiques de celui ou celle qui l’applique. Cette perspective omet totalement la violence et la militarisation des États, comme si ces derniers étaient idéologiquement neutres ou nécessairement au centre de l’échiquier politique. De plus, le CPRMV inclut dans son domaine de recherche des groupes qui ne rentrent pas dans cette catégorie déjà assez floue, mais qui pourraient toutefois servir d’« incubateur » à des individus ou des tendances qui pourraient se radicaliser à l’avenir. Il s’agit donc d’un domaine de recherche extrêmement vaste.

Les entités comme le CPRMV sont des éléments caractéristiques du paysage lorsqu’on s’engage dans la lutte antifasciste. L’antifascisme n’est pas une bataille simple entre deux adversaires, soit nous contre les nazillons. C’est une lutte à trois, dans laquelle il nous faut nous battre non seulement contre l’extrême droite mais aussi contre des organismes étatiques et paraétatiques qui sont tout aussi hostiles (sinon plus) à la gauche radicale qu’à la droite radicale. Le plus souvent, ces entités étatiques et paraétatiques bénéficient de relations privilégiées avec les médias et d’autres organes de l’État, ainsi que d’un financement généreux qui leur permet de prendre énormément de place dans le débat public sur l’extrême droite.

En tant qu’antifascistes radicaux ayant des racines historiques dans la gauche révolutionnaire, les activités de ces antifascistes d’État nous confrontent à des défis et des risques. Compte tenu des ressources dont ils disposent, ces groupes produisent souvent des renseignements au sujet de l’extrême droite qui nous sont utiles. Des groupes comme l’Anti-Defamation League et le Southern Poverty Law Center aux États-Unis, par exemple, sont encore parmi les principales sources d’information sur les individus et les organisations d’extrême droite. Même lorsque des personnes plus proches de nous produisent des reportages sur nos adversaires d’extrême droite, elles s’appuient souvent (mais pas toujours) sur des dossiers produits par ces entités paraétatiques. Mais par contre, nous voulons éviter de renforcer le profil de tels groupes, car il est fort probable qu’un jour ou l’autre ils utiliseront leur position non seulement pour saper nos efforts, mais aussi pour faciliter la répression visant les antifascistes radicaux et leurs allié-e-s.

La forme que ce travail répressif prend peut varier, et tous les sales coups ne sont pas égaux, bien sûr. Faire des amalgames entre l’extrême gauche et l’extrême droite, mettre sur un pied d’égalité la violence oppressive et la violence CONTRE l’oppression, demander d’élargir les pouvoirs répressifs de l’État – tout cela fait partie de la fonction normale des antifascistes d’État, même des groupes qui peuvent par ailleurs se trouver de notre bord dans certaines campagnes. Et même aussi des personnes bien intentionnées qui peuvent par ailleurs faire du bon travail dans certains cas.

Mais ces groupes peuvent aussi prendre parti plus activement contre nous. L’exemple le plus connu concerne l’Anti-Defamation League (ADL) qui, dans les années 1980, est allée jusqu’à monter une véritable opération d’espionnage, en collusion avec le régime d’apartheid d’Afrique du Sud, pour recueillir des renseignements sur des dizaines d’organisations d’extrême gauche et anti-impérialistes. Dans certains cas, les espions de l’ADL sont même allés jusqu’à encourager et à créer des liens entre des néonazis et des organisations propalestiniennes pour pouvoir ensuite dénoncer à grands cris « l’antisémitisme » de ces dernières. Le scandale a éclaté lorsque le voile a été levé sur cette opération en 1993, et après plusieurs années en cour, l’ADL a été obligée de payer des centaines de milliers de dollars à des personnes qu’elle avait ciblées. Impossible de dire si l’ADL s’est à nouveau abaissée à ce genre d’opération clandestine depuis cet épisode peu glorieux.

Plus près de nous, une soi-disant « Ligue antifasciste mondiale » (LAM) était active à Montréal dans les années 1990. Issue de la lutte de rue contre des boneheads néonazis, et suite à des pressions policières, la « ligue » s’est principalement impliquée dans la collecte (et le partage avec la police) de renseignements et spécialisée dans les déclarations aux médias. L’une de ses principales priorités était de critiquer les autres forces antifascistes, notamment le Centre canadien sur le racisme et les préjugés. En 1993, tandis qu’étaient organisées les plus grandes manifestations antifascistes à Montréal depuis des années contre la venue du Heritage Front néonazi de Toronto et de représentants du Front National français, la LAM a surtout agi pour saboter les mobilisations militantes! Finalement, elle est allée jusqu’à dénoncer publiquement des anarchistes de la revue Démanarchie à la police et dans les médias suite aux émeutes de la Saint-Jean à Québec en 1996. Il a été révélé par la suite que la LAM avait partagé pendant des années des renseignements sur la gauche avec la police.

On note avec amusement que la LAM avait toujours travaillé en étroite collaboration avec Yves Claudé, alias Yves Alix, un « chercheur » qui s’est lui-même promené de la gauche à l’extrême droite au fil des ans. On ne sait toujours pas pour qui Claudé travaille réellement, puisqu’il « fait de la recherche » et prend des photos d’amis et d’ennemis où qu’il aille. Son récent « exposé » sur les antiracistes dans les pages de l’Aut’journal n’est vraiment rien de plus qu’une mise à jour surréaliste du genre de désinformation qu’il produisait déjà il y a vingt ans.

Si les dérives de la LAM et de l’ADL montrent jusqu’où peut aller l’antifascisme d’État, il est clair  que des opérations aussi grossières nuisent à sa fonction primaire, qui est justement de prévenir la radicalisation et de gérer la crise idéologique dans laquelle le capitalisme se trouve. La modalité préférée des organismes de l’antifascisme d’État est de jouer au nice cop, de se faire inviter dans nos espaces, d’avoir une place dans nos réseaux, de s’exprimer en tant qu’« allié critique », tout ça pour mieux nous comprendre et, éventuellement, nous cibler et nous déstabiliser plus efficacement le moment venu. C’est dans cette optique qu’il faut comprendre les agissements et les propos de M. Fiset et du CPRMV.

Maxime Fiset et le CPMVR nuisent activement à la lutte antifasciste

Jusqu’à tout récemment, l’omniprésence de M. Fiset n’était pour nous qu’un irritant de plus dans le paysage sociopolitique et médiatique. Or, dans une récente entrevue accordée au journal communautaire Droit de parole, il a dépassé les limites de la décence élémentaire en nommant expressément un groupe actif du milieu antifasciste de Montréal dans des termes hostiles et condescendants qui, en plus de semer la discorde, donne du grain à moudre à la police et au militant-e-s d’extrême droite et expose d’autant plus nos camarades à la répression et aux représailles.

Avant cela, M. Fiset s’était épanché sur toutes les tribunes, le 20 août dernier, pour déclarer La Meute victorieuse d’un face à face tendu à Québec où cette dernière était restée confinée dans un stationnement sous-terrain pendant cinq heures, assiégée par des centaines d’antiracistes et d’antifascistes. Par quelle contorsion logique en arrive-t-il à considérer que La Meute est sortie victorieuse de cette humiliante situation? En concluant qu’un groupe d’antifascistes qui avaient renversé des poubelles, lancé des chaises de parterre et d’autres projectiles dans la direction de la police et agressé physiquement une poignée d’individus identifiés au mouvement ultranationaliste ont de facto « perdu la bataille des relations publiques », délégitimé l’ensemble de la mobilisation antiraciste et par voie de conséquence, légitimé le discours raciste de La Meute! (Il a d’ailleurs récidivé tout récemment en disant à Al Jazeera que l’extrême-droite jouissait actuellement au Québec d’une « légitimité accrue », confirmant du coup sa propre prophétie, et encore dans l’article de La Presse du 23 novembre intitulé Les assauts de l’extrême gauche se multiplient au Québec -véritable opération de diabolisation de l’extrême gauche curieusement lancée par l’establishment libéral à 48 h d’une manifestation d’extrême droite à Québec- où Fiset compare carrément le site de propagande anarchiste Mtl Counter-Info à un « blogue djihadiste ».) Tout ce raisonnement est évidemment fallacieux et indique un différend majeur entre la posture politique de M. Fiset et celle de la majorité du mouvement antifasciste militant.

Nommément, M. Fiset s’attache dogmatiquement à ce qu’on appelle la « non-violence », tandis que le mouvement antifasciste international, de ses débuts dans les années 1920 jusqu’à aujourd’hui, adhère à une diversité de tactiques incluant (mais sans s’y limiter) le recours à la violence contre les courants organisés d’extrême droite, fascistes et ultranationalistes. L’objectif de ces mouvements étant de bloquer la dérive fasciste par tous les moyens nécessaires. (À ce titre, nous ne saurions que recommander à M. Fiset la lecture de Antifa : The Anti-Fascist Handbook, qui participerait sans doute à combler certaines lacunes importantes dans son analyse.)

Comme l’écrit Peter Gelderloos dans son livre incontournable Comment la non-violence protège l’État :

« Nous pensons que les tactiques devraient être choisies en fonction de chaque situation particulière, et non pas déduites à partir d’un code moral préconçu. Nous tendons également à penser que les moyens se reflètent dans les fins, et nous ne voudrions pas agir d’une façon qui conduirait invariablement à la dictature ou à quelqu’autre forme de société qui ne respecte pas la vie et la liberté. Ainsi, nous serons plus judicieusement décrits comme défenseurs d’un activisme révolutionnaire ou militant, que comme défenseurs de la violence. »

En tant qu’antifascistes et antiracistes, nous ne sommes ni pour, ni contre la violence intrinsèquement. Par contre, nous soutenons l’action directe et des stratégies d’actions diversifiées. Nous sommes politiquement « radicaux » (au sens premier du terme, c’est-à-dire que nous désirons nous attaquer à la racine –radix– des problèmes), nous ne nous en cachons pas, et croyons que la violence est parfois nécessaire contre l’extrême droite et la dérive fasciste. Mais n’admettant pas l’autorité de l’État, nous sommes aussi contre la répression policière d’un État qui met par ailleurs en place des conditions socio-économiques favorables à l’émergence de l’extrême-droite et qui protège ensuite le« droit » de celle-ci de parader dans les rues et de diffuser ses idées toxiques.

Cette position « radicale », à la fois contre l’extrême droite et contre l’État, nous inscrit d’emblée en faux contre M. Fiset, son centre, et la vision libérale moralisante qu’ils défendent. Ainsi, nous n’avons jamais entendu M. Fiset s’exprimer sur les violences et dérives policières à Québec ou à Montréal. Nous ne l’avons jamais entendu dénoncer les excès de violence physique, économique et symbolique de l’État et de son bras armé qui cultivent le terreau où germe l’extrême droite.

Le pacifisme moralisateur de personnages comme M. Fiset s’inscrit dans une forme d’hégémonie idéologique servant l’État et sa répression plutôt que de soutenir les mouvements sociaux. Nous croyons au contraire que la montée de l’extrême droite et la répression policière contre toute forme de contestation nécessitent une résistance tout aussi forte.

Plusieurs tactiques doivent travailler de concert, dans des stratégies communes, au moment opportun. Il y aura certes des débordements qui peuvent être critiqués, ce que nous ne nous sommes pas privés de faire (y compris à Québec le 20 août 2017). Toutefois, ce n’est pas la violence en tant que telle qui doit alors être critiquée, mais son utilisation peu productive ou peu stratégique dans des circonstances données, le cas échéant.

Pour conclure, nous n’acceptons pas que monsieur Fiset s’exprime en notre nom dans les médias, ni d’ailleurs au nom de l’ensemble des antiracistes ou de la cause antiraciste. En tant que spécialiste patenté de l’extrême droite, Maxime Fiset fait pour nous figure d’imposteur. Il ne représente que lui-même et son centre, lequel n’est en fin de compte qu’un porte-voix au service de l’État libéral que nous combattons en même temps que la peste brune et l’extrême-droite.

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