Montréal Contre-information
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Fév 252020
 

Soumission anonyme à North Shore Counter-Info

LA RÉCONCILIATION EST MORTE

par tawinikay
(aka Southern Wind Woman)

La réconciliation est morte. Elle est morte depuis un certain temps.

Si une seule chose m’a apporté de la joie ces dernières semaines, c’est ce qui a commencé lorsque les matriarches de Unist’ot’en ont brûlé le drapeau canadien et ont déclaré la réconciliation morte. Comme une traînée de poudre, cette déclaration a traversé le cœur des jeunes aux travers des territoires. De leur bouche, les dents dénudées, ils ont fait écho : “la réconciliation est morte ! la réconciliation est morte !” Leurs yeux sont plus aiguisés à percevoir une vérité que beaucoup de nos aînés ont été trop timides pour nommer. L’ère Trudeau de la réconciliation a été une farce dès le début. Elle a toujours été plutôt destinée aux colons canadiens qu’aux autochtones.

“La réconciliation est morte” est un cri de guerre.

Cela signifie que la pression pour respecter notre part du marché est terminée. La jeune génération a jeté les menottes au sol. Nous entrons peut-être dans une nouvelle ère, où le militantisme remplace la négociation et la contestation juridique. Une époque où nous commençons à nous soucier moins du jugement juridique et moral du colonisateur et plus de nos responsabilités.

Critiquer la réconciliation, ce n’est pas faire honte aux anciens et aux personnes qui ont participé à la Commission Vérité et Réconciliation, c’est attaquer un gouvernement qui a profité de ce moment de vulnérabilité pour renforcer son image globale. Je l’ai déjà dit et je le répète, je ne blâme pas notre génération âgée d’espérer un avenir plus pacifique. Ceux qui ont vécu l’horreur des pensionnats et le scoop des années 60, les jours d’autorisation de circuler et les abattages de chiens de traîneau ne pouvaient que souhaiter une vie meilleure pour les générations à venir. Il est de la responsabilité de ces jeunes générations de se lever et de dire que ce qui leur est offert n’est pas suffisant. C’est à nous de dire que nous préférons encore cent ans de lutte plutôt que d’accepter la douce assimilation qui nous est offerte. C’est à nous de remercier nos aînés pour leur service et de nous tourner ensuite vers les lignes de front avec nos plumes, nos tambours et nos poings.

Parce que les idées seules ne changent rien. C’est un mensonge libéral. Il faut que les mots soient supportés par l’action pour faire la différence. Cette action doit être entreprise ensemble. Ni les idées ni la pratique ne sont créées par les individus. Tout ce qui est écrit ici est le résultat de discussions et d’interactions avec d’autres défenseurs des terres, des amoureux, des anarchistes, des mères, des enfants et des résistants. Nous devons être responsables de ce que nous disons tout en reconnaissant que le savoir est créé par les communautés. Il faut toujours voir les choses de cette façon afin de subvertir la hiérarchie, de ne jamais permettre qu’une personne soit élevée au-dessus d’une autre.

Ce qui est écrit ici vous appartient donc à tous. Prenez-le et faites-en ce que vous voulez.
Discutez. Défendez-le. Dénoncez-le. Faites-en votre affaire.

Oubliez les règles.

Le Canada est un État colonial. Il existe pour gouverner un territoire et gérer les ressources de ce territoire. Ce n’est ni plus ni moins que ça. Il a fait un excellent travail afin de convaincre ses citoyens qu’il défend quelque chose, quelque chose de bon. C’est ainsi qu’il maintient sa légitimité. Le mythe national de la politesse et de la civilité gagne le soutien des électeurs. Il a été soigneusement construit au fil du temps et il peut être déconstruit. En fait, les règles du Canada changent tout le temps. J’écrirais bien davantage à ce sujet, mais la vérité est que je ne pourrais pas faire mieux que ce que j’ai récemment découvert en ligne. @Pow_pow_pow_power a récemment écrit ce qui suit :

Les gouvernements des colons ont inventé les règles au fur et à mesure depuis le début de leurs invasions. Alors que chaque génération lutte pour s’éduquer au respect des règles, ils les ignorent et font ce qu’ils veulent quand ils veulent. Cela ne devrait pas être une surprise. Il en a toujours été ainsi parce qu’ils se placent au-dessus de tout – des autres personnes, de nos frères et soeurs animaux, de l’équilibre de la nature et certainement de “ce qui est juste”. Les lois ont toujours été adoptées pour légitimer leurs caprices et leurs intérêts en tant qu’intentions de dirigeants apparemment rationnels, et pour nous garder soumis à leurs besoins.

Nous vivons actuellement à une époque où nos structures impérialistes se sont montrées très soucieuses de paraître ordonnées et civilisées aux yeux des autres régimes de pouvoir afin de cultiver un sentiment de supériorité. C’est pourquoi la violence à laquelle nous nous sommes habitués ne prend plus la forme de massacres, de tortures publiques et d’exils, mais de raids nocturnes et de disparitions, de criminalisations et de l’enfermement dans des systèmes de négligence. Elle est devenue plus dépendante de la violence structurelle et de l’effacement que de la violence directe, et donc plus insidieuse. L’insidieux est plus efficace et plus difficile à identifier comme source d’injustice.

C’est pourquoi, lorsque nous les abordons, dans la légalité, la paix, la rationalité, l’équité et la douceur, avec autant de grâce et de calme que possible, nous sommes facilement rejetés avec des sourires blancs polis de “meilleures intentions”, de “regrets les plus profonds” et de “nous faisons de notre mieux”, en fait “nous faisons mieux que la plupart”. Et lorsque nous insistons, plus fermement, plus passionnément, plus justement, la réponse des gouvernements des colons est aussi claire que nous le voyons maintenant : “Pourquoi ne pouvez-vous pas simplement obéir ?”

Les Canadiens veulent croire que la violence coloniale est une chose du passé, donc le gouvernement la leur cache. C’est pourquoi la GRC n’autorise pas les journalistes à les filmer alors qu’ils lancent leurs chiens sur les femmes qui défendent leurs terres. C’est pourquoi ils s’en tireront à bon compte.

Le temps est venu d’arrêter de chercher la justice dans le droit des colons.

Pour les peuples autochtones du Canada, il est impossible d’éviter la violence que nous inflige l’État. Lorsque nous levons le poing et que nous ripostons, c’est toujours un acte d’autodéfense. Toujours. S’engager dans la non-violence ou le pacifisme face à un ennemi violent est une chose dangereuse. Pourtant, essayer d’éviter d’utiliser la violence jusqu’à ce que cela soit absolument nécessaire est un principe noble. Un principe qui porte en lui le plus d’espoir pour un nouvel avenir. Mais que signifie la violence pour l’État colonisateur ?

Pour eux, prendre d’assaut un territoire avec des armes à feu et en retirer ses occupants légitimes, ça, ce n’est pas violent. Raser les sommets des montagnes ou les forêts coupées à blanc, ou aspirer le pétrole du sol pour ensuite le brûler dans l’air, ce n’est pas violent. Confiner des poulets, des cochons et des vaches dans de minuscules caisses, sans leur permettre de voir la lumière du soleil, en les utilisant comme des machines à manger, ce n’est pas violent.

Mais briser une fenêtre d’un bureau du gouvernement…
Cela va trop loin.

Il est temps que nous voyions leurs lois pour ce qu’elles sont : imaginaires et hypocrites. Les lois sur les colons existent pour protéger les colons. Nous ne sommes pas des colons. Nous sommes Michif. Nous sommes Anishinaabek. Nous sommes Onkwehón. Nous sommes Nêhiyawak. Nous sommes Omàmiwininì. Nous sommes Inuits. Nous sommes Wet’suwet’en. Alors pourquoi continuons-nous à faire appel à leurs lois pour notre légitimité ?

À chaque fois, les communautés dépensent des centaines de milliers de dollars pour contester les droits fonciers. La Première nation Chippewa of the Thames a utilisé l’argent gagné dans le cadre d’une revendication territoriale pour lancer une contestation judiciaire contre le Canada disant qu’ils n’ont jamais été consultés de manière appropriée, et qu’ils n’ont pas consenti à ce que le pipeline de la ligne 9 traverse leur territoire. La Cour suprême s’est prononcée contre eux, affirmant que les peuples autochtones n’ont pas le droit de dire non à des projets industriels sur leurs territoires. La ligne 9 est toujours opérationnelle. Les Wet’suwet’en ont sans doute remporté la plus importante contestation judiciaire de l’histoire du Canada. Le verdict Delgamuukw a vu les tribunaux reconnaître que le territoire des We’suwet’en n’est pas cédé, qu’ils détiennent le titre et la juridiction légale, et pourtant, regardez comment le Canada honore cela. Ce n’est pas avec des victoires juridiques que nous gagnerons notre terre et notre dignité. Le Canada se soucie aussi peu du droit canadien que du droit autochtone…

Il en va de même pour les Nations unies et leur précieuse UNDRIP. Nous avons vu que l’État adoptera les principes de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones (UNDRIP) et les interprétera en fonction de leurs besoins. Ce document stipule que les gouvernements et les entreprises doivent obtenir un consentement préalable, libre et éclairé pour s’engager dans des projets sur leurs territoires. La Colombie-Britannique l’a adopté et, pourtant, proclame que cela ne signifie pas qu’ils doivent obtenir le consentement des Wet’suwet’en. Le consentement ne signifiera jamais réellement le droit de dire non. Et l’ONU n’a aucun moyen de le faire respecter.

Le temps est passé pour les contestations judiciaires devant leurs tribunaux qui ne font que drainer nos ressources et nous ralentir. Je rends hommage aux parents et aux ancêtres qui ont tenté de trouver une solution pacifique, qui ont fait confiance aux bonnes intentions des autres humains. Mais les colons ont prouvé que les options pacifiques qu’ils nous ont offertes sont des mensonges. Trompez-nous une fois, honte à vous.

Il ne s’agit plus seulement d’Unist’ot’en.

Il s’agit de nous tous. D’un jour à l’autre, la GRC pourrait tenter d’intervenir et d’expulser le blocus ferroviaire de Tyendinaga. Je suis solidaire avec eux autant qu’avec les Wet’suwet’en. Il ne s’agit pas seulement de faire reculer le gouvernement et ses hommes de main militarisés à Unist’ot’en et Gitdum’ten, il s’agit aussi de les amener à desserrer leur emprise sur nous tous. Il s’agit de proclamer la mort de la réconciliation et de reprendre notre pouvoir.

Cela ne veut pas dire que nous devons oublier Unist’ot’en et les abandonner au moment où ils ont le plus besoin de nous. Il s’agit d’une proposition visant à élargir notre champ d’action afin que nous ne perdions pas notre élan vers l’avant si ce qui se passe à l’Ouest ne répond pas à nos rêves les plus fous. Il s’agit d’élaborer un récit plus fort.

Cela signifie que nous devrions réfléchir avant de prétendre que les Wet’suwet’en ont le droit à leur terre parce qu’elle n’est pas cédée. N’avons-nous pas tous droit à la terre volée à nos ancêtres ? Pour qu’une terre soit non cédée, cela signifie qu’elle n’a jamais été vendue, cédée ou perdue par conquête. La Proclamation royale de 1763 a exhorté le Canada et le Dominion à ne s’approprier des terres que par la conclusion d’un traité. C’est ce que les agents du Canada ont entrepris de faire. Ils ont continué à conclure des traités sur tout le continent, parfois en mentant sur le contenu des traités à des ancêtres qui ne parlaient pas anglais, parfois en trouvant celui qui signerait le traité sans se soucier de savoir si cette personne agissait avec le soutien de la communauté. Après la signature du dernier traité, le Canada a interdit aux Indiens d’engager des avocats pour contester les revendications territoriales. Et ils ont ensuite volé le reste de ce qu’ils voulaient. Ils ont continué à inonder les terres avec des colons jusqu’à ce que les peuples autochtones ne disposent plus que de 0,2 % des terres qu’ils protégeaient et sur lesquelles ils vivaient.

Je n’ai que faire d’en appeler à la légitimité d’un territoire non-cédé. Toutes les terres ont été volées. Le Canada ne possède de juridiction sur aucune de celles-ci, parce que tous les accords conclus pour les acquérir ont depuis été brisés.

On peut adresser la même critique à l’idée que la gouvernance héréditaire est le seul vrai leadership des peuples autochtones. Je ne suis pas pour les conseils de bandes. Mais c’est important de comprendre que plusieurs de nos relations ont perdu le système héréditaire qui nous a jadis aidés à bien vivre. Nous devrons raviver notre gouvernance. Nous pouvons nous inspirer des formes du passé et nous pouvons aussi en inventer de nouvelles. Toutes les formes d’organisation choisies librement sont légitimes. Notre légitimité ne sort pas de la bouche de nos leaders, mais elle réside dans notre connexion au territoire et à l’eau, ainsi que dans notre engagement à nos responsabilités envers toute la vie, celle d’aujourd’hui comme celle des générations à venir.

Tout ceci peut constituer une bonne chose, si nous l’acceptons ainsi. C’est insensé de croire que nous n’avons pas changé et évolué en 300 ans. De toute façon, nos systèmes se seraient transformés. Voilà une opportunité de combiner de nouvelles et belles idées avec les traditions et les cérémonies ancestrales des anciens, des communautés spirituelles où la hiérarchie est subvertie et le genre est libéré!

C’est le moment de tout renverser.

Le Canada a toujours eu peur que prenions notre pouvoir en mains. La réconciliation a été une distraction, une carotte agitée devant notre nez, une ruse pour que nous nous comportions bien. Le moment est venu de leur montrer à quel point nous voyons clair. Être déterminés et assurés ne veut pas dire ne pas avoir peur. Les temps qui arrivent sont dangereux. Dire : « Je n’obéirai pas », c’est dangereux.

La première chose à faire est d’arrêter de nous poignarder dans le dos entre nous. Siégez au conseil de bande si vous le voulez, mais que ça ne vous monte pas à la tête. Ne vous percevez jamais plus qu’un serviteur, un distributeur d’argent et quelqu’un qui fait respecter la loi. Ce n’est pas parce que vous êtes élu que vous avez gagné le respect de votre communauté. Ça ne fait pas de vous un aîné. Laissez-moi prendre le temps de lancer un gigantesque fuck you aux nations Métis qui ont signé les accords de pipeline parce qu’elles étaient si heureuses que le gouvernement les considère autochtones. Les Métis n’ont pas de droits de territoire en Ontario et continuent de signer des accords comme si c’était le cas, en poussant les nations autochtones qui ont réellement un territoire à se jeter sous un train. Laissez-moi étendre ce « fuck you » aux nations autochtones qui ont signé les accords de pipeline et restent en silence alors que leurs relations se font attaquer pour protéger l’eau. Ou encore pire, qui donnent des entrevues avec des lobbyistes pro-pétrole et des médias conservateurs en dénigrant les défenseurs de la terre dans leur entourage. Ne voient-ils pas comment les Canadiens dévorent leurs mots et salivent en constatant notre division, et l’utilisent pour dénigrer notre manière de vivre? Je n’excuse pas les attaques contre nos pairs qui ont perdu le chemin rouge, mais nous devons trouver une façon de les rallier à nous. Tout le monde n’est pas obligé d’être sur la ligne de front dans sa communauté, mais on devrait au moins refuser de coopérer avec le gouvernement colonial et les entreprises à son service.

La deuxième chose que nous devons faire, c’est agir. Mais nous ne devons pas nous limiter aux actions qui demandent le retrait policier du territoire Wet’suwet’en. Le gouvernement fédéral mène le bal; pas seulement à Unist’ot’en mais à tous les niveaux où des autochtones sont opprimés à travers le territoire. Toute attaque contre l’État canadien est une action de solidarité. Solidarité encore, toute affirmation de la souveraineté autochtone.

C’est le moment de commencer l’occupation dont vous rêvez.

Un bout de votre territoire a été annexé? Reprenez-le. Un nouveau pipeline doit être construit dans votre cour? Bloquez le chemin. Des propriétaires de chalets souillent le lac près de votre communauté? Donnez-leur un avis d’expulsion et installez un campement. Sabotez les fermes aquacoles qui tuent les saumons. Détruisez le barrage qui bloque la rivière. Jouez avec le feu.

Lorsqu’on canalise tous nos espoirs et nos rêves de lutte vers un même endroit, on va tout droit à l’épuisement avec le cœur brisé. Luttons pour le peuple Wet’suwet’en, oui! Mais honorons leur courage et leurs actes en les laissant nous inspirer à faire de même. Luttons pour eux en luttant pour le manoomin, les milieux humides et les grizzlis.

Choisissez bien vos complices. Les libéraux qui reconnaissent qu’ils sont en terres volées ont souvent trop investi dans ce système pour le voir changer réellement. Les communistes imaginent un système sans un Canada capitaliste, mais ils veulent un État communiste, qui aura inévitablement besoin de contrôler le territoire et de l’exploiter. Construisez des liens de confiance avec des ceux qui veulent la destruction de l’État pour que des communautés autonomes prennent place et pour restaurer l’équilibre entre les humains et toutes nos relations. Choisissez ceux qui écoutent plus qu’ils ne parlent, mais pas ceux qui feront tout ce que vous leur direz sans réfléchir. Ceux-là sont motivés par la culpabilité. Trouvez ceux dont le feu intérieur brûle pour un monde plus sauvage et plus juste. La plupart sont anarchistes, mais pas tous. Et tous les anarchistes n’ont pas un bon esprit.

La création d’un champ de bataille à plusieurs fronts divisera leurs énergies. Les blocages de chemins de fer fonctionnent! Si les sabotages ferroviaires nocturnes, les fils de cuivre et les blocages continuent et se multiplient, cela entraînera l’arrêt de tout le trafic ferroviaire dans cette terrible économie. Plus il y en aura, mieux ce sera. Ne le faites pas que pour les Wet’suwet’en, faites-le pour les rivières et les cours d’eau qui sillonnent sous les rails. Faites-le pour les ancêtres qui ont vu ces chemins de fer envahissants annoncer leur disparition.

Et comme le dit cette critique venant de Montréal : ne vous organisez pas en vue d’une arrestation intentionnelle et symbolique.

S’ils viennent exécuter une injonction, déplacez-vous vers une autre partie du chemin de fer.
S’ils arrivent avec une deuxième injonction, bloquez l’autoroute la plus importante dans les environs.
S’ils arrivent avec une troisième injonction, déplacez-vous vers le port le plus proche.
Restez en liberté et soyez féroce. Les gens d’Unist’ot’en et de Gidum’ten n’ont pas eu cette option, mais vous, vous l’avez. Anticipez leur prochaine intervention et gardez une longueur d’avance.

C’est un moment parmi bien d’autres. Nos ancêtres ont été habiles, parfois dans l’attente silencieuse, parfois en luttant, tout en continuant de transmettre secrètement nos cérémonies et nos histoires. Je les honore autant que je vous honore maintenant. Nous sommes encore ici grâce à eux, et nos enfants et nos petits-enfants seront encore là grâce à nous. N’oublions jamais qui nous sommes. Luttons avec cérémonie.

Je suppose que ceci est une proposition d’adopter une stratégie d’anarchisme autochtone, ici, sur l’Ile de la Tortue. Un rejet des tactiques qui demandent des choses à des gens puissants et un retour à la fabrication d’une multitude de solutions locales et diverses. C’est un rejet du style d’organisation à la Idle No More. Ne reproduisons pas les erreurs du passé (pour une critique détaillée d’INM, voir https://warriorpublications.wordpress.com/2012/12/12/idle-no-more-speak-for-yourself/ , et pendant que vous y êtes, lisez tout le reste). C’est un appel à choisir nos propres leaders et à créer une gouvernance qui refuse la hiérarchie. C’est une demande qu’on rejette la réconciliation et qu’on aille vers une revendication militante. L’idée d’un anarchisme autochtone est encore jeune. Écrivez-moi à ce sujet.

Ceci est un de nos moments. Faisons en sorte que ce ne soit pas qu’une demande de quitter Unist’ot’en, mais une demande de quitter tout le territoire. L’idée n’est pas que CGL cesse de faire de l’argent, mais de dénoncer le rôle même de l’argent. Ce moment parle de la colonisation partout. Ce moment nous concerne tous.

Aux colons qui vont inévitablement lire ce texte.

Ce qui est écrit ici vous concerne aussi. Pas dans le sens de : « Soulevez-vous et reprenez vos terres ». Ça, ça a déjà été fait.

Mais je lis les messages des récits d’actions et les médias, et je vous vois tomber dans toutes sortes de vieux pièges. Vous n’êtes pas seulement un rouage dans la machine de la solidarité. Vous pouvez aussi entreprendre des luttes dans votre ville. Souvenez-vous du Two Row: vous pouvez mener des batailles parallèles vers les mêmes objectifs.

J’ai entendu plusieurs aînés dire que nous ne gagnerons pas cette bataille seuls, et c’est certainement vrai. Merci pour les façons dont vous avez attaqué l’économie et l’État. Merci d’avoir répondu à l’appel. Maintenant, prenez ces réflexions et faites-en ce qui vous plaira.

Vous aussi devriez chercher des moyens de défendre le territoire et l’eau là où vous vivez. Chercher les manières de miner et d’affaiblir le pouvoir du gouvernement sur ces terres. Ne vous découragez pas si la GRC ne quitte pas Unist’ot’en. Ce n’est qu’une bataille parmi d’autres. Ce n’est qu’un début. Ne tombez pas dans le piège de faire appel aux lois canadiennes ou internationales.

Voyez-vous tels que vous êtes, telle qu’est votre communauté. Agissez de manière à créer un monde où la réconciliation est possible, un monde dans lequel les vôtres redonnent les terres et vous démantelez l’État canadien centralisé. Ne romantisez pas les autochtones avec qui vous vous organisez. Ne croyez pas que vous ne pouvez pas questionner leur jugement, ou choisir de vous organiser avec certains plutôt que d’autres. Trouvez ceux qui gardent une flamme vive dans le cœur, ceux qui préfèrent continuer à lutter plutôt qu’accepter la carotte de la réconciliation. N’agissez jamais par culpabilité et par honte.

Et ne vous laissez pas croire que vous pouvez transcender votre colonialisme en faisant du travail de solidarité. Comprenez que vous pouvez et devez trouver vos propres façons de vous connecter à ce territoire. À partir de vos propres traditions, héritées ou créées par vous-mêmes.

Imprimez ce zine et distribuez-le à vos compagnons autochtones [PDFs ci-dessous].
Prenez des risques. Rêvez grand. Poursuivez l’anarchie. Restez humbles.

CE ZINE A ÉTÉ PUBLIÉ PAR APHIKONA DISTRO
Contactez-les à aphikonadistro@riseup.net

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