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Brutalité, impunité et culture du silence : le cas de l’agent Paul Junior Morin #5629 du SPVM

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Mai 302018
 

Soumission anonyme à MTL Contre-info

Il y a des histoires qui, à force de s’accumuler, nous permettent de comprendre les agissements des personnes qui profitent de leur impunité pour abuser de leur pouvoir et commettre des crimes sans s’inquiéter des conséquences. Le cas récent de deux agents du SPVM accusés de séquestration, voies de fait et de menaces sur un itinérant en 2010, nous révèle comment la police commet les pires atrocités et enterre des cas d’abus graves afin de protéger ses membres. Cet exemple permet de rendre visible à tous-tes cette culture de l’impunité. Nous savons cependant depuis longtemps que les policiers commettent des abus et font preuve de violences injustifiées sans être punis ou inquiétés, et en avons fait l’expérience, soit comme victimes, soit comme témoins.

Plusieurs de ces histoires sont racontées de façon informelle, au gré des événements, pour être rapidement oubliées. Lorsque plusieurs de ces récits concernent un même agent de police et ses collègues et qu’ils font état de harcèlement, de violences physiques gratuites, de fausses accusations, de parjure et d’abus graves, il est important de les relier afin d’en démontrer le caractère continu et systématique.

Paul Jr Morin s’en est bien sorti jusqu’à maintenant. Pourtant, il s’apprête à aller en déontologie 31 mai 2018 pour avoir tabassé une militante le 1er mai 2014. Le procès durera 6 jours, jusqu’au 13 juin. Beaucoup d’histoires de l’agent Paul Morin ne se sont toutefois jamais rendues jusque-là. Elles doivent néanmoins être racontées.

Paul Junior Morin est un policier comme les autres, il travaillait au centre-ville il n’y a pas trop longtemps, il est maintenant à Hochelaga au poste 23. Pour arrondir les fins de mois, il fait parti du groupe d’intervention Est (GI) et joue au robocop dans les manifestations.

Sauf que Morin (5629) dépasse souvent ses fonctions officielles de policier. Il vise les militant.e.s, souvent racisé.e.s ou socialement marginalisé.e.s (ie. Punks). Il suit les gens dans sa voiture, les interpelle par leur nom, les intimide.

Sans jamais avoir été formellement accusé, Paul Jr. Morin a souvent perdu des procès contre des personnes qu’il accusait d’infraction ou d’actes criminels. Ces accusations se sont avérées fausses et les juges ont jugé « peu crédibles » ses témoignages et ceux de ses collègues policiers, qui se contredisaient.

Si vous avez été victime de l’agent Paul Morin ou que vous avez observé l’une de ses interventions abusives et violentes, faites parvenir votre histoire au crapulespvm@riseup.net.

Une série d’histoires qui en disent long

9 mai 2008

Un jugement datant du 24 mars 2010 nous dévoile le caractère brutal et aléatoire des interventions de l’agent Morin. Celui-ci était intervenu auprès de Andy Ermilus le 9 mai 2008 à 3h du matin au coin des rues Saint-Denis et Sainte-Catherine alors qu’il patrouillait avec son collègue François Gagné (matricule 5101). Il prétextait avoir vu la photo de Andy Ermilus dans un «rassemblement de police», rassemblement où sont distribuées les photos de différents suspects. Paul Morin ralentit aux abords d’Andy Ermilus et lui demande son nom. Celui-ci n’ayant commis aucune infraction continue son chemin. L’agent Morin serait alors sorti de son autopatrouille, matraque à la main, et aurait asséné un coup au genou, un deuxième à l’épaule et un troisième à la tête de la victime. Ermilus est alors menotté et emmené à l’hôpital en raison d’étourdissement et craignant de perdre connaissance. Ermilus est par la suite emmené au poste de police, où on confirme qu’il n’a pas d’arme à feu, pas de condition de remise en liberté provisoire et qu’il n’existait pas de mandat pour son arrestation.

À la suite du témoignage de Andy Ermilus et de l’agent Morin le juge Jean-Paul Braun acquitte Ermilus des accusations de résistance à son arrestation portée par l’agent Morin. Les agissements de l’agent Morin dans ce dossier dévoilent sa propension au profilage et à une brutalité arbitraire, arrêtant un homme d’origine haïtienne « ressemblant » à la photo d’un suspect vu il y a quelques jours. Ressemblance qui ont valu à Ermilus une aggression injustifiée de l’agent Morin, un passage à l’hôpital et des accusations de résistance à son arrestation. Acquitté lors de son procès, l’expérience de brutalité vécue par Ermilus se répétera au cours des prochaines années.1

23 mai 2012 et avril 2013

L’agent Morin était présent aussi durant la grève de 2012. Durant l’arrestation de masse, il a refusé l’assistance médicale à une personne éprouvant un malaise. De plus, il aurait fermé les fenêtres de l’autobus, pour être sûr que personne n’entende les plaintes. Il aurait aussi menacé quelqu’un.e avec un taser 11 mois plus tard pour avoir émis un bruit audible.

L’arrestation de masse, 23 mai 2012

About the incident at the mass arrest, William Girard on Facebook reported…

Several students questioned, as well as a nurse have testified that a person in his sixties had a cardiac malaise without having received adequate aid in a timely manner. This person complained of chest pains and difficulty breathing. He asked to be allowed to take his medicine which was refused by Agent Paul Junior Morin, badge number 5629, who was in the STM bus marked 27-028. He said that he had a paper on him to prove his state. Agent 5629 refused to help this person in distress. Students shouted to get an ambulance. Police closed the windows of the bus so that the sound would not be heard outside. Finally, the man fell to the ground, many precious minutes were wasted before police did anything and called an ambulance. Agent 5629 said that he did his job for “the cash” and also to intimidate students. [1]

1 mai 2014

Après la manifestation anticapitaliste du 1 mai, Paul Junior Morin plaque au sol une militante et lui donne des coups dans les côtes pendant qu’elle est inconsciente.

La CRAP, coalition contre la répression et les abus policiers, relate les faits:

Notons que l’agent Brassard fait actuellement l’objet d’une poursuite en dommages-intérêts de 85 000 $ intentée par Jennifer, une militante du COBP surnommée Bobette.

La poursuite, qui vise également les agents Paul Junior Morin et Ken Leblond, porte principalement sur une agression sauvage que Bobette a subi de la part du SPVM après la manifestation du 1er mai 2014, soit trois mois après le décès d’Alain Magloire.

La poursuite allègue que l’agent Morin a foncé sans raison sur Bobette dans un stationnement situé face au Palais de justice de Montréal, sur la rue St-Antoine, à l’angle du boulevard St-Laurent. La militante a été littéralement plaquée au sol. Le choc a été si brutal qu’elle a brièvement perdu connaissance. Ce n’est que lorsque les agents Morin et Leblond se sont mis à la frapper au ventre et aux côtes qu’elle a repris conscience.

L’agent Brassard a quant à lui tordu le pouce de Bobette alors qu’elle était écrasée contre un mur de béton par les autres policiers. Elle a demandé à ce que cesse la pression sur son pouce car elle n’éprouvait plus de sensation. Au lieu de cela, l’agent Brassard lui a dit ceci : « Tu sais Bobette ça fait tellement longtemps qu’on veut te pogner qu’astheur tu vas passer au cash ».

Bobette a été libérée après que les policiers lui ont remis un constat d’infraction en vertu du règlement anti-manifestation P-6.

Elle a cependant à nouveau perdu conscience peu après. Hospitalisée pendant une journée, les médecins ont conclu qu’elle avait subi un traumatisme crânien et une entorse cervicale lors de son agression dans le stationnement.

La poursuite allègue également que l’agent Brassard était tout sourire lorsqu’il a participé à l’arrestation de Bobette à la Cour municipale de Montréal, le 17 juin 2014, sous une accusation « d’intimidation d’une personne associée au système judiciaire », c’est-à-dire l’agent Brassard lui-même.

C’est cet événement qui mènera Morin en déontologie policière, où il comparaîtra pendant pendant 6 jours à partir du 31 mai 2018. Il sera accusé avec Ken Leblond (maticule 6162), Rock Lamarche et Mathieu Brassard (matricule 6070). À noter que Brassard est celui qui a assassiné Alain Magloire itinérant racisé en état de choc, le 3 février 2014.2

23 avril 2017

Le 23 avril 2017 se tenait une manifestation du groupe identitaire Front Patriotique du Québec à laquelle participaient plusieurs figures de l’extrême-droite québécoise. Parmi celles-ci on reconnaît notamment Shawn Beauvais McDonald (alt-right présent à la manifestation suprémaciste de Charlottesville) Robert Proulx (Ex-responsable de la sécurité pour La meute) et Philippe Gendron (membre des Soldats d’Odin et organisateur de la manifestation avortée au stade olympique pour intimider les demandeurs d’asile). Une vingtaine de participant.e.s à la manifestation d’extrême-droite portent des masques, des casques, des gilets pare-balle, des gants de combats ainsi que des bâtons. Un militant anti-fasciste (d’origine arabo-musulmane) sort d’un Starbucks avec un café et rencontre la manifestation. Il crie en bordure de la manifestation des slogans anti-racistes afin de dénoncer la procession de groupes armés d’extrême-droite dans les rues de Montréal. Contrairement aux membres d’extrême-droite armées dans la manifestation, ce militant n’est ni masqué, ni armé et demeure sur le trottoir. Sans avertissement, l’agent Morin poivre le militant, tandis que son collègue Frédéric Plante (matricule 5688) le plaque au sol en lui frottant le visage dans le gravier. Au moment de son arrestation, Frédéric Plante affirme au militant « On te connaît, tu es un baveux dans les manifestations ».

Manif 23 avril

Le militant apprendra au moment de sa libération qu’il est accusé d’entrave au travail des policiers et de voie de fait sur l’agent Morin. Selon les élucubrations de l’agent Morin, il aurait tenté de le pousser pour aller se battre seul, sans arme, ni protection avec les milices d’extrême-droite. L’agent Morin n’en restera pas là et continuera à harceler et intimider le militant deux semaines plus tard alors que celui-ci avait pour condition de ne pas entrer en contact avec lui. Le 9 mai, dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, il ralentit son autopatrouille auprès du militant marchant sur le trottoir avec une amie et l’interpelle par son prénom, le menaçant de l’arrêter à nouveau.

À la suite des témoignages des agents Morin, Plante et de la victime, la juge de la cour municipale a acquitté le militant anti-raciste des accusations de voies de fait et d’entrave. Elle a affirmé que les témoignages des agents Morin et Plante étaient contradictoires et a remis en question leur crédibilité. Les fausses déclarations de l’agent Morin n’ont jusqu’à aujourd’hui pas été sanctionnés, malgré l’acquittement et le blâme de la juge à l’égard du comportement et du témoignage du policier.

Mars à juin 2017

Paul Morin semble avoir été en très actif entre mars et mai 2017. Il est à l’origine d’une série d’actes de profilage, de harcèlement et de violence dans le quartier Hochelaga.

Paul Morin émet, le 4 mars 2017, un ticket au nom de la Déferle, un espace social anarchiste dans Hochelaga pour des rebuts laissés sur le domaine public. Les déchets devant la Déferle sont souvent dûs aux locataires d’en haut ou au dépanneur d’à côté. Ceci participe à un harcèlement constant de la part de l’agent Morin envers des personnes ou des groupes qui critiquent le travail des policiers. En effet, au cours du mois de mai, Paul Morin a abordé les membres de SOS itinérance, un organisme qui vient en aide les personnes en situation d’itinérance et remet en question les interventions violentes des policiers à leur égard. Ils distribuaient de la nourriture dans une manifestation au moment de l’intervention de l’agent. Celui-ci les aurait menacé en affirmant : « On va s’arranger pour vous pogner plus tard ». Quelques jours plus tard, l’agent Morin interpelle le véhicule de SOS Itinérance et le mène à la fourrière, sous prétexte de « contrôle technique ».

Un autre incident, beaucoup plus violent, survient le 5 juin 2017 et concerne deux personnes qui, tard le soir, quittent la Déferle, un espace social anarchiste. Alors qu’elles marchent sur la rue Adam, elles sont suivies par une voiture de police roulant lentement en sens inverse de la circulation, sur une dizaine de coins de rue. L’une des personnes demande alors aux policiers s’il y a un problème. L’agent Paul Morin lui répond « T’as un criss de problème ». Les agents sortent de leur voiture et les aspergent de poivre de cayenne. Paul Morin utilise alors sa matraque télescopique pour leur asséner plusieurs coups. À l’aide de son collègue, les policiers menottent les deux victimes. Plusieurs autres policiers arrivent en renfort. Les personnes menottées reçoivent un ticket d’infraction pour avoir été dans un parc après 11h, ce qui n’était pas le cas. Les policiers les laisseront partir, blessé.e.s. Un mois plus tard, elles recevront une deuxième contravention par la poste pour bruit audible. Un voisin, observant la scène et arrivant sur les lieux recevra lui aussi plusieurs constats d’infraction. L’agent Paul Morin doit se contenter d’infractions municipales et ne peut inventer d’accusations criminelles puisqu’une passante enregistre l’intervention à partir du moment où les agents sortent de leur voiture.

Le nombre des incidents et le caractère grave des gestes posés par l’agent Paul Morin témoigne d’une impunité policière généralisée. Paul Morin a pu, de façon continue et systématique, sur près d’une dizaine d’années, commettre des assauts violents et du harcèlement envers des personnes racisées, marginalisées ou associées à des groupes contestataires. Ses interventions sont à chaque fois suivies d’accusations inventées et de faux témoignages. Sa crédibilité a maintes fois été remise en question lors de procès, parfois même par les juges. Nombre de ses victimes ont été acquittées à la suite de processus judiciaires longs et fastidieux, souvent accompagnés de conditions et de restrictions à leur liberté.

Les histoires répertoriées dans ce texte suggèrent que d’autres événements impliquant l’agent Paul Morin ont été vécus ou observés au cours de sa carrière. Il est à notre avis important de relier ces événements afin d’aider ses victimes passées et à venir dans leur défense, mais aussi afin d’informer la population du danger que représente ce policier et tous les autres qui demeurent protégés par la culture du silence et d’impunité du SPVM. Paul Morin n’est pas un policier ayant commis des erreurs exceptionnelles dans des situations exceptionnelles, il est à l’origine d’un nombre important de crimes pour lesquels il n’a jamais été puni ou inquiété.

Si vous avez fait l’objet ou avez été témoin d’une intervention de l’agent Paul Morin (matricule 5629), n’hésitez pas à faire parvenir votre témoignage, avec le plus de détails possible, à l’adresse courriel suivante : crapulespvm@riseup.net

Références

1 R. c. Ermilus, 2010 QCCQ 2878 (CanLII), <http://canlii.ca/t/29cv2>

2 https://deontologie-policiere.gouv.qc.ca/fileadmin/comite/audience/Role_audience.pdf C-2016-4094-3/5011-3

3 https://ricardusofhell.wordpress.com/2013/11/30/agent-5629-paul-junior-morin-who-risked-causing-someones-death-remains-on-duty/

https://lacrap.org/retour-sur-lenquete-magloire

Soldiers of Odin à Montréal: la police protège (encore) les nazis!

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Mai 272018
 

De Montréal-Antifasciste

Le samedi 12 mai avait lieu à Montréal une manifestation dans le quartier Rosemont-La Petite-Patrie pour dénoncer publiquement la présence de Gabriel Sohier Chaput, un idéologue néonazi étroitement lié au Daily Stormer, un site de propagande néonazie considéré comme l’un des plus influents au monde en ce moment. Des antifascistes de Montréal ont révélé que Sohier Chaput, dont le principal pseudonyme est « Zeiger », habitait jusqu’à tout récemment au 6308, rue Fabre. Zeiger était par ailleurs l’un des principaux animateurs de ce qu’ils appellent un « Stormer Book Club » à Montréal, un genre de club social pour jeunes hommes s’identifiant à l’Alt-Right néonazie.

Depuis plusieurs mois, des antifascistes de Montréal savaient qu’un autre sympathisant nazi, Philippe Gendron, dont il a été question à quelques reprises sur ce site, habitait lui aussi sur cette même rue. Philippe Gendron est l’un des petits chefs de la section québécoise des Soldiers of Odin, une organisation anti-immigration fondée en Finlande en 2015 par Mika Ranta, un suprémaciste blanc notoire lié au Mouvement de résistance nordique. On se souvient notamment de Gendron comme l’un des cabochons qui avaient essayé d’organiser une manifestation contre l’arrivée de réfugié.e.s haïtien.ne.s au Stade olympique en août 2017, une action qui s’est avérée un fiasco complet lorsque tous les principaux groupes d’extrême droite ont retiré leur appui à l’événement un à un par crainte d’être associés à un nazi.

Jusqu’à tous récemment, les Soldats d’Odin se défendaient encore d’être racistes ou opposés à l’immigration. Le 21 mars dernier, lors d’une pitoyable intervention au Cégep Édouard-Montpetit visant à chahuter une conférence portant sur l’extrême droite au Québec, Katy Latulippe (« présidente provinciale » et « porte-parole pour le Canada ») niait que Mika Ranta soit encore associé à l’organisation, et suggérait sarcastiquement qu’il était absurde de croire que les SoO puissent être considérés comme néonazis. Pourtant, en mai 2018, Mika Ranta pose encore publiquement avec l’emblème des SoO, et est encore très proche de l’actuel leader suprême de l’organisation, Kimmo Pekkarinen.

« Je ne saurais que dire de plus », a-t-elle bégayé lorsque les conférenciers lui ont demandé de préciser exactement quels éléments de leur allocution étaient erronés selon elle. C’est cela, oui.

Le fondateur des Soldiers of Odin, le néonazi Mika Ranta, porte toujours les couleurs de l’organisation en date du 20 mai 2018.

Philippe Gendron est ami avec Kimmo Pekkarinen, leader international du réseau d’extrême droite anti-immigration Soldiers of Odin. Notons le commentaire “White Pride 1488” ; 14 88 fait référence aux “14 words”, un code nazi universellement reconnu, et à “Heil Hitler”, la lettre “h” étant la huitième lettre de l’alphabet. Le motif en filigrane de la photo de profil de Gendron est un “Soleil noir”, un autre symbole nazi.

Or, toute prétention de SoO Québec à se défaire de l’image d’ordures racistes que le crew traîne depuis sa création s’est envolée en fumée le 12 mai 2018, lorsqu’une vingtaine d’individus liés aux différents groupes d’extrême droite du Québec (dont certains n’ont aucun scrupule à s’afficher eux-mêmes ouvertement comme néonazis) se sont rendus au domicile de Philippe Gendron pour le protéger « contre les antifas » qui, dans leurs esprits engourdis par la peur, s’en venaient en horde détruire sa maison! (Un délire d’ailleurs gobé tout entier par les brillants fantassins du SPVM, selon une résidente du quartier qui s’est fait dire que l’anti-émeute s’était déployée massivement dans le secteur pour empêcher la manifestation antiraciste de « détruire un appartement ».)

Quiconque a aperçu, dans les médias ou ailleurs, des photos de ladite manif a pu se rendre compte qu’elle était composée d’un peu plus d’une centaine de personnes, dont la très grande majorité de familles, de jeunes et de personnes âgées avançant à visage découvert pour s’adresser directement aux résident.e.s du quartier. Pas exactement la menace terroriste dont les fachos et la police agitent le spectre…

Manifestation antiraciste devant le domicile du propagandiste néonazi Gabriel Sohier Chaput, alias Zeiger, au 6308 rue Fabre, à Montréal, le 12 mai 2018. Photo: Document Everything

Après un bref passage devant le domicile de Sohier Chaput, la manif antiraciste a repris la rue Fabre vers le nord pour se diriger vers celui de Gendron, à peine deux blocs plus loin. À l’intersection de Fabre et Saint-Zotique, le SPVM avait déployé un dispositif de sécurité imposant, avec un fourgon stationné au milieu de la rue pour bloquer la circulation, et des pelotons d’anti-émeute de chaque côté du fourgon pour bloquer le passage sur les trottoirs.

Manifestation antiraciste au coin des rues Fabre et Saint-Zotique à Montréal, à quelques mètres du domicile de Philippe Gendron, un militant néonazi des Soldiers of Odin Québec, le 12 mai 2018. Photo: Document Everything

À moins d’une centaine de mètres, l’on pouvait apercevoir un groupe d’individus qui faisaient nerveusement le pied de grue sur le trottoir face au 6735, rue Fabre, où Gendron habite.

Groupe d’individus mobilisés devant le domicile du néonazi Philippe Gendron, au 6735 rue Fabre à Montréal, le 12 mai 2018.

Groupe d’individus mobilisés devant le domicile du néonazi Philippe Gendron, au 6735 rue Fabre à Montréal, le 12 mai 2018.

Dans une série de vidéos mise en ligne par Robin « le prophète » Simon, on entend celui-ci répéter à quatre ou cinq reprises que son groupe de fachos n’a rien à craindre, puisque la police les protège…

Après une dizaine de minutes à cette intersection, à expliquer aux résident.e.s et aux passant.e.s la raison de la manifestation, le cortège a repris son chemin pour se rendre au métro Fabre et se disperser calmement. Des affiches et des tracts informatifs sur Gabriel Sohier Chaput et Philippe Gendron ont aussi été distribués. Fin de l’événement. Sauf que…

Manifestation antiraciste à Rosemont-La Petite-patrie, le 12 mai 2018. Photo: Document Everything

Quelque notes sur le bonehead Philippe Gendron…

Revenons un instant en images sur ce personnage. Juste pour que tout le monde comprenne bien que Philippe Gendron des SoO est bel et bien un néonazi, y compris les gens qui le défendent encore. À cet égard : si vous le défendez encore après avoir constaté ces preuves de son alignement idéologique, vous n’êtes pas mieux que lui et ses petits camarades nazis.

Philippe Gendron, des Soldiers of Odin

Philippe Gendron des Soldiers of Odin, fait le salut nazi en compagnie de Benoit Asselin, un proche du Québec Stomper Crew.

Philippe Gendron, des Soldiers of Odin, portant fièrement un drapeau fait sur commande combinant la fleur de lys au Soleil noir, un symbole occulte nazi.

Philippe Gendron, des Soldiers of Odin, portant une boucle de ceinture à l’effigie du Totenkopf, l’emblème universellement reconnu de la Waffen-SS, les troupes de choc nazies.

Philippe Gendron, des Soldiers of Odin, jouant au tough dans une manifestation du Front patriotique du Québec, le 23 avril 2017.

Philippe Gendron, des Soldiers of Odin, en 2017. Notons l’autocollant de la Fédération des Québécois de souche.

Prenons tout le même le temps de féliciter Katy et Philippe pour avoir trouvé l’amour dans ce monde cruel. En espérant que votre idylle soit plus solide et dure plus longtemps que les dernières relations foireuses de Philippe. Ça serait dommage que votre groupe de boneheads implose à cause d’une amourette déçue…

Notons aussi que Gendron travaille encore aujourd’hui à la Pizzeria Villeray, sur la rue Villeray, au coin de Saint-Denis.

 

Sur l’attention particulière portée aux SoO par les antifascistes de Montréal…

Le 13 mai dernier, Norm SoO publiait sur la page publique des Soldiers Of Odin un billet à l’effet que son groupe de boneheads racistes était victime « d’acharnement de la part des antifas ces derniers temps ». Il est vrai que plusieurs membres des SoO semblent avoir été visés récemment par des représailles. Un article anonyme publié sur Montréal Contre-info en mars dernier laisse entendre que les véhicules de Katy Latulippe, Stéphane Blouin et Simon Arcand ont été vandalisés, ce que confirme le billet de Norm SoO. De plus, Philippe Gendron se plaint dans un article du Vice d’avoir été attaqué devant son domicile.

Ce que Norm SoO omet de préciser dans son appel aux snitches, c’est que son groupe provoque ouvertement les antifascistes depuis plusieurs mois, non seulement en patrouillant les rues du centre-ville et de La Petite-Patrie full patchés, comme nous l’avons déjà documenté, mais en arrachant des affiches, en volant des bannières ou en plantant leur drapeau sur des bastions de l’extrême gauche à Montréal, et en se vantant par la suite sur Facebook de « faire le ménage » et du fait que les antifascistes ne font rien pour les arrêter.

Il va sans dire que ce genre de comportement appelle des représailles. À moins d’être complètement abruti, on ne joue pas avec le feu sans s’attendre à se brûler les doigts un moment donné…

Sur le groupe d’individus mobilisés le 12 mai à la défense de Gendron…

Mais revenons au contingent de racistes réunis devant le 6735 rue Fabre, le 12 mai dernier. Voici en galerie le groupe d’individus qui se sont rendus chez Philippe Gendron pour protéger cette ordure nazie.

Ian Alarie (SoO)
(Note: l’acronyme NSBM sur son t-shirt fait référence au National-Socialist black metal, et spécifiquement à Misanthropic Division Vinland.)

David Leblanc (SoO)
Danny Bédard (SoO)
Burn SoO
Pascal Giroux (SoO)
Katy Latulippe (SoO)

William Dou (Storm Alliance)
Daniel Fortin (Storm Alliance)
Sylvain Lacroix (Front patriotique du Québec)
André Lavigueur
Robin « le prophète » Simon (caméraman poche avec le shake en estie)
Robert Proulx (III%)
Shawn Roy (III%)
Éric Vachon (III%)
(III%)
(SoO)
 
Mario Dallaire
 
 
 

Et les recoupements entre les différents groupes d’extrême droite se confirment…

Soulignons pour conclure que plusieurs des individus ci-dessus ont aussi été aperçus à la manifestation anti-immigration de Storm Alliance à la frontière, le 19 mai. Ce recoupement confirme ce que nous disons depuis plus d’un an, à savoir que les membres de ces différents groupes se connaissent et se fréquentent régulièrement, selon un continuum allant des « monon’c racistes » de La Meute jusqu’aux néofascistes d’Atalante et aux néonazis de l’alt-right comme Shawn Beauvais-MacDonald, en passant par les miliciens de pacotille des Three Percenters.

Une nouvelle journée, un nouveau doxx.

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Mai 202018
 

Soumission anonyme à MTL Contre-info

Récemment, depuis la sortie de l’information que le bloggeur ‘Zeiger’ de Daily Stormer et le forum privé ‘Montreal Stormer Book Club’ étaient actifs en ville, des centaines d’affiches sont apparues dans les rues de Montréal pour exposer l’identité d’autres ordures nazies. Certaines de ces affiches contiennent les adresses, inconnues jusqu’avant, de Vincent Bélanger Mercure (4350 avenue Melrose) et de Philippe Gendron (6735 rue Fabre).

Voici les fichiers que vous pouvez imprimer et coller vous-mêmes. Soyez prudent-e-s, et attention aux fachos – certains auraient été vu en panique, devant leur propre visage placardé dans leur quartier, tentant de les arracher.

Shawn Beavais-Macdonald en anglais et en français Vincent Bélanger Mercure en anglais et en français. Adresse : 4350 avenue Melrose Gabriel Sohier Chaput en français. Adresse : 6308 rue Fabre Phillipe Gendron en français. Adresse : 6735 rue Fabre Quelques autres losers (noms inconnus), en anglais et en français.

Prison pour migrant-e-s : une bande anti-construction libère des milliers de criquets dans les bureaux d’architectes

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Mai 192018
 

Le siège social de Lemay, 3500 rue Saint-Jacques

Soumission anonyme à MTL Contre-info

Tôt un matin d’avril 2018, notre équipe de construction amateur a relâché des milliers de criquets dans les nouveaux quartiers généraux de la compagnie d’architecture montréalaise Lemay. Nous avons arraché un mur de plywood d’un côté du bâtiment et avons laissé entrer les criquets dans leurs tout nouveaux locaux. En effet, la compagnie Lemay et le Groupe A (situé à Québec) ont obtenu un contrat pour construire un nouveau centre de détention de migrant-e-s à Laval, en banlieue de Montréal. Son ouverture est prévue pour 2020. Nous sommes opposé-e-s aux frontières, aux prisons et aux centres de détention de migrant-e-s. Nous luttons pour un monde où toutes et tous sont libres de se déplacer et de s’établir; un monde libre de la suprématie blanche, du capitalisme, du colonialisme et du patriarcat.

Nous voyons cette action comme le début d’un effort concerté pour empêcher la construction de ce nouveau centre de détention de migrant-e-s. Les criquets sont reputés pour se reproduire rapidement et sont particulièrement difficiles à exterminer; leur bruit constant et leur prolifération rapide dans n’importe quel espace font de ces derniers bien plus qu’une simple nuisance. Ils se multiplieront dans les murs du bâtiment greenwashé de Lemay, dans Saint-Henri, un quartier en gentrification, et ce, même après que le mur que nous avons enlevé ne soit remplacé. Pendant ce temps, notre résistance s’organisera face au centre de détention des migrant-e-s et à tout ce qu’il représente.

Ce nouveau centre de détention pour migrant-e-s à Laval a été proposé dans le cadre d’un «ajustement» du système d’immigration proposé par le gouvernement canadien. La plus grande partie de cet ajustement est dirigé vers les infrastructures : des 138 millions accordés, 122 seront dépensés dans la construction de deux nouveaux centres de détention (à Laval et à Surrey, en Colombie-Britannique) ainsi que dans l’amélioration du centre de détention en fonction à Toronto. Le gouvernement justifie ces mesures en prétendant que les «centres» (pour ne pas dire prisons) ne respectent pas les standards internationaux. Il y a d’ailleurs quelque chose d’ironique à voir que tout en investissant dans de nouvelles prisons pour migrant-e-s, il prétend vouloir trouver des alternatives à la détention.

Ces nouvelles installations sont présentées comme des “meilleures” prisons. Elles sont supposément issues d’un design “non-institutionnel” et ont des espaces extérieurs et un accès facile aux familles ainsi qu’aux représentant-e-s d’ONG, mais priorisent tout de même la “sécurité publique” par l’incarcération. Les compagnies mandatés pour la construction du centre à Laval sont connues pour concevoir des palais de justice et des prisons “LEED”, ainsi que des bibliothèques et des pavillons universitaires. Il est difficile d’imaginer que cette nouvelle prison ne donnera pas une impression “institutionnelle”. La tentative du gouvernement Trudeau rappelle celle par le gouverment fédéral dans le système carcéral pour femmes des années 90 et la tentative du gouvernement ontarien d’assouplir son système carcéral. Les réformes dans les centres de détention visent à redécorer des bâtiments d’où il est interdit de sortir pour prétendre qu’il est acceptable d’y enfermer des personnes.

La nouvelle prison de Laval semble avoir une capacité semblable ou légèrement supérieure à celle du centre présentement en fonction (de 109 à 144 personnes, la nouvelle aurait une capacité d’enfermer 121 personnes). Alors que les dernières années enregistrent un taux plus bas d’incarcération de migrant-e-s et que les gouvernements prétendent vouloir le réduire davantage, ce projet laisse penser qu’il ne s’agit que de mensonges. Étonnant. Comme il a été dit, “construisez les, et ils se rempliront”. Il est peu probable d’assister à une réduction du nombre de détenu-e-s.

Voyons cela de plus près. En tant qu’acteur de l’”ajustement” du système d’immigration, le ministre de la sécurité publique Ralph Goodale a annoncé l’intention du gouvernement d’explorer des “alternatives à l’incarcération”. Dans le rapport qui a été écrit sur la réforme, le gouvernement affirme que les alternatives à l’incarcération incluent “la possibilité de s’identifier par téléphone pour ne pas avoir besoin de se rendre en personne aux services frontaliers, l’augmentation de la liberté de mouvement, la facilitation des critères et l’optimisation de l’efficacité”. C’est-à-dire rendre le travail des flics des frontières plus facile et sauver de l’argent.

Les alternatives les plus connues de l’incarceration des migrant-e-s incluent les maisons de transition et le port de bracelets électroniques ainsi que la probation à travers des ONG qui sont prêtes à agir comme gardiens de prison. Ces mesures sont préférables à l’enfermement. Alors que la prison est le bâton qui menace de frapper, elles représentent la carotte qui discipline. Dans tous les cas, elles servent de légitimation à l’usage de l’emprisonnement (“nous vous avons donné le choix d’utiliser la reconnaissance vocale même si vous ne pouviez pas régulariser votre statut car vous alliez être déporté-e, mais vous avez disparu, il faut donc vous jetter en prison”). Les alternatives à la détention sont des formes plus sophistiquées de contrôle de migrant-e-s qui permettent à l’État de paraître charitable tout en déportant et en emprisonnant des personnes qui ne les respectent pas.

La stratégie d’implanter des alternatives à la détention ne ferait qu’accentuer la collaboration entre les ONGs et le gouvernement pour la détention des migrant-e-s, en échange du financement pour payer les salaires des employé-e-s. En 2017, le gouvernement a signé un nouveau contrat avec la Croix Rouge pour évaluer les conditions dans les centres de détention des migrant-e-s. Par contre, la Croix Rouge surveille techniquement ces conditions depuis 1999, il s’agit seulement de la première fois qu’ils reçoivent un “financement de base” de la part du gouvernement. Avec 1.14 million en deux ans, la Croix Rouge continuera à “évaluer” les centres de détention et à dire au gouvernement que tout va pour le mieux, légitimant la continuation de l’emprisonnement des migrant-e-s. N’est-ce pas merveilleux, quand les ONGs font bien paraître la répression du gouvernement?

Qu’est-ce qui ressort de cet ajustement au final? Plus d’argent pour les prisons répressives, un peu d’argent pour des formes moins violentes de contrôle des mouvements et un peu pour la Croix Rouge. Dans le contexte des migrations à la frontière américaine de ceux et celles qui fuient le régime de Trump, un contexte où la plupart de ces personnes n’obtiendront jamais de statut de réfugié et pourraient bien se retrouver dans un centre de détention, nous voulons empêcher la construction de ce nouveau centre de détention des migrant-e-s. Selon nous, c’est un moment opportun, c’est même le seul moment, pour intervenir pour arrêter le cours des choses. Nous nous mobilisons contre cette nouvelle prison en gardant en tête que nous voulons aussi faire fermer l’ancienne. Nous voyons la prévention de la construction de cette prison uniquement comme une partie d’un combat bien plus grand pour détruire celles qui existent déjà.

En plus de placer cette lutte dans le contexte d’une “crise migratoire” globale, nous comprenons aussi que celle-ci s’inscrit aussi dans le contexte de la montée de l’extrême droite. Storm Alliance, un groupe d’extrême droite raciste et anti-immigration a organisé une poignée de maniestations à la frontière, souvent rejoint par La Meute, un groupe populiste spécifiquement québécois. Influencé par les rhétoriques anti-immigrante et d’extrême droite sur internet, Alexandre Bissonnette a fusillé et tué six personnes dans une mosquée de Québec il y a un an et demi. TVA et le Journal de Montréal ont aussi publié une fausse nouvelle islamophobe pour faire mousser la haine.

Avec tout cela en tête, nous comprenons que la lutte contre la construction de ce nouveau centre de détention est une lutte anti-fasciste, qui est elle-même une lutte contre la suprémacie blanche. Nous souhaitons lier nos actions avec celles d’autres personnes dans nos communautés, proches et éloignées, qui se battent également contre la suprémacie blanche et la montée de l’extrême droite. Même si nous combattons le libéralisme et sont gouvernement actuel au Canada, nous nous battons aussi contre l’extrême droite et leurs désirs d’un avenir plus violent.

Nous sommes inspiré-e-s par l’action récente pour empêcher la déportation de Lucy Granados. Nous sommes inspiré-e-s par le courage quotidien des personnes sans statut et par ceux et celles qui s’organisent et se rassemblent pour protéger nos communautés. Nous sommes inspiré-e-s par toutes les personnes qui se lèvent contre les frontières, les prisons et les autres formes de domination. Nous sommes inspiré-e-s à lutter pour leur liberté de s’installer et de se déplacer, et vous appelons à lutter avec nous.

Lemay n’est pas la seule entreprise impliquée dans la conception et la construction de la prison, et n’est donc pas le seul point de pression possible. Des plans architecturaux de Lemay, aux contributions du Groupe A, aux matériaux et aux équipes de constructions, il faut des ressources multiples pour bâtir une prison. Ceci est un appel pour plus de recherche, de discussions, et d’actions autour de Lemay spécifiquement, mais aussi de toutes les autres firmes et groupes qui sont impliquées dans le projet. Nous espérons voir d’autres bandes anti-construction agir dans le futur et nous espérons que ce projet devienne l’objet d’une campagne soutenue, capable de rassembler plusieurs personnes et groupes vers un futur sans prisons ni frontières.

Nous espérons que la résistance à cette prison continuera de proliférer, plus vite et plus loin que ces milliers de criquets.

Pourquoi nous avons fait annuler le show de L’Artiss Charland du 12 mai à Montréal ?

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Mai 192018
 

Du Comité anti-raciste du Plateau Montroyal

Qui est L’Artiss? C’est un chansonnier, un gars qui aime jouer du blues dans son garage avec ses chums boomers ou dans des boites à chanson. Le seul problème c’est que L’Artiss est aussi membre de La Meute et responsable de La Meute TV, projet qui vise à faire des reportages sur les activités internes de La Meute afin de fédérer les clans et de donner une bonne image de l’organisation raciste.

Steeve Charland est persuadé d’être une bonne personne. Il aime les gens, il est généreux, il cite régulièrement des artistes progressistes comme Fred Pellerin, Richard Desjardins et Pierre Falardeau, ou encore le syndicaliste Michel Chartrand. Mais allez savoir pourquoi, L’Artiss est membre du groupe raciste La Meute, il a une peur insensée de l’Islam et s’oppose à l’immigration.

Nous n’avons fait que rendre l’information disponible, après le travail s’est fait tout seul. Dés le début nous avons contacté la propriétaire du bar et la personne qui s’occupe de booker des shows. Cette dernière reconnaissait avoir été trompé et ne souhaitait pas faire de promotion à La Meute.

À notre connaissance, plusieurs dizaines de personnes ont appelé et écrit des mails au bar. D’autres bands qui jouent habituellement dans ce bar on aussi fait pression, ce qui a donné une bonne excuse au booker pour annuler le show.

Tout ça s’est fait en quelques heures. Faire annuler ce show a été facile car tout le monde déteste les racistes. On devrait faire ça plus souvent!

Aujourd’hui, L’Artiss et son entourage chiale sur la perte de leur liberté d’expression. La liberté d’expression est une liberté fondamentale importante, mais elle ne peut et ne doit pas exister seule, dans l’absolu. Elle entre en résonance avec toutes les autres libertés individuelles, comme la liberté d’être en sécurité ou la liberté de circuler. Or, le message véhiculée par La Meute est un message de haine, qui invite au racisme et vise à empêcher les populations migrantes de se rendre et de vivre en sécurité au Québec (oui oui on l’a bien lu votre criss de manifeste qui ressemble à un devoir de cégépien copié sur internet).

C’est pour cela que nous ne laissons pas les racistes s’exprimer, manifester, parler ou chanter, car le racisme n’est pas une opinion mais un crime qui fait un grand mal aux individus et à la société. C’est aussi pour cela que nous continuerons d’annuler vos shows, de dénoncer vos propos et de vous combattre sur tous les terrains. Ne cherchez plus vos droits et libertés, les racistes n’ont aucun droits

En conclusion : FUCK LA MEUTE pis si tu veux vivre de la chanson L’Artiss, quitte La Meute et aime ton prochain!

Deux statues de la reine Victoria sont vandalisées à Montréal

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Mai 192018
 

De subMedia

Communiqué anonyme original produit par le Brigade Henri Paul* contre la monarchie, partagé avec subMedia:

Quelques jours avant la Fête datée et insultante commémorant la reine Victoria, deux statues importantes érigées en hommage à la reine Victoria furent vandalisées pendant la nuit du 17 au 18 mars à Montréal.

Le monument en mémoire à la reine Victoria au centre-ville de Montréal (érigé en 1872), ainsi que la statue de bronze sur la rue Sherbrooke (érigée en 1900) à l’Université McGill, ont été arrosées avec de la peinture rouge.

Cette action se base en opposition au colonialisme et à l’impérialisme, et exprime également une aversion envers la monarchie britannique parasitique (ainsi qu’envers toute monarchie). De plus, nous nous inspirons directement du vandalisme récent (avec peinture verte) des mêmes statues de la reine Victoria à l’occasion de la Saint-Patrick ce mars dernier, action revendiquée par la Brigade de solidarité anticoloniale Delhi-Dublin.

Pour la Brigade de solidarité anticoloniale Delhi-Dublin, ces statues représentent “un héritage criminel de génocide, de meurtres de masse, de torture, de massacres, de terrorisme, de famines forcées, de camps de concentration, de vols, de dénigrement culturel, de racisme et de suprématie blanche.”

Les statues de la reine Victoria devraient être ôtées de l’espace public et placées dans un musée en tant qu’objets historiques. Les statues et les monuments publics ne devraient pas représenter l’oppression. La présence de statues commémorant la Reine Victoria à Montréal est, pour citer la Brigade de solidarité anticoloniale Delhi-Dublin, “ une insulte aux nations autochtones en Amérique du Nord (l’Île de Tortue) et en Océanie, ainsi que les peuples d’Afrique, du Moyen-Orient, des Caraïbes, du sous-continent indien, et partout où l’Empire britannique a commis ses atrocités.”

Ces statues sont également insultantes pour les gens qui représentent les luttes irlandaises progressistes, ainsi que pour les Québécois.es. Par contre, nous dénonçons les “Québécois.es de souche” racistes et anti-immigrant.es au Québec (les souchebags) qui tentent de s’approprier l’héritage des patriotes pour mieux représenter leurs idées néo-fascistes.

Contexte important: notre action d’hier soir contribue à une nouvelle tradition de ciblage de symboles et monuments coloniaux pour qu’ils soient vandalisés et, éventuellement, enlevés: Cornwallis à Halifax, John A. Macdonald à Kingston et à Montreal, le mouvement Rhodes Must Fall en Afrique du Sud, la résistance aux monuments Confédérés aux États-Unis, et bien d’autres encore.

Pour encore citer la Brigade de solidarité anticoloniale Delhi-Dublin: “Notre action est une expression de solidarité anticoloniale et anti-impérialiste, et nous encourageons d’autres gens à entreprendre des actions semblables contre des monuments et symboles racistes qui ont leur place dans des musées, et non dans nos espaces publics partagés.”

— Communiqué par le Brigade Henri Paul* contre la monarchie

* Henri Paul était conducteur du Mercedes de luxe qui transportait la Princesse Diana lors de son accident mortel à Paris en 1997. Chaque membre de la monarchie britannique mérite un conducteur français saoul.

Retour sur la manif contre la « marche pour la vie »

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Mai 182018
 

 

Soumission anonyme à MTL Contre-info

Chaque mois de mai, des milliers de personnes se réunissent à Ottawa pour la «marche pour la vie», une initiative d’organisations opposées au libre choix et à la libre information en ce qui concerne l’interruption volontaire de grossesse. Cette année, ce fut le 10e du mois que les manifestant.es anti-choix prirent les rues de la capital pour manifester contre les droits des femmes (et toutes personnes avec un utérus) d’avoir le droit sur leur propre corps, d’avoir le droit d’avorter. La Riposte féministe organisa un contingent montréalais pour joindre une contre manifestation avec des groupes féministes de l’Outaouais et d’Ottawa. Nous étions à peu près 50 personnes à partir de la station Berri-UQAM ce matin là, caféinées d’indignation.

Le débarquement se fit au Confederation Park, au centre-ville, où déjà des militant.es étaient réuni.es et distribuaient des tracts aux passants et passantes dans la rue. Pendant près d’une heure, la parole fut prise par des femmes et des personnes de la diversité sexuelle et de genre autour des thèmes communs de la défense de l’autonomie corporelle dans toutes ses expressions, des institutions étatiques coloniales et impériales qui taisent les voix des personnes opprimées par le genre/sexe et du droit à l’avortement sécuritaire, accessible et légale.

À 13h30, nous partîmes, solidaires et fortes, bloquer le départ de la manifestation Pro-Vie, appellation hypocrite qui détourne l’attention des enjeux qu’entourent cette prise de position conservatrice : le désir de contrôle de la femme et de son corps, la discrimination des personnes LGBTQIA+ et le racisme. Malgré notre plus petit nombre, nous formons une opposition solide et vocale qui empêcha effectivement la manifestation anti-choix d’avancer. Après près d’une heure de résistance, le camp antiféministe opposé renonça et recula. Ce fut symboliquement le moment le plus significatif de la journée.

La contre-manifestation bifurqua à son tour pour tenter de bloquer à nouveau la manifestation, ayant continué leur marche sur une autre route parallèle. Nous prîmes alors une plus petite rue perpendiculaire pour la rejoindre. La police s’empressa de nous dépasser afin de construire un mur impénétrable constitué d’une chaine de vélo allant d’un bout à l’autre de l’intersection. Cet encloisonnement fut une tactique de répression policière : elle aura consisté à faire exister un sujet révolutionnaire radical, nous, une counter gang dangereuse et violente. La police ne cherchait pas à nous détruire, mais plutôt à nous produire en tant que sujet politique. Comme le comité invisible l’a expliqué dans À nos amis : « Quand la répression nous frappe, commençons par ne pas nous prendre pour nous-mêmes, dissolvons le sujet-terroriste fantasmique que les théoriciens de la contre-insurrection se donnent tant de mal à imiter; sujet dont l’exposition sert surtout à produire par contrecoup la «population» – la population comme amas apathique et apolitique, masse immature bonne tout juste à être gouvernée, à satisfaire ses cris du ventre et ses rêves de consommation. »

L’intention de la non-violence de notre part était claire dès le début de la contre-manifestation. Nous exprimons notre indignation pacifiquement. La répression policière subit de notre côté seulement était alors injustifiée pour des raisons de sécurité. Il était alors évident que l’emprisonnement par force servait à légitimer la prise de position adverse, celle des «pro-vie». C’était une démonstration de soutien indéniable pour les arguments anti-féministes, camouflée sous le devoir de protégé une liberté d’expression incontestable dans la société néolibérale.

Par le fait même, la tactique de répression servait aussi à réduire nos revendications à une posture violente et sans fondement. Les policiers ont réussi à inverser le backlash, transférant la violence des propos anti-choix sur nous, qui ne faisons qu’affirmer nos droits sur notre propre corps. Ceci a permis de donner libre cours à une manifestation ouverte de violence masculiniste et antiféministe envers nous, contingent emprisonné et donc vulnérable.

La «peace-line», formé de policiers, renforçait le vieux paradigme dualiste, créant une opposition : d’une part, les bons citoyens défendant le droit à la vie, et d’autre part, la gang d’insurgées, violentes. Mais il ne faut oublier que la vraie violence se trouvait du côté protégé. En effet, cette manifestation reflète la montée de l’extrême droite et du fascisme en Amérique du Nord. On pouvait y lire des slogans comme « All lives matter », « Make Canada Great Again » et « Not your body not your choice». La plupart de ces affiches étaient portées par des hommes cisgenres blancs. En plus, il y avait beaucoup d’étudiant.es du secondaire, provenant majoritairement d’écoles catholiques qui défilaient avec leurs pancartes pro-vie confectionnés en classe, ce qui reflète un endoctrinement systémique et étatique imposé dès un très jeune âge.

Continuons à dénoncer les mouvements néonazis et fascistes pour ne pas banaliser une telle violence. Soyons solidaires aux peuples autochtones, aux personnes racisées, aux femmes et personnes de la diversité sexuelle et de genre! Malgré les difficultés émotionnelles, psychologiques et physiques, cette contre-manifestation fut porteuse des voix militantes passées et présentes et servit de rappelle que la lutte est encore à mener. Merci à la Riposte Féministe de Montréal de nous rappeler la force vivante de la communauté.

Première bannière anti-G7 au Saguenay

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Mai 172018
 

Soumission anonyme à MTL Contre-info

En ce froid matin, le collectif anti G7 « Saumons la terreur » a frayé son chemin jusqu’à la base militaire de Bagotville pour poser sa première bannière « G7, Stay Home, Use Skype », afin de protester contre la tenue du sommet en juin 2018 à La Malbaie.

Nous nous insurgeons que la région de Charlevoix soit déjà entièrement paralysée par des mesures sécuritaires drastiques et disproportionnées implantées à grands frais par les gouvernements québécois et canadiens pour accueillir les hauts dignitaires, alors qu’une simple vidéoconférence aurait suffi. Nous avons sciemment choisi la base de Bagotville, point d’entrée international important de la région, pour montrer notre désaccord envers la venue de ces chefs d’État et le déploiement des Forces armées canadiennes pour assurer leur protection.

Nous déplorons que la couverture médiatique des enjeux soulevés par le G7 soit pratiquement inexistante. Les nombreuses critiques de fond proposées par les différents groupes communautaires peinent à se faire entendre dans les réseaux d’informations traditionnels, au profit d’une campagne de peur menée afin de légitimer les millions de dollars puisés dans les fonds publics qui serviront au financement de la folie sécuritaire qui couve cette mascarade politique.

Le G7, sous le couvert d’un agenda pacifique et progressiste, ne nous semble être qu’une manifestation de violence institutionnelle. Nous considérons que les pays du G7 forment à eux seuls les principales raisons de l’existence des inégalités sociales mondiales.

D’autres actions anti G7 sont à prévoir, tant dans la région qu’à l’échelle de la province.

Histoire de luttes : Des émeutes et des aigles – une brèche s’est ouverte

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Mai 152018
 

L’histoire ci-dessous lance la série d’articles Histoires de luttes de MTL Contre-info. Cette série offre un espace de partage d’expériences de lutte anarchiste sur le territoire dominé par l’État canadien. Nous croyons à l’importance de la narration de ces histoires, cette pratique insufflant la vie à notre mémoire collective et nous donnant l’opportunité d’apprendre des expériences passées.
Si Des émeutes et des aigles est un conte de joie émeutière, de célébration et de magie, nous espérons tout autant créer un espace témoignant des petits échecs et des petites victoires du quotidien, ainsi que des profondeurs de l’isolation et du désespoir qui font intrinsèquement partie des luttes anarchistes. Nous voulons transmettre des histoires qui se raconteront autour d’un feu de camp. Des moments qui nous ont inspiré.es, qui nous ont fait sentir plus vivant.es que jamais, qui nous ont profondément confronté.es.

Ni Dieu ! Ni maître !

Ce classique et des plus fondamental slogan anarchiste est certainement sujet à interprétation : serait-ce simplement une vide itération de la philosophie des Lumières occidentales et du progrès scientifique, ou plutôt un cri de rage envers tout ce qui nous enchaîne, dans la vie comme dans la mort, au monde de l’exploitation et de la domination ?

J’ai été élevé avec la première interprétation fermement implantée dans ma conscience. Tout ce qui aurait pu se déployer de façon merveilleuse, selon une infinité de significations, était emprisonné dans une idéologie linéaire et progressiste voulant que « l’humanité » triomphe. Mon marxiste de père, avec sa foi dans le déterminisme historique, ne m’a pas outillé pour détruire d’un même élan à la fois le dieu et le maître. Au lieu du Dieu chrétien, enraciné dans une tradition autoritaire, contre lequel mes ancêtres anarchistes ont déclaré la guerre, ce furent l’État, la science (l’expérimentation contrôlée) et une soumission aliénante à la notion d’expertise qui entravèrent mon imagination et mon agentivité.

J’ai entrepris de rompre avec tout cela il y a plusieurs années. Tout en reconnaissant pleinement que je m’exprime de façon beaucoup trop semblable à celle de tous les autres hommes blancs qui se sont « trouvés » au contact de quelque religion ou culture exotique, je dirai que cette rupture résulte d’expériences de luttes vécues en proximité avec des personnes autochtones.

Parmi les expériences les plus profondes ayant créé une brèche dans mon esprit, une des premières dont je me souvienne s’est produite lors d’une manifestation pour la commémoration des femmes autochtones disparues et assassinées. Cette manifestation est un événement annuel, portant son lot de douleur, de deuil et de chaleur humaine. Cette fois-là, des milliers de personnes s’étaient rassemblées à une intersection, entourant un groupe de chanteur.ses et de joueur.ses de tambour.Si la taille de la foule varie d’année en année, les joueur.ses de tambour, les chanteur.ses, la fumée de sauge et les coquilles d’ormeau ne manquent jamais à l’appel. Il n’est également pas rare de voir des aigles tournoyer au-dessus de la foule. Le moment est toujours puissant. Cette fois-là, il y en avaient plus que je ne pouvais compter, traçant des cercles ascendant et descendant, loin au-dessus de l’intersection. Si loin que certains semblaient disparaître et réapparaître.

À ce moment-là, je me suis senti profondément insensé, de la plus libératrice des manières. Me reposerais-je sur la religion scientifique rationnelle dans laquelle j’avais été élevé ? Sur cette même vision du monde qui motive les horreurs contre lesquelles les gens rassemblés là étaient en train de manifester ? Comment pouvais-je expliquer la présence de ces aigles et la manière dont mes yeux les suivaient? Pourquoi nierais-je la signification spirituelle profonde de ce à quoi j’étais confronté ? Ce pourrait-il qu’il existe quelque chose de plus anti-autoritaire et rebelle dans le fait de réduire toute signification à une explication uni-dimensionnelle, de réduire l’entièreté du monde à un ensemble de choses mortes composant une équation mathématique ?

Cette expérience a mis longtemps à se produire. Et en l’espace d’un instant, j’ai senti que quelque chose chose s’était transformé en moi.

Quelques temps après, je me trouvais dans un quartier des finances, au centre-ville d’une importante métropole capitaliste, avec quelques ami.es. Nous y étions parce qu’une rencontre gouvernementale et financière mondiale allait s’y tenir dans les jours suivant. La police se rassemblait et se préparait, et nous aussi. Nous voulions nous familiariser avec les rues et leurs environs. Un.e de mes ami.es, à la demande d’un.e de ses camarades autochtones, nous avait demandé de répandre du tabac sur notre chemin, à l’intention des esprits. Nous prîmes soin d’en faire ainsi, alors que nous déambulions à travers la cathédrale de béton marchande. Ce geste me sembla juste. Bien que je ne moi-même sois pas autochtone, que je ne saisisse pas le contexte culturel portant la signification particulière de cette offrande, ce geste m’accompagna pour les jours qui suivirent.

Quelques jours plus tard, au coin d’une rue, je me retrouvai dans le plus grand black bloc dont j’avais jamais fait partie. L’atmosphère était évidemment inquiétante et intense ; la mobilisation de la police, déployée sur des kilomètres, semblait insurmontable. Malgré tout cela, une note de célébration flottait dans l’air.

Soudainement, nous fonçâmes dans une direction : la nuée se ruait sur une voiture de police, qui s’est vue fracassée alors que le porc était toujours à l’intérieur. Un peu plus loin sur la rue, porté.es par cet élan d’assurance, nous découvrîmes un amoncellement de roches. La camionnette d’un média de masse se prit quelques roches, une ligne d’anti-émeute se fit repousser contre un bâtiment par quelques autres et le reste fut gardé pour plus tard.

Outre ce que le bloc trouvait sur son chemin, il semblait que nous étions lamentablement mal préparé.es à confronter la police de front. Nous utilisâmes la meilleure arme à notre disposition : la mobilité. Cette dernière confère habituellement une longueur d’avance, mais cette fois, nous nous sentions résolument plus fort.es qu’à la normale, comme si une force invisible nous avait conféré de plus grands pouvoirs d’évasion et d’intimidation. Je me rappelai du tabac. Je pensai aux esprits.

Nous poursuivîmes notre chemin de destruction jubilatoire pour éventuellement nous arrêter à une autre intersection, entouré.es de gigantesques temples financiers et encerclant une voiture de police en feu, récemment abandonnée. Je me souviens m’être senti nerveux : j’avais l’impression que nous nous attardions beaucoup trop longtemps et qu’au loin, la police était en train de se préparer à bloquer toute possibilité de fuite.

Nous nous remîmes en mouvement, courant dans la même direction que la brise légère qui, soufflant l’épaisse fumée noire du brasier derrière nous, changeait presque la journée nuageuse en nuit. Pour me donner du courage, je criai vers la ligne d’anti-émeute qui bloquait notre route : « Vous allez tous crever aujourd’hui, criss de porcs ! ». Quand nous arrivâmes à vingt ou trente mètres d’eux, ils semblèrent reculer de peur et rapidement nous prîmes un tournant serré à gauche sur une autre rue commerciale achalandée.

Cependant que notre joyeux parcours de vengeance se continuait, un nombre incalculable de vitres de commerces et de banques furent fracassées, de multiples petits groupes de policiers furent forcés de s’enfuir en courant et l’une des principales stations de police se fit attaquer. Il semblait impossible de croire que nous avions été capables d’agir ainsi tout ce temps sans intervention policière significative. Encore une fois, je ne pu m’empêcher de me rappeler le tabac, et de penser aux esprits.

Nous nous volatilisâmes éventuellement comme si nous étions nous-mêmes des esprits, au bout d’environ quatre-vingt-dix minutes de désordre, au point où c’en était devenu presque ennuyant. Bien que cet événement demeurait profondément inexplicable pour plusieurs, des nombreuses explications émergèrent peu de temps après.

Les divers enthousiastes du contrôle de l’État, allant des gens de droite aux libéraux, des social-démocrates à certains communistes, préférèrent l’explication selon laquelle le black bloc était une opération secrète du gouvernement et/ou que la police avait intentionnellement laissé le tout aller, dans l’intention de justifier l’opération de répression brutale ainsi que le fait d’arrêter massivement autant des pacifistes que des quidams venus apprécier le chaos.

Certain.es anarchistes se faisant plus entendre que les autres, ainsi que certain radicaux.ales, adoptèrent l’explication fournie par la police, selon laquelle il y aurait eu un manque de communication et une confusion émanant d’une chaîne de commande centralisée ayant été incapable de gérer adéquatement une situation évoluant aussi rapidement.

J’avais personnellement ma propre explication.

Chaque explication corrobore la vision du monde de la personne qui la fournit. Je ne ressens plus le besoin d’une explication scientifique rigide pour tout ce qui se passe. Nous pouvons tous et toutes nous mettre d’accord sur le fait que certaines situations défient le sens commun tel qu’on le conçoit. Le sens est une notion puissante, et ma vie s’est considérablement enrichie depuis que mon interprétation du monde s’est décloisonnée.

De nombreuses années se sont écoulées depuis les évènements décrits ci-dessus, et ces derniers ont profondément marqué ma vie. Ils offrent deux exemples de la façon dont la spiritualité peut enrichir notre expérience. Il est également important de noter que ces histoires expriment comment le pouvoir de la spiritualité n’est exclusif ni aux moments paisibles de deuil, ni à l’usage comme arme d’une culture de lutte. Cela dit, ces deux exemples prennent place lors d’évènements larges, et je les ai vécu aux côtés de personne que je ne connaissais pas intimement. Il est possible que de mes proches aient été présent.es à ces événements, mais le contraire est tout aussi probable. Ce qui manque à ces histoires, c’est l’importance des plus petits événements : interagir avec un corbeau, un papillon ou une tempête, remercier les écosystèmes qui nous entourent, individuellement ou en petits groupes. Je crois que les moments de la vie quotidienne, tout autant que les grands événements cathartiques, sont essentiels à une vie spirituelle profonde.

Depuis ces moments, mon parcours spirituel s’est dessiné de façon beaucoup plus personnelle, se basant sur de petits évènements et rituels tranquilles. La façon dont je m’ouvre à ces instants est largement influencée par ce que j’ai pu voir chez des camarades autochtones, et par des bribes de pratiques européennes précédant le christianisme.

Bien sûr, je ne peux prétendre avoir aujourd’hui complété ce parcours, ni me trouver sur une sorte de voie vers la vérité. Soyons honnêtes, je proviens d’une culture proche de l’aliénation totale. Le fait que je doive, comme tellement de hipsters et de hippies new-age, être « éveillé » à d’autre façons de réfléchir à mon existence et à ce qui m’entoure, en est la preuve. Cela étant, je crois que les luttes se déroulant sur ces terres auront nécessairement à confronter les perspectives occidentales séparant et dominant la « nature » (le fait-même de pouvoir écrire le mot « nature » comme séparé de ma propre vie est un résultat de la pensée occidentale).

Évidemment, je n’oserais jamais revendiquer une spiritualité autochtone en particulier. Ce serait aussi absurde que de me revendiquer une identité autochtone. Ces pratiques spirituelles et ces façons de voir le monde proviennent de cultures vivantes et de communautés qui se battent pour s’établir à nouveau. Elles proviennent d’un contexte social concret dans lequel je n’ai pas été socialisé et duquel je ne fais tout simplement pas partie.

Étrangement, je me sens encore plus maladroit lorsque je tends vers des traditions païennes européennes. La façon dont je les vois mises en pratique, ainsi que les enseignements qu’elles transmettent et que je tente de comprendre, proviennent clairement d’un contexte social disparu depuis plus d’un millénaire. Je me doute également que la plupart de l’information disponible, que nous utilisons pour nous éduquer à ce propos, soit profondément teintée par une pensée occidentale chrétienne et patriarcale, celle des missionnaires qui ont couché sur papier les enseignements oraux de ces cultures avant qu’elles ne disparaissent.

Je n’ai non plus jamais été réceptif ou satisfait par l’astrologie occidentale, laquelle séduit tant de mes compagnon.nes de voyages aliéné.es (souvent citadin.es) qui sont ouvert.es à la spiritualité.

Je continue donc, ironiquement, à suivre ce chemin solitaire et aliénant. J’aspire ardemment au contexte, aux rituels collectifs et intergénérationnels qui créeraient un monde spirituel plus complet et épanouissant. Je pense à nos camarades autochtones qui utilisent le cadre de pensée des sept générations. Je pense à une mes citations préférées de À couteaux tirés, texte qui semble influencer tant de mes camarades :

« La vie ne peut pas être qu’une chose à laquelle s’agripper. Il existe une idée qui effleure chacun, au moins une fois. Nous avons une possibilité qui nous rend plus libres que les dieux : celle de nous en aller. C’est une idée à savourer jusqu’au bout. Rien ni personne ne nous contraint à vivre. Pas même la mort. Ainsi, notre vie est une tabula rasa, une page qui n’a pas encore été écrite et qui contient donc tous les mots possibles. On ne peut vivre en esclaves avec une telle liberté. L’esclavage est fait pour ceux qui sont condamnés à vivre, ceux qui sont contraints à l’éternité, pas pour nous. Pour nous existe l’inconnu. L’inconnu des ambiances dans lesquelles se perdre, des pensées jamais développées, de garanties qui sautent en l’air, d’inconnus parfaits auxquels offrir la vie. L’inconnu d’un monde auquel pouvoir finalement donner les excès de l’amour de soi. Le risque aussi. Le risque de la brutalité et de la peur. Le risque de finalement faire face au mal de vivre. Tout cela touche ceux qui veulent en finir avec le métier d’exister. »

… et je me questionne à savoir si toutes ces choses sont si mutuellement exclusives. Si ma vie est une page blanche, je dois pouvoir être libre de rompre avec l’aliénation que je suis censé reproduire. Afin de détruire ce que je déteste et de créer un monde absolument autre. C’est vers cette idée que tendent mes réflexions.

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