À distribuer dans les écoles, au travail, dans les cafés, sur les barricades, dans les événements et les manifs!
Remplir un extincteur de peinture : guide d’instruction
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Cette vidéo est à des fins éducatives seulement et n’encourage aucune activité illégale. Cliquez sur CC sur l’application vidéo pour voir les sous-titres en français.
Les extincteurs de feu remplis de peinture ont été utiles aux anarchistes de Montréal dans leurs luttes contre la gentrification, la surveillance et, plus récemment, les symboles coloniaux.
1. Voler l’extincteur
Trouvez un extincteur à pression hydraulique. Ils sont en métal argenté et existent en deux formats différents.
Les deux formats sont fermés avec un écrou et peuvent être ouverts sur le dessus.
Le plus grand format est de 9L et a une valve semblable à celle d’un pneu de vélo, ils peuvent donc être facilement re-pressurisés. Ils se trouvent souvent dans les universités, les cégeps et dans les immeubles d’appartements ou de bureaux.
Le plus petit format est de 6L et nécessite un compresseur d’air pour réajuster la pression. Ils se trouvent seulement dans les restaurants et sont souvent placés près des sorties arrières. Pratique!
2. Vider l’extincteur
Portez des gants de coton pour éviter de laisser vos empreintes digitales sur l’extincteur. Videz le liquide de l’extincteur en vous assurant que l’indicateur de pression atteigne 0 psi. Vous pouvez le faire dans une ruelle ou dans votre bain.
3. Remplir avec de la peinture
Enlevez l’écrou et la section du dessus.
Remplissez l’extincteur à moitié avec un mélange moitié eau, moitié peinture de latex.
4. Re-pressuriser
Ré-attachez la section du dessus en vous assurant que le tout soit étanche.
Pour le format de 9L, utilisez une pompe à vélo et faites monter la pressions jusqu’à 100 psi.
Pour le format de 6L, il n’y a pas de valve. Vous devez donc utiliser un compresseur à air, que vous pouvez trouver dans une quincaillerie ou dans la plupart des pawnshops. Retirez la hose et connectez le tube du compresseur en utilisant un adaptateur mâle de 3/8 ».
Réglez le compresseur à 115 psi. Vous n’aurez peut-être même pas besoin d’actionner le détenteur de l’extincteur pour que la pression monte lentement à 100 psi. Si vous le faites, levez l’épingle de sûreté et actionnez le graduellement. Arrêtez dès que la l’indicateur montre 100psi, pour éviter que de la peinture n’entre dans le tube.
Remettez l’épingle de sûreté et fixez-la en utilisant du duct-tape.
5. Nettoyer
Frottez l’extincteur avec un tissu imbibé d’alcool à friction pour enlever toutes les empreintes qui pourraient s’y trouver.
Consultez la page des guides sur Montréal Counter-info pour plus d’idées pour des actions directes : blocages de trains ou d’oléoducs, manifestations, émeutes et plus!
« « La seule raison pour laquelle nous devrions rejoindre la classe supérieure, c’est pour provoquer du désordre, mais certainement pas pour corrompre le graffiti comme certain-e-s le font. Mon but est d’instaurer l’insolence et la violence du graffiti où il ne devrait pas se trouver. Le graffiti est un tout, on ne peut pas seulement prendre les parties qui nous intéressent. Dans ce cas là, vous trouverez ce qui en reste sur les façades de vos magasins »
Une vitrine fracassée à TVA après la manif du 15 mars
De Journal corporatiste légèrement détourné, soumission anonyme à MTL Contre-info
L’édifice de TVA a été la cible d’un acte de vandalisme dans la nuit de jeudi à vendredi [le 16 mars]. Une vitrine donnant sur le boulevard De Maisonneuve a été fracassée. Bon moyen de rappeler que les possibilités d’attaquer n’existent pas qu’en manif, lors desquelles il n’est pas toujours simple d’agir en raison du nombre important de flics.
Peu avant 3 h 30, trois individus encagoulés qui marchaient sur le boulevard ont brisé la vitrine au moyen d’objets contondants, puis ont rapidement quitté les lieux.
Les policiers ignorent pour l’instant si l’incident est lié à la manifestation organisée par le Collectif opposé à la brutalité policière, qui a eu lieu jeudi soir.
Vigile et journée d’action mercredi 28 février 2018 en solidarité avec l’accusé Freddy Stoneypoint, la souveraineté mi’kmaq et la lutte contre les hydrocarbures
Le 28 février 2018 aura lieu la prochaine comparution de Freddy Stoneypoint au palais d’(in)justice de Percé. Les clowns juridiques du génocide perpétué évalueront si les preuves accumulées par le bras armé de l’État québécois au service de Junex sont suffisantes pour que le cirque commence, autrement dit qu’un procès ait lieu. Ces partisans de l’économie de la mort agissent en complète illégitimité sur le territoire souverain mi’kmaq, plus précisément sur le territoire souverain non cédé du 7e district du territoire mi’kmaq comme le stipule la clause protectrice des terres indiennes de la Proclamation royale de 1763.
Le chef traditionnel du 7e district de Mi’kma’ki, territoire souverain du peuple mi’kmaq, Gary Metallic sr., a servi une notice d’entrée par infraction à la compagnie Junex qui ne fait pas l’objet de procès, seul un camarade du peuple mi’kmaq supposément présent dans un blocage historique qui défendait le territoire et qui fut fait à l’invitation de l’autorité traditionnelle est présentement persécuté par la Cour(onne). Gary Metallic a plusieurs fois réaffirmé le refus de son peuple de l’extraction des hydrocarbures. Malgré la souveraineté jamais abandonnée des Mi’kmaq, l’État québécois continue de réprimer les différent.e.s camarades arrêté.e.s en lien avec la lutte contre les hydrocarbures en Gespe’gawa’gi et pour la reconnaissance de la souveraineté mi’kmaq.
En tant que camarades de Freddy Stoneypoint et du peuple mi’kmaq, nous appelons à faire du 28 février une journée de solidarité et d’action pour la pleine et entière libération des accusé.e.s de la cour coloniale, en reconnaissance et résistance pour la souveraineté de Mi’kmaki et des autres territoires autochtones et contre l’extraction des hydrocarbures.
Nous appelons aussi à souligner par cette journée notre pleine solidarité en action avec le Camp de la rivière et le Treaty Truck House against Alton Gas.
Que nous soyons en Gespe’gewa’gi ou ailleurs, continuons à agir en esprit de totale résistance pour la décolonisation, la souveraineté des peuples autochtones et la vie.
Déclaration de Freddy Stoneypoint (traduction française):
En tant qu’homme souverain autochtone de l’Île de la Tortue, mes droits et responsabilités incluent pratiquer des cérémonies et marcher sur la terre avec amour et respect. Je ne suis pas un activiste. Je suis simplement un homme anishnaabe préoccupé par ceux et celles qui sont à naître et la protection des terres et des eaux dont ils/elles dépendent. Je suis très reconnaissant envers les gens de tous les horizons qui ont supporté la bienveillance et la relationnalité que j’entretiens avec le sacré. Miigwetch.
Pour plus d’informations :
Fonds légal pour Freddy Stoneypoint
Appel à une semaine d’action des Comités de défense et de décolonisation des territoires
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Bloquer l’économie extractiviste
Soutenir le Camp de la rivière
Des 24 au 26 novembre prochains, le parti libéral se réunira dans la ville de Québec. Ces farouches partisans de l’économie extractiviste viennent de faire adopter une nouvelle réglementation sur l’exploitation des hydrocarbures qui menace plus que jamais l’eau, la terre et tout ce qui y vit. Leur détermination à favoriser les pétrolières et les minières malgré les désaccords de plus en plus bruyants, démontre que seul un rapport de force conséquent peut interrompre leurs activités. C’est en ce sens que les Comités de défense et de décolonisation des territoires appelons à une semaine d’actions du 24 novembre au 2 décembre pour se rencontrer de nouveau dans la lutte, maintenir la pression et s’attaquer à l’infrastructure de l’économie de la mort.
Depuis que le camp de la Rivière s’est érigé en Gaspésie, au pied de la route menant aux puits de la pétrolière Junex, la ligne est claire : d’un côté, ceux et celles désirant protéger les territoires et de l’autre, ceux voulant les soumettre à une logique d’exploitation. Malgré les menaces d’injonction, un renouveau dans le mouvement de résistance a été généré par les discussions, les rencontres et l’appel à la formation de comité de soutien. La proposition de lier lutte écologiste et décoloniale fait son chemin et engendre de nouvelles possibilités. Tout autant qu’elle adresse des questions brûlantes. Ce qui se passe en Gaspésie, inspire les résistances sur tous les territoires, en plus de nous enseigner le mépris envers les institutions coloniales.
C’est qu’il faut se souvenir qu’une entente temporaire pour l’arrêt des travaux avait été conclue en août dernier sous la pression du conseil traditionnel Mi’kmaq entre les conseils de bande de la région et les pétrolières. Pourtant, Petrolia a reçu l’aval de ces mêmes conseils pour débuter des tests sismiques à proximité d’aires protégés. L’ensemble des institutions coloniales s’allie pour poursuivre leurs œuvres destructrices.
Ainsi, l’annonce de la fin du projet Énergie Est ne fut qu’un court répit pour ceux et celles désirant protéger les territoires. Plus que jamais nous devons miser sur nos propres forces, forger nos liens de solidarité et passer à l’action. C’est pourquoi nous appelons à sortir de nouveau avant que la neige ne vienne voiler les ravages des pétrolières. Sortir, et par tous les moyens nécessaire, ré-habiter les mondes.
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Rapport critique sur la Loi 62 adoptée par l’Assemblée nationale du Québec le 18 octobre 2017
Au cours des derniers jours, vous avez sûrement pris connaissance d’un projet de loi controversé proposé pour le Québec. Le projet de loi 62, qui a pour objectif de protéger la fameuse « neutralité religieuse » de l’État, est la continuation d’un débat politique de longue date sur la laïcité et les accommodements religieux au Québec – un débat visant particulièrement les femmes musulmanes.
Le 18 octobre 2017, le cauchemar devient réalité : le projet de loi, désormais la Loi 62 sur la neutralité religieuse, est adopté par l’Assemblée nationale suite à un vote de 66 contre 511. Ce rapport critique vise à brosser un portrait de cette loi et de ses implications, ainsi que de son historique et de sa place dans un contexte social plus large, notamment en relation au discours islamophobe véhiculé par les principaux partis politiques au Québec, ainsi que dans le contexte de la montée et de la normalisation de la rhétorique et des mobilisations de groupes d’extrême droite islamophobes et anti-immigrants en Amérique du Nord depuis le début de 2017. Nous croyons par ailleurs qu’il est essentiel d’aborder cet enjeu dans une perspective féministe – comme un exemple parmi tant d’autres des restrictions et des contrôles imposés aux femmes, particulièrement les femmes racisées et musulmanes, par l’État.
Obligations et implications de la Loi 62
Abordons d’abord les questions évidentes : que va-t-elle faire, exactement, cette fameuse loi? Quels impacts aura-t-elle sur nos vies? Devrait-on s’en inquiéter? Il est vrai qu’il nous arrive souvent d’aborder les effets de nouvelles lois et régulations sur un ton exagérément sensationnaliste ou catastrophiste. Malheureusement, cette fois-ci, ce n’est pas le cas – et oui, on devrait absolument s’inquiéter. Voici une liste non-exhaustive des contraintes particulièrement inquiétantes qu’introduit la Loi 62:
LOI 62 : OBLIGATIONS ET RESTRICTIONS SAILLANTES2 OBLIGATIONS
(nouvelles contraintes juridiques)RESTRICTIONS
(nouvelles interdictions juridiques)● Avoir le visage découvert lorsqu’on donne ou reçoit un service public;● Toutes municipalités, sociétés de transport, et communautés métropolitaines, ainsi que l’Assemblée nationale, doivent se conformer à cette loi. ● Les voiles intégraux (niqab, burqa), cagoules, bandanas, ou tout autre vêtement recouvrant le visage seront interdits à bord des transports publics et dans les bibliothèques publiques;● Interdiction de recevoir ou de donner des services à visage couvert dans un hôpital, à moins que ce soit nécessaire pour la sécurité ou le bon fonctionnement du service.
Modifiée depuis sa présentation initiale3, la loi précise maintenant que des « accommodements raisonnables » (ou situations d’exceptions), peuvent être envisagées sur demande si ces dernières respectent les conditions suivantes4:
- La demande doit être sérieuse.
- La demande doit respecter le droit à l’égalité entre hommes et femmes (du moins, la définition de l’État de ce concept).
- La demande doit respecter le principe de neutralité religieuse de l’État.
- L’accord de la demande ne poserait pas de « contraintes excessives » quant au respect des droits d’autrui, au fonctionnement du service public en question, aux coûts impliqués et/ou à la santé et la sécurité publiques.
Notons que certains partis d’opposition, dont la Coalition Avenir Québec (CAQ) et le Parti Québécois, ont lutté contre l’adoption de cette loi sous prétexte qu’elle ne va pas assez loin5. Ces deux partis soutiennent que les accommodements raisonnables devraient être complètement interdits6, et ce, même lorsque ces derniers sont demandés pour des raisons de nature religieuse. Si la loi a été contestée par les partis d’opposition et adoptée surtout en raison de la majorité Libérale, c’est principalement parce que certains partis la trouvent trop douce, et non parce qu’ils s’opposent à ses principes de base.
Il faut aussi préciser que la loi n’est pas encore en vigueur. Elle a beau avoir été adoptée par l’Assemblée, la nature du système politique canadien fait en sorte qu’une loi doit recevoir l’approbation finale du lieutenant-gouverneur (qui représente la monarchie britannique) avant de devenir officiellement loi. On dit attendre la décision finale du lieutenant-gouverneur sous peu7.
Contexte historique
Malgré qu’on en entende beaucoup parler récemment, le projet de loi 62 ne date pas d’hier. Il a été présenté initialement à l’Assemblée nationale en juin 2015 (il y a plus de deux ans) par Mme Stéphanie Vallée, Procureure Générale du Québec et ministre responsable de la Condition féminine8. Le projet de loi avait alors comme objectif énoncé de « favoriser la neutralité religieuse de l’État [québécois] ». Mme Vallée s’est prononcée en plus amples détails sur cet objectif au moment du dépôt du projet de loi9 :
« Avec ce projet de loi, nous nous voulons rassembleurs, en consacrant une approche qui fait déjà consensus. Ainsi, nous souhaitons réaffirmer que les services offerts par l’État québécois ne doivent pas être influencés par les croyances religieuses de ses employés ni par celles des personnes à qui ces services sont rendus. De plus, nous proposons le recours à des balises claires et tirées des enseignements des tribunaux pour toute demande d’accommodement religieux dans les services publics. »
Initialement, le projet de loi visait principalement à encadrer les demandes « d’accommodements raisonnables » de nature religieuse et imposait plusieurs restrictions et obligations à la population Québécoise, notamment10:
- Les employé(e)s de services ou organismes publics devaient « faire preuve de neutralité religieuse » au travail;
- Toute personne aurait l’obligation légale d’avoir le visage découvert lorsqu’elle donne ou reçoit un service public, sauf si ladite fonction professionnelle l’oblige à se couvrir le visage (par ex. un(e) médecin s’occupant d’un(e) patient(e) atteinte d’une condition contagieuse);
- Un «accommodement raisonnable » pourrait être envisagé, mais seulement dans des circonstances très particulières.
On retrouve la majorité de ces propositions intactes dans la loi adoptée en date du 18 octobre. Les modifications majeures apportées par la ministre Vallée ont eu pour but principalement d’étendre la portée de la loi, qui s’appliquera maintenant autant aux municipalités et aux services de transport en commun qu’à l’Assemblée nationale, aux hôpitaux et à tout autre service public11. On a également pris la peine d’insister pour que la loi s’applique autant aux militant(e)s masqué(e)s12, par exemple, qu’aux symboles religieux. Hein!? Non seulement cette référence saugrenue aux manifestant(e)s masqué(e)s est-elle une tentative transparente de distancer le projet de loi de ses objectifs énoncés et de son contexte historique antimusulman suite aux critiques formulées à son endroit, elle est en outre parfaitement ridicule. Comment est-ce que cela est censé fonctionner? Les législateurs pensent-ils vraiment que les militant(e)s se rendent régulièrement au bureau de poste, à la clinique ou à la SAAQ masqué(e)s et accoutré(e) pour participer à une manif? On peut raisonnablement en doute. Ici, il est clair qu’on utilise la figure menaçante des militant(e)s masqué(s)s comme point rhétorique pour détourner la critique et faire croire que la loi n’est pas essentiellement sexiste et raciste.
En effet, il faut se rendre compte que la Loi 62 s’inscrit dans un contexte historique plus large – ce débat sur les « accommodements raisonnables » et sur la neutralité religieuse fait rage depuis plus de dix ans au Québec. L’origine de ce prétendu « débat » – qui est en réalité une campagne prolongée d’incitation à la haine raciste – peut être retracée à la fin de l’an 2006, lorsque plusieurs demandes très différentes de personnes de confessions variées se sont vues amalgamées au sein d’un même récit public sur les demandes « non-raisonnables » formulées par des communautés racisées et de confession non chrétienne – des demandes, selon ce récit, trop souvent exaucées par une majorité québécoise par trop généreuse13. Plusieurs forces ont participé à la construction de ce discours problématique. L’empire médiatique Québécor, mené à l’époque par son président et directeur général Pierre-Karl Péladeau – le futur chef du Parti Québécois – s’est en quelque sorte spécialisé dans la recherche d’exemples courants de demandes d’accommodement pour les mettre en vedette à la une de ses journaux presque quotidiennement. Encouragé par cette mise en scène médiatique, Mario Dumont, le chef du parti Action démocratique du Québec, a déclaré que le Québec était une société européenne dont les valeurs sont inspirées de son patrimoine religieux. Il a ensuite accusé le Parti Libéral de se « prosterner » devant les communautés immigrantes et exigé que l’Assemblée nationale adopte mesures visant à renforcer et protéger « l’identité nationale » du Québec et ses précieuses valeurs « traditionnelles ».
Par la suite, le conseil municipal d’Hérouxville (une localité de moins de 1 500 habitants dans la région de la Mauricie) est intervenu de façon décisive en adoptant un ridicule « Code de conduite pour les immigrants », une règlementation raciste fondée sur des stéréotypes relatifs aux communautés religieuses et ethniques marginalisées, particulièrement les communautés musulmanes. Ce « code de conduite » suggérait notamment qu’il est nécessaire de préciser aux immigré(e)s de s’abstenir de pratiques misogynes telles que la mutilation génitale ou la lapidation des femmes. Entre autres, dans sa litanie de stipulations aussi absurdes que condescendantes, le code d’Hérouxville précise que « le seul temps où il est permis de se masquer ou se recouvrir le visage est durant l’Halloween; ceci s’agit d’une coutume religieuse traditionnelle ayant lieu en fin Octobre et célébrant le jour des saints. » Le code précisait aussi que : « le style de vie abandonné par [les immigrants] dans leur pays natal ne peut pas être transplanté avec eux ici. Ils vont devoir s’adapter à leur nouvelle identité sociale. »
Hérouxville à fait les manchettes autour du monde. Sous prétexte de critiquer un gouvernement libéral accusé d’être « mou » à l’égard des immigrant-e-s, les prophètes alarmistes avaient réussi à créer une ambiance de xénophobie raciste généralisée qui allait perdurer jusqu’à aujourd’hui. (Il est intéressant de noter que l’homme derrière la résolution d’Hérouxville, André Drouin, s’est plus tard impliqué dans un groupe d’extrême droite, RISE Canada, mené par Ron Banerjee, est s’est associé pour un temps au groupuscule néofasciste Fédération des Québécois de souche. Cette dernière, suite au décès de Drouin l’an dernier, en a fait l’eulogie en le qualifiant de « courageux combattant » dans son organe de propagande, Le Harfang14.)
Sous la gouverne de Jean Charest, les Libéraux ont tenté d’atténuer cette flambée de racisme en créant une commission itinérante, dirigée par les intellectuels Gérard Bouchard et Charles Taylor, dont l’objectif était de prendre connaissance des inquiétudes de la population et de formuler des recommandations pour gérer la « crise » des demandes d’accommodements raisonnables. La Commission Bouchard-Taylor est plutôt devenue une plateforme où les racistes de partout au Québec ont pu se plaindre des musulmans, des Juifs et des Sikhs (mais surtout des musulmans), tout en légitimant la fiction selon laquelle la population immigrante croissante constituait une sorte de crise à laquelle il fallait impérativement répondre.
Vers la fin de l’été 2007, le Parti québécois a déposé un projet de « Loi sur l’identité québécoise », lequel proposait de retirer le droit de vote dans certaines élections aux personnes qui échoueraient à un test de français et/ou refuseraient de porter allégeance à la nation québécoise. La députée libérale Christine Pelchat, qui présidait alors le Conseil du statut de la femme (un organisme gouvernemental) a demandé au gouvernement d’adopter une réglementation interdisant aux employé-e-s du secteur public des porter des « vêtements religieux », un appel endossé par les dirigeants de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) et du Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ), deux des plus importants syndicats de la province, dans leurs mémoires respectifs à la Commission Bouchard-Taylor, en décembre de la même année.
En effet, il est déplorable de constater qu’une très grande partie de la gauche institutionnelle au Québec n’a pas été capable, ou n’a pas voulu intervenir sérieusement contre la montée du racisme, alors que des segments importants, non seulement du mouvement syndical, mais aussi de Québec Solidaire et d’autres groupe qui se campent normalement « à gauche », se sont laissés entraîner dans le fantasme blanc d’une nation québécoise progressiste assiégée par des forces étrangères hostiles de droite, et ont conséquemment gardé le silence ou carrément appuyé les restrictions aux droits des minorités. C’est principalement à l’extérieur de la gauche institutionnelle, dans une coalition informelle constituée autour du collectif Personne n’est illégal sous la bannière du réseau « Rejetons l’intolérance au Québec », que l’opposition à cette vague raciste s’est organisée15. Bien qu’aucune nouvelle loi n’ait été adoptée suite à cette débâcle, le psychodrame des accommodements raisonnables de 2006-2007 a tout de même servi à mettre en place un certain cadre narratif où l’islamophobie, et en particulier l’obsession avec les choix vestimentaires des femmes musulmanes, est devenu une référence centrale. Même si l’attention médiatique s’est quelque peu atténuée, les mythes et peurs racistes au sujet des musulmans ont continué à progresser, tout juste sous la surface, dans la société québécoise. Surtout, il faut le dire, dans les régions où il y a le moins de résidents musulmans.
Faisons un saut en 2013, quelques mois seulement après que le parti Libéral ait perdu le pouvoir dans la foulée de la plus importante grève étudiante de l’histoire du Québec. L’année 2012 avait été marquée par une progression considérable de la gauche radicale, doublée d’un possible recul important du programme néolibéral au Québec, lorsque des centaines de milliers de personnes étaient descendues dans la rue et que des dizaines de milliers s’étaient battues avec la police sur une base régulière, en défiance de la loi et au risque d’être arrêtées, dans le cadre d’une grève générale contre la hausse des frais d’adhésion à l’université, laquelle était cadrée par une partie du leadership étudiant en termes de lutte des classes et d’anticapitalisme.
Après la défaite des Libéraux, le Parti québécois a pris le pouvoir sous la gouverne de Pauline Marois. Sans perdre de temps, la formation séparatiste a dépoussiéré les thèmes et préoccupations de la crise de 2006-2007 et les a ré-instrumentalisés sous la forme d’une « Charte des valeurs ». Celle-ci proposait d’interdire à tou-t-e-s les employé-e-s du secteur public de porter des « symboles religieux ostentatoires » au travail. Le turban, la kippa et, en particulier, le hijab, la burka et le niqab seraient désormais interdits.
Le « débat entourant la Charte » en 2013-2014 a redonné de l’élan aux forces racistes qui s’étaient défoulées en 2006-2007. Les sympathisant-e-s de la Charte ont organisé des manifestations de dizaines de milliers de personnes où s’illustraient une multitude de thèmes laïcards, féministes, islamophobes et anti-immigration. Bien que Québec Solidaire s’y soit opposé dans sa forme initiale, le parti a tout de même insisté pour indiquer qu’il était lui aussi en faveur d’une modification de la Charte. Des pans importants du mouvement féministe québécois (historiquement le plus fort au Canada) se sont ralliés au projet de Charte des valeurs, alors que des théories du complot se sont mises à circuler voulant que la Fédération des femmes du Québec (qui s’opposait à la Charte) soit financée par l’Arabie saoudite ou l’Iran pour faire avancer la cause « islamiste ». (Pendant ce temps, moins de deux ans après la grève de 2012, très peu d’attention était portée au fait que le PQ faisait à son tour passer une série de mesures d’austérité16)
Le PQ ayant perdu les élections aux mains des Libéraux en avril 2014, la Charte des valeurs est restée lettre morte, mais ce projet législatif avait déclenché une mécanique qui allait s’avérer difficile à arrêter. Les années suivantes ont vu une augmentation régulière de l’organisation islamophobe en ligne, avec la formation de groupes comme PEGIDA Québec, les Insoumis, La Meute et les Soldats d’Odin, dont la plupart donnent l’opposition à « l’Islam radical » comme seule raison d’être. La croissance de telles organisations « venant d’en bas », et la nature de leurs obsessions racistes, sont la conséquence inévitable des campagnes alarmistes et des manœuvres « venant d’en haut », qu’une part importante des médias de masse et de l’establishment politique s’est rendue responsable depuis de nombreuses années.
L’impact dépasse toutefois la croissance de groupes d’extrême droite. Chacune des mobilisations entourant ces lois racistes a inévitablement été accompagnée d’une recrudescence du harcèlement envers les femmes musulmanes voilées. Ces femmes subissent des insultes, des menaces et des attaques verbales et physiques. Elles se font cracher dessus, gifler et, dans de nombreux cas, on tente même d’arracher de force leurs voiles. Pour prendre un exemple récent particulièrement horrible, suite au passage de la Loi 62, un homme blanc de Trois-Rivières s’est senti encouragé à déclarer sur Internet qu’il venait de s’exposer et d’uriner dans la direction de deux femmes musulmanes, précisant qu’il était prêt à les battre ainsi que toute personne qui s’interposerait17. En même temps, des groupes militants ont commencé à recevoir des rapports d’incidents où des femmes musulmanes auraient été harcelées durant des voyages en transport en commun. En décembre 2014, un sondage informel mené auprès de femmes musulmanes au Québec a révélé que 300 répondantes sur 338 avaient subi des agressions verbales durant la période de « débat » entourant la Charte des valeurs. Des travailleuses en garderie musulmanes du quartier Saint-Henri de Montréal ont dit avoir reçu des menaces de mort et de viol lorsqu’une photo où elles portaient le niqab est devenue virale sur Facebook. Des boucheries halal et des mosquées ont été vandalisées. Le lendemain de la défaite du PQ aux élections en 2014, quelqu’un a lance une hache – sur laquelle on avait inscrit « Fuck les Libéraux » et « Nous exterminerons les Musulmans » – par la fenêtre du Centre communautaire islamique Assahaba de Montréal. Plus tard le même jour, quelqu’un en bicyclette a défoncé à coup de batte de baseball les fenêtres de trois voitures stationnées devant une autre mosquée de Montréal, alors que leurs propriétaires faisaient leurs prières du soir. Cette violence antimusulmane a atteint son apogée le 29 janvier 2017, lorsqu’un homme a massacré de sang froid six hommes musulmans et blessé grièvement 19 autres individus au Centre culturel Islamique de Sainte-Foy. Il est d’autant plus abject de constater que cet attentat a ensuite servi d’encouragement aux groupes d’extrême droite islamophobes comme La Meute qui, dès le mois de mars, ont commencé à prendre la rue en plus grand nombre que jamais.
Bien qu’il soit possible que la Loi 62 soit invalidée par les tribunaux, comme l’aurait sans doute été la défunte Charte des valeurs, l’objectif réel de ces manœuvres est de faire passer un message sur qui a sa place au Québec et qui ne l’a pas, sur quelles cultures sont jugées légitimes et lesquelles sont jugées « étrangères ». Dans le contexte actuel, où beaucoup de Québécois et Québécoises se sentent menacé-e-s, non seulement par le néolibéralisme, mais aussi par les transformations démographiques qui se produisent, ces lois cherchent à mettre en place une certaine hiérarchie au Québec, à déterminer qui sera « maître chez-nous » et qui, au contraire, sera « maîtrisé-e ». L’objectif n’est pas nécessairement de constituer une société blanche homogène, ou une société où nous partageons toutes et tous une seule et unique religion, mais plutôt une société où toute personne qui n’est pas un Québécois blanc « de souche » doit, d’une manière ou d’une autre, craindre pour sa sécurité, se sentir à risque et sentir qu’elle est une cible potentielle. La conséquence de cet ordre social imposé (c’est du moins ce qu’espèrent les racistes et les misogynes) est que ces personnes devront vivre dans la soumission et rester « à leur place ».
L’opposition à la Loi 62 : un enjeu fondamentalement féministe, antiraciste et antifasciste
On constate que le texte de la Loi 62 reflète clairement la Charte des valeurs dans ses objectifs comme dans ses impositions – à la différence que cette loi vient d’être adoptée et a une portée beaucoup plus grande. Cette loi est problématique et inquiétante pour de nombreuses raisons. Entre autres, justement, elle ne respecte pas elle-même l’égalité entre hommes et femmes! Ayant comme cible principale la femme musulmane voilée, elle impose notamment des restrictions, des obligations et des contrôles qui s’appliqueront majoritairement et de façon disproportionnée à des femmes. De façon plus générale, il s’agit d’un exemple parmi tant d’autres d’un gouvernement (composé très majoritairement d’hommes blancs, en plus) qui impose à des femmes, majoritairement racisées, des règles et des restrictions par rapport à leur tenue personnelle. Encore une fois, ils ont beau dire que cette loi « s’applique à tout le monde », la réalité est que c’est une loi conçue principalement pour obliger juridiquement un respect de la « neutralité religieuse » de l’État. Il est donc clair que les cibles principales seront des personnes qui se recouvrent le visage pour des raisons religieuses. Peu importe le texte spécifique ou « l’élargissement de la portée » de la loi, en pratique, cette loi vise et désavantage, spécifiquement et explicitement, d’abord et avant tout, les femmes musulmanes voilées.
Cela mène au prochain point. Le concept libéral de la « neutralité de l’État » ne présuppose-t-il pas qu’on ne doit pas imposer nos croyances à autrui? Sans entrer dans tous les enjeux philosophiques et éthiques du principe comme tel, n’est-il pas évident que cette loi enfreint fondamentalement la logique de son propre principe? On peut en conclure que le gouvernement cesse de se préoccuper de son principe de « neutralité » lorsqu’il devient question d’imposer les croyances et les valeurs d’une société québécoise normalisée à des femmes musulmanes et/ou racisées. C’est hypocrite, et la manœuvre est transparente.
Vu dans une optique antifasciste, cette loi a des implications fort dangereuses, surtout étant donné le climat politique que l’on connaît, et encore plus depuis l’élection de Donald Trump à la Présidence américaine et la tuerie dans la mosquée de Sainte-Foy en janvier 2017. En effet, depuis le début de 2017, nous constatons une augmentation marquée et alarmante des mobilisations de plusieurs groupes d’extrême droite Québécois – notamment La Meute, Storm Alliance et les Soldats d’Odin – des groupes islamophobes, racistes et anti-immigration qui seront évidemment encouragés et validés par l’adoption de la Loi 62. L’adoption de cette loi s’inscrit dans un contexte de normalisation de la rhétorique et du discours de ces groupes, au Québec comme ailleurs, particulièrement suite à la campagne électorale et l’élection de Trump. Au Québec, cette normalisation et la montée de l’extrême droite en général se manifestent d’une façon particulière – et spécifiquement antimusulmane – étant donné l’omniprésence d’un discours politique islamophobe, raciste et sexiste, non seulement au sein des groupes d’extrême droite, mais également, et peut-être de façon plus inquiétante encore, dans nos espaces politiques institutionnels ainsi que dans les médias de masse. On voit clairement les conséquences concrètes de la prolifération de ce discours et de la normalisation d’une rhétorique de plus en plus extrême lorsqu’on constate la montée récente des crimes haineux commis envers les musulmans, lorsqu’on se souvient de la violence spectaculaire et meurtrière commise à la mosquée de Sainte-Foy en janvier, et lorsqu’on refuse de qualifier Alexandre Bissonnette de terroriste alors que s’il avait été musulman, on lui aurait imposé cette étiquette sans hésiter.
La dangerosité de cette loi va beaucoup plus loin que ses propres impositions; elle représente une acceptation et un renforcement systémique d’idées haineuses et d’une islamophobie dont les conséquences deviennent de plus en plus graves. En tant que féministes, antiracistes et antifascistes, nous devons nous positionner fermement contre cette loi et la dénoncer à tout prix. Nous devons également démontrer – pas juste en mots, mais en actions – notre solidarité envers les femmes musulmanes pour qui cette loi deviendra bientôt une réalité quotidienne.
Références
[i] http://www.ledevoir.com/politique/quebec/510664/adoption-du-projet-de-loi-62 ; http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/projets-loi/projet-loi-62-41-1.html
[ii] Idem. ; http://www.lapresse.ca/actualites/politique/politique-quebecoise/201710/18/01-5140396-le-projet-de-loi-62-adopte-fini-le-voile-integral-dans-les-autobus.php
[iii] http://www.ledevoir.com/politique/quebec/510664/adoption-du-projet-de-loi-62
[iv] Idem.
[v] Idem. ; http://www.ledevoir.com/politique/quebec/510664/adoption-du-projet-de-loi-62
[vi] http://www.lapresse.ca/actualites/politique/politique-quebecoise/201710/18/01-5140396-le-projet-de-loi-62-adopte-fini-le-voile-integral-dans-les-autobus.php ; https://coalitionavenirquebec.org/fr/presse/neutralite-religieuse-la-caq-abrogera-la-loi-62-et-fera-adopter-une-veritable-charte-de-la-laicite/
[vii] http://www.lapresse.ca/actualites/politique/politique-quebecoise/201710/18/01-5140396-le-projet-de-loi-62-adopte-fini-le-voile-integral-dans-les-autobus.php
[viii] http://www.fil-information.gouv.qc.ca/Pages/Article.aspx?idArticle=2306104597
[ix] Idem.
[x] Idem.
[xi] http://www.ledevoir.com/politique/quebec/510664/adoption-du-projet-de-loi-62 ; http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/projets-loi/projet-loi-62-41-1.html
[xii] http://www.tvanouvelles.ca/2017/10/18/le-projet-de-loi-sur-la-neutralite-religieuse-adopte
[xiv] Le Harfang Vol. 5, #5, juin/juillet 2017. Il est utile de citer intégralement Rémi Tremblay de la FQS, qui décrit assez justement l’impact que Drouin a eu : « Le génie du Code de vie d’Hérouxville ne fut pas d’interdire certaines pratiques liées à l’islam, comme la lapidation, mais bien de faire réaliser à l’ensemble de la province le genre de pratiques qui pourraient fort bien arriver avec ces nouveaux venus provenant de pays où ces pratiques barbares sont us et coutumes. Le but de Drouin ne fut pas l’interdiction dans ce petit village perdu de ces actes barbares, mais bien de réveiller le Québec. Ses détracteurs les moins hostiles parlèrent d’un geste maladroit alors qu’au contraire, ce fut du génie politique. Un petit conseiller municipal sans pouvoir ou influence parvint à faire des pratiques musulmanes le sujet de l’actualité durant des mois. Il ne s’agit pas de maladresse, mais de grand art! »
[xv] http://www.dominionpaper.ca/articles/1589 ; http://solidarityacrossborders.blogspot.ca/2007/02/no-one-is-illegal-montreal-statement-on.html
[xvi] See Partisan #49, « Austérité, racisme, islamophobie : bâtissons notre opposition de classe ! ». http://www.pcr-rcp.ca/fr/3589 « Hausses régressives de divers tarifs (frais de scolarité universitaires, services de garde, électricité) jumelées au maintien des importantes baisses d’impôt consenties aux entreprises par les gouvernements précédents ; coupes systématiques à l’aide sociale, dans la santé et le système d’éducation ; promotion d’un modèle de développement tous bénéfices pour les grandes sociétés minières et pétrolières, au détriment des droits territoriaux des nations autochtones et de l’environnement : la liste est longue et il n’est pas besoin d’en ajouter plus. »
Tu n’iras pas plus loin, Canada!
Soumission anonyme à MTL Counter-info
11 octobre 1869 : Il y a cent quarante ans, des experts du territoire envoyés par la nouvelle confédération canadienne fut confrontée par un groupe de Métis mené par Louis Riel. Les experts avaient été envoyés pour délimiter le nouveau tracé de propriété du Canada, une première étape dans la prise de contrôle du Canada sur les territoires de la Rivière Rouge. Ce groupe de Métis a physiquement arrêté leur travail alors que Riel leur annonçait : « vous n’irez pas plus loin ». Ainsi débuta la rébellion de la Rivière Rouge, un moment inspirant de la longue histoire non-achevée des luttes autochtones pour survivre et combattre le colonialisme et sa violence génocidaire à travers le continent.
Nous sommes des anarchistes non-autochtones et nous avons choisi de commémorer cette importante journée dans l’histoire de la résistance anti-coloniale en vandalisant le monument à la mémoire de John A. MacDonald à la Place du Canada à Montréal. Nous avons peint Ⓐ FUCK 150 DÉCOLONISONS.
2017 est une année marquée par les tentatives du canada pour célébrer ses 150 années d’existence. À travers elles, l’État tente d’accorder aux peuples autochtones une place dans un narratif déformé sur la construction d’une nation bâtie sur des terres volées, une tentative de génocide et l’assimilation. Face au cauchemar colonial en cours, nous ne voyons qu’une avenue possible : décoloniser et en finir avec le canada.
Vivent les peuples autochtones de l’Île Tortue!
Ni frontière, ni état, ni québec, ni canada!
Personne ne sera libre tant que tous.tes ne seront pas libres!
Dans les tranchées: Sabotage d’un oléoduc de Enbridge à Hamilton
Les oléoducs sont une guerre menée par l’insatiable avarice des corporations contre la terre et les vivants. Dans cette lutte, notre détermination s’intensifie à chaque fois que Enbridge lance audacieusement un nouvel assaut; à chaque fois qu’ils font fi des préoccupations et des requêtes des peuples autochtones. À chaque audience en justice. À chaque acte d’intimidation. À chaque mensonge ou prétention fallacieuse à la sécurité et la nécessité. Nous en avons assez.
Alors quand Enbridge a commencé à livrer de nouvelles sections d’oléoduc pour son expansion de la ligne 10, nous avons entrepris de les saboter.
L’Île de la Tortue est traversée de vastes réseaux d’infrastructure pétrolière. Ils sont indéfendables: des opportunités parfaites pour des actions directes effectives, qui ne font de mal à personne sauf aux lignes de fond d’une compagnie pétrolière. C’est dans cet esprit que nous nous sommes retrouvés à faire de longues ballades au clair de lune dans les trenchées d’une emprise fraîchement défrichée pour la ligne 10. À notre gré, nous avons percé des trous de grosseurs diverses dans certaines sections de l’oléoduc, alors que d’autres se voyaient remplies de produits corrosifs.
Ce geste a été mené en solidarité avec les peuples autochtones de la région. Des peuples qui ont été déplacés, menacés et massacrés depuis le débarquement des premiers colons – et qui font toujours face à cette violence, souffrant des conséquences de cette société capitaliste coloniale et des industries qui la font vivre.
Alors – à Enbridge: Vous devrez remplacer toutes les dernières sections de la ligne 10 que vous avez posées jusqu’à maintenant. Nous vous en faisons part car l’environnement nous importe, et que vous ne nous importez pas du tout – tenez vous le pour dit. Pour chaque dollar que vous raflez des mains des peuples autochtones et des gens qui défendeur leurs territoires, nous allons vous en faire payer dix.. #sorrynotsorry
Au public: Il n’en tient qu’à vous de rendre Enbridge imputable de chacun de ses gestes. Ne les laissez pas mettre vos vies en jeu en installant des pipelines, alors même qu’ils savent désormais qu’ils sont compromis. Ne les laissez pas mettre vos vies en jeu avec des pipelines, point.
Et enfin, mais non le moindre, à nos camarades et co-conspirateurs:
Un mémo venant du coeur
Vous aurez besoin 1) d’une bonne perçeuse sans fil, 2) un embout de petite taille en cobalt ou en titante – préférablement avec un point de guidage, et 3) d’huile à coupe (oh l’ironie!)
Avec un certain sens de l’aventure et des responsabilités, mettez vos talents de ninjas furtifs à l’oeuvre en vous installant dans l’emprise. Une fois rendus là, vous serez plus ou moins invisibles de la rue si vous n’avez pas de vêtements fluorescents, parsemés de glitters ou si vous ne déconnez pas trop avec votre lampe frontale. Prenez une respiration, regardez aux alentours, puis faites vous un chemin vers un pipeline vide et percez! Allez-y lentement (pour faire moins de bruit, de réverbération et de friction) et appliquez suffisamment de pression pour voir sortir des copeaux – et poursuivez pour un bon 10 ou 15 minutes. L’huile de coupe vous aidera à refroidir l’embout de la perceuse, la rendant plus efficace.
Amusez-vous, et restez prudents.
Des Anti-fascistes Bloquent L’Extrême Droite À La Frontière
De Sub.media
Le 30 septembre 2017, des anti-fascistes ont convergé vers Lacolle à la frontière canado-américaine pour montrer leur support aux migrants et faire face au groupe d’extrême droite Storm Alliance. Alors que le groupe dit qu’il n’est pas raciste, plusieurs individus dans ses rangs sont des nationalistes blancs et néo-nazis connus.
Le torchon brûle entre La Meute et Storm Alliance!
La Meute et Storm Alliance (SA) sont deux organisations qui prétendent ne pas être racistes, mais dont la raison d’être est l’expression (et la propagation) d’une peur des immigrant-e-s et des Musulman-ne-s, c’est-à-dire d’un « Autre » fantasmé, au Québec. Les deux groupes sont antidémocratiques, hiérarchisés, et se situent à l’extrême droite de l’échiquier politique, dans ce qu’on pourrait appeler un nationalisme populiste. Les deux groupes orientent principalement leur message vers un certain segment relativement homogène de la population générale : les Québécois blancs francophones et conservateurs.
SA et La Meute sont en concurrence pour la même base. Cette concurrence est potentiellement cruciale, autant en ce qui a trait au statut et au capital social qu’à l’argent qui est en jeu, compte tenu des revenus dérivés de la vente de drapeaux, t-shirts, écussons et autres marchandises portant leur emblème respectif.
Pour des raisons découlant de la dynamique entre un groupe plus grand et un groupe plus petit, La Meute insiste auprès de ses membres sur la règle d’« adhésion exclusive » et les décourage de soutenir SA. En tant qu’entité plus modeste, SA n’a évidemment rien à perdre de l’adhésion double et met davantage de l’avant la ligne « unitaire », c’est-à-dire « nous sommes tous dans le même bateau ». En fait, contrairement à La Meute, SA n’a aucun membership officiel, mais seulement des cadres chargés d’organiser les réunions dans chacune des régions et, éventuellement, de mobiliser les gens lors des actions.
La légitimation auprès du public est actuellement une priorité pour La Meute. Il y a une alliance claire entre La Meute et Citoyens au pouvoir (anciennement le Parti des sans-parti), avec à sa tête Bernard « Rambo » Gauthier, lui-même un membre de La Meute[1]. Les membres de La Meute pourraient aussi devenir un bloc d’électeurs important pour le PQ ou la CAQ, selon la direction que prendront ces partis. En fait, en tant que groupe de pression, La Meute restera plus efficace si elle ne s’engage pas auprès d’un parti ou d’un autre et se laisse courtiser par tous.
Compte tenu de cette priorité de légitimation publique, La Meute essaie d’éliminer tout ce qui pourrait s’avérer un handicap politique dans ses propres rangs, tels que les néonazis et autres racistes impénitents. C’est la raison pour laquelle elle s’est dissociée d’un certain nombre d’actions et a « démissionné » son lieutenant anglophone, Shawn Beauvais-MacDonald, après que sa participation à la manifestation suprémaciste de Charlottesvile, en Virginie, ait été largement publicisée.
En tant que challenger, SA est obligée d’adopter une approche de La Meute. Ainsi, malgré son insistance à marteler qu’elle n’est pas raciste et qu’elle ne s’oppose pas à l’immigration pour autant qu’elle « respecte les règles », SA est beaucoup moins frileuse quant à la présence de néonazis et de racistes dans ses rangs.
Toute la relation entre les deux groupes est actuellement définie par cette concurrence asymétrique. La seule collaboration officielle entre les deux groupes a eu lieu le 1er juillet dernier, au chemin Roxham, dans la petite municipalité de Hemmingford. Une soixantaine de membres confondus des deux groupes s’étaient réunis à la frontière Canada/É.-U pour manifester contre « l’immigration illégale ». À ce moment-là, La Meute proposait encore d’assurer la sécurité de tout groupe qui en ferait la demande, partout au Québec, contre la menace antifasciste (une idée évidemment désastreuse pour un groupe qui espère mousser sa légitimité aux yeux du public, et qui a été rapidement et discrètement abandonnée). Face à un nombre équivalent de militants et militantes antiracistes mobilisé-e-s sous la bannière de Solidarité sans frontières, les membres de La Meute portant leurs propres écussons et drapeaux constituaient l’essentiel des troupes de ce qui devait être un événement de Storm Alliance. Dans la foulée, des membres de SA ont exprimé leur insatisfaction que La Meute s’attribue tout le mérite d’un événement qu’elle n’avait même pas organisé. (Malgré un nombre égal de participant-e-s des deux côtés, tout le monde a dû admettre que les antiracistes avaient gagné la bataille en arrivant assez tôt pour stratégiquement occuper la frontière et marginaliser les manifestant-e-s anti-immigration.)
À la fin juillet et au début août, la principale activité publique de La Meute consistait à assurer la sécurité d’André Pitre, un vlogueur inspiré par l’alt-right américaine, lors de sa tournée du Québec. Elle a toutefois été mentionnée dans la presse (souvent en des termes qui ne lui plaisaient pas…) lorsque la présentation de Pitre à Rimouski a été annulée et lorsqu’il s’est avéré que l’intervention de membres de La Meute dans le processus référendaire déclenché à Saint-Apollinaire avait fait pencher le vote contre l’autorisation d’un cimetière musulman dans cette localité. Storm Alliance était complètement absente de ces événements.
Au début du mois d’août, SA a soutenula propositiond’organiser une manifestation au Stade olympique de Montréal, où de nombreux réfugié-e-s étaient temporairement logé-e-s après avoir traversé la frontière. Cette manifestation était ostensiblement organisée par des racistes impénitents proches de Storm Alliance et du Front patriotique du Québec (FPQ), et malgré leurs démentis, l’intention de la démarche était clairement d’aller intimider les réfugié-e-s. Fidèle à sa volonté de faire valoir sa légitimité, et malgré l’enthousiasme initial de plusieurs de ses membres, La Meute s’est rapidement dissociée de la manifestation du 6 août, allant même jusqu’à dire (avec raison) qu’une participation à cet événement ferait passer les gens pour des racistes. Cette volte-face marquait clairement un recul sur l’engagement pris par La Meute plutôt cette année d’assurer la sécurité de tout événement d’extrême droite au Québec, quels qu’en soient les organisateurs ou quelle qu’en soit la raison. Storm Alliance se retrouvait donc isolée avec le FPQ à soutenir un événement raciste qui serait selon toute vraisemblance écrasé par la mobilisation antifasciste, puisque des centaines de personnes avaient indiqué sur Facebook qu’elles participeraient à une contre-manifestation organisée au même endroit par Solidarité sans frontières sous la bannière « Bienvenue aux réfugié-e-s! ». Le chef de Storm Alliance, Dave Tregget, a été humilié lorsque la manifestation a été annulée et qu’il a dû admettre à ses membres que SA ne pourrait pas garantir leur sécurité. Les organisateurs de la manif raciste, allié-e-s de SA, Philippe Gendron et Amber Dawson/Sue Elle/Sue Charbonneau, ont également été humilié-e-s en se voyant forcé-e-s d’annuler l’événement[2].
La Meute a été critiquée par certains et accusée de « trahison » et de « couardise ». Ceci s’est produit à une période où La Meute resserrait encore ses rangs et expulsait des membres occupant des rôles officiels parce qu’ils étaient inscrits au groupe Facebook de Storm Alliance. Voir par exemple le cas de Steven Dumont :
La Meute a annoncé la tenue de sa manifestation du 20 août « en appui à la GRC » en partie pour réaffirmer sa crédibilité en tant que plus grande et plus importante organisation de l’actuelle mouvance nationaliste populiste. Cette manifestation était prévue au lendemain d’une autre manif, également à Québec, soutenue par le Front patriotique du Québec et Storm Alliance, ce qui a donné lieu à de nouvelles plaintes déplorant les « divisions » et le « manque d’unité ». En guise de réponse, La Meute a tenu à préciser qu’elle n’avait rien à voir avec la manifestation du 19 août en raison du risque que des individus violents s’y trouvent et parce que le groupe pourrait être associé à des racistes et des extrémistes dans la mesure où il ne contrôlait pas les pancartes et les slogans. Dans ce contexte, Storm Alliance a répondu du tac au tac en disant que si ses membres étaient libres de participer au rassemblement de La Meute de 20 août, ils ne devaient pas porter l’insigne de SA ou porter des drapeaux ou des signes de l’organisation. Au final, environ 60 personnes ont participé à la manif du 19 (sans opposition). Le consensus semble être que l’événement fut un flop, et plusieurs personnes ont exprimé leur colère dans les médias sociaux.
Deux de ceux qui ont effectivement participé à cette manif ratée du 19 août sont Dave Tregget, le chef de SA, et Éric Venne (ou « Corvus »), le fondateur de La Meute qui avait officiellement quitté l’organisation en janvier dernier (mais qui en fait y était resté associé en tant que membre lambda en liens avec différents clans, tout en consolidant un statut de guru virtuel du mouvement). Les deux bonhommes ont passé la journée à marcher sous la pluie et à jaser comme de vieux compères, et le soir même, Tregget a publié un selfie avec Corvus et annoncé que son mot d’ordre précédent concernant l’emblème du groupe était révoqué : les membres de SA pourraient finalement participer en habits d’apparat, full patch, à la manifestation de La Meute du lendemain. Il semblait qu’un réchauffement se soit opéré « dans l’intérêt commun ».
Impossible de dire comment les choses se seraient déroulées sans la présence des militant-e-s antifascistes le 20 août. Celle-ci était déjà imposante au moment où Tregget et une poignée de membres de SA sont arrivés sur place avec leurs drapeaux; La Meute, elle, était coincée dans le garage sous-terrain, incapable d’en sortir, assiégée par des centaines d’antifascistes bloquant l’entrée principale du garage. Difficile de dire si La Meute a effectivement donné le mot d’ordre de refuser l’entrée du garage aux membres de SA ou si ce refus n’est que la conséquence du sentiment de panique qui secouait le service de sécurité de La Meute à ce moment-là, mais voici ce qui s’est passé. Tregget et ses petits camarades se sont fait revirer de bord sans cérémonie dans des circonstances qui, selon les plaintes exprimées plus tard, « ont mis leurs vies en danger » devant la menace posée par les antifascistes. Une nouvelle trahison de La Meute, comme l’ont relevé de nombreux commentateurs dans les médias sociaux (et pas seulement des membres de La Meute).Tregget se retrouvait dans la pitoyable position de devoir sans cesse répéter à ses fidèles que l’unité était de toute première importance, qu’ils ne devaient pas parler en mal de La Meute et que tout allait éventuellement se raccommoder entre les deux organisations… pour ensuite se faire traiter à répétition comme un petit chef de bazar menant une patente à gosses que même ses « alliés » ne font plus semblant de prendre au sérieux. Pas étonnant que lui et ses copains s’en soient allés directement noyer leur peine dans un bar et suivre l’actionen direct à la télé.
Finalement, quoi qu’il en soit des circonstances ayant mené à cet humiliant rejet le 20 août, il s’avérait quelques jours plus tard que les tensions entre les deux groupes étaient loin d’être résolues. L’amitié retrouvée avec Corvus et la disposition de Tregget à se plier en quatre pour excuser et expliquer les multiples rejets de La Meute ne suffiraient pas. Le 25 août, Éric Venne était expulsé de La Meute, un geste qu’il a qualifié de « claque au visage ». Moins de 48 heures plus tard, il était de retour dans les médias sociaux pour annoncer qu’il était devenu un membre honoraire de Storm Alliance.
Il est peu probable que la dynamique dans laquelle La Meute et Storm Alliance se sont enfermées change de sitôt, à moins que la première abandonne sa quête de légitimité ou que l’autre accepte la position dominante de La Meute. Même sans que les antifascistes n’exploitent activement ces tensions, elles nous avantagent naturellement. Prenons l’exemple de Jean-François Dionne :
Le 30 août, le porte-parole de La Meute, Sylvain Brouillette, a dû dissocier publiquement son groupe de Dionne, qui avait participé à la manif du 20 août en brandissant un drapeau marqué de la croix de fer, un emblème du régime nazi.
Même si Brouillette s’est gardé de nommer Dionne, d’autres membres de La Meute se sont empressés de le faire dans les médias sociaux, en faisant remarquer que Dionne était un membre de Storm Alliance et qu’il avait participé à la manif du 19 août ainsi qu’à l’action à la frontière le 1er juillet. Fidèle à elle-même, en tant que groupe dont le principal intérêt à ce stade-ci est d’accepter dans ses rangs des racistes, des néonazis et n’importe qui d’autre, Storm Alliance a décrit le geste de Dionne comme une simple « erreur » et expliqué que le groupe n’avait pas l’intention d’expulser cet amateur d’iconographie nazie.
Le test ultime pour Storm Alliance viendra le 30 septembre prochain. C’est le jour qu’a choisi le groupe pour coordonner une journée nationale d’action pour faire exacerber la peur et l’hostilité à l’endroit des réfugié-e-s et des immigrant-e-s. Un grand nombre de ces actions auront lieu près de passages frontaliers, à la fois pour des considérations symboliques et pour intimider les personnes qui traverseront la frontière ce jour-là. Dans ce contexte de concurrence ouverte, La Meute a tenu à préciser, dans les médias mainstream ainsi que dans les médias sociaux, qu’elle ne participera pas à la mobilisation du 30 septembre, même si elle n’empêche pas (encore) ses membres d’y participer individuellement. Ainsi, nous verrons le 30 septembre prochain si Storm Alliance peut vraiment mobiliser une foule importante sous sa propre bannière et si elle peut maintenir sa présence sans un gros méchant loup pour la protéger.
Si elle y arrive, une autre question se posera : dans quelle mesure a-t-elle compté sur l’aide de forces plus agressivement racistes, comme le Canadian Nationalist Front, la Northern Guard et d’autres groupuscules ayant annoncé vouloir se mobiliser ce jour-là?
Quelques éléments à garder à l’esprit :
D’abord, pour notre côté : il est naturel que de telles divisions chez nos ennemis nous fassent sourire, et dans la mesure où la pression que nous avons maintenue (le 1er juillet, les 6 et 20 août) n’est pas complètement étrangère à cette situation, il est permis de s’en réjouir. Les antifascistes devraient toutefois garder à l’esprit que les schismes et les conflits ne signalent pas nécessairement un état de confusion ou de désorganisation. Ils peuvent aussi bien être le symptôme d’un moment de clarification pour un mouvement politique. Et ça vaut autant pour nos ennemis que pour nous-mêmes.
Nous traversons actuellement une série de crises contribuant aux contradictions sous-jacentes à la croissance de l’extrême droite et du racisme. Bien que les difficultés organisationnelles de nos ennemis soient dignes de mention (et méritent qu’on les exploite!), elles ne représentent d’aucune façon une victoire pour nous.
Et pour l’autre côté : si vous êtes un membre de La Meute ou de Storm Alliance, il est fort probable que vous cultiviez une piètre opinion des « antifas » qui, selon le mythe complotiste en vogue, vivent dans le luxe et préparent en secret le génocide blanc sous l’égide complice de George Soros. Si vous n’êtes sincèrement pas racistes, toutefois, vous devez certainement vous poser un certain nombre de questions. Tôt ou tard, vous vous rendrez bien compte que ce qu’on vous a raconté à notre sujet relève du mensonge et qu’en réalité, les problèmes qui gangrènent cette société —comme le sous-financement des services aux aîné-e-s, un système de santé en déroute, des compressions de tous bords tous côtés, et nous savons tous et toutes très bien que la pourriture va beaucoup plus loin que ça— ne seront pas réglés en blâmant les immigrant-e-s, les musulman-e-s ou qui que ce soit d’autre, puisque le problème fondamental est le néolibéralisme et le système capitaliste et non pas une partie de la classe ouvrière qui ne vous ressemble pas ou ne prie pas de la même manière que vous.
Qui sait, peut-être que vous nous rejoindrez quand vous aurez compris cela. Mais en attendant, nous sommes persuadés que bon nombre d’entre vous sont irrités par ces chicanes entre « chefs » et organisations. Nous serions ravi-e-s de savoir ce que vous en pensez! Nous avons vraiment apprécié les renseignements que certain-e-s d’entre vous nous ont communiqués récemment. N’hésitez pas à nous faire savoir ce qui se passe dans vos groupes et à quel point ils sont administrés en broche à foin! Anonymat garanti! (C’est même pas une blague.)
[1] http://www.journaldequebec.com/2017/08/11/bernard-rambo-gauthier-membre-de-la-meute
[2] https://montreal-antifasciste.info/fr/2017/08/07/6-aout-2017-plantage-epique-des-racistes-a-montreal/