Montréal Contre-information
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Fév 282020
 

De Montréal Antifasciste

Tiohtià:ke (Montréal), le 27 février 2020 – Montréal Antifasciste tient à déclarer sa solidarité inconditionnelle avec la résistance continue de la nation wet’suwet’en contre le colonialisme canadien, ainsi qu’avec toutes les personnes qui ont entrepris des actions en appui aux Wet’suwet’en suite à l’invasion de leur territoire par la GRC le 6 février 2020. De toutes les barricades érigées au cours des dernières semaines d’un bout à l’autre du pays illégal qu’on nomme « Canada », nous voulons tout particulièrement saluer les campements installés sur les voies ferrées par des membres de la nation Mohawk à Tyendinaga – que la police coloniale a attaqué le 24 février 2010 – et à Kahnawake – qui est sous la menace d’une autre injonction coloniale au moment d’écrire ces lignes.

En tant que groupe antifasciste en lutte contre l’extrême droite, nous sommes bien souvent amené·e·s à braquer les projecteurs sur des individus que la société dominante ne considère au mieux que comme des ratés marginaux. Mais nous ne perdons jamais de vue en menant ce travail rebutant que le fascisme est, et a toujours été, intimement lié au colonialisme. Le poète Aimé Césaire a d’ailleurs judicieusement fait remarquer, au sujet de la montée d’Hitler, que les crimes du régime nazi n’étaient qu’un redéploiement en Europe des procédés employés par les puissances européennes partout contre les peuples colonisés. Cette observation s’applique certainement aussi au Canada, où l’extrême droite est ancrée dans la longue histoire de violence coloniale déployée contre des peuples opprimés aux quatre coins de la planète, et en premier lieu contre les premiers peuples des territoires que nous occupons.

Relevons au passage le rôle des militants d’extrême droite qui tentent de constituer des groupes de vengeurs populaires pour attaquer les barricades, comme cela s’est produit à Edmonton le 19 février 2020. La rhétorique vindicative s’épanche librement dans les médias sociaux, où des hordes de réactionnaires profèrent des menaces de violence à longueur de journée. Nous n’avons pas oublié 1990, lorsque des ex-policiers se sont alliés à des personnalités médiatiques de droite et ont mis sur pied des groupes de citoyens vengeurs pour terroriser des autochtones – en particulier les Mohawks – en collaboration avec un groupuscule du KKK implanté au Québec. C’est en gardant toujours à l’esprit cet énorme potentiel de racisme et de violence à la canadienne que nous définissons notre antifascisme et notre anticolonialisme.

Celles et ceux d’entre nous qui sont des colon·e·s connaissent bien leur position. Ne nous leurrons pas : la « gauche » dans ce pays, comme dans toutes les colonies de peuplement, s’est souvent compromise dans l’histoire coloniale et faite complice du colonialisme. C’estt un héritage que nous devons nous engager à combattre dans nos propres rangs. Lorsque les rêves d’un Québec socialiste indépendant se fondent sur la construction anticipée de barrages hydroélectriques en terres autochtones, lorsqu’on évoque une « tradition progressiste canadienne » qui ne s’est jamais vraiment montrée incompatible avec le génocide, ou lorsqu’un gouvernement provincial NPD lâche la police coloniale contre les protectrices et protecteurs du territoire, nous devons afficher clairement notre dissidence. Rappelons-nous encore qu’en 1990, une partie de « la gauche » s’était ralliée contre les Mohawks, tandis que d’autres renvoyaient dos à dos la Warrior Society et l’État canadien comme étant « également criminels ». Là encore, nous rejetons franchement cet héritage.

Celles et ceux d’entre-nous qui sont des colon·e·s vivant sur des terres autochtones jamais cédées doivent s’efforcer de mieux comprendre les responsabilités qui leur incombent, de se montrer à la hauteur de ces responsabilités – tout en appelant nos camarades et différentes communautés à incarner leur solidarité avec la résistance anticoloniale – et d’apprendre à faire leur part pour saborder le génocide qui se poursuit aujourd’hui sur ces terres.

En solidarité complète avec la résistance autochtone!
Contre le fascisme; Contre le Colonialisme!