Montréal Contre-information
Montréal Contre-information
Montréal Contre-information

mtlcounter-info

Nov 232014
 

Depuis Anarchist News

Depuis quelques années, le quartier de St. Henri subit des changements importants: lors d’une promenade sur la rue Notre-Dame, des nouveaux restos gourmands, des magasins des vêtements de mode, des galeries d’art, et des «drinkeries» accueillant les residents des condos qui bordent le canal, et remplaçant des marchés aux puces et des magasins d’aubaines.

Bien que l’embourgoisement du quartier se fait par plus que des nouvelles entreprises et des belle vitrines, nous avons decidé de rendre notre degôut avec celle-ci en vandalisant deux entreprises exemplaires avec des extincteurs de feu remplis de peinture. L’un est le barbier Notorious, avec les patrons fiers de porter des ensembles de Versace, qui offre des services comme le rasage doré à $1000; l’autre est Campanelli, un magasin de mode haut-de-gamme et café bourg qui tient également un muraille de Louis Cyr, ancien flic et figure «héroique» dans l’histoire du quartier. Connu comme «strongman», il travaillait pour les services policiers afin de pacifier le Village des Tanneries, où se trouve Campanelli aujourd’hui. Cyr n’était pas capable d’imposer la loi et l’ordre, et a été battu et envoyé du quartier. Le choix de la part de Campanelli de glorifier cette figure est un indice de comment cette entreprise se voit dans le quartier, et est un exemple de la manière que l’histoire des quartiers populaires se déforment pour effacer tout trace de résistance et valoriser la conformité et la docilité. Nous espérons que l’avenir de Campanelli soit semblable à ce de Cyr: un échec.

Ces commerces, en tant que jouers actifs de la «revitalisation» du quartier, contribuent à repousser les pauvres et les travailleurs-euses précaires pour favoriser la venue de jeunes yuppis ayant des revenus considérables et qui sont toujours à la recherche de la nouvelle tendance-autant en terme de nourriture, de bière, de mode vestimentaire que de quartier. Incapables de débourser le prix du nouveau coût de la vie, subissant plus de harcèlement par la police qui contribue au projet de nettoyage des rues en repoussant les indésirables de plus en plus loin du centre-ville et des aires centrales, les travailleurs-euses précaires, les sans-emploi ou tout autres marginaux de la société se retrouvent toujours perdant-e-s dans ce processus de «revitalisation».

Nous percevons aussi cette action comme prenant part à la lutte contre le colonialisme et en solidarité avec l’autodétermination et la souveraineté autochtones. Alors que nous reconnaissons que notre lutte à Montréal, terre autochtone occupée, n’est comparable en aucun cas aux luttes autochtones dans sa forme ou son contenu, nous avons engagé cette action en solidarité avec celles et ceux qui luttent contre des projets exploitatifs chez eux, tels que la construction des gazéoducs et autres stratégies d’extraction de ressources naturels.

Nous pensons que l’une des meilleurs façons d’agir en solidarité est de lutter dans notre propre contexte contre des ennemis communs: les forces de répression et de déplacement de population, incluant le capital et la police. En ce sens, inspiré-e-s en partie des luttes contre des menaces du territoire et de l’eau qui se produisent sur des terres ayant déjà été volées aux peuples autochtones, des menaces qui pérpetuent un processus sans fin de colonisation et de génocide des peuples autochtones au Canada, nous avons attaqué des forces qui nous rendent aliéner de ce qui nous entourent et qui nous poussent hors des espaces dans lesquelles nous habitons.

quelques anarchistes

Nov 202014
 

Aujourd’hui ça fait plus de 10 mois que nous sommes en taule. Au cours des dernières semaines les deux sentences, fédérale et locale, ont été rendues. Le premier novembre le juge Manuel Muñoz Bastida, du huitième tribunal du Reclusorio Sud, a prononcé la sentence de 7 ans et demi de prison sous l’accusation “d’incendie de bâtiment public avec des personnes à l’intérieur”, ça c’est pour les dommages qu’il y a eu sur le “Secrétariat des Communications et des Transports du Mexique”. Les “gens à l’intérieur” ce sont les deux porcs fédéraux en charge de la sécurité du lieu. Ensuite, le 7 novembre, nous avons reçu la seconde sentence sous les accusations de la juridiction locale qui sont “atteinte à la propriété privée aggravé en bande” et “atteinte à la paix publique”. Ces accusations font référence à l’attaque contre le concessionnaire Nissan. Puisque nous avons été arrêté-e-s à l’angle du Secrétariat des Communications et des Transports et du lieu où nous avons brûlé les voitures. La juge Margarita Bastida Negrete du tribunal de la juridiction locale #18 du Reclusorio Orient a prononcé une sentence de deux et sept mois de prison, joignant les deux délits, et de cette façon les atteintes à la propriété privée deviennent des réparations de dommages et on reste avec le délit d’atteinte à la paix publique et la réparation des dommages qui s’élève à 108 000 pesos. Selon la loi, pour toutes les sentences de moins de 5 ans pour les primo-délinquants il y a droit à des aménagements. Dans notre cas, si nous payons l’amende de 43 000 pesos on sera immédiatement libéré-e-s ou bien nous pourrons sortir en payant 10 000 pesos de caution chacun et en pointant chaque mois au tribunal pendant les 2 ans et 7 mois.

Nous sommes en appel dans les deux procès parce que le parquet a fait appel pour la sentence de la juridiction locale et nous avons fait appel pour la sentence fédérale. D’ici 5 mois la justice rendra sa décision. En fait c’est la sentence fédérale qui nous retient en prison. Pour pouvoir sortir, la sentence fédérale doit être inférieure à 5 ans. Ainsi dans les prochains mois nous verrons s’il y a une possibilité de sortir de cet endroit.

On a été informées de la parution d’un article de Philippe Teisceira-Lessard dans le journal québécois “la Presse”, l’un des journaux les plus lus au Québec. Nous sommes énervées par la parution de cet article qui parle de notre affaire, qui cite en partie nos lettres publiques, et aussi que notre avocat a parlé avec le journaliste. Jamais nous n’avons demandé à un média de masse de parler de l’affaire, et nous n’autorisons pas notre avocat à communiquer des informations sur nous à des journalistes. Si nous avons quelque chose à dire nous préférons le faire nous-même. Les médias sont des ennemis au même titre que la police, les outils les plus puissants de contrôle social qui puissent exister jusqu’à maintenant. Ceci étant dit, que ce salopard de Philippe Lessard arrête de harceler nos familles et qu’il se mette bien dans la tête que nous n’avons pas besoin de ses articles pour parler de notre situation.

Ainsi on a toujours cette force dans le cœur, emmerdant la justice et l’État. Nous n’attendons rien de la justice même si nous avons très envie de sortir dans la rue. Force et courage à notre complice Carlos Lopez Marin (au Reclusorio Orient), au compa Luis-Fernando (Reclusorio Sud), à Fernando et Abraham (Reclusorio Nord). Un coucou aussi à Mario Gonzales, qui est aujourd’hui dans la rue et une grosse bise à Felicity, Tripa et à la sorcière.

Feu à la civilisation, guerre à la société.
Jusqu’à la liberté et même au delà !

Amelie
Fallon
Santa Martha

[Traduit de l’espagnol par Camotazo de Contrainfo.]

Nov 112014
 

de Avalanche

Ce qui suit est la transcription d’une conversation entre deux amis peu de temps après le soulèvement de Ferguson, Missouri. (+++) était là, et (***) n’y était pas, mais nous avons tous les deux participé à des soulèvements anti-policiers au cours des dernières années dans la West Coast et le Midwest. Nous publions ce texte dans le but d’explorer la complexité des événements récents aux Etats-Unis, mais aussi de contribuer aux discussions et attaques en cours contre l’ordre existant, partout.

*** L’expérience la plus intéressante faite par des rebelles dans la région de Bay Area au cours des dernières années a été d’établir Oscar Grant Plaza (la base d’Occupy Oakland aussi connu comme la Commune d’Oakland) comme une police-free zone à l’automne de 2011. La logistique de cette expérience était en fait assez simple : chaque fois que la police a tenté d’entrer dans le campement, une foule se rassemblait autour d’eux et les forçait à la quitter. Parfois, cela signifiait crier, tandis que d’autres fois c’était simplement une question d’informer les officiers qu’ils auraient une émeute sur les mains s’ils y pénétraient. Les gens du campement ont pris plusieurs mesures pour se défendre de la présence de la police. Matériellement, les communards stockaient du matos pour construire des barricades et des projectiles à utiliser contre toute présence policière indésirable. Ils se réappropriaient les barricades de police pour leurs propres besoins et construisaient les leurs. Ils ont arraché les pavés de la place pour qu’ils puissent être lancés contre les raids de la police. Culturellement, l’ambiance de police-free a été produite en favorisant l’hostilité envers la police, et à partir de la culture de résistance de rue contre eux. Lorsque le campement a été placé en état de siège, les flics et leurs commissariats ont été victimes d’une vague chaotique de représailles. Comme les manifestations et les émeutes contre la police finissent toujours par atteindre leurs limites avec le temps, nous nous sommes demandés comment maintenir ces suspensions de l’ordre plus longtemps que quelques jours. Une possibilité est que la culture des zones libérées de la police pourrait apporter une réponse à ce dilemme.

Si par le maintien d’une zone sans police, la Commune d’Oakland a offert une contribution à la lutte de tous ceux qui travaillent à créer des territoires contre la police – à rendre leurs maisons, quartiers et villes entièrement hostiles à l’occupation de la police – on pourrait faire valoir que le récent soulèvement à Ferguson a considérablement élargi cette expérience. Il semble que la révolte à Ferguson est sans précédent au cours des dernières années, ou même dans la vie de beaucoup de gens, en termes de durée mais aussi d’intensité de ce qui est arrivé. Il semble également que, tout comme à propos de la situation à Oakland, les gens de Ferguson ont réussi à aggrandir l’espace et à créer une zone sans police de façon plus combative que ce qui avait été fait auparavant.

+++ Je suis d’accord jusqu’à un certain point seulement. Je pense qu’il y a eut des pas en vue de la création d’un espace libéré, ou d’une zone autonome. En général, je pense que l’émeute est une situation où un espace est ouvert à l’abri de la police ou les lois de l’Etat. Ainsi, chaque nuit où il y avait des émeutes, restaient temporairement ouvertes ces zones sans lois et sans police. Ce qui a été différent des autres émeutes, était la persistance du caractère émeutier. Même après trois jours d’émeutes, les gens revendiquaient le QT brûlé comme pivot central de l’activité du soulèvement. Je pense que l’importance du QT a été qu’il a élargi l’autonomie et le désordre des émeutes de la nuit à la journée. Il serait malhonnête de dire que le désordre et le sentiment anti-police des émeutes a intégralement été transmit au QT. Il y eu des moments où des policiers de haut rang sont venus sur le parking pour faire des déclarations à la presse. Mais cela a au moins permis de créer un environnement qui leur était incroyablement hostile, et en général chaque fois qu’une patrouille ou un agent de bas rang était en vue, ils ont été attaqués ou dégagés de la zone. Il était évident pour la police comme pour les participants de la rébellion, que le QT était notre espace, pas l’espace de la police ou des capitalistes.

*** Il semble plus facile pour les gens qui n’étaient pas là de voir les choses les plus spectaculaires – le pillage, les incendies, les molotov -, mais malheureusement les efforts pour créer un espace sans police sont plus difficile à voir de loin pour les gens. Il semble évident que c’était vraiment central dans la férocité de ce qui se passait. Comment vous avez ressenti le fait d’être à la QT ? A quoi ressemblait cet espace ? Mais aussi, quels étaient des moyens plus spécifiques utilisés par les gens pour empêcher la police de venir là ou dans d’autres zones ?

+++ Eh bien, pour la plupart d’entre eux, le QT était ce lieu incroyablement festif et joyeux pendant la journée, où les gens faisaient des graffitis, apportaient des barbecues géants et distribuaient des centaines de hot-dogs ; tout le monde apportait de l’eau à partager, rien ne coûtait de l’argent, tout était gratuit. C’était devenu un centre culturel bizarre aussi. Il y avait des rappeurs, les gens qui font de la break dance, un step-crew des adolescent est venu. Il y avait une atmosphère de fête de rue joyeuse parfois. En même temps, des gens distribuaient des masques pour la nuit, partageant les histoires des nuits passées. A un moment, j’ai traîné avec un homme qui partageait des photos de toutes les chaussures qu’il avait pillé la nuit d’avant, et nous avons échangé des histoires. Les gens parlaient de ce qu’il faudrait faire s’ils envoyaient des gaz lacrymogène de cette direction, quoi faire si ils arrivaient de l’autre direction. Ainsi, en même temps qu’il y avait cette atmosphère festive et de célébration, c’était aussi clairement un espace où les gens formaient des stratégies et parlaient et s’engageaient. Comme c’était le point central de rassemblement, chaque jour où tu y retournais, tu commençais à voir des gens et à reconnaître des visages; peut-être certains auxquels tu avais parlé la nuit précédente ou avec lesquels tu t’étais engagé dans quelque chose, et que tu serais en mesure de revoir et de parler avec ; on commençait à établir des relations et à partager des idées. Ce fut vraiment excitant.

Dans la nuit la police finissait toujours par pousser les gens vers le QT, mais même si le QT était à moins d’un kilomètre de l’endroit où la plupart des affrontements se produisaient, ils n’étaient souvent capables de l’atteindre qu’après des heures et des heures de combats de rue. Ça leur prenait autant de temps parce qu’ils étaient terrifiés de venir dans la foule, en particulier de jour quand il y avait des milliers de personnes autour d’eux. La région de Saint-Louis a toute une histoire de policiers pris pour cibles, et la police était très consciente de ça. Les policiers savent que les gens sont armés et prêts à tirer. Dès le début du soulèvement, les rebelles l’ont posé très clairement : l’une des premières choses qui s’est passée après qu’ils aient assassiné Mike Brown a été des coups de feu en l’air. Et puis le dimanche, la première nuit d’émeute, les gens ont de nouveau tiré des coups de feu pendant le pillage. Je pense à une situation particulière où la police a essayé de pénétrer dans le coin, et les gens ont formé une ligne pour les affronter. Quand l’échauffourée s’est terminée, la police a lâchement gazé la foule et est partie. Il y a immédiatement eu des coups de feu en direction de la police tout au long de leur retraite. On pouvait entendre des coups de feu partout, et voir des gens sauter des voitures pour tirer ; tirer sur eux, tirer dans leur direction. Les gens ont appris qu’on n’a même pas besoin de tirer sur eux : le simple fait de tirer dans leur direction ou de leur faire savoir qu’on était armé était suffisant pour maintenir la police à distance. Les armes les tenaient ainsi à l’écart. C’est la première fois de ma vie que j’ai vu ce niveau d’action armée flagrante dans une émeute ou une manifestation, ou comment vous voulez appeler ce qui se passait là-bas.

Deuxièmement, l’autre chose que je n’avais jamais vu auparavant, spécifique à cette situation, était la culture de la voiture et la façon dont les voitures ont été utilisées de plusieurs manières pour emmerder la police, la bloquer ou juste l’entraver. West Florissant, la rue principale où toutes les émeutes, les pillages et les combats se passaient, est une autoroute à quatre voies. Et donc de haut en bas de la route, les gens y naviguaient avec d’innombrables voitures remplies de gens, de la musique tonitruante à fond, une demi-douzaine de gamins sur le capot, et en klaxonnant pendant que tout le monde hurlait. Cela a créé une situation où il était impossible pour la police de conduire au milieu de la foule ; la quantité de voitures était si dense. Et aussi le bruit général s’ajoutait à la folie de la situation, de sorte que c’était complètement dingue d’être là. C’était une situation qui était complètement incontrôlable, et ils ne savaient pas du tout quoi faire. S’ils venaient à pied, ils étaient attaqués; s’ils venaient en voiture, leurs voitures seraient vite coincées et ils seraient attaqués. Beaucoup d’armes étaient aussi planquées dans les voitures, les gens étaient donc mobiles et armés. Parfois, les voitures étaient elle-mêmes des armes. Une nuit, les voitures ont enfoncé les lignes de police. Les gens utilisent les voitures comme des barricades; tout le monde conduisait et garait les voitures dans les rues pour former des lignes derrière elles. Je me souviens d’un moment où deux jeunes filles ont garé leurs voitures capot à capot en bloquant les quatre voies de la circulation, et que de l’autre côté des voitures, face à la police, tout le monde avait des fusils. Les voitures ont été utilisées comme des barricades à partir desquelles tirer, comme moyen de rester mobile, comme des véhicules de parade, et en général de façon à semer la confusion et à intimider la police. Je pense donc vraiment que ces deux choses particulières à Ferguson, la culture des armes à feu et la culture de la voiture, ont contribué à créer et à préserver cette police-free zone autonome. Sans oublier le fait qu’il y avait des milliers de personnes qui y participaient.

*** J’ai l’impression, à partir de quelques comptes rendus, qu’il n’y avait pas seulement dans le QT où la police avait peur d’entrer. J’ai entendu dire qu’ils limitaient essentiellement leur activité à West Florissant, et qu’il y avait certaines rues et certains quartiers où ils n’entreraient pas.

+++ C’est totalement vrai. En particulier, le quartier où vivait Mike Brown, Canfield Appartements, à côté de Canfield Avenue. La police ne pénétrait pas dans cette rue. Les gens l’ont vite appris, mais l’ont aussi imposé. A la nuit tombée, lorsque la police chassait les gens de la rue principale, les gens reculaient d’un bloc ou d’un demi bloc, et c’était souvent à partir de là où ils tiraient sur la police. Quand les flics patrouillaient sur la rue principale, ils se faisaient tirer dessus à partir des rues latérales. Chaque fois qu’un policier s’aventurait dans les rues secondaires, les gens se repliaient un peu plus loin encore dans les quartiers, et s’il essayait de les suivre, il se faisait tirer dessus à partir des buissons, des maisons, des voitures. Les gens ont brûlé des ordures dans les rues afin qu’ils ne puissent pas entrer. C’est donc ce qui s’est répété nuit après nuit : les gens combattaient à West Florissant jusqu’à ce que la présence policière écrasante (y compris avec les gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc) les chassent de cette rue principale. Ensuite, soit ils se battaient pour garder la police hors des quartiers, soit ils attendaient que le gaz se disperse pour aller se battre à nouveau dans la rue.

*** En repensant au campement de la Commune d’Oakland, il est évident que la création d’un espace où la police ne pouvait pas entrer a été crucial pour cette lutte. Mais ce que je trouve encore plus merveilleux était que c’était plus qu’un simple zone défensive; c’est devenu une base où d’autres attaques pouvaient être menées. A plusieurs reprises, des manifestations ont pu partir du campement; et parce que les caméras des médias n’étaient pas autorisés à l’intérieur, c’était relativement sûr pour les personnes de changer de vêtements et de mettre des masques. Dans près d’une douzaine de cas au cours des premières semaines du campement, des bureaux et des véhicules de police à proximité ont été saccagés. Penses-tu que l’espace arraché à Ferguson, au QT et ailleurs, a contribué à diffuser des manoeuvres offensives, au-delà d’être un espace pour se rassembler et se défendre ?

+++ Je pense qu’il y avait un peu des deux. Il y avait des moments pendant la nuit où les gens pouvaient être là et s’organiser pour aller piller plus loin. Les gens auraient peutêtre pris l’initiative de le faire, même s’ils n’avaient pas été à Ferguson sur cette route, mais je pense vraiment qu’être là ensemble avec tout le monde a permis aux gens de commencer à agir collectivement. Nous étions là-bas une nuit et les gens ont commencé à scander « Walmart ! Walmart ! » et tout le monde a commencé à courir vers sa voiture, à faire des donuts, et à décoller. Walmart était à six kilomètres de l’endroit où les émeutes avaient lieu, et sans le contexte d’un endroit où les gens peuvent discuter de « oh nous devrions aller piller Walmart ! » et se sentir en sécurité et suffisamment à l’aise pour le faire, je ne pense pas que cela se serait passé. A certains égards, ça a permis ce type de diffusion. Mais, à d’autres égards, je pense que ça ne l’a pas fait, parce que les gens étaient si attachés à cet espace qu’ils avaient libéré (et ça sentait vraiment comme un espace libéré) que les gens ne pouvaient pas imaginer de le diffuser ou de le quitter. Les gens étaient tellement concentrés sur le QT et Canfield et West Florissant, qu’il semblait difficile d’imaginer les émeutes se propager à un autre endroit. Cet espace était devenu si important pour les gens, et pour cela aussi qu’ils étaient prêts à faire beaucoup pour le défendre. Donc, dans une certaine mesure ça a été utilisé comme un espace pour planifier des attaques ou des expropriations dans d’autres parties de la ville, mais la rébellion ne s’est jamais vraiment propagée bien au-delà de la zone centrale.

*** C’est une source d’inspiration que de t’entendre parler d’une partie de Ferguson comme d’un espace libéré, parce que c’est de la même façon que beaucoup d’entre nous considéraient le campement de la Commune d’Oakland. La première chose qui est arrivé quand nous avons pris la place a été de changer son nom en Oscar Grant Plaza, et c’était presque comme si une incantation avait été prononcée. Les choses semblaient différentes quand on y était. Beaucoup de gens ont parlé du fait qu’ils sentaient le temps différemment lorsqu’on était dans cet espace ; les préoccupations et les pressions de leurs relations et de leurs boulots et toutes les choses qui pèsent habituellement sur eux semblaient s’évanouir lorsque les gens entraient dans le campement. Je pense que plus de choses semblaient être possibles dans cet espace, et pour moi c’était quelque chose que je n’ai pas connu ailleurs – cette immense ouverture de possibilités et la capacité de parler aux gens d’une façon qui semblait auparavant impossible. Cela sent comme un monde entièrement différent, si loin d’une vie de travail et des responsabilités et des indignités. Dans un sens, c’est peut-être ce qui est en jeu dans la création d’espaces comme celui-ci : la création de lieux magiques où on peut découvrir de nouvelles choses sur nous-mêmes.

+++ Complètement. De beaucoup de façons, cela semblait similaire. Un des petits rôles que les anarchistes ont eu était d’insister sur un changement de nom pour le QT; les gens ont commencé à l’appeler Mike Brown Plaza, comme une sorte de réminiscence du mouvement d’occupation. Il était clair que nous n’avions pas reçu le droit de nous réunir, de manifester ou d’autre chose. Tout le monde savait que nous ne pouvions faire ce que nous faisions parce que nous l’avions pris. Et à cause de cette connaissance que nous avions pris le pouvoir des mains de la police, du maire et du gouverneur, l’espace est devenu incroyablement important pour les gens. Donc oui, une chose semblable est arrivée. Le temps n’avait plus de sens. D’une certaine manière vous étiez là et tout d’un coup huit heures avaient disparu. Je me souviens d’une nuit, nous étions tous à traîner, il y avait eu beaucoup de pillages, le magasin d’alcool était en feu et nous étions tous assis autour en train de le regarder brûler, et cet homme dit : « fuck, quelle heure est-il !? Je dois aller travailler demain. » Notre amie riait parce qu’elle devait aussi aller travailler le matin et elle a demandé, « vous voulez vraiment savoir » et il a répondu « non, fuck that ; on s’en fout du temps. Nique le travail, ça n’a pas d’importance. » Et il est reparti faire la fête. Donc oui, les choses ont changé, et comme tu l’as dit, la capacité de parler aux gens a vraiment changé. Saint-Louis est un endroit où la ségrégation est incroyablement forte, où la tension raciale est réelle et viscérale, mais là la pression est redescendue. Les gens pouvaient voir qui était là. Les gens pouvaient voir, oh tu es ici, je suis là aussi, c’est une chose que nous partageons en commun et qui peut nous lier. Cela était particulièrement vrai entre les gens qui militaient dans le soulèvement. Un respect mutuel s’est développé parmi les gens qui se battaient. Donc, c’est devenu beaucoup plus facile de parler aux gens. Ces identités, ces contraintes que la société met sur nous pour nous maintenir séparé, ont commencé à disparaître, même juste pour de brefs moments. Evidemment, il y avait encore pas mal de dynamiques intenses autour de la race et des genres ou des motivations perçues par les gens, mais d’une certaine façon cela commençait à se dissoudre.

*** En repensant à la Commune d’Oakland, et à quel point le campement a été important dans la création de ce type de possibilités et de relations, il devient évident que le revers de la médaille est que tout a semblé disparaître après que le campement ait été attaqué et repris. Une fois que la police a imposé une occupation militarisée totale de l’espace et rendu impossible de le récupérer, ça a vraiment été ressenti comme le début de la fin. A partir de là, il a semblé que toute tentative de créer des espaces similaires ou de maintenir l’élan seraient purement et simplement écrasé. Je me demande donc comment l’encerclement et la ré-occupation (par la police) du QT a touché ce qui se passait dans les émeutes, voire pas du tout.

+++ Ça pourrait être une coïncidence, mais il me semble exact que le jour où ils ont clôturé le QT (une dizaine de jours environ après le début des émeutes), a été la première nuit où la paix sociale est revenue dans les rues de Ferguson. Après avoir été dépossédés de cet espace, les gens ne se sont plus sentis en capacité de se rassembler et ont perdu cet espace très important socialement. Donc beaucoup de la combativité a disparu. Les gens étaient aussi fatigués, et la garde nationale était dans les rues, tout cela combiné avec la récupération des gauchistes et des chefs religieux a permis d’en finir. Ce fut vraiment un coup dur pour le soulèvement de perdre le QT, et ensuite de perdre les rues de West Florissant.

*** Pour moi, cela soulève la question de la relation des anarchistes aux espaces comme ceux-ci, où des types de rébellions auparavant inimaginables se jouent. D’autres qui ont participé à des moments semblables, où l’activité des gens ordinaires dépasse largement ce que les anarchistes font, ont posé la question de savoir comment agir avec eux ou pas. Il semble qu’il y ait au moins deux idées. L’une est d’être présents, au milieu des autres, de partager les connaissances et les perspectives tactiques que nous avons; être dans la foule en aidant à pousser les choses plus loin là où nous le pouvons. Une autre idée est que plutôt que de participer dans les rues à ces lieux spécifiques (les plazas, etc.), nous pourrions avancer notre propre projectualité ailleurs et pourrions trouver d’autres ouvertures et des moments pour agir et mener à bien nos intentions. Sur la base de tes expériences à Ferguson, que penses-tu sur cette question ?

+++ Je ne pense pas qu’il s’agisse vraiment d’une dichotomie où on devrait choisir l’une ou l’autre. A Ferguson, je pense qu’il était vraiment très important d’être là, en particulier en tant que groupe en grande partie blanc, à faire des pas pour dissoudre la ségrégation et la tension raciale qui existent dans cette ville en agissant en solidarité avec les autres ; et aussi pour créer des liens. En outre, beaucoup d’entre nous n’ont jamais connu ce type de rébellion et je pense que c’était important d’avoir ce genre d’expérience dans les rues; d’expérimenter à quoi ressemble de lutter collectivement et de se battre. Je ne pense pas que cela signifie nécessairement que les gens ne devraient pas faire d’autres choses aussi. Quand nous étions là-bas, nous nous sommes retrouvés rapidement dépassé par d’autres rebelles. Donc, même si vous croyez en une avant-garde anarchiste, cela n’a pas été possible parce que les gens étaient déjà beaucoup plus avancés que ce à quoi la plupart des anarchistes étaient préparés. De plus, en raison de certaines tensions raciales, ceux qui étaient perçus comme des personnes extérieures blanches ont dû limiter leurs façons de participer, à suivre plutôt que de prendre l’initiative. C’était un contexte tellement tendu que les choses pouvaient vraiment aller dans chaque direction à tout moment, ce qui était vraiment bizarre. En même temps c’était incroyable d’être là avec les gens et de lutter ensemble. Donc, je pense que c’est très important pour nous en tant qu’anarchistes de participer au coeur du soulèvement.

En outre si, en tant qu’anarchistes, nous avons développé un ensemble d’outils spécialisés que nous avons forgés au fil des ans comme anarchistes dans les rues, nous devrions réfléchir à la façon de les utiliser dans des moments critiques dans différentes parties de la ville, ce qui pourrait avoir un grand impact ou aider les choses à se propager à un autre endroit. Une des choses plus chouettes qui ont eu lieu dans un endroit différent a concerné l’approvisionnement en lacrymos et en gaz au poivre qui étaient expédiés. Il y avait un centre de distribution dans le Minnesota où des travailleurs en grève sauvage ont refusé de livrer tout gaz à Ferguson. Ceci ne concerne pas spécifiquement les anarchistes, mais il est intéressant de remarquer qu’il existe des endroits clés où nos ennemis peuvent subir un coup critique en ne recevant pas les fournitures ou les renforts dont ils ont besoin dans les rues. Cela peut limiter leur capacité d’action. Je pense que les anarchistes devraient faire les deux, nous devrions être dans les rues et nous devrions penser à des façons d’aider la situation à se développer et à durer plus longtemps; saboter les tentatives de la police de recouvrer la paix sociale; imaginer comment les choses peuvent se propager; regarder et étudier la ville pour que d’autres étincelles puissent s’allumer; montrer des signes de perturbation à travers toute la ville, même des tags ou de petits attaques – tout a compté lors de ces semaines-là.

*** Il semble que certains des autres trucs que les anarchistes peuvent faire dans ces situations inclut d’encourager les gens à porter des masques, attaquer les systèmes de surveillance, essayer de saper les manières les plus sinistres ou subtiles de récupération ou les tentatives gauchistes de reprendre le contrôle. Ces choses sont presque constantes, que nous devrions nous y attendre et avoir une perspective stratégique sur cette question.

+++ Je peux dire avec certitude que les anarchistes ont créé la culture – presque à eux seuls – de porter des masques. Alors que les premières nuits des gens disaient ouvertement « pourquoi devrais-je porter un masque !? Je suis fier de ce que je fais, je veux que les gens sachent que je suis en train de faire cela » en commettant les délits les plus fous, plus tard dans la semaine, c’était presque devenu une mode d’avoir une chemise autour de la tête. Je pense qu’une autre contribution des anarchistes pour créer un espace sûr pour que les personnes puissent engager des actions plus combatives a été d’attaquer les équipes des médias et de les dégager de la rue, ou au moins derrière les lignes de police. Avant ce moment, il y avait des dizaines d’équipes de tournage prenant des images de pillards, dont beaucoup ne portaient pas de masques ou avaient des tatouages visibles.

*** Il semble qu’il existe des possibilités pour toutes sortes de gens, y compris les anarchistes, lorsque ces situations éclatent – à la fois dans l’épicentre et à la marge -, pour trouver une sorte d’auto-réalisation individuelle mais aussi pousser ses propres projets un peu plus loin. Ce faisant, ils pourraient également aider à étendre le conflit social, et je pense que c’est à l’intersection de ces possibilités que certaines des choses les plus palpitantes se produisent. Il semble plutôt clair que beaucoup de ce dont nous avons parlé jusqu’à présent porte d’une manière ou d’une autre sur l’identité, et je pense que dans ces situations conflictuelles nous pouvons comprendre comment l’identité joue contre nous. Un constat de base qu’ont beaucoup de gens issus des luttes de la Bay Area, qu’il s’agisse de la rébellion à Oscar Grant ou des occupations, est l’idée que l’identité est un instrument utilisé par l’Etat pour continuer de séparer les gens et renforcer les rôles sociaux que les gens sont censés jouer. Il était aussi évident que, dans ces moments de rupture, les identités ont commencé à s’effriter et à tomber. C’est pour cela que l’Etat tente d’abord de reprendre le contrôle à travers la logique de l’identité, en rétablissant les catégories d’identité qui étaient précédemment mises de côté. D’après ton compte-rendu et celui d’autres, il semble que cela était également en jeu à Ferguson.

+++ Ceci est certainement vrai, et je pense que l’Etat dans la Bay Area a perfectionné l’utilisation moderne de l’identité comme une forme de contrôle, en particulier dans des situations comme la Rébellion Oscar Grant. Après avoir vu ce qui c’est arrivé là, c’est très intéressant de voir les parallèles, mot pour mot, dans la façon dont l’Etat a répondu ici. Après la première nuit d’émeute, le shérif est venu presque instantanément pour dire : « il s’agit d’un petit groupe d’agitateurs blancs, anarchistes, extérieurs qui sont venus et ont suscité les choses ». Pour moi, il était évident que c’était une tentative préventive de mettre un terme à toute sorte d’unité raciale. Historiquement, le racialisation des situations a été l’une des premières mesures prises par l’Etat pour étouffer les rébellions. Qu’il s’agisse des rébellions de classe contre l’Etat au 17e ou 18e siècle ou des rébellions anti-police de la dernière décennie. Le terme « agitateurs extérieurs » a été utilisé effectivement pour la première fois aux Etats-Unis dans les années 60 par un shérif du sud pour décrire des blancs qui descendaient pour collaborer et se battre avec les noirs contre la ségrégation. En étant dans ce soulèvement, je ne me suis jamais senti aussi proche de gens qui faisaient des pas concrets pour briser leurs identités fondées sur la race, le genre, la classe, le fait d’être anarchiste, etc. Bien sûr, ces identités n’avaient pas entièrement disparu, et il y avait encore beaucoup de dynamiques en jeu basées sur elles, mais elles commençaient à faiblir. Et c’est donc l’une des premières choses que l’Etat (et les nombreux micro-Etats, ou ceux qui cherchaient à prendre le contrôle de la situation) a tenté de rétablir. C’était visible comment lorsque la police a parlé d’« anarchistes blancs », certains groupes gauchistes ont immédiatement adopté le même langage. Il y avait aussi un fort encouragement de plusieurs groupes plus « radicaux » comme la Nation of Islam et le New Black Panther Party pour racialiser les choses. Ils étaient dans les rues en tentant de développer l’axe que cette question serait une question des noirs, et que c’était une lutte pour le black power. Contrairement aux gauchistes et aux politiciens, ces groupes étaient dans les rues tous les soirs, mais c’était toujours plus évident que leurs tentatives de racialiser les choses visaient seulement à prendre le contrôle d’une foule et à pousser leur agenda politique.

*** Il semble que le genre était aussi un facteur clé. J’ai entendu des comptes-rendus d’Al Sharpton et d’autres appelant à ce que des « hommes noirs forts » aillent aider la police lors des manifestations, et à ce que les jeunes hommes qui participaient aux émeutes « grandissent et deviennent des hommes » en aidant à mettre fin à l’émeute, ou appelant aussi les femmes à rentrer chez elles « pour être avec leurs enfants ». Il semble que le genre était un axe aussi évident que la race utilisé par les politiciens pour essayer d’étouffer les choses.

+++ Ouais, c’était en fait vraiment drôle de voir le va-etvient de ces mêmes groupes. Les gauchistes qui tentaient de prendre le contrôle étaient là à parler de comment tous les émeutiers étaient des jeunes hommes et qu’il n’y avait pas de personnes âgées ou de femmes afin de discréditer les émeutes. Tout d’abord, ce n’était pas vrai, il y avait beaucoup de types différents de gens là-bas pour se battre. Encore plus drôle a été leur proposition de créer des choses comme « les disciples de la justice » d’Al Sharpton, qui se composaient de 100 hommes noirs qu’il a appelé à reprendre les choses en main. Ils ont vraiment poussé ces rôles de genre, en disant que les femmes étaient censées rentrer à la maison ou rester à l’arrière, « il y a des femmes et des enfants ici, c’est dangereux », ou une nuit lorsque la Nation of Islam était là pour dire « ramenez vos femmes à la maison! ». Quand tu prends du recul et que regardes la situation, il est évident que les personnes qui discréditent les émeutes parce qu’elles comprenaient en grande partie des hommes dans la vingtaine, étaient les mêmes partis ou travaillaient avec les mêmes partis qui tentaient de dégager la nuit les femmes et les enfants hors des rues, en essayant d’arrêter les combats au nom de la défense « des femmes, des enfants et des personnes âgées » présents dans les rues. Mais le fait est que dans les rues la nuit, quand c’était conflictuel, les gens ne l’acceptaient pas. Chaque fois que des gens ont essayé de racialiser les choses ou de renforcer des rôles de genre stricts du type les hommes devraient être les combattants et les femmes doivent rentrer à la maison, les gens l’ont activement refusé, leur ont gueulé dessus, leur ont dit de se casser, leur ont dit « fuck you, c’est notre lutte ».

*** Il y a une façon vraiment subtile, très intentionnelle, que l’on peut voir dans la Bay Area comme à Ferguson, où l’Etat, les médias, les gauchistes, la police, poussent tous la même ligne. C’est une tentative de saisir cette folle violence racialisée, cette campagne quotidienne d’extermination contre principalement les jeunes hommes noirs, et de la transformer en une « question » limitée autour de quelques flics racistes ou du besoin d’une poignée de petites réformes de la police ou de la justice. Ce faisant, ils mystifient le fait que la race n’est pas une « question », mais que la race et la violence raciale sont le fondement de …

+++ La société américaine !

*** Oui, toute la misère qui est imposée aux gens ici.

+++ Ouais, c’est pour cela qu’ils essaient immédiatement de réduire les choses à une seule question. Parce que ces rébellions et des moments comme celui-ci font éclater vraiment le potentiel de ce qui peut arriver. Les gens parlaient de comment ce n’est pas une question, que ça ne concerne pas seulement Ferguson, que ce n’est pas une chose de noirs et de blancs. Ce sont les gens contre les bleus, c’est quelque chose de systémique. Cela a cessé d’être une question, ça a été un point de rupture. Ce n’était pas qu’une émeute antipolice, c’était une insurrection contre la société dominante, contre la façon dont les choses existent, contre la classe, la suprématie blanche. Ça ne concernait plus juste un mauvais flic, ou la justice. Ce que veulent les gens c’est la liberté, et nous avons commencé là-bas à nous imaginer comment faire des pas dans cette direction. Et cela est terrifiant pour les gauchistes, les politiciens et tous ceux avec toute sorte de confort dans ce monde qu’ils pourraient perdre. Il est donc logique que ces groupes aient unifié leurs forces afin de calmer les choses et de rétablir la paix. La gauche parle de prendre des mesures réformistes et toutes ces conneries, mais les gens ont pu voir qu’à travers elles, il ne s’agissait que d’une tentative de les renvoyer dans les mêmes bonnes vieilles cages de toujours.

*** A côté de cela, une autre manière de penser la question concerne le regard sur l’identité anarchiste. Et que de la même manière que les barrières genrées et raciales qui nous séparent et nous empêchent parfois d’agir, l’identité anarchiste se dissout aussi dans ces moments. D’une part vous avez toutes sortes de gens, des anarchistes ou non, propageant des activités anarchiques, des incendies, des pillages. Et puis de l’autre côté, vous avez toutes sortes de gens qui ne sont pas anarchistes mais sont pointées comme tels par les médias. Donc, pour ceux d’entre nous qui sont anarchistes et ont choisi de participer à ces luttes, cela cesse presque d’avoir de l’importance qui est anarchiste et qui ne l’est pas. Ou peut-être que cela nous importe, mais pas au sens large.

+++ Idéalement, j’aimerais penser que l’identité anarchiste se dissolve également dans une telle situation. Quand il y a un soulèvement, cela fait sens de perdre sa propre identité. Ne pas perdre son éthique ou ses idées ou ses désirs ou les tensions qu’on possède contre le monde d’un point de vue anarchiste, mais perdre la manière dont toute identité peut être utilisée contre nous. On l’a vu quand l’Etat a collé une étiquette d’anarchistes sur les gens et a essayé d’utiliser cela pour séparer les militants dans la rue. Je pense que c’est important d’abandonner ces identités et de laisser tomber tout bagage social que nous avons en participant à un milieu anarchiste, pour le meilleur ou pour le pire. Une chose à laquelle je pense, et je n’entends en aucun cas en parler mal, mais je me souviens que pendant les émeutes de Londres, une situation où le pays tout entier était en feu, la FAI a revendiqué une attaque contre deux ou trois voitures. Et bien que je respecte hautement l’attaque et les personnes qui ont risqué leur sécurité pour mener à bien cette opération, cela ne fait pas sens dans mon esprit de s’isoler et de se démarquer de cette façon. Nous devons agir, mais nous ne devons pas agir afin de nous séparer des gens. Donc oui, je pense que c’était important pour l’identité anarchiste de se dissoudre aux côtés de toutes les autres identités.

*** Dans un certain sens, des moments comme ceux-là sont une clarification en termes de pourquoi nous nous battons et pourquoi nous faisons ce que nous faisons. Je dirais que pour les anarchistes, en particulier ceux d’entre nous qui désirent l’insurrection, ce qui est en jeu n’est pas une lutte pour affirmer une identité anarchiste ou une idéologie, mais pour réellement se battre pour l’anarchie.

+++ Certainement.

*** Les dernières réflexions et questions que je me pose concernent ce qui peut arriver dans les prochains mois et ce qu’on peut faire maintenant. L’espace qui a été créé à Ferguson n’est plus là, mais les tensions qui ont conduit à cette révolte existent toujours. Et les milliers de personnes qui ont participé à cette révolte portent en eux leurs expériences et les transformations qu’ils ont traversé. Tout cela continue, et il semble tellement intuitif que les choses vont continuer aussi. C’est juste une question de comment nous pouvons propager les choses et comment ceux d’entre nous qui ne sont pas à Ferguson peuvent exprimer notre solidarité quand c’est nécessaire.

+++ Franchement, je n’en sais rien. Il semble que la ville ne sera plus la même après ce soulèvement. Les choses semblent différentes et les tensions sont toujours là. D’une manière, on a l’impression qu’un bouchon de vapeur a explosé et qu’un peu de colère a été libérée au cours des douze jours d’émeute. C’est difficile de communiquer avec les gens à cause de l’étendue et de l’aliénation de la ville, mais je pense que c’est important de continuer à montrer des signes de désordre, qu’il y ait des attaques visibles et des gestes de résistance. Même la gauche commence à y prendre pied et à organiser de grandes journées d’action. C’est entièrement de la récupération, mais il reste encore de grands groupes de personnes qui refusent d’être contrôlées par ces politiciens et activistes, et c’est donc logique de s’y engager. Simplement pour les perturber ou pour les pousser dans des directions différentes. Je pense aussi que c’est logique d’agir conjointement, mais en dehors de ces événements. Nous sommes à un moment crucial, où tout est remarqué, et cela nous donne une situation où, comme anarchistes, nous pourrions être en mesure d’introduire de nouvelles analyses, de nouvelles tactiques et étendre avec succès les choses sur de nouveaux terrains, à la fois littéralement et métaphoriquement. Quant à ce que les anarchistes ailleurs peuvent faire … bien que je pense que les attaques de solidarité sont toujours impressionnantes et que je ne veux pas les décourager, je pense qu’en général seuls les anarchistes les voient. Cela n’est pas nécessairement une mauvaise chose, cela nous donne de la chaleur et de la force de voir que d’autres attaquent, mais je pense que ça fait du sens pour les rebelles de réfléchir sur comment les choses pourraient se propager et comment ils peuvent agir afin d’inspirer la révolte là où ils vivent. Et pas que d’une manière qui pourrait avoir une incidence ou décourager les efforts de la police à Ferguson. Donc, je ne suis pas entièrement sûr de savoir à quoi cela pourrait ressembler, mais je sais que les gens sont créatifs.

Nov 082014
 

Le 31 octobre Amélie, Fallon et Carlos ont été jugé-e-s au cours d’un procès fédéral pour destruction de bien d’autrui sous la forme de l’incendie. La sentence qui leur a été dictée est de 7 ans et 6 mois. Leurs avocats vont faire appel dans un délai de 15 jours.

Le 6 novembre la sentence est tombée dans le procès qui dépend de la juridiction locale pour atteinte à la paix publique et dommages aggravés en bande (l’attaque sur le concessionnaire Nissan).

La sentence est de 2 ans, 7 mois et 15 jours de prison, en plus de devoir payer une réparation de dommage de 108 mille pesos.

Les avocats vont faire appel de cette décision.

Solidarité avec Carlos, Amélie et Fallon !
À bas les murs des prisons ! Liberté pour tous !

Nov 042014
 

Anti-dev

La semaine dernière a été le théâtre de deux attaques au Canada contre des soldats canadiens par des Musulmans. En réponse, des miliers de personnes ont rempli les rues (à Hamilton), pour agiter des drapeaux et appeler à une surveillance accrue, des arrestations préventives, et encore plus de guerre au Moyen-Orient.

Ces masses revendiquent un État policier. Ça pèse lourd, et on est pris-es à observer avec désarroi, alors que les foules semblent vouloir ressusciter des scènes de propagande des Jeux Olympiques de 1936 à Berlin. Sauf qu’au Canada en 2014, ce qui émeut les foules n’est pas le progrès d’une torche mais celui d’un cadavre transporté de Ottawa à Hamilton.

Les politiques mises de l’avant par ces deux spectacles sont similaires de façon alarmante : pour vaincre l’ennemi à l’extérieur de nos frontières, on doit vaincre l’ennemi intérieur. En théorie, l’armée et la police sont des corps distincts avec des rôles séparés. Mais même si ces attaques ont ciblé des soldats et suivi la décision du Canada de se joidre à la guerre en Irak et en Syrie, leur réponse sera à travers plus de flicage.

Les gens prennent la rue pur appeler à un État policier: Pourquoi tous ces gens suivant une idéologie extrémiste ne sont-ils pas surveillés à journée longue? Si vous avez assez de suspiction pour surveiller quelqu’un, pourquoi vous ne pouvez pas l’arrêter? Quels pouvoir additionnels la police a besoin pour surveiller et juger quiconque a une idéologie extrémiste? Ils appellent à plus de fusion des rôles de l’armée et de la police, pour l’expansion de la guerre de contre-insurgence à l’intérieur du territoire canadien.

Le second soldat tué était de Hamilton et son régiment est situé en plein centre-ville, sur une une étendue de James St qui se gentrifie rapidement, juste à quelques rues de là où j’écris. Durant trois jours, la rue a été la scène d’une prolifération de drapeaux et démonstrations publiques de deuil. Les médias locaux font leur devoir de filmer ce spectacle et le rediffuser à tout le monde – dans la chambre à échos, deuil et nationalisme se font inséparables. Tout questionnement de l’État est perçu comme un manque de compassion pour le héros tragique.

Il n’y a pas de place pour un discours critique en public autour de ça, ce qui est pas surprenant. Jusqu’aux appels habituels pour quiconque visiblement musulman à participer à ce deuil public – l’imam local se rend jusqu’à la caserne pour y déposer une couronne de fleurs et rappeller à tout le monde qu’il est Canadien aussi. T’es avec nous ou contre nous… la logique de la guerre commence à tout envahir. Pendant ce temps en Alberta, dans la même ville qui abrite les avions de chasse qui ont quitté pour l’Irak, des nationalistes ont peint « Go Home » et « Canada » sur la façade d’une mosquée.

Je trouve ça difficile d’éviter la comparaison avec 1936, peu importe comment ça peut être cliché. Les gens ont déjà sauté sur l’occasion de décrire le conflit en Syrie et autour comme un nouveau moment de la Guerre Civile de 1936 en Espagne, il est clair qu’un combat idéologique décisif vient d’être engagé. Cependant, comme en 1936, chaque étape dans la bascule de la rhétorique, de la guerre de proxy à la guerre ouverte a marqué une fermeture du débat, un entonnoir idéologique, et une consolidation du pouvoir. Au moment où la Deuxième guerre mondiale s’est déclenchée, toutes les parties se sont établies plus ou moins dans leur propre forme de fascisme – le début de la guerre a marqué une fermeture pour la possibilité d’une lutte libératrice.

En Syrie, ce fut la stratégie du gouvernement depuis le début. Le gouvernement a répondu aux soulèvements de façon militaire, ce qui a entendu que seulement une réponse militarisée était possible. Alors que le conflit escalada, les possibilités se sont constamment refermées jusqu’à ce que seulement les rôles laissés à être joués furent ceux de soldat, réfugié-e ou bien victime. Et la partie de l’opposition au gouvernment Syrien la mieux préparée pour accepter le paradigme militaire se trouva à être les organisations fascistes religieuses telles Daesh/État Islamique et Al-Nusra. Et ce fut exactement ce que le gouvernment a anticipé – la logique de la guerre a étriqué le champs jusqu’à ce que Bashar Al-Assad pouvait raisonnablement être perçu comme le bon gars.

Les activistes de la base qui ont parti ce soulèvement combattent encoer pour la liberté et la dignité, mais leurs voix ont largement été submergées dans la logique de guerre. Effectivement, le conflit est devenu une lutte entre des fascismes rivaux, séculaires contre religieux, chacuns avec leurs différents supporteurs internationaux.

Les régions kurdes ont cherché à se lancer à l’attaque différemment, sécurant leur autonomie par la force mais en ne prenant pas part à la lutte pour contrôler l’État. Mais inévitablement, la guerre est venue à eux. Les anarchistes en Amérique du Nord se sont de plus en plus intéressé dans les régions Kurdes de la Syrie et la Turquie, où des décennies de lutte de libération nationale plus traditionnelle contre plusieurs États a pavé ont pavé la voie à une nouvelle stratégie de communes fédérées développant l’autonomie pratique dans leurs territoires sans le besoin de s’attaquer à l’État de façon décisive. Plusieurs l’ont décrit comme un système anarchiste. Cependant, la situation de plus en plus dangereuse dans les régions Kurdes de Syrie, aggravée par les actions des États Tursques et Iraqiens, est devenue une justification pour un rôle militaire accru des nations Occidentales dans le conflit, actions qui demeurent au plus grand profit de la dictature d’Assad.

Et voici qu’entre en scène le Canada, avec ses six vieux avions de chasse, se tenant symboliquement du côté des États Unis et des autres gros garçons du pouvoir et de l’influence occidentale.

Quand je parle de comment la logique de guerre clot la discussion, je ne prône pas une quelconque sorte d’idéal démocratique, un échange libre de points-de-vues sur un marché des idées. Je ne veux pas que pouvoir tenir une pancarte « Fuck l’Armée » devant une caserne sans me faire battre. Je parle de fascisme et d’États policiers, où la logique de guerre s’immisce dans chaque aspect de nos vies et demande qu’on se range du côté de l’État-nation qui nous réclame. Quelle sorte de réponse peut-on imaginer à ça?

Ça a pris à plusieurs d’entre nous des environs un long moment à l’admettre, mais le momentum radical s’est atténué. Le pendule s’éloigne de nous dans son mouvement cyclique. Plusieurs anarchistes d’origine (qui pourraient utiliser encore ce mot pour eux-mêmes quand ça leur convient) ont déjà remarqué cela, et ont glissé vers des positions plus sécures au sein de la gauche institutionnelle. Des anarcho-lobbyistes, des anarcho-bureaucrates, des académiques anarchistes. Dans un contexte d’affaiblissement, peut-on imaginer une réponse aux appels à un État policier qui ne consiste pas en un retrait?

Les anarchistes et autres radicaux d’ici ont une histoire récente d’être arrêtés et accusés sur base d’idéologie et d’actions « extrémistes » qui n’avaient même pas été mises en pratique – plusieurs d’entre nous ont été pris dans le filet préalablement au G20 de 2010. Le G20 tout comme la réponse à la grève étudiante massive de 2012 à Montréal a démontré la volonté et la capacité de l’État à militariser même une ville majeure, et jusqu’où ils peuvent aller pour nous forcer au silence si c’est commode ou nécessaire pour eux de nous considérer comme une menace. Ces mémoires fraîches et notre capacité réduite pour la confrontation démontre la lourdeur du climat pesant sur nous alors que le deuil public bascula sans faille dans le nationalisme, pour devenir par la suite un appel pour un accroissement massif du flicage.

Les anarchistes cherchaient déjà des façons d’en savoir plus sur le conflit en Syrie et dans les environs et avaient commencé à offrir de la solidarité pratique aux groupes Kurdes qui semblaient partager nos valeurs. Mais avec la participation matérielle du Canada dans la guerre pour supporter les régions kurdes, ne sommes-nous pas simplement en train de s’aligner avec les nations occidentales dans une guerre impérialiste? Ou y a-t-il de l’espace pour attaquer autant l’intervention militaire que les groupes fascistes en Syrie?

En 1936, plusieurs anarchistes ont pensé qu’il y avait un terrain pour une lutte libertaire au sein d’un choc à venir entre les fascismes socialistes et capitalistes. Le conflit éclata en Espagne, et ils s’y sont déplacé de partout dans le monde pour combattre les fascistes avoués de Franco seulement pour se trouver attaqués par les fascistes qui se disaient communistes.

Leur lutte pour l’anarchie devint une note de bas de page pour l’incroyable massacre qui suivit, mais après l’Espagne ce fut clair qu’aucune des puissances se battait pour la liberté. Quoique bien-sûr tous l’ont clamé hypocritement, et plusieurs ont choisi de croire que le moindre des maux n’était pas tant un mal.

Les deux jeunes hommes qui sont morts en attaquant des soldats canadiens la semaine dernière ont tenté de voyager au Moyen Orient un peu avant, et au moins un des deux a explicitement essayé de joindre le Daesh. La propagande fasciste contient toujours un brin de vérité, qui dans le cas de Daesh est la réalité de l’histoire de l’impérialisme occidental au Moyen Orient durant le 20ième siècle. Les pays occidentaux ont redessiné la carte politique, imposé le modèle de l’État-nation, instaurant ou renversant des dictateurs d’un seul coup, et le plus important a peut-être été le sionisme et l’État d’Israël. Ce brin de vérité est alors utilisé pour soutenir une lecture romancée de l’histoire et une vision de retour à une forme de vie plus pure – pour Daesh, l’histoire ayant fait ses preuves étant que les nations musulmanes sont subjuguées parce qu’elles ne sont pas assez pieuses et que la véritable piété Musulmane est fondée sur une lecture strictement à la lettre du Qu’ran et du Hadith. Et au final ce discours est utilisé pour amasser du support pour un projet politique militaire et totalitaire qui préfigure une expansion infinie et légitimise un joug autoritaire à travers des campagnes militaires victorieuses à l’étranger.

L’État Canadien s’est toujours efforcé à se définir et soulever les passions de la part de ses sujets. Un pays avec une courte histoire, qui dépend d’un formattage des histoires des nations indigènes et de son génocide, et à l’instar des États-Unis, n’a pas eu de bataille fondatrice pour son auto-détermination, seulement un coup de crayon bureaucratique. Le Canada n’est jamais devenu une cause, à la frustration des élites politiques, quoiqu’il n’a pas abandonné l’idée d’en devenir une.

Les médias demandent sans cesse qu’est-ce qui pourrait attirer les jeunesses Canadiennes vers l’idéologie de Daesh. Mais quelqu’un pourrait aussi se demander ce qui a mené ce jeune soldat tué à Ottawa à prendre les armes en défense d’un État-nation génocidaire et impérialiste. Des interviews avec sa famille démontrent qu’il aimait l’armée depuis son enfance, il semble que c’était dans son sang, comme ils disent. Pour aussi dégueulasse que ça puisse être de prétendre qu’un enfant soit né pour suivre des ordres de tuer et mourir, le Canada utilise cette même sorte de discours que Daesh pour attirer à sa cause les mêmes jeunes hommes sans desseins et fétichisant la guerre.

Le brin de vérité dans la propagande Canadienne est que le peuple au Canada jouit de beaucoup de libertés. Le discours historique est que de braves explorateurs amis des autochtones (qui pour une certaine raison sont disparus) et qui à travers leurs labeurs et dévouement, ont ouvert le pays d’un océan à l’autre, et développé une nation éclairée tout en évitant les excès des États Unis. Le projet autoritaire semble différent ici – c’est un échange de complicité pour le privilège incluant le privilège de ne pas se farie achaler par des enjeux politiques. En des temps de crise cependant, plus nous est demandé pour qu’on puisse demeurer du bon côté de l’État.

Après que la mosquée de Cold Lake fut vandalisée, de soi-disant bons Canadiens sont venus, ont aidé à la nettoyer, et ont chanté l’hymne nationale une fois dehors. Le choix offert aux Musulmans Canadiens est clair : de quel côté du nationalisme Canadien voulez-vous être? Voulez-vous être attaqués ou bien nous joindre en chantant l’hymne? Voudriez-vous plutôt vous égayer à regarder les avions de chasse quittant Cold Lake, ou bien avoir à esquiver leurs bombes en Iraq? Allez-vous accepter de donner à la police de nouveaux pouvoirs ou bien risquer de devenir une cible?

Il se présente que les anarchistes du territoire Canadien n’ont pas eu cette fois à voyager pour prendre part à notre Espagne de 1936; e conflit est opportunément venu à nous et maintenant seulement de continuer à faire comme avant est de choisir un camp. Il n’y a pas de position neutre ici, et le terrain glisse rapidement.

En un moment d’atténuation de l’énergie radicale comment on s’oriente dans cette logique de guerre? Entre des fascismes concurrents, peut-on trouver ceux-elles avec qui nous partageons une affinité sur le terrain au Moyen Orient, et est-ce que notre habileté à la solidarité influencera leur lutte ici ou là-bas? Est-ce que de s’organiser contre de nouvelles mesures répressives nous amènera les opportunités pour répandre la lutte, ou cela nous rendera-t-il plus isolés et vulnérables dans la répression? Quelles sortes de soutien et de solidarité sommes-nous intéressés à apporter aux communautés musulmanes qui se font continuellement plus cibler par l’État, et quelles opportunités pourraient être crées en y bâtissant des liens?

Nous n’avons pas de conclusions à offrir. Les routes à Hamilton vont êtres fermées Mardi pour les funérailles d’un soldat. Il y a deux mois, deux jeunes hommes musulmans furent attaqués et sévèrement battus sur leur chemin de retour de la prière du vendredi. Un signe face à la mairie montre un compte à rebours pour le début des jeux PanAm, et nous savons que l’appareil sécuritaire pour cet événement est déjà à plein régime, cherchant la région d’Hamilton pour des menaces possibles pouvant justifier sa propre existence. Devrions-nous aller à l’offensive contre une escalation, ou devrions-nous profiter de ce moment d’attentes diminuées pour se retirer de la confrontation et renforcir nos réseaux? Quelles ooportunités existent en ce moment? Pouvons-nous trouver des façons de refuser leur logique de guerre et continuer notre lutte pour l’anarchie?

Nov 022014
 

Le 31 octobre 2014, les juges ont rendu leur verdict dans le procès fédéral contre Amélie Trudeau Pelletier, Fallon Poisson Rouiller et Carlos López Marín pour le délit de “dommages à la propriété d’autrui” sous forme d’incendie (attaque du Secrétariat de la Communication et des Transports). Nos compagnons ont été condamnés à 7 ans et six mois de prison.

Les avocats feront appel du verdict sous quinze jours. Le verdict du procès local pour avoir rompu la paix publique et causé des dommages (attaque d’un concessionnaire Nissan) n’a pas encore été rendu.

Solidarité avec Carlos, Amélie et Fallon !
Liberté pour Fernando* et Abraham** !
A bas les murs des prisons !
Liberté pour tous !

NdT :
* Arrêté le 13 décembre 2013 lors des manifs contre la hausse du prix des transports à Mexico, Fernando Bárcenas Castillo est actuellement en préventive au Reclusorio Norte, accusé d’avoir incendié l’arbre de Noël de l’entreprise Coca Cola.
** Originaire de Tlaxiaco (Oaxaca), Abraham Cortés Ávila (23 ans) purge depuis juin 2014 une peine de prison de 13 ans et quatre mois de prison pour “tentative d’homicide”, “outrages à l’autorité” et “attaques contre la paix publique” suite aux émeutes du 2 octobre 2013 à Mexico. Il est incarcéré au Reclusorio Norte.

Oct 222014
 

Anti-dev

Au cours de la nuit du 21 septembre 2014 on a mis le feu à des câbles de télécomms du train sur la ligne Brigham-Sherbrooke-USA, en pensant aux résistants Algonquins qui se sont fait expulser d’un site archéologique, ainsi qu’aux prisonnières Amélie, Fallon et Carlos (5E3) détenues dans des prisons mexicaines depuis des mois. On a pris le temps de choisir un pont ferroviaire en plein milieu de nulle part près de Waterloo comme endroit approprié pour ce sabotage, car les câbles enfouis sortent à l’extérieur. C’est une tactique très facile qui peut être reproduite partout où y a un pont ferroviaire. Du carburant a été versé par une petite ouverture dans le coffrage d’acier protégant les câbles, puis allumé, causant une joyeuse petite explosion de flammes à l’intérieur du conduit. Seulement quelques secondes plus tard ça sentait le caoutchouc brûlé à quelques mètres de distance.

Bien-sûr que ça a pas causé la chute du système techno-industriel! Sa société a l’air d’être encore bien fonctionnelle aujourd’hui. Mais faut commencer par quelque part pour l’attaquer. Cet acte a donné l’impression de couper un nerf de la machine sociale technologique. Ça nous a aussi fait du bien de se bouger le cul en plein milieu de la nuit pour ça.

En guise de bonus, des affiches de développements résidentiels ont aussi été vandalisées durant les nuits suivantes, chacune au nom d’Amélie, Fallon et Carlos, trois anarchistes emprisonné(e)s au Mexique depuis plusieurs mois. Deux affiches dans Saint-Etienne-de-Bolton, pas très loin de ce sabotage, où on été peint « Écocide », et un grand panneau de développement sur le bord de l’autoroute 10 liant Montréal à Sherbrooke, non loin de là.

Ces gestes sont loin d’être de l’intensité de attaques dont ils-elles sont accusé(e)s, mais quand même une autre extrémité de même la machine sociale qui voile et détruit le vivant, ici comme au nord de l’Alberta comme au Mexique et ailleurs.

On profite de l’opportunité pour faire part de notre vision partagée sur la lutte au progrès de la techno-civilisation: L’épidémie de ce genre de pollution visuelle joue un rôle clé dans le processus de destruction qui pave la voie à une invasion de la société techno-industrielle, or de perturber son image tout en essayant de passer un message clair quand c’est possible peut efficacement perturber sa progression. Il y a pas de géopolitique du vandalisme, ce qui importe étant seulement la sensibilité de la cible pour l’infrastructure qui est derrière, et celle-ci on la trouve foutrement sensible. Alors que des tas de graffitis dans la Ville-usine vont au moins exprimer une critique et donner une impression virtuelle -voire prétentieuse?- de désordre, au mieux dénoncer publiquement les fascistes et les flics et le capital; des étalements périurbains peuvent être arrêtés ou ralentis en résultat du vandalisme persistant contre ces représentations du capital (ici, l’industrie gangstériste de la construction et tous ces parasites qui veulent se payer leur yatch avec de l’argent facile issue de la vente de propriétés entièrement fictives, qui sont pas mal les mêmes ordures qui se paient des résidences secondaires de luxe avec le pognon issu de la gentrification dans la ville. Tu figures?). On en a la preuve, par expérience… on a vu des corporations immobilières se retirer de développements, apparemment à cause d’affiches immobilières récursivement vandalisées. On croit que ce genre de tactique, même si elle peut paraître de bas niveau ou moche pour certain(e)s, mérite d’être remise au menu de l’attaque, au moins comme hors d’oeuvre. Y a au fer de lance de la civilisation des tas d’opportunités de faire de l’art subversif, au moins. Un bon contexte, aussi, pour répandre des mêmes anti-civs!

Pour toutes les créatures tuées ou expulsées par la machine de mort de la société qui continue d’envahir.

Pour le sauvage!

– le Roi Ludd et son armée de Fénians, de l’ombre de la forêt

Oct 192014
 

Un geste de solidarité …

Dans la nuit du 12 octobre, nous avons saboté deux établissements bancaires avec des pierres, des frondes et des cocktails molotov dans le secteur d’Iztapalapa à Mexico.

La solidarité révolutionnaire, c’est aussi la manière dont nous montrons notre soutien aux compagnons emprisonnés en grève de la faim depuis le 1er octobre [jusqu’au 17, NdT] en attaquant les responsables de cette vie quotidienne misérable. C’est notre réponse au harcèlement envers les compagnons par des gardes, les médecins et le personnel des établissements pénitentiaires. Voilà pourquoi c’est une cible facilement identifiable et en rapport avec la domination.

La perspective anarchiste insurrectionnelle va au-delà du fétichisme du feu et des armes. Notre approche de l’anarchie est une lutte qui n’a aucun intérêt à être un spectacle télévisé, ni d’un besoin « d‘auto-promotion » en raison du manque de promotion de l’Etat. Donc c’est une communication simple et directe qui correspond à l’exigence du moment par rapport aux compagnons en grève; un moyen simple et facilement reproductible.

Le point de vue anarchiste insurrectionnelle est une méthode souvent adapté à la généralisation des conflits individuels et sociaux qui subvertissent la normalité. Ouvrons les possibilités d’une vraie révolution pour l’insurrection comme de nombreuses autres formes (dans leur intégralité). Une méthode anarchiste pour un changement radical et profond.

Sans médiation ni dialogue avec l’Etat et le Capital !

Par la lutte contre le pouvoir quel qu’il soit, y compris le soi-disant pouvoir populaire qui nous est vendu comme de l’autonomie !

Traduit de l’espagnol de contrainfo, par lechatnoiremeutier

Oct 182014
 

Le 17 octobre 2014, les compagnons Carlos López, Mario González, Fernando Barcenas et Abraham Cortés ont mis un terme à leur grève de la faim qu’ils ont commencé le 1er octobre.

Les compagnons vont bien, sans complications ou dommages physiques. Ils donneront bientôt les raisons et motifs visant à mettre fin à cette grève.

Pour l’instant c’est la seule information que nous avons pour le moment.

Liberté pour tous ! A bas les murs des prisons !

Croix Noire Anarchiste Mexico

Oct 152014
 

Depuis le 1er octobre 2014, quatre prisonniers anarchistes dans différentes prisons de la ville de Mexico sont en grève de la faim illimitée: Carlos López Marín (« El Chivo« , qui est détenu dans la prison de l’Est), Mario González (dans la Tour médicale Tepepan) et Fernando Bárcenas et Abraham Cortés Ávila (dans la prison du Nord).

Ci-dessous un rapport sur leur état de santé après 15 jours de grève de la faim:

Carlos López a perdu près de 7 kilos. Le compagnon est toujours séparé de la population carcérale générale, il est détenu dans la zone des nouveaux arrivants où il a été transféré depuis le début de la grève de la faim. Durant les premiers jours, il partageait une cellule avec un autre prisonnier, mais depuis le 5 octobre, il est détenu seul. Il ressent des remontées gastriques, des brûlures d’estomac, de l’affaiblissement et de légers vertiges. Ils l’ont transféré de la cellule jusqu’à 4 fois par jour pour l’emmener au service médical de la prison, surtout tôt le matin, pour prendre ses données et mesurer sa tension artérielle, étant donné que la balance ne fonctionne pas et ils n’ont pas l’équipement nécessaire pour vérifier les taux de glucose dans le sang. Le lundi 13 octobre, une infirmière de l’équipe médicale de solidarité a tenté de l’examiner, mais elle s’est vue refuser l’entrée pour ne pas avoir l’autorisation. La condamnation de Carlos López, Amélie Pelletier et Fallon Poisson, accusé-es de dommages et attaques à la paix publique dans la première affaire jugée au niveau local, devrait être prononcée dans les dix prochains jours.

Mario González est confronté à des problèmes, surtout au pancréas, ainsi que les changements observés dans les reins et le foie pendant les jours de grève de la faim. Son état est considéré comme stable par un médecin de l’équipe médicale de solidarité qui l’a examiné mardi. Il continue à présenter les mêmes symptômes qu’il avait les jours précédents (douleur abdominale, l’anxiété, irritabilité et difficultés de concentration), sauf que la douleur abdominale a augmenté. Le directeur de la Tour médicale Tepepan a entravé l’accès au dossier médical de Mario; le médecin solidaire a eu accès au dossier le 15 octobre, et demande que des essais en laboratoire soient de nouveaux faits. Le compagnon a perdu environ 10 kilos. Il est actuellement en attente de la résolution d’une requête qu’il a déposé contre la condamnation.

Fernando Bárcenas a perdu 3 kilos et 200 grammes, tandis qu’Abraham Cortés (dont la condamnation à 13 ans et 4 mois de prison a été récemment confirmé par une cour d’appel) a perdu 3 kilos et 900 grammes. Les deux camarades restent dans la zone des nouveaux arrivants où ils sont détenus depuis leurs incarcérations respectives. Ils sont sortis des cellules pour un contrôle médical à plusieurs reprises dans les premières heures de la matinée, de sorte qu’ils ne puissent pas avoir suffisamment de repos après une bonne nuit. Ils ont une restriction d’appels téléphoniques.

Note de Contra Info:

Mario González et Abraham Cortes ont été arrêtés le 2 octobre 2013, au cours des commémorations combatives du massacre de Tlatelolco en 1968. Mario González a été condamné à 5 ans et 9 mois de prison, accusé d’attaques contre la paix publique, tandis qu’Abraham Cortes a été condamné à 13 ans pour tentative d’homicide.

Fernando Bárcenas Castillo a été arrêté le 13 décembre 2013 au cours des protestations contre la hausse du prix des billets de métro de la ville de México. Il se trouve depuis en prison préventive, accusé d’avoir brûlé l’arbre de Noël de l’entreprise Coca-Cola.

Carlos López Marin a été arrêté avec Amelie Pelletier et Fallon Poisson le 5 janvier 2014 pour participation à l’attaque (à coups de pierres et de cocktails molotov) des installations du Secrétariat des Communications et des Transports et d’un concessionnaire Nissan dans la ville de México. Le 17 février 2014, les accusations de terrorisme sont abandonnées, mais pas les mesures de prison préventive, puisque les accusations de dégradations et d’attaques à la paix publique restaient en vigueur. Le procès à leur encontre a débuté le 3 avril 2014, mais on a appris le 16 mai 2014 que les compagnon-ne-s devraient se présenter à deux procès en pénal distincts : l’un inclus dans la juridiction locale pour l’attaque au concessionnaire NISSAN, et l’autre au niveau fédéral pour l’attaque au Secrétariat des Communications et des Transports. Selon les dernières nouvelles dont nous disposons, la dernière audience du premier procès a eu lieu le 16 juin 2014, sans que les sentences ne soient prononcées, tandis que le second procès reste ouvert.