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Une injonction remise, puis brûlée, au blocage ferroviaire de Tyendinaga, alors que de plus en plus de gens s’y joignent

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Fév 102020
 

*Appel aux dons – fonds de défense légale*

De Real People’s Media

Une injonction obtenue par le CN est retournée à la terre, alors que de plus en plus de gens se rassemblent au passage à niveau de Wyman Road.

TYENDINAGA MOHAWK TERRITORY – Le blocage ferroviaire au passage à niveau de Wyman Road, dans le territoire mohawk de Tyendinaga, a pris de l’ampleur depuis qu’il a commencé jeudi après-midi. Une caravane, un toilette portable et une tente sont arrivés sur place. Et le nombre de personnes présentes est en augmentation.

La raison du blocage est simple, selon Dalton McKay.  « Je suis ici pour en soutien et en solidarité avec les Wet’suwet’en pour les aider à lutter contre la destruction de leur vie et de leurs maisons pour un pipeline » a-t-il déclaré à Real People’s Media.

Plus de 50 Mohawks et sympathisant.es étaient rassemblé.es aujourd’hui à l’endroit où la ligne ferroviaire du CN traverse la Wyman Roas, juste au nord du territoire Mohawk de Tyendinaga. Le drapeau des Mohawk Warriors flottait tout en haut du poteau signalant le passage à niveau, et un grand camion charrue était stationné juste au sud de la voie ferrée.

La présence médiatique et policière sur les voies ferrées était beaucoup plus importante que les jours précédents. Une injonction a été émise hier contre  « John Doe, Jane Doe et personnes inconnues » .

Un important contingent d’agents du OPP (Ontario Provincial Police) et du CN est arrivé avec l’intention de remettre davantage de documents, mais l’injonction a été brûlée sur les voies ferrées, sous les yeux des médias et de la police. Après que l’injonction ait été brûlée devant eux, l’OPP et le CN sont remontés dans leurs véhicules et sont partis rapidement sans remettre plus de documents.

Une déclaration a été diffusée sur les médias sociaux en réponse :

     « En ce qui concerne « l’injonction » remise aux gens de Tyendinaga, Nous, le peuple, refusons que vos lois nous soient imposées. Nous avons, et avons toujours eu, nos propres lois et coutumes, avant, pendant et après vos tentatives de génocide et d’assimilation. Un document nous ordonnant de quitter notre terre, et/ou de permettre le passage de biens étrangers sur notre territoire n’a aucun sens. Nous tiendrons nos positions et, comme indiqué, nous ne partirons pas tant que la GRC ne se sera pas retirée des territoires traditionnels Wet’suwet’en. »

L’ambiance sur le site était bonne toute la journée, des gens venant continuellement apporter leur support, arrivant avec de la nourriture, du bois et d’autres nécessités. McKay a déclaré :  « Le soutien de la communauté a été d’une grande aide, chaque jour nous recevons de la nourriture, de l’eau, des couvertures… ce dont nous avons encore le plus besoin en ce moment, ce sont des prières, du soutien et du bois de chauffage.»  Interrogé sur le moral des troupes au blocage, quelqu’un a pointé vers les coyotes qui avaient commencé à hurler au loin.

Les jeunes reconnaissent l’importance de cette action. Comme l’a expliqué un jeune Mohawk :  « C’est notre terre, c’est notre eau, nous sommes ici à nous battre pour récupérer ce qui nous appartient et ce dont nous avons besoin pour que les sept générations puissent encore se battre et avoir un territoire.»

Appuyez les chefs héréditaires Wet’suwet’en

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Fév 072020
 

Des Chefs héréditaires Wet’suwet’en

LES DÉFENSEUR.ES DE LA TERRE ONT BESOIN DE VOTRE AIDE

À ce moment même une bataille épique est en cours, et sa conclusion déterminera le destin de la côte du nord-ouest. Les implications de ce conflit se feront sentir partout autour de la planète pour des générations à venir.

Au moment où vous lisez ces lignes, la GRC mène une opération immense afin d’extraire des personnes autochtones et leurs allié.es de territoires Wet’suwet’en non-cédés afin que des riches compagnies pétrolières puissent bâtir un corridor énergétique au coût de plusieurs milliards de dollars pour amener du gaz de schiste sur les marchés mondiaux.

Le peuple Wet’suwet’en et leurs allié.es sont toujours déterminés à faire en sorte que cela ne se produise jamais.

D’un côté, les forces de certains des plus grands pollueurs du monde, le gouvernement et la GRC qui agissent en fonction de leurs intérêts, avec des milliards et des milliards derrière la création d’un corridor énergétique d’envergure pour amener le gas de schiste à Kitimat pour l’exportation.

De l’autre, des peuples autochtones qui affirment leur droit de protéger leur territoire ancestral en créant un centre de guérison dédié à traiter les traumatismes intergénérationnels qui résultent de la colonisation.

Les choses bougent rapidement en ce moment, et il est à nouveau temps de défendre la terre.

Au travers de ces événements, plusieurs personnes ont mis leurs corps dans le chemin des pétrolières. Le peuple Wet’suwet’en a montré à la planète entière à quoi ressemble la vraie détermination, en défiant sans arrêt et sans compromis certaines des plus grandes entreprises pétrolières du monde. Par ailleurs, des gens de partout sur l’Ïle de la Tortue et la planète ont voyagé de grandes distances pour démontrer leur solidarité avec la lutte de la nation Wet’suwet’en, et ont également mis leurs corps dans le chemin des pétrolières.

Des documents légaux prouvent que la GRC était prête à utiliser une force létale contre les défenseur.es de la terre lorsqu’elle a attaqué le point d’accès Gidimt’en, le 7 janvier 2019. Il n’est pas exagéré d’affirmer que les défenseur.es du territoire risquent leur vie pour défendre la terre et l’eau, au bénéfice des générations futures.

Les circonstances de vie de beaucoup de gens font qu’il ne fait pas de sens pour eux et elles de voyager jusqu’à la ligne de front. Nous savons que plusieurs sont profondément préoccupé.es par cette cause, et espèrent ardemment contribuer au mouvement. En vérité, le mouvement dépend aussi de la contribution de différentes personnes utilisant différents moyens pour amener de l’énergie au camp. Une manière significative d’aider est par les dons.

Nous demandons votre aide afin de créer un fonds spécifiquement pour supporter les gens qui font face à des accusations criminelles suite à des actions directes menées en lien avec la défense du territoire Wet’suwet’en contre l’industrie et la GRC.

Qui recevrait ce soutien?

Ce soutien irait à des défenseur.es Wet’suwet’en de la base qui travaillent sous le leadership de leurs chefs héréditaires. Spécifiquement, il serait reçu par des membres du clan Likhts’amisyu, et administré par eux et elles pour tous et toutes les arrêté.es accusé.es au criminel.

Pour plus d’information sur le clan Likhts’amisyu, veuillez visiter leur site web, www.likhtsamisyu.com.

Les fonds seront déposés dans un compte conjoint qui sera administré par des membres du clan Likhts’amisyu, incluant le chef de la Maison du Soleil Smogelgem et les chefs alliés Dtsa’Hayl et Kloumkun. La trésorière est Angie Gagnon, la fille du chef Dtsa’Hayl.

Les fonds seraient utilisés comment?

Pour supporter les gens qui font face à des accusations criminelles et des gens qui pourraient être trouvés coupables et subir des conséquences telles que l’incarcération, l’arrestation à domicile, des conditions de probation restrictives, du service communautaire mandaté par la cour, etc. Les fonds seraient utilisés pour des choses comme :

-Frais d’avocat

-Transport de et vers la cour

-Coûts de recherche (e.g. demandes en vertu de la Loi d’accès à l’information, analyse légale, etc.)

-Coûts reliés à l’incarcération (téléphone, magasin, loyer, casier, etc.)

-Coûts reliés à l’obtention d’un loyer à la sortie de prison

-Coûts reliés à la thérapie pour des gens qui subiraient des séquelles psychologiques de leur arrestation ou de leur expérience au sein du système de justice.

Les fonds seront déposés dans un compte qui sera administré par trois chefs héréditaires Wet’suwet’en et une trésorière. Les décisions au sujet de l’allocation des fonds seront prises par consensus en accord avec la loi Wet’suwet’en. Afin d’assurer la transparence, les transfères de fonds nécessiteront deux signataires et les documents financiers seront rendus disponibles aux autres chefs sur demande.

Comment donner :

Par transfert électronique à likhtsamisyu@gmail.com. Veuillez vous assurer que la réponse à la question de sécurité est SaYikh2020 .

Il est aussi possible de donner sur la page Gofundme du clan Likhts’amisyu : https://www.gofundme.com/f/support-the-wet039suwet039en-hereditary-chiefs

*** Veuillez noter que puisque les Conditions d’utilisation de Gofundme interdisent de lever des fonds pour les personnes accusées d’un crime, nous ne sommes pas en mesure d’utiliser Gofundme spécifiquement pour un fonds légal.***

Un chèque peut aussi être fait au nom de « Likhts’amisyu » et envoyé aux chefs. Veuillez écrire à likhtsamisyu@gmail.com pour une adresse postale.

Merci d’avance pour votre généreux appui!

Le ministre fédéral de la justice ciblé en réponse à l’invasion de la GRC en territoire Wet’suwet’en

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Fév 072020
 

Soumission anonyme à MTL Contre-info

L’État canadien n’est pas invulnérable. Alors que le Canada envoie une armée sur les territoires Wet’suwet’en pour essayer de forcer le passage du pipeline de Coastal GasLink, c’est le moment de trouver les points faibles du pouvoir économique et politique de ce pays et d’attaquer.

Hier soir, en réponse au début du raid de la GRC, nous avons visité le bureau de circonscription de David Lametti, ministre fédéral de la justice, à Montréal. Nous avons vidé un extincteur rempli de peinture à l’intérieur après avoir brisé la vitrine.

Aucune facette de la « justice » canadienne – ni ses cours, ni ses lois, ni ses flics, ni ses ministres – n’a de légitimité sur des terres volées et nous allons faire en sorte que ça se sache.

Nique la GRC. Solidarité inconditionnelle avec les défenseur.se.s de la terre Wet’suwet’en.

Alerte : La descente de la GRC en territoire Wet’suwet’en est imminente

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Fév 052020
 

Des Chefs héréditaires Wet’suwet’en

4 février 2020 – Publication immédiate – Territoire Wet’suwet’en (Smithers, Colombie-Britannique)

Les chefs héréditaires Wet’suwet’en étaient en discussion avec la province de la Colombie-Britannique durant deux jours dans l’objectif d’obtenir une résolution pacifique quant à l’exécution de l’injonction de Coastal GasLink. Un médiateur était en contact avec CGL durant ces discussions pour les informer des avenues potentielles avec la province.

Les chefs héréditaires Wet’suwet’en proposent le « processus de développement Wiggus » (un processus d’engagement de respect mutuel) entre la province de la Colombie-Britannique et les chefs héréditaires Wet’suwet’en.

Durant les discussions avec la province de la Colombie-Britannique, Coastal GasLink a accepté de ne pas mettre l’injonction à exécution pour une période de sept jours. Coastal GasLink a refusé de voir quelconque progrès dans cette discussion. L’exécution de l’injonction est donc imminente.

Les chefs héréditaires Wet’suwet’en sont toujours engagés avec le processus de développement Wiggus et continueront de discuter avec la province de la Colombie-Britannique.

La préoccupation principale des chefs héréditaires Wet’suwet’en est que la sécurité soit la priorité de tous les Wet’suwet’en.

[Vidéo] Une sortie de l’autoroute 720 bloquée en appui aux Wet’suwet’en

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Jan 302020
 

Soumission anonyme à MTL Contre-info. Vidéo de subMedia.

En pleine heure de pointe, jeudi matin, une cinquantaine de personnes ont bloqué une sortie de l’autoroute 720 au centre-ville de Montréal, en solidarité avec les peuples autochtones Wet’suwet’en qui sont en lutte contre la construction d’un oléoduc sur leur territoire non-cédé. Des barricades enflammées ont été errigées au coin des rues St-Marc et René-Levesque afin de bloquer la circulation automobile. Une bannière #WetsuwetenStrong a été déployée sur un panneau de signalisation afin d’exprimer la solidarité avec les souverainetés autochtones.

Cette action s’inscrit dans la lignée d’événements organisés en appui aux Wet’suwet’en qui résistent et luttent contre la destruction de leur territoire depuis plus de 10 ans. À Montréal et à travers le Canada, plusieurs actions répondent à l’appel à la solidarité lancé par les Wet’suwet’en en réaction à l’intervention de la GRC pour empêcher l’accès à leur territoire le 13 janvier dernier.

L’état canadien, via ses forces armées et sa justice coloniale, s’attaquent présentement aux defenseur.es des territoires Wet’suwet’en afin d’assurer le déploiement des 670 kilomètres de pipeline de gaz naturel liquéfié de Coastal GasLink (CGL).

Dans ce moment critique, continuons de répondre à l’appel des Wet’suwet’en et supportons leur lutte par tous les moyens nécessaires.

Plus d’infos sur https://unistoten.camp

#WetsuwetenStrong

Les chefs héréditaires Wet’suwet’en expulsent Coastal GasLink (4 janvier)

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Jan 262020
 

Du Camp Unist’ot’en

Publié le 4 janvier 2020. L’avis d’expulsion est toujours en vigueur.

POUR DIFFUSION IMMÉDIATE : Smithers, C.-B.

Les chefs héréditaires Wet’suwet’en, représentant les cinq clans de la nation Wet’suwet’en, ont émis un avis d’expulsion visant la société Coastal GasLink (CGL). L’expulsion de CGL prend effet immédiatement et s’applique au Camp 9A sur le territoire de Dark House, ainsi qu’aux territoires voisins des clans Gidimt’en, Tsayu et Laksamshu. Des chefs héréditaires sont présents sur les territoires de Gidimt’en et de Gilseyhu afin de monitorer l’expulsion.

La société Coastal Gaslink a violé la loi Wet’suwet’en sur le droit de passage. Elle a bulldozé nos territoires, détruit nos sites archéologiques, et occupé nos terres avec des camps de travailleurs. La GRC ainsi que des sociétés de sécurité privées ont continuellement fait obstacle aux droits constitutionnellement protégés du peuple Wet’suwet’en d’accéder à ce terrritoire pour la chasse, la trappe et les cérémonies.

Dans l’affaire Delgamuukw-Gisdaywa c. La Reine, les tribunaux ont reconnu que notre peuple, représenté par nos chefs héréditaires, n’a jamais cédé ni abandonné le titre de propriété sur l’entièreté des 22 000 km2 du territoire Wet’suwet’en. L’octroi d’une injonction interlocutoire par la Cour Suprême de la Colombie-Britannique démontre que les tribunaux canadiens peuvent renier leurs propres décisions et nier notre juridiction, du moment que c’est dans leur intérêt. Nous ne pouvons compter sur ces tribunaux pour protéger nos territoires ou nos droits en tant que peuples autochtones.

La loi Wet’suwet’en, l’Anuc ‘nu’at’en, n’est pas une  » croyance  » ou un  » point de vue « . Cette loi est la base sur laquelle repose notre gestion durable des territoires et de nos relations les uns avec les autres ainsi qu’avec le monde qui nous entoure. C’est grace à cette loi millénaire que nos territoires sont intacts aujourd’hui. Elle est au cœur de notre identité. La criminalisation continue de nos lois par les tribunaux et la police industrielle du Canada est une tentative de génocide, une tentative d’extinction de l’identité Wet’suwet’en.

Nous réitérons que l’Anuc ‘nu’at’en demeure la loi suprême sur les terres des Wet’suwet’en et qu’elle doit être respectée. La responsabilité et l’autorité de protéger nos territoires non cédés nous appartient. La protection de nos yintah (territoires traditionnels) est au cœur de l’Anuc ‘nu’at’en. Nous continuerons à pratiquer nos lois pour les générations futures.

Depuis toujours, le peuple Wet’suwet’en contrôle l’accès à son propre territoire. Depuis 10 ans, chaque fois que quelqu’un qui n’est pas membre de Dark House demande l’accès au territoire, un protocole de consentement préalable, libre et éclairé (FPIC) a été appliqué. Dark House n’a pas été en mesure de mettre en œuvre ce protocole depuis janvier 2019, date à laquelle l’injonction provisoire a pris effet. Ce protocole est appliqué en vertu de la loi Wet’suwet’en ainsi que de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA). Cette déclaration garantit aux peuples autochtones le droit à un consentement libre et éclairé préalablement à tout développement sur leurs territoires.

Nous nous attendons à ce que Coastal GasLink se conforme à notre avis d’expulsion de manière pacifique. Nous exigeons que la Colombie-Britannique respecte son engagement à mettre en œuvre la DNUDPA et ordonne à la GRC de respecter nos droits et de s’abstenir de toute ingérence dans la loi Wet’suwet’en.

Solidarité avec les Wet’suwet’en : Les voies ferrées sabotées à répétition en Ontario

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Jan 242020
 

Soumissions anonymes à North Shore Counter-Info

Appel à la perturbation des voies ferrées ici.

01/07/2020 – Hamilton : sabotages simultanés de goulets d’étranglement ferroviaires en solidarité avec les défenseur.ses de la terre Wet’suwet’en

Il y a une décennie, les Wet’suwet’en en ont inspiré plus d’un.e lorsqu’il.les ont réoccupé leurs territoires non-cédés, afin d’amorcer un processus de guérison et de s’assurer que la terre soit protégée ainsi qu’elle le nécessite pour assurer le maintien de la vie et des pratiques du peuple Wet’suwet’en, la continuité de leur existence sur leur territoires traditionnels.

Il y a un an, la GRC a violemment envahi ces territoires pour permettre à l’industrie d’y avoir accès.

Il y a une semaine, l’état canadien a criminalisé Anuk’nu’at’en – la loi héréditaire Wet’suwet’en – en accordant une injonction criminalisant les personnes autochtones et leur allié.es advenant que celles-ci protègent le Yintah des forces destructives de l’industrie.

Nous honorons ces anniversaires par un énorme fuck you à l’état.

Tôt ce matin, des colons ont répondu à plusieurs appels à l’action : ceux qu’ont émis de multiples groupes de maisons (house groups) [NdT: Chaque clan Wet’suwet’en compte un certain nombre de groupes familiaux appelés Yikhs, ou groupes de maisons] Wet’suwet’en après avoir courageusement évincé l’industrie de leurs territoires non-cédés, ainsi que celui émis par des colons pour les colons.

Nous avons contribué d’un petit geste à la résistance menée contre notre gouvernement et la violence qu’il perpétue. Nous avons simultanément perturbé trois goulets d’étranglement des voies ferrées du CN et du CP, situés à des endroits stratégiques, avec l’intention de bloquer toute circulation entrant et sortant de soit-disant Hamilton. Nous l’avons fait en utilisant des fils de cuivre et des câbles de démarrage [NdT: communément appelés « câbles à booster »] attachés aux câbles des éclisses du chemin de fer, afin de créer un court-circuit – vidéo démonstratif (ouvrir avec TOR). Cette méthode est sécuritaire, facile, relativement peu risquée et facilement reproductible.

Le CN a expédié et continuera d’expédier des tuyaux vers des parcs de stockage en préparation pour de la construction. Il est aussi doté de très grands segments d’infrastructure isolés. Les premières installations ferroviaires ont eu un impact profond et durable sur la colonisation de l’île de la Tortue ; les prendre pour cible aujourd’hui a un impact direct sur l’économie du soit-disant canada.

Bien que les perturbations causées par ces actions ne soient que temporaires, nous espérons envoyer un message fort : le respect de la souveraineté autochtone – partout sur l’île de de la Tortue – n’est pas facultatif. Nous ne serons pas passifs.

Nous espérons que d’autres, à travers l’île de la Tortue – en particulier les colons – se joindront à nous pour garantir qu’il ne s’agit que du début, et pour rendre l’oléoduc de Coastal GasLink intenable à la fois pour l’industrie et pour l’état, de toutes les manières possibles.

***

01/14/2020 – Toronto : Explorations sur les perturbations ferroviaires en solidarité avec les Wet’suwet’en

Ce week-end à Toronto, inspiré.e.s par les actions des défenseurs de la terre Wet’suwet’en ainsi que par un récent appel à la perturbation des chemins de fer, certain.e.s anarchistes ont pris les rails pour contribuer à l’élan des manifestations, des blocages et des actes de sabotage ayant eu lieu sur l’île de la Tortue.

Nous avons hésité à rédiger cet article car, en raison de notre manque d’expérience et de l’endroit choisi, nous ne pouvons pas être absolument certain.e.s que notre tentative de sabotage ait réussi. Mais finalement, nous avons voulu partager notre message de solidarité et notre engagement dans cette lutte, ainsi que nos propres réflexions et connaissances acquises lors de cette première tentative.

Les articles publiés précédemment sur ce site constituent un excellent point de départ pour apprendre à exécuter ce type de mission. Nous avons choisi un site à proximité d’un nœud ferroviaire et avons utilisé du fil de cuivre pour imiter la présence d’un train sur les rails, ce qui bloquerait (avec un peu de chance !) tout trafic ferroviaire jusqu’à ce que la perturbation soit éliminée. Comme nous n’avions pas de câbles de raccordement, qui assurent une connexion plus fiable, nous avons rapidement frotté nos points de jonction avec de la laine d’acier pour nous assurer qu’aucune rouille n’entravait la connexion.

Tel que mentionné dans les articles précédents, et ça s’est avéré juste dans notre cas, il peut falloir un certain temps avant de trouver un endroit où les éclisses (qui sont un endroit idéal pour se connecter) s’alignent sur les deux rails. La prochaine fois, nous chercherons probablement d’autres endroits où quitter la voie ferrée en toute sécurité, ce qui nous donnera des options plus proches de là où nous nous sommes retrouvé.e.s, au lieu de devoir revenir en arrière jusqu’à l’endroit où nous étions entré.e.s.

Un peu plus tard, en quittant les lieux, nous avons vu un camion avec les phares allumés au bord de la voie ferrée. Il est difficile de dire s’il était stationné ou s’il se dirigeait vers le site de la perturbation, mais il est bon de savoir qu’il était là.

Enfin, il aurait été bon de savoir avec certitude si l’action a réellement fonctionné. Si une connexion est établie avec succès, les barrières des passages à niveau à proximité vont s’abaisser, et il aurait donc été utile de viser un endroit proche d’une telle barrière. Sinon, on aurait pu placer un guetteur ou une guetteuse à une certaine distance du site de l’action, pour garder un œil sur un passage à niveau, ou sur toute autre activité indiquant le succès de l’action.

En conclusion, nous disons : Faites attention et lancez-vous ! Les yeux sur la ligne de front, les pieds dans la rue et… sur les voies ferrées !

***

01/18/2020 – Sabotage d’une voie ferroviaire à haute capacité

Il y a quelques nuits, un.e colon.ne anarchiste a saboté la principale voie ferroviaire transcontinentale du CN. Si TC Energy voulait transporter quoi que ce soit depuis le sud de l’Ontario, ou depuis plus loin à l’est, jusqu’au site de CGL en Colombie-Britannique, elle utiliserait probablement cette voie ferroviaire. J’ai pris soin de choisir un site isolé, comme agir seul prendrait plus de temps. J’ai utilisé la méthode avec les fils de cuivre décrite ici. Afin d’assurer une bonne connexion, j’ai utilisé de la laine d’acier et du vinaigre pour enlever la rouille des voies ferrées. Je crois que la perturbation a fonctionné, puisque le fil a émis des étincelles quand il a été connecté aux voies ferrées. Je suis parti.e rapidement – même quand on ne se sent ni pressé.e ni stressé.e, il est important de partir aussi rapidement que possible – et je suis retourné.e à la maison. Cette action était facile à faire, même pour une personne complètement inexpérimentée.

Et particulièrement en tant que colons, nous devrions continuer à trouver des opportunités de perturber ce projet. CGL continue de menacer de détruire les territoires et le mode de vie Wet’suwet’en.

Solidarité avec les Wet’suwet’en ! Nous continuerons de montrer à l’état colonial violent et à CGL que nous ne reculerons pas. Il est si facile de bloquer l’infrastructure permettant les projets d’exploitation comme CGL.

***

01/23/2020 – Gardez votre feu vif : sabotage d’un chemin de fer à Burlington

La nuit dernière, nous avons fait un sabotage au niveau d’un goulot d’étranglement de la voie ferrée à Burlington. Ce lieu a été choisi car c’est là que les lignes de Detroit et de Buffalo se rejoignent pour aller vers Toronto et Montréal. Nous avons entendu dire que c’est le carrefour de ce genre le plus fréquenté au Canada. Cette action a été faite en solidarité avec les Wet’suwet’en qui luttent en première ligne contre l’État canadien et les entreprises qu’il soutient, suite à un appel au sabotage de chemins de fer.

Pour ce faire, nous avons identifié un poste de signalisation et mis le feu à son alimentation électrique pour détruire les câbles qui l’alimentaient. En espérant que cela leur prendra un certain temps pour réparer et que la ligne restera fermée le plus longtemps possible.

Nous avons fait cela pour montrer aux personnes qui luttent sur le front qu’elles ne sont pas seules, et que d’autres sont prêtes à faire des gestes forts de solidarité si la GRC agit contre elles. Nous avons choisi ce moment tendu des négociations qui ont commencé aujourd’hui pour nourrir le feu sur les premières lignes.

Continuons à bloquer les rails, la solidarité est un outil puissant qui nous permet à toutes et tous de construire notre autonomie. La GRC, hors du territoire Wet’suwet’en et partout ailleurs !

Appel pour activités et évènements de la semaine contre la brutalité policière

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Jan 222020
 

Du Collectif opposé à la brutalité policière

Comme à chaque année, le COBP (Collectif Opposé à la Brutalité Policière) organise une semaine contre la brutalité policière orientée autour d’un thème.

Le thème de cette année est « Police partout, justice nulle part : Solidarité internationale ! ».

Les révoltes se multiplient au niveau international : Chili, Colombie, Algérie, Équateur, Haïti, Irak, Iran, France, Hong Kong, Inde … Et le point commun de toutes ces révoltes est la brutalité policière, brutalité supportée entres autres par nos puissances coloniales, qui n’hésitent pas à équiper les polices de partout d’armes de plus en plus violentes.

Nous encourageons les collectifs et les personnes à contribuer à la semaine d’activités en organisant vos propres évènements dénonçant la brutalité policière.

Cette année, la semaine d’activités aura lieu du lundi 9 mars jusqu’au dimanche 15 mars.

Vous pouvez nous communiquer vos activités au cobp@riseup.net avant le 24 février 2020.

Notez qu’il y a déjà des événements prévus dans les plages horaires suivantes :

– Mercredi 11 mars, en soirée,
– Jeudi 12 mars, en soirée
– Vendredi 13 mars, en soirée,
– Dimanche 15 mars, en après-midi.

Assurance, courage, lien, confiance : une proposition de culture de sécurité

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Jan 222020
 

Soumission anonyme à North Shore Counter-Info

Quand on parle de culture de la sécurité, les gens vivent généralement l’une de ces deux expériences : soit iels construisent des murs et tiennent les autres à l’écart, soit iels sont iels-même exclu·e·s et n’ont pas la confiance des gens. Dans les deux cas, il y a des sentiments négatifs — la peur et la suspicion pour le premier et un sentiment d’aliénation et du ressentiment pour le second. Je dirais que ce sont les deux côtés d’une même médaille, deux expériences d’une culture de la sécurité qui ne fonctionne pas bien.

Je veux être accueillante et ouverte aux nouvelles personnes quand je m’organise. Je veux aussi me protéger du mieux possible des efforts visant à perturber cette organisation, surtout de la part de l’État, mais aussi des patrons ou de l’extrême-droite. Ça signifie que je veux avoir le genre de pratiques de sécurité qui me permettent d’être ouverte tout en sachant que j’ai évalué les risques auxquels je suis exposée et que je prends des mesures intelligentes pour les minimiser. La culture de la sécurité devrait faciliter et non pas limiter l’ouverture aux autres.

Cette proposition de culture de la sécurité repose sur un recadrage — sur le passage de la peur à l’assurance, de l’aversion au risque au courage, de l’isolement aux liens, et de la suspicion à la confiance.

Il est logique d’avoir peur — l’État est très puissant, la répression est fréquente et elle a le pouvoir de nous écraser, nous et tous nos projets. Mais je ne veux pas être paralysée par cette peur. Avec des informations précises et un bon plan, on peut commencer à transformer la peur en assurance, en sachant qu’on a des pratiques de sécurité à la hauteur des risques auxquels on fait face. En fait, sans transformer la peur, il est difficile d’imaginer comment même agir face au pouvoir de nos ennemis.

Je ne veux pas avoir peur du risque. Je veux faire le choix de mes actes en fonction de leur efficacité, de leur pertinence, de mon analyse et de mon éthique. Une bonne culture de la sécurité nous permet de faire preuve de courage dans nos tactiques collectives, car on sait qu’on peut gérer les risques. Lorsqu’on ne transforme pas l’aversion au risque, on s’auto-police et on reste confiné à l’espace d’opposition symbolique qui nous est fourni.

La répression fonctionne en isolant les gens. Je ne veux pas contribuer à cet isolement par ce que je fais pour ma sécurité et celle de mes ami·e·s. Je veux une culture de la sécurité enracinée dans l’approfondissement de nos liens les un·e·s avec les autres. Quand on ne dépasse pas l’isolement, l’organisation risque de ressembler au travail et de ne pas permettre le genre de relations qui nous transforment vraiment, d’une manière qui nous fait ressentir le monde que nous voulons créer.

Je ne veux pas me méfier des gens que je rencontre. C’est toxique et ça désagrège les espaces de lutte qu’on crée. Plutôt que de ressentir de la méfiance envers quelqu’un, je préfère me demander : « Qu’est-ce que ça prendrait pour que je fasse confiance à cette personne ? » Je veux aller vers les gens et essayer de transformer la méfiance en confiance.

Je voudrais proposer une définition de la culture de la sécurité pour donner une perspective à cette conversation. La culture de la sécurité est un ensemble de pratiques développées pour évaluer les risques, contrôler les flux d’informations dans nos réseaux, et construire des relations de lutte fortes. Il existe d’innombrables cultures de la sécurité possibles, mais ce qui est important c’est qu’elles viennent de discussions claires et explicites à propos des risques et s’adaptent au changement. Dans l’exemple qui suit, le rapport au risque s’adapte à l’évolution des actions et à la répression. Les pratiques de culture de la sécurité qui y sont mentionnées seront expliquées plus loin.

Dans une mobilisation contre un oléoduc, là où je vis, on a voulu mettre l’accent sur les actions directes de masse visant les infrastructures pétrolières. On a établi que, pour les premières étapes de cette mobilisation où on se concentrait sur la sensibilisation et la recherche, le risque qu’on courait était très faible et qu’on pouvait en toute sécurité faire participer de nombreuses personnes à ces étapes, et partager ouvertement les infos par n’importe quel moyen. Quand on a commencé à planifier des actions symboliques, cette considération n’a pas beaucoup changé, mais quand on a commencé à planifier des choses comme bloquer des routes ou manifester devant un commissariat, l’élément de surprise est devenu une considération plus importante. En dehors des risques pénaux encourus, nos actions seraient tout simplement moins efficaces si elles étaient connues à l’avance. On a donc cessé d’utiliser des moyens de communication publics ou facilement surveillés et on a commencé à demander que les gens ne communiquent les détails qu’à des personnes de confiance ayant l’intention de participer.

Peu après le début de cette phase de la mobilisation, un dispositif policier national appelé Joint Intelligence Group (JIG) s’est formé pour défendre les oléoducs, avec la participation de différents services de police et de renseignement. Les JIG et les dispositifs de ce genre constituent une menace spécifique envers les luttes de toutes sortes, car ils visent directement à perturber les luttes et disposent d’importantes ressources. Donc, même si nos actions n’ont pas changé, on a repensé notre rapport au risque et on a décidé d’isoler les organisateur·ice·s des actions de possibles accusations de conspiration en planifiant les actions au sein d’un petit groupe opaque. On pouvait inviter à participer des personnes en qui on avait confiance, et on pouvait prendre des mesures pour établir cette confiance, comme vérifier les identités les uns des autres. Mais on ne planifierait plus les actions ouvertement au niveau du réseau plus large de personnes intéressées par le travail de sensibilisation. Grâce à ce changement, quand on s’est orienté vers le sabotage d’infrastructures critiques, il nous a suffi d’élargir le noyau qu’on avait formé et d’encourager d’autres groupes à s’organiser de la même manière. La coordination des groupes (groupes passés par un vouching, voir ci-dessous) se faisait via des réunions rassemblant des représentant·e·s de chaque groupe, où le rôle de chacun était décidé.

(Ce modèle d’organisation, comme tous les autres modèles, vient évidemment avec ses forces et ses faiblesses. Mon intention dans ce texte n’est pas de faire l’apologie d’une manière de s’organiser en particulier, bien que j’aie plus d’expérience avec certaines qu’avec d’autres.)

Avant d’approfondir des idées et des pratiques spécifiques, je veux parler d’une objection courante que les gens ont à l’égard des discussions sur la culture de la sécurité dans leur lutte : « Je ne fais rien d’illégal donc je n’ai pas besoin de penser à la sécurité ». Ou alors plus spécifiquement, mais l’objection sous-jacente est la même : « Je ne parle de rien d’incriminant, inutile de me préoccuper de la surveillance », ou « En général, je ne me fais pas arrêter à la frontière, donc je n’ai pas à me soucier des tas de brochures anarchistes dans ma voiture ».

C’est l’État et nul autre qui décide de réprimer ou de saper les luttes — ce qui ne passe pas forcément pas la criminalisation d’actions spécifiques. Personnellement, j’ai eu un certain nombre de condamnations pénales : j’ai passé environ un an en prison, deux ans en détention à domicile, et à peu près cinq ans avec diverses restrictions de liberté. Toutes ces condamnations étaient pour des activités de lutte de routine que l’État a choisi de réprimer pour des raisons qui lui sont propres. J’ai été condamnée à huit mois de prison pour avoir aidé à organiser des réunions et pour avoir écrit et distribué un appel à une manifestation lors d’un contre-sommet ; quelques années plus tard, j’ai été condamnée à un an pour avoir distribué un tract annonçant une manifestation et y avoir ensuite participé. Dans ces deux cas, il y a eu des dégâts matériels lors des manifestations, mais je n’en ai jamais été accusée. L’État a plutôt choisi d’utiliser des accusations de conspiration pour cibler des gens s’organisant de manière visible et routinière comme je l’ai fait à maintes reprises. Une dynamique similaire s’est manifestée dans d’autres affaires de conspiration aux États-Unis et au Canada. Mon expérience n’a rien d’exceptionnel.

Je ne raconte pas ça pour me positionner comme victime — je veux m’organiser pour menacer le pouvoir, donc il me semble logique d’être ciblée pour ça. Ce qui est notable, c’est que l’État choisisse de criminaliser la distribution de tracts et l’organisation de réunions afin d’intimider ou de faire des exemples. Même si ce genre de répression ne se produisait que dans 1% des cas (bien que ça semble arriver plus souvent), on doit faire attention et s’organiser en conséquence avec des pratiques de sécurité adaptées. Sinon on aura plus d’autre choix que de préventivement restreindre nos activités, intérioriser la répression et intégrer la crainte et la faiblesse à nos pratiques.

Ceci dit, la culture de la sécurité ne consiste pas seulement à se protéger des accusations pénales. Il s’agit d’empêcher que nos activités soient perturbées. La criminalisation est une menace particulière, mais c’est loin d’être la seule.

Pendant le contre-sommet où j’ai été accusée de conspiration, seuls deux des seize infiltré·e·s du JIG étaient impliqués dans le procès lui-même. Les autres avaient changé des mots de passe de sites Web et d’adresses électroniques, dirigé des autobus vers les mauvais endroits, volé du matériel médical, répandu des rumeurs pour aggraver certains conflits, et même tenté de piéger des jeunes dans un étrange complot autour d’un attentat à la bombe. Toutes ces actions policières ont eu un effet extrêmement perturbateur, sans jamais avoir besoin de recourir au pouvoir des tribunaux, et on ne connaîtra sans doute jamais l’étendue de leur impact.

On a déjà vu que le maintien de l’élément de surprise est souvent une considération importante en matière de sécurité. Un exemple dans notre région est l’organisation de manifs devant des prisons en soutien aux personnes à l’intérieur : en les organisant discrètement, on peut avoir une liberté de mouvement et d’action pendant un certain temps avant que la police ne soit en mesure d’intervenir. Ou imaginons qu’une section de l’IWW tente de lancer une mobilisation de type « Réclame ta paye » contre un patron — iels devront prendre des mesures pour se protéger contre des poursuites au civil ou le risque d’être ciblé·e·s par une entreprise de sécurité privée. Ou bien prenons le travail que font les antifascistes pour identifier l’extrême-droite — iels doivent se prémunir contre la divulgation de leurs propres informations personnelles et contre les violences dont iels pourraient faire l’objet dans la rue. Il y a aussi de plus en plus d’entreprises de sécurité privées engagées pour défendre des intérêts privés (et celles-ci peuvent faire des choses que la police ne peut ou ne veut pas faire), ce qui est arrivé à plusieurs reprises ces dernières années dans les luttes de défense de terres menées par les autochtones.

Les préoccupations en matière de sécurité sont déjà en grande partie intégrées dans nos modes d’organisation. Pour bâtir une culture de la sécurité, il faut évaluer les risques de manière explicite au-delà de quelques actions spécifiques, et adopter des pratiques claires conçues pour nous garder en liberté et assurer l’efficacité de nos actions, quelles que soient les formes que prennent nos luttes. Pour ça, il faut se concentrer sur la mise en place de liens solides, tout en créant un climat de confiance où il est possible d’agir avec assurance.

Voici selon moi quelques principes de base de culture de la sécurité :

Les « Deux Jamais ». Même s’ils sont relativement bien connus, ces deux points sont aussi un peu inadéquats. Dans leur forme a plus simple, ils sont : « Ne jamais parler de sa propre implication dans une activité illégale. Ne jamais parler de l’implication de quelqu’un d’autre dans une activité illégale. »

Mais c’est inadéquat, parce que la majorité de ce qu’on fait n’est pas clairement illégal. On pourrait donc reformuler les « Deux Jamais » comme : « Ne jamais parler de sa propre implication ou de l’implication de quelqu’un d’autre dans une activité qui risque d’être criminalisée. Ne jamais parler de l’intérêt de quelqu’un d’autre pour une activité criminalisée. »

Mais cette reformulation est encore inadéquate, parce que les accusations pénales ne sont pas le seul risque. Bien sûr, avoir une règle claire et respectée par tou·te·s de ne pas parler inutilement de trucs illégaux est une bonne idée, peu importe où on se trouve. Ça inclut ce qu’on croit parfois être des blagues — des paroles en l’air à propos de combattre les flics ou d’attaquer la propriété privée peuvent sembler moins légères lorsqu’elles sont consignées dans le rapport d’un infiltré.

L’une des raisons courantes qui font qu’on se met à douter d’une personne c’est quand cette personne essaie de prendre des gens à part pour discuter de tactiques illégales. Plutôt que de dire : « Cette personne est un flic qui tente de me piéger », on peut reformuler nos propos et dire : « J’ai besoin de clarifier ma vision de la culture de la sécurité avec cette personne si on continue à travailler ensemble ». La version reformulée des « Deux Jamais » peut permettre cette clarification. Elle nous aide aussi à nous souvenir de ne pas spéculer sur qui est à l’origine d’actions anonymes accomplies autour de nous. Ça, c’est le rôle de la police. Si autour de nous, des gens se demandent qui sont derrière des actions illégales anonymes, on peut leur rappeler simplement que l’action a été faite anonymement, que ce n’est pas important de savoir qui l’a faite et que l’action parle d’elle-même.

(Une chose dont on parle moins est comment les reproches autour de la culture de la sécurité peuvent renforcer des dynamiques de pouvoir néfastes. On doit absolument parler entre nous des interactions qui nous posent problème en terme de sécurité, mais ça devrait toujours être mutuel et fait en privé si possible — décris ce que tu as entendu, présente ton idée de culture de la sécurité, demande si l’autre pense que c’est une limite raisonnable, sois prêt·e à écouter son désaccord. L’objectif est de construire une compréhension partagée pour élargir les formes d’organisation dans lesquelles on peut s’engager ensemble, pas que les autres se sentent honteux (ni se sentir soi-même plus hardcore). Une forme encore plus extrême de ça est de faire courir des ragots comme quoi quelqu’un·e serait un·e informateur·trice sans preuve à l’appui, ce qui peut avoir d’importantes conséquences sur la vie des gens ; ça a été une des causes de l’éclatement des mouvements révolutionnaires des années 1970. Un moindre exemple peut être qu’une personne plus « expérimentée » en rabaisse une autre devant un groupe pour avoir parlé d’actions qu’iel a trouvé inspirantes ou parce qu’iel parle aux mauvaises personnes.)

Un autre principe de base est de privilégier les rencontres en face-à-face. Peu importe la sécurité de tel ou tel outil de communication, on construit une meilleure confiance, des relations plus solides et on prend de meilleures décisions quand on prend le temps de se rencontrer en personne. Quand les outils de communication électroniques remplacent le face-à-face, nos conversations sont plus faciles à surveiller, génèrent plus de malentendus, et peuvent être perturbées par des décisions ou des problèmes liés aux entreprises qui gèrent ces outils. Chaque fois que tu utilises des outils électroniques pour t’organiser, demande-toi si cela remplace les rencontres face à face. Si c’est le cas, demande-toi si c’est vraiment nécessaire. Envisage de réduire ta dépendance à ces outils. (On reviendra un peu plus loin sur la sécurité informatique…)

Une des objections à ça est que plein de gens ont de l’anxiété sociale et préfèrent communiquer via leurs appareils ; une autre est que se déplacer physiquement est impossible pour certaines personnes. Comme pour d’autres sujets difficiles qui émergent quand on parle de culture de la sécurité, je t’encourage à faire face à ces obstacles et à chercher d’autres moyens de satisfaire ces besoins en essayant tout de même de prioriser les rencontres en face-à-face. Après tout, ces technologies sont très récentes et les gens ayant des handicaps de toutes sortes ont depuis longtemps développé des moyens pour se retrouver et s’organiser autour de sujets qui les affectent.

La répression est inévitable, essayer de l’éviter à tout prix ne vaut pas la peine. Peu importe la lutte, si elle est menée au-delà des limites de la légalité, elle deviendra une lutte contre la police, dont le rôle est de défendre ce monde tel qu’il est. Si on part avec l’idée que l’on évitera la répression à tout prix, on n’utilisera que des formes de luttes approuvées par la police, ce qui rend quasi impossible la construction d’un pouvoir collectif capable d’un changement transformateur. Pour ne pas subir ces limites, on doit être prêt·e·s à faire face à la répression.

Une façon de s’y préparer est de mettre la police et les prisons au centre de nos luttes dès le départ. Là-dessus, on peut apprendre des mouvements antiracistes qui gardent toujours en tête la violence raciste et physique de ces institutions et cela même lorsqu’ils choisissent de se concentrer sur des sujets plus larges. L’avantage c’est qu’on construit une culture de lutte qui n’est pas choquée par la violence policière et qui est réaliste quant à la prison. On peut aller un peu plus loin et incorporer des pratiques de solidarité dans nos luttes. Si on s’organise sur un lieu de travail on peut s’intéresser aux luttes de travailleur·euse·s ailleurs et réfléchir à des actes de solidarité pratiques avec celleux qui font face à la répression. Si on s’organise autour des questions queer on peut trouver et soutenir des prisonniers queers, et au passage apprendre à connaître les prisons de la région au cas où ça nous soit utile un jour. Si on s’intéresse aux luttes écolo et de défense de terres, il y a des défenseur·e·s de terres en prison qui font face à des accusations et à la violence physique de l’État à travers tout le continent ; incorporer des pratiques de solidarité avec elleux dans nos projets peut donner une puissante inspiration en vue d’une résistance forte et courageuse.

Un autre avntage est qu’on recevra sans doute plus de solidarité en retour puisque la prison est une grande force unificatrice qui relie toutes les formes de luttes contre la domination et l’oppression. Prendre part à une culture de résistance qui démontre de la solidarité active face à la répression peut jouer gros dans le fait de nous garder en sécurité. Comme toujours, c’est en ayant de bonnes informations qu’on combat la peur. Plus on en sait à propos du fonctionnement de la police et des prisons, plus on peut transformer notre peur en préparation et en confiance en nous-même.

Avec ça en tête, observons plus en détail ce que signifie évaluer les risques. Ce qui importe ici est de le faire ouvertement et régulièrement puis de se focaliser sur comment rendre possibles les actions qu’on pense efficaces et appropriées. Ça peut être facile d’être dans un état d’esprit réticent au risque et de s’auto-policer encore plus de ce que l’État arrive à nous contrôler. Être explicites quant aux risques peut faire en sorte que ce soit plus facile de mettre l’accent sur le courage et les possibilités.

Si vous vous posez pour prévoir une manif, pensez au ton qu’elle prendra. Est-ce que vous l’imaginez calme et ordonnée ? Ou combative et incontrôlable ? Si la police tente de vous bloquer, est-ce que vous resterez passifs où est-ce que vous essaierez de leur rentrer dedans ? Est-ce qu’il y a des actions que vous seriez excités de voir advenir pendant la manif, mais qui risquent d’être criminalisées plus que le défilé en lui-même ? Ça peut être aussi basique que de poser des autocollants ou bien ça peut être de faire des tags ou de briser des vitrines. Est-ce que votre plan sera menacé si vous perdez l’élément de surprise ? Qui ne doit pas être mis au courant de ce plan ? Comment est-ce que vous allez joindre les personnes que vous devez contacter sans risquer que les mauvaises personnes aient vent de l’initiative ? Communiquer clairement à propos du ton que prendra une action peut aider les autres à élaborer des plans autonomes appropriés.

C’est important d’éviter le laisser-aller et de ne pas prendre les choses pour acquis. Voici un exemple de 2018 :

Les organisateur·trice·s d’un salon du livre anarchiste ont décidé d’appeler à une manif de nuit après l’événement. Iels avaient mis beaucoup d’énergie dans les autres aspects de la journée et ont négligé les risques de la manif, parce qu’iels avaient organisé un tas de manifs auparavant. Néanmoins, la manif a été beaucoup plus combative que toutes les autres et il y a eu beaucoup de dégâts matériels — iels n’avaient pas évalué explicitement les risques alors que l’heure du rendez-vous approchait. Iels n’avaient pas non plus pris en compte que le JIG se focalisant sur un sommet du G7 qui allait avoir lieu dans une autre province cet été-là, ça pouvait faire que des ressources policières additionnelles les cibleraient durant cette période. Du coup les pratiques de sécurité dans l’organisation de la manif n’étaient pas adaptées aux risques que l’action a fini par comporter et tous les organisateurs du salon du livre ont été accusé·e·s de conspiration.

Il s’agit d’un exemple extrême, mais des imprévus vont toujours advenir et c’est généralement une bonne chose, vu qu’on ne peut pas vraiment prévoir notre chemin vers les situations insurrectionnelles. Rester actif·ve dans notre évaluation des risques peut réduire les chances d’être pris par surprise. Mettre régulièrement en pratique une culture de la sécurité rigoureuse peut limiter les dégâts dans ce genre de situation. Dans cet exemple, une bonne sécurité informatique, une culture de non-coopération avec la police, une solidarité persistante et active, une bonne dissimulation des visages, et un refus d’abandonner ou de se soumettre ont fait que cette situation inattendue s’est avérée bien moins problématique qu’elle aurait pu l’être, et les peronnes ont surmonté la situation la tête haute.

Comme autre exemple, prenons le développement d’une organisation de masse, par exemple une organisation antifasciste. Quel genre de questions doit-on se poser pour évaluer les risques, même si aucune mobilisation n’est prévue ? De quel niveau de confiance a-t-on besoin entre nous par rapport au genre de choses que l’on veut faire ? On risque peut-être d’être infiltré par la police donc savoir qu’on est tou·te·s les personnes qu’on prétend être peut être important. On pourrait aussi être infiltré par l’extrême droite, auquel cas comprendre nos lignes politiques respectives et construire graduellement une confiance mutuelle via des actions qui augmentent doucement en intensité peut être une solution. Le principe de privilégier les rencontres en face-à-face plutôt que la communication en ligne rendra sans doute ces objectifs plus atteignables.

Si le but est de développer les actions pendant les manifs alors il est possible de discuter de discipline et de planification. Quelles sont les attentes des un·e·s envers les autres dans des situations tendues ? Il est difficile de respecter des attentes lorsqu’elles sont vagues, et plus facile d’agir intelligemment quand on a un plan clair et qu’on arrive à estimer si ce plan fonctionne ou pas. Développer de bonnes habitudes pour gérer des situations au sein d’un groupe a d’énormes conséquences en terme de sécurité lors des manifs — ce n’est pas la culture de la sécurité, mais c’est assez lié. Par exemple, les risques des manifs antifascistes peuvent inclure d’être trop peu nombreux·ses, être encerclé·e·s ou séparé·e·s, être suivi·e·s ou identifié·e·s par l’extrême droite ou par la police, subir des blessures inutiles ou se faire arrêter.

Quelques pratiques qui tiennent compte des risques lors des manifs :

  • Un nombre minimum de participants : l’action est annulée ou modifiée par un plan B de moindre intensité si le nombre de participants minimum nécessaire n’est pas atteint.
  • Des stratégies de fuite : à quel moment partir, comment le communiquer aux autres, où se séparer, comment éviter d’être suivis, comment vérifier que chacun·e est rentré à la maison sans problème ?
  • Des points de rassemblement : se regrouper avant de se rendre vers le site d’une action.
  • Des tactiques de rue appropriées : se positionner en deux lignes avec des rôles complémentaires par exemple.
  • Des pratiques de communication claires : comment communiquer dans la rue, est-ce que vous amènerez vos téléphones, quels noms utiliser entre vous ?
  • Un moment de débriefing : comment vérifier entre vous après l’action que tous sont en sécurité, se rassembler plus tard pour faire un retour sur l’action ou offrir du soutien.

Différents groupes vivent différentes expériences de culture de la sécurité et je ne tenterai pas de parler de tout. J’aimerais plutôt en partager quelques-unes dont j’ai fait l’expérience avec les gens qui m’entourent et qui nous ont réussi. Il s’agit de la vérification d’identité, du vouching, des cercles de confiance, des structures organisationnelles flexibles et du fait d’aborder les mauvaises dynamiques de façon proactive.

La vérification d’identité sert à établir qu’une personne est bien qui elle prétend être. Lors de la mobilisation contre l’oléoduc décrite plus haut, au moment où on a voulu passer à des actions directes plus intenses, on a eu besoin d’approfondir la confiance au sein du groupe. Parce qu’on parlait régulièrement de risques, on a compris que les pratiques de sécurité utilisées pour les manifs, les petites occupations et les événements de sensibilisation n’étaient pas adaptées à nos nouveaux objectifs. Comme on s’inquiétait du risque d’infiltration, on a décidé de vérifier les identités des uns et des autres. Par exemple, je pouvais inviter une personne à prendre un café et, sans prévenir, montrer ma carte d’identité et peut-être une photo de famille ou une photo de classe. Je pouvais lui dire que je voulais qu’iel puisse avoir confiance que j’étais réellement celle que je prétendais être parce que je voulais qu’on puisse mener ensemble des actions plus risquées. On discutait ensuite de ce que cette personne pourrait me montrer. Parfois, il s’agissait d’un coup de fil à son travail ou à un membre de sa famille en haut-parleur. Je pouvais ainsi entendre la voix de la personne à l’autre bout du fil donner des détails sur la vie ou le travail de la personne. D’autres fois, la pièce d’identité était suffisante. Parfois on s’est montré nos appartements respectifs. L’idée était que ce soit aussi mutuel que possible (ce qui est difficile, car en pratique, il y a toujours une personne qui initie le processus) et de se concentrer sur la construction de la confiance.

C’est inutile de faire de telles vérifications d’identité avec des personnes en qui on n’a pas confiance ou avec qui on ne se sent pas à l’aise de faire des actions risquées. Le but n’est pas de démasquer des flics mais d’approfondir notre confiance et notre assurance. Vérifier nos identités de cette façon devrait être un signe de respect.

Plusieurs facteurs peuvent venir compliquer ce processus. Par exemple, les gens qui ont immigré n’ont peut-être pas de famille à proximité ou le même type de documents. Souvent, les personnes queers et trans n’utilisent pas les noms inscrits sur leurs documents officiels et iels ne se sentent peut-être pas à l’aise de partager leurs noms légaux ou de vielles photos. Néanmoins, ce sont des éléments à prendre en compte et auxquels s’adapter, pas des raisons de faire des exceptions. Une flic infiltrée dans ma région prétendait fuir une relation abusive et a utilisé les pratiques de solidarité avec les survivant·e·s d’agression pour éviter de parler des détails de son passé. Notre inconfort quant aux sujets plus sensibles et complexes crée des angles morts qui peuvent être utilisés par celleux qui nous veulent du mal — on doit être courageux et trouver les moyens d’aborder cette complexité. On ne doit pas l’éviter.

Un·e ami·e qui a expérimenté les vérifications d’identité pense qu’il y a peut-être des moments où c’est OK d’être moins mutuel, lorsqu’on ne veut pas donner aux gens trop de contrôle sur le type de preuve à apporter. Iel met aussi l’accent sur le fait que les vérifications d’identité n’aident pas forcément dans le cas des balances (en opposition aux infiltrés) qui sont bien celleux qu’iels prétendent être, mais qui ont de mauvaises intentions. Il faut aussi prévoir quoi faire si quelqu’un ne peut ou ne veut pas jouer le jeu, ou si on découvre quelque chose qui nous fait ré-évaluer la confiance qu’on avait en la personne.

Le vouching est une technique pour intégrer de nouvelles personnes dans un groupe déjà existant ou dans un espace d’organisation. Tout comme nos autres pratiques, c’est mieux lorsque c’est explicite et fait de manière systématique. La première étape est d’avoir des bases de confiance claires au sein d’un groupe. La base de confiance peut être que les membres aient des idées compatibles et soient fiables. Ou alors de s’assurer que les membres sont bien ceux qu’ils prétendent être, qu’ils ne paniquent pas en cas de stress, qu’ils ont certaines expériences d’organisation et qu’ils sont à l’aise avec certains types d’actions. Peu importe cette base, le vouching c’est quand un ou plusieurs membres existants introduisent une nouvelle personne au groupe, et affirment que celle-ci correspond aux bases de confiance du groupe. Les autres membres doivent explicitement accepter ou rejeter ce vouch. L’aspect explicite du vouching évite le risque de faire implicitement confiance aux gens pour des raisons superficielles, par exemple parce qu’ils correspondent aux normes culturelles d’un milieu, parce qu’on présume de leur personnalité, ou parce qu’on présume que d’autres personnes leur font confiance.

Voici un exemple de vouch, c’est-à-dire d’assurances données par des membres existants du groupe vis-à-vis d’une nouvelle personne :

« Je connais cette personne depuis cinq ans, durant ce temps on a travaillé ensemble sur des projets publics et je lui fais confiance pour me soutenir dans des moments difficiles. Je suis allé dîner chez son père une fois et je suis souvent allé la chercher au travail. »

Voici un autre exemple :

« J’ai rencontré cette personne l’an dernier à un événement sur le changement climatique et on s’est vu plusieurs fois à des événements écolos depuis. On a souvent discuté de différents sujets et je l’aime bien. Je sais qu’elle cherche à gagner en expérience dans l’organisation d’actions et je crois que ça pourrait fonctionner avec nous. »

Une exception au fait d’être explicite sur les raisons qu’on a de faire confiance à quelqu’un est de ne pas briser les « Deux Jamais ». Si vous organisez des actions clandestines, inviter de nouvelles personnes ou présenter un groupe à un autre est délicat : le vouching reste une bonne idée mais il est important de ne pas parler des actions auxquelles une personne a participé afin de ne pas la mettre en danger. Comme il est nécessaire d’avoir une forte base de confiance pour faire ce type d’actions, il est possible de faire confiance au jugement de quelqu’un sans demander de détails d’actions spécifiques.

Les cercles de confiance sont surtout destinés aux réseaux informels et à l’organisation sur des bases affinitaires (ce qui correspond à la plupart de mes expériences d’organisation). Cette technique consiste à écrire les noms des individus dans votre réseau autour d’un cercle puis à tracer différents types de lignes entre ceux-ci pour symboliser les types de relations qu’ils ont entre eux. Une ligne continue pourrait représenter une relation forte et basée sur la confiance. Une ligne brisée pourrait signifier un certain niveau de confiance et une ligne pointillée que vous ne vous connaissez pas bien. Ce processus collaboratif peut en dire long sur les dynamiques de groupe et visibiliser les liens qu’il faudrait renforcer pour développer de la confiance.

Ça peut révéler que seule une personne a des relations fortes avec tout le monde et que les autres liens sont moins solides. Cela voudrait dire qu’il y a un travail à faire pour équilibrer le réseau, ce qui le rendrait aussi plus résistant (au cas où cette personne est arrêtée ou simplement tombe malade ou fait un burn out) et plus égalitaire, car la capacité à lancer des projets est liée au nombre de personnes qui font confiance à la personne qui les lance. Cet exercice peut également montrer qu’il y a quelqu’un en qui personne ne fait confiance.

Souvent, un infiltré se rapproche d’un premier milieu, puis utilise les noms des contacts établis au sein celui-ci pour se rapprocher d’un deuxième milieu. Le vouching et les cercles de confiance protègent bien contre ça. Au-delà de démasquer les individus hostiles, les cercles de confiance nous permettent de renforcer nos réseaux en transformant ces lignes brisées en lignes continues autant que possible.

Les structures organisationnelles flexibles permettent à nos luttes de s’adapter aux besoins de différents types d’activité. L’organisation informelle sur des bases affinitaires est un modèle développé pour répondre à ce besoin. Dans un réseau informel (c’est-à-dire sans structure fixe), les individus communiquent leurs idées et leurs intentions puis des groupes affinitaires se forment autour d’un projet quelconque ou d’un désir partagé d’intervenir sur des bases communes. La force de ce modèle est qu’il est très facile d’initier des projets avec des degrés de risques variés, chacun avec sa culture de la sécurité adaptée. Cela implique aussi qu’il n’y ait que les gens concernés qui connaissent les détails ou les personnes impliquées, à moins qu’il en soit décidé autrement.

Une flexibilité semblable peut être incorporée dans d’autres modèles d’organisation. La clé est de respecter et de légitimer les initiatives individuelles, en n’exigeant pas que chaque activité soit approuvée par une entité centralisée. Une autre clé est le respect de la liberté d’association : considérer comme normal de travailler en petits groupes choisis aux côtés de groupes plus larges ayant des structures plus ouvertes. Ça peut ressembler à des comités ou à des groupes de travail ayant la capacité de définir leurs propres critères de participation. Ça peut aussi être d’être ouvert à certains éléments de l’organisation affinitaire décrite plus haut ou d’être explicite quant à quelles informations partager à qui.

Enfin, aborder les mauvaises dynamiques de façon proactive est généralement une bonne habitude à avoir, mais c’est si important en terme de sécurité qu’on devrait insister dessus dans chaque conversation sur la culture de la sécurité. De nombreuses dynamiques peuvent éroder la confiance et rendre l’organisation plus difficile. Par exemple le bullying (harcèlement, brimades), ou les comportements oppressifs enracinés dans le patriarcat ou la suprématie blanche. Un autre exemple est la centralisation des ressources et des contacts, qui fait que les projets ne peuvent être initiés que par certaines personnes. Ou encore de dire du mal des autres dans leur dos, de se vanter, ou de briser les « Deux Jamais » en posant des questions à propos des activités criminelles d’autrui. Quiconque ayant été impliqué dans un milieu militant peut facilement lister les mauvaises dynamiques qui s’y trouvent.

Comme je l’ai dit plus haut en parlant des difficultés liées à la vérification d’identité, nos difficultés liées aux mauvaises dynamiques et à l’oppression dans nos milieux sont des points faibles que la police et le renseignement connaissent de plus en plus. J’ai mentionné la flic qui prétendait fuir une relation abusive pour s’immiscer dans la vie des gens (elle avait même intégré la coloc d’une personne). Une autre expérience d’infiltration impliquait un flic dans la quarantaine à la peau foncée. Lorsque les gens parlaient de comment celui-ci les mettait mal à l’aise (entre autres pour avoir brisé les « Deux Jamais »), il arrivait à détourner ces préoccupations en répondant qu’ils étaient racistes envers lui. Il a trouvé du soutien chez un groupe d’activistes antiracistes dans une autre communauté que celle qu’il ciblait principalement et il a réussi à résister à plusieurs tentatives pour l’expulser des espaces d’organisation. Il a fini par témoigner dans un dossier qui a envoyé six personnes en prison. Il a certainement vécu du racisme dans notre milieu, ce qui, combiné à sa manipulation cynique de l’antiracisme, devrait nous pousser à examiner les faiblesses de nos politiques antiracistes. Avoir des politiques claires sur le racisme, les oppressions de genre et d’autres oppressions (c’est-à-dire être à l’aise de discuter de nos analyses sur ces sujets) ainsi que des pratiques pour adresser ces sujets de front quand ils surviennent peut réduire les chances de réussite de telles stratégies d’infiltration.

Il peut y avoir plein de raisons de ne pas faire confiance à quelqu’un, et plein de comportement prédateurs qui n’impliquent pas qu’une personne soit un flic infiltré. Le cas de Brandon Darby en est un exemple. Dans le texte « Pourquoi les misogynes font des super indics », les auteur·ice·s affirment que les gens auraient dû faire plus d’efforts pour aborder les comportements très sexistes de Darby avant même qu’il commence à coopérer avec le FBI et qu’il piège plusieurs personnes. Darby est un exemple extrême, mais il arrive très souvent dans notre milieu que des gens se sentent mal à l’aise à cause de comportements patriarcaux. Parfois, les gens vont développer des soupçons envers ceux qui ont ces comportements, ce qui est compréhensible, mais c’est une erreur de chercher des infiltrés lorsque ce qui est devant nos yeux, c’est du sexisme : les comportements destructeurs doivent être abordés en tant que tels. Et si ça nous aide contre des indics comme Darby, tant mieux.

Un mot sur les organisations de masse formelles. Ces organisations sont souvent imperméables aux débats sur la culture de la sécurité car elles associent ces débats à des modes d’organisation qui ne leur correspondent pas. La culture de la sécurité peut être perçue comme une critique générale de leurs organisations plutôt que comme un moyen de les renforcer. Certaines des pratiques ci-dessus ne s’appliquent peut-être pas aux organisations de masse formelles, mais j’argumenterais que tous les principes généraux s’appliquent. En fait, je crois que si de telles organisations font attention à leurs modes de fonctionnement, elles verront certaines de ces pratiques y existent déjà.

Par exemple, dans les sections du IWW, il est fréquent de s’organiser en secret au sein d’un lieu de travail. Parfois des noms de code sont utilisés, et seules des informations générales sont rendues publiques. Il est aussi fréquent pour de telles organisations d’assigner des petits comités à certaines tâches comme l’organisation d’une manif, et les réunions de ces comités ne sont pas forcément ouvertes aux personnes non-impliquées, ou bien des moyens de communication spécifiques sont utilisés pour éviter les grosses listes mail et les réseaux sociaux.

Ce que je suggère, c’est que des conversations explicites à propos des risques et de la sécurité soient incorporées dans les différents projets menés par ces organisations. La formation de comités autonomes qui décident de leurs propres pratiques de sécurité est une étape importante, tout comme accueillir des initiatives individuelles par des membres qui s’associent sur des bases affinitaires. C’est-à-dire que la structure doit être assez flexible pour accommoder différentes formes d’organisation pour différents types d’activité.

Certaines objections à la culture de la sécurité viennent souvent de celleux qui utilisent des réseaux sociaux comme le populaire Facebook. J’aimerais apporter quelques critiques de l’organisation par Facebook et proposer une manière pour les grosses organisations qui en dépendent de faire autrement.

Le point crucial est que les réseaux sociaux contrôlés par des entreprises réduisent les possibilités d’organisation. Puisque s’organiser par ces réseaux est à peu près aussi privé que de s’organiser dans la salle d’attente d’un commissariat (chose qui est largement admise de nos jours), il y a des limites strictes à ce qui peut y être discuté. Ce qui veut dire que si on est dépendants de Facebook parce que c’est notre principal moyen d’organisation, les limites de ce qui peut être pensé et planifié deviennent nos propres limites. Ce genre de désarmement préventif est une vraie position de faiblesse.

Sur de telles plateformes, on prend aussi le risque d’être submergé de réactions hostiles. On ne peut pas contrôler comment nos actions seront reçues, et parfois nos actions ne sont pas très populaires — après tout, on veut un monde sans capitalisme organisé sur des bases radicalement différentes. Les réactions sur Internet après une action impopulaire peuvent être déstabilisantes. Lors d’une récente mobilisation antifasciste dans ma ville, l’extrême-droite et les médias de masse ont réussi à provoquer un contre-coup contre les antifascistes qui a inondé les réseaux sociaux de menaces et de colère. Les antifascistes dépendaient fortement de Facebook pour s’organiser et iels ont dû faire face à un choix : rester hors ligne et éviter le contre-coup, mais être isolés de leurs camarades ou aller en ligne et discuter avec les gens, mais en ayant des conversations dominées par le stress et l’hostilité. Cette dynamique rend la lutte moins résiliente et notre travail plus perturbable par la mauvaise presse.

Le contrôle des plateformes par les entreprises est un autre problème. Facebook est une entreprise énorme et riche dont les intérêts sont opposés aux nôtres — ce qui est bon pour nous est mauvais pour elle. Si on dépend de ses infrastructures, elle est capable de nous faire taire à n’importe quel moment pour n’importe quelle raison. De telles entreprises sont très sensibles à la pression du public. On n’a pas besoin de réfléchir longtemps pour trouver des exemples de projets qui sont devenus impopulaires et qui ont perdu leurs pages et ainsi, leur capacité à communiquer avec leur base. Si on est trop dépendants de ces entreprises, ça peut être un désastre. Demandez-vous ce que vous feriez si toutes vos pages et vos comptes disparaissaient ce soir — comment est-ce que vous vous organiseriez demain ?

Il y a aussi le problème de la surveillance, qui ne devrait pas être controversé. Tout ce qui est écrit sur Facebook est sauvegardé pour toujours dans une base de données à laquelle la police peut avoir accès en tout temps. Facebook (tout comme Google et d’autres) vous traque et espionne vos appareils. Ces données sont également accessibles aux agences de renseignement et de sécurité. Ce n’est pas une théorie, ça a été prouvé à maintes reprises, et des accusations contre des militants basées sur ces données sont de plus en plus courantes en Europe et en Amérique du Nord ces dernières années.

Ma proposition pour les réseaux sociaux est la suivante. Privilégier les rencontres en face-à-face. Se rencontrer régulièrement si possible, ainsi le prochain rendez-vous est déjà prévu au cas où la communication en ligne soit perturbée. Quand on utilise les réseaux sociaux, demandons-nous si c’est vraiment nécessaire si c’était possible d’utiliser un autre moyen de communication. Je vous encourage à voir un réseau social comme un mégaphone, une façon d’amplifier votre voix. Ce n’est pas comme dans un salon où on discute et on apprend à connaître les gens. Utilisez ces réseaux pour promouvoir, annoncer, disséminer, mais ayez vos conversations ailleurs. Dans les luttes auxquelles je participe, on efface presque tous les commentaires des pages qu’on administre et on les déplace vers d’autres plateformes dès qu’on les reçoit. On utilise des comptes partagés quand c’est possible et on limite notre dépendance aux comptes liés à des informations personnelles. Peut-être que vous ne voulez pas aller aussi loin, peut-être que vous voulez aller plus loin, mais c’est en tout cas une façon d’utiliser la puissance des réseaux sociaux tout en évitant leurs principaux désavantages.

L’évolution de nos usages des réseaux sociaux peut se faire graduellement, en observant ces usages de manière critique et en les déplaçant petit à petit vers d’autres platformes, ou mieux, en les transformant en rencontres en face-à-face. Ça a pris du temps pour que tant d’aspects de nos vies soient capturés par ces entreprises dégueu, et développer de nouvelles habitudes et cultures de luttes qui résistent à ces entreprises nous prendra peut-être beaucoup de temps aussi.

Enfin, parlons un peu de sécurité informatique. Le sujet est complexe et c’est facile de s’embourber. Néanmoins, il y a quelques règles simples que l’on peut suivre pour améliorer notre sécurité informatique. Voici trois points.

Un : Utilise le chiffrement de bout en bout à moins que tu aies une raison de ne pas le faire. Cette technologie peut être compliquée, mais de nos jours plusieurs applications de messagerie la rendent très accessible. Je recommande Signal, de Open Whisper Systems, même si WhatsApp utilise le même type de protocole de chiffrement, mais sans protection des métadonnées. L’inconvénient est que ce ne sont pas des logiciels multiplateformes, alors qu’avec PGP, puisque c’est possible de copier-coller des blocs de textes, on peut l’utiliser avec tout — les différents clients de messagerie, Facebook, Twitter et même les messages textes. Mais c’est plus difficile de se mettre à PGP et l’expérience a démontré que les gens ne sont pas prêts à faire beaucoup d’efforts pour leur sécurité informatique.

Deux : Chiffre les données là où elles sont enregistrées. À moins d’avoir une raison de ne pas le faire, tu dois immédiatement chiffrer ton téléphone (Android a une option pour ça, de nombreux iPhones sont chiffrés par défaut). Pour les données enregistrées sur les ordinateurs, les disques durs externes, les clés USB ou en ligne, je recommande VeraCrypt. Ça te permet de faire des « boîtes » chiffrées où tu mets tes fichiers. Par contre, ça ne t’aidera pas si ton chiffrement est déverrouillé au moment où ton ordinateur est saisi. Si tu penses que tu risques d’être arrêté, ne circule pas entre différents endroits avec ton téléphone (chiffré) allumé. Envisage de récupérer un vieux réveille-matin. Ainsi, tu peux éteindre ton téléphone et ton ordinateur pendant la nuit (ce qui ré-active le chiffrement, typiquement désactivé au démarrage), particulièrement si tu risques d’être perquisitionné. Fais des sauvegardes de tes données et garde-les dans un autre lieu.

Trois : Dissimule ton identité en ligne lorsque c’est possible. Ton adresse IP est visible par tous les sites web et les services que tu utilises et relie tes activités du point de vue de ton fournisseur d’accès à Internet et de l’État, même si tu utilises la « navigation privée ». Je recommande l’utilisation de Tor pour toute navigation ou recherche. Les réseaux sociaux d’entreprises bloquent généralement Tor (Reddit est une exception et Twitter te laissera utiliser Tor si tu le leur demandes), donc si tu essaies d’avoir un compte anonyme sur ces réseaux, une option est d’utiliser un VPN — il y en a un gratuit et disponible chez Riseup pour l’usage des anarchistes et des militants.

Beaucoup plus de choses peuvent être faites pour la sécurité informatique, mais ces trois étapes sont déjà un bon début. Il y a quelques années, la police a fait une perquisition chez nous. Ils ont saisi une quinzaine d’ordinateurs portables et de téléphones ainsi que plusieurs clés USB et disques durs. Parmi tout ça, un seul ordinateur portable n’était pas chiffré car il était resté allumé. Mais sur tout le reste, aucune information n’a pu être récupérée. Les historiques des SMS et des appels qui été obtenus via nos opérateurs téléphoniques n’ont rien révélé puisqu’on utilise le chiffrement de bout en bout avec un service qui protège les métadonnées. On utilise pas les réseaux sociaux ou Google pour communiquer. Lorsqu’ils ont fait des recherches sur ces plateformes, ils n’ont rien trouvé. Ces pratiques de sécurité informatique fonctionnent lorsqu’elles sont appliquées correctement et de façon constante. Il y a une vraie différence entre les appliquer et ne pas les appliquer, en terme de résultat. Ces méthodes nous mettent en confiance lorsqu’on se lie aux autres et contribuent à construire la confiance.

Merci de votre lecture! Ce texte est plus long que prévu, mais j’espère qu’il a été utile. Je l’ai écrit car il n’y a pas une tonne de bonnes ressources à propos de culture de la sécurité. J’espère que ça inspirera les gens à discuter de quelles pratiques sont appropriées pour elleux, animés par un esprit d’assurance, de courage, de liens et de confiance. Par nos actes, gardons le cap sur le monde qu’on tente de créer plutôt que de craindre les mouvements de nos ennemi·e·s. Bonne chance !