Commentaires fermés sur Invitation de l’État à la Révolte!
Sep032024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Cette fin de semaine qui vient, la Municipalité d’Eastman, Québécor, Hydro-Québec, le reste du gouvernment du Québec et le Conseil des Arts du Canada vous invite à vous joindre à la Révolte !
Oui c’est pas un canular, mais bien le thème officiel de ces Correspondances d’Eastman, avec une panoplie de gentils écrivain-es, intellols et artisses de la haute société, qui nous chanteront sans doute leurs tentatives pitoyables de récupérer les beaux moments que nous avions passé ensemble (en présentiel ou à distance) à brûler des poubelles et parfois des chars dans les rues, à saboter des opérations de l’industrie écocidaire, à bloquer des trains et des oléoducs, à dénoncer des mecs abuseurs de notre entourage, à attaquer des grosses mardes de l’immobilier, comme d’ailleurs les grosses mardes en charge du gouvernment du Québec (salut à toi, Camarade Legault) et bien entendu ceux du Conseil municipal (de Eastman ou ailleurs).
Visiblement même le gouvernement et sa myriade d’institutions qu’il parraine se voit forcé de reconnaître ici que leur société vaut plus la peine d’être vécue… que le temps de la Révolte est revenu.
Et il y a en effet plusieurs terrains de stationnements à travers le village et ses environs que le gratin s’empresseront de remplir de leurs beaux chars de l’année et leurs superdutys. Puis une myriade de chalets de luxe et autres développements immobiliers -souvent laissés vides le plus clair de l’année- contribuant graduellement à la destruction d’écosystèmes et à la pollution d’hycrocarbures. Aussi pas mal de restos/bistros bien bobos, à commencer par leur Cabaret de banlieusards de marde.
Et si jamais vous vous sentez pas dedans pour des attaques, bien il est bon de savoir que (soi-disant) le courrier déposé dans les boîtes rouges des Correspondances sera affranchi au frais des Correspondances, peu importe la destination du courrier, or ça peut être une occasion opportune d’envoyer des lettres aux prisonnier-ères que vous chérissez. Autant que possible essayez de pas venir en char par contre, car c’est pas assuré que le vôtre va pas écoper aussi!
Sur les lieux:
Eastman est cet endroit magique… plutôt notoire, bien connu des gens dans le sud du Québec qui sortent parfois de leur patelin pour voyager sur la 112 ou l’autoroute 10 entre Montréal et Sherbrooke. Juste à côté du Parc du Mont Orford. Une de ces colonies de la petite bourgeoisie libérale (et moins libérale) de milieu rural; un autre Sutton, ou Bic, ou Waterville, ou Val David… mais avec ses propres cliques de petit bourgeois professionels, les vampires de l’immobilier et autres artisses de renom et bien connectés. Mais c’est pas qu’Eastman qui fait cette jolie communauté, mais les enclaves bourgeoises des environs, Orford-sur-le-Lac, Stukely, les Boltons et puis les Communes de chalets de bord de lac. Des opportunités à perte de vue!
Soit, juste pour votre info… si jamais le coeur vous en dit.
Dimanche passé, la F.A.G.S. et ses complices queers et trans ont perturbé le défilé de la fierté corporative, sioniste et colonialiste de Fierté Montréal.
Nous nous sommes rassemblés vers 13h dans la zone des spectateurs à la Place Ville Marie en tenue et maquillage drag bloc. Près d’une douzaine de flics avec des brassards SIS se sont mobilisés pour surveiller notre rassemblement, car clairment qu’un groupe de queers à la fierté se protégeant mutuellement de la COVID est une cause de suspicion. Autour de 13h30, vers le début de la parade, nous avons pris la rue au moment où le char de parade Queer pour la Palestine de Helem, Mubaadarat et Voix Juives Indépendantes passait. En marchant derrière leur char dans le défilé pendant un court moment, nous avons réussi à apaiser les craintes des boeufs anxieux.
Après avoir défilé brièvement, nous nous sommes arrêtés et nous avons déployé une bannière extra-longue pour commencer à disperser et à perturber le défilé. Nous avons prononcés un discours sur le pinkwashing corporatif de Fierté Montréal. Nous avons ensuite communiqué avec les membres du char AGIR derrière nous, leur permettant ainsi qu’à plusieurs autres chars communautaires de passer et de continuer à défiler, avant de bloquer le char d’eau gazeuse Bubly.
Nous avons continué à marcher et à zig-zaguer vers l’arrière du défilé, évitant largement l’intervention des keufs, et bloquant brièvement plusieurs chars et contingents liés aux intérêts des entreprises sionistes. Les chars et les contingents solidaires nous ont encouragés et ont levé le poing sur notre passage. Un petit contingent portant des drapeaux sionistes s’est approché. Nous avons tenté de les bloquer en déployant rapidement une deuxième banderole extra-longue, mais la police nous a brutalement poussés sur le côté de la route et a volé notre banderole.
Comme la présence des flics commençait à s’intensifier, nous avons décidé de changer de direction et de revenir vers l’avant du défilé, en suivant et en protestant contre le contingent sioniste. Après avoir interrompu le défilé à plusieurs reprises, nous nous sommes arrêtés à l’angle de Jeanne-Mance et René Lévesque. Là, nous avons bloqué toute la partie arrière du défilé, où se trouvaient presque tous les chars complices.
Pendant ce temps, les cochons, les sionistes, la sécurité privée et les maréchaux de Fierté nous ont attaqués et insultés, tandis que les passants nous encourageaient et scandaient des slogans avec nous. Des membres autonomes des contingents Helem, Mubaadarat et VJI sont revenus nous rejoindre après leur perturbation “die-in” réussie et poignante. D’autres membres de la communauté ont répondu à notre appel public de soutien. Notre nombre est passé à environ 150 manifestants.
Alors que les cochons se multipliaient et revêtaient leur équipement anti-émeute, que les véhicules de transport de prisonniers arrivaient, que Fierté nous suppliait de permettre à leur parade corporative de continuer, que les sionistes nous lançaient des projectiles, que le soleil brûlant du mois d’août tapait sur nous, nous sommes restés fermement en place.
Alors que les flics nous bousculaient, nous tiraient, nous matraquaient, essayaient de voler notre matériel, nous menaçaient et nous brutalisaient devant une foule de nos adelphes queers, nous sommes restés inébranlables et défiants.
Nous avons bloqué le défilé à Jeanne Mance pendant près d’une heure avant que la police et les maréchaux de Fierté, traîtres de classe, ne travaillent ensemble pour rediriger le défilé de l’autre côté du terre-plein de René Levesque.
Après que le défilé soit passé de l’autre côté de la route, nous avons marché sur René Lévesque en scandant des slogans contre le pinkwashing et la police. La grande majorité des passants nous ont encouragés, tandis que certains nous ont crié du vitriol raciste, montrant leur vrai visage d’hommes cis blancs sionistes, capitalistes et colonialistes. Nous nous sommes finalement dispersés dans le métro. Aucune arrestation n’a eu lieu.
Bien que nous n’ayons pas réussi à faire annuler complètement le défilé, nous considérons que cette action a été une réussite.
Nous avons bloqué les chars des entreprises suffisamment longtemps pour que nombre de leurs spectateurs potentiels, situés plus loin sur le parcours de la parade, s’en aillent par ennui. Nous avons montré aux spectateurs queers et aux médias que la police n’a pas peur de brutaliser les queers lors d’une parade de la fierté. Nous avons rappelé au monde que la fierté était née d’une émeute contre la police, et non d’un défilé sponsorisé par des intérêts corporatistes. Nous avons montré qu’en tant que queers de conscience à Tio’tià:ke, comme à Tkaronto, les territoires Salishes côtiers colonialement connus sous le nom de Vancouver, et ailleurs sur l’île de la Tortue et dans le monde, nous n’accepterons pas un génocide en notre nom.
Fuck le pinkwashing Fuck Fierté Montréal Police partout Justice nulle part
Commentaires fermés sur Sabotage de Airbnb dans le quartier de Hochelaga
Août012024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Alors que la crise du logement fait rage, les habitant.es du quartier Hochelaga ripostent contre les propriétaires d’Airbnb. La ville est au service des propriétaires; les locataires choisissent l’autodéfense populaire.
Des citoyen.ne.s du quartier ont saboté les serrures d’une trentaine de Airbnbs. L’action visait ainsi à dénoncer la présence de ces Airbnb et à montrer à la ville et aux propriétaires que les locataires d’Hochelaga n’hésiteront pas à s’attaquer matériellement aux propriétaires qui volent leurs logements. Dans le quartier, ce serait 300 logements qui sont retirés du marché locatif en raison de la présence de Airbnb. Avec un taux d’inoccupation exceptionnellement bas, il est impossible de laisser passer ça.
Ainsi, ce sont des victimes des crimes commis par les propriétaires des Airbnbs et des allié.e.s qui ont décidé de montrer leur colère et de mettre en lumière les injustices perpétrées dans le quartier. Aucun Airbnb strictement légal (comme une personne qui loue son logement pendant qu’elle est en voyage) n’a été visé.
Les citoyen.ne.s ont notamment repris pour cible le Airbnb au 3650 rue Ontario, car celui-ci symbolise l’impunité des propriétaires qui pourrissent le parc locatif du quartier en créant toujours plus de Airbnb, alors que la province est plongée dans une terrible crise du logement. Les gens peinent à se loger et ces propriétaires véreux préfèrent se remplir les poches plutôt que de laisser cet immeuble au marché locatif. Nous ne doutons pas que les militant.e.s du quartier continueront de viser ce bâtiment jusqu’à ce qu’il revienne à la communauté.
Strawberry Stays! est l’une des compagnies les plus actives dans Hochelaga-Maisonneuve. Selon La Presse, la compagnie aurait 14 annonces à leur nom sur la plateforme Airbnb dans le quartier. Cette compagnie aurait fait du lobbying intensif et aurait même intenté une poursuite contre l’arrondissement pour empêcher la mise en place d’un nouveau règlement visant à interdire la location de courte durée dans une résidence secondaire en 2023. Cette compagnie est l’ennemie des locataires du quartier.
Alors que le massacre insupportable à Gaza par Tsahal et ses milliers de morts continue et prend actuellement une tournure encore plus abjecte avec l’offensive sur Rafah, le climat actuel dans le milieu politique nous a poussé à écrire cet article pour redire quelques observations qui devraient être des évidences pour tout révolutionnaire anti-autoritaire : comme dans tout endroit existant sur cette planète, il existe en Israël comme en Palestine, nombre de personnes en lutte contre les différents pouvoirs qui les oppriment.
En Israël des manifestations s’enchaînent tous les week-ends depuis plusieurs mois pour réclamer un cessez-le-feu, et demander le départ de Benjamin Netanyahu et de son gouvernement, accusés de continuer une guerre inutile et meurtrière à Gaza pour se maintenir au pouvoir, tout en empêchant la libération des otages israéliens détenus par le Hamas par leur volonté de poursuivre aveuglément les combats.
Si les massacres qui se sont déroulés lors de l’attaque dirigée par le Hamas le 7 octobre dernier avaient choqué le pays et fait croire à une courte période d’union nationale, les contestations s’étaient rapidement élevées dès mi-octobre 2023 pour réclamer à l’État d’avoir pour priorité la libération des otages. Alors que le gouvernement israélien s’est entêté à poursuivre la guerre, occasionnant des dizaine de milliers de morts, ces manifestations en soirée se sont intensifiés jusqu’à faire descendre des dizaines de milliers de personnes dans la rue. Le 6 mai dernier, dans la manif’ la plus massive depuis des mois, des protestataires ont bloqué l’autoroute Ayalon, allumant des feux sur leur passages, et certains manifestants ont assailli l’entrée du Ministère de la Défense avant d’être repoussés par la police. Ces manifestations viennent rappeler le mouvement de contestation qui avait provoqué des grèves massives et fait sortir plusieurs centaines de milliers de manifestants l’an dernier, et ce jusqu’en septembre 2023, contre la réforme de la justice. Il s’était élargi en partie à la contestation de la politique mené par le gouvernement israélien vis-à-vis des palestiniens, mais aussi à la montée de l’influence politique des mouvements d’extrême-droite sionistes ou religieux ultra-orthodoxes. Lors de certains de ces rassemblements, considérés comme faisant partie des plus massifs de l’histoire du pays, les participants étaient parvenus à plusieurs reprises à bloquer des autoroutes importantes, parfois dans plus de 150 endroits à travers Israël, des voies maritimes, et à un des moments culminants du mouvement en termes d’intensité, à s’approcher de la résidence de Netanyahu.
Aujourd’hui, les opposants à la réforme judiciaire, les familles des otages et les refuzniks, les jeunes israéliens qui refusent le service militaire obligatoire et sont pour ceci passibles de prison, se mêlent dans la rue. Le gouvernement, usant de la vieille et habituelle rhétorique nationaliste d’union sacrée, a dénoncé ces manifestations comme un « cadeau » fait par les israéliens au Hamas, tandis que la police a réprimé brutalement les rassemblements et arrêté plusieurs dizaines de personnes ces dernières semaines, dont des membres de familles d’otages, notamment pour « incitation à l’émeute ». Solidarité aux interpellés de ces nuits là et à tous ceux qui luttent en Israël contre l’État, la répression policière et la militarisation.
Depuis qu’il a pris le pouvoir sur le mouvement nationaliste laïc du Fatah en 2007, le Hamas cherche à imposer sur Gaza, par l’application de la charia, son idéologie fondamentaliste religieuse et réprime durement toute contestation de son autorité sur ce territoire déjà éprouvé par le blocus israélien. Cela n’empêche pourtant pas les gazaouis de se soulever contre le Hamas, sa mainmise sur les ressources économiques ou ses « comités moeurs » qui surveillent l’application des restrictions religieuses. Depuis une dizaine d’années, des manifestations et émeutes font irruption dans l’enclave palestinienne. Des manifestations de grande ampleur avaient eu lieu à plusieurs reprises dans la ville de Gaza en 2015 et en 2017 notamment pour protester contre les incessantes coupures d’électricité, dont le réseau et l’approvisionnement était partiellement contrôlé par le Hamas et le Fatah à l’époque. En 2019, les gazaouis avaient pris la rue en bloquant les routes et en enflammant des pneus pour protester contre les taxations imposées par le Hamas sur des produits de nécessité et contre les conditions de vie inhumaines, entre pauvreté, chômage, pénuries et enfermement, alors que les dirigeants du Hamas ne vivent pas à Gaza et que ses gradés profitent de positions très privilégiées par rapport au reste de la population. En juillet-août 2023, des protestations dans les villes de Gaza, de Rafah, de Khan Younès et dans les camps de réfugiés de Jabalyah et Nusseirat, ont réuni des milliers de palestiniens, après notamment de nombreux appels relayés par le compte Instagram anonyme « Virus Al Sakher » ou « Virus moqueur ». Les palestiniens manifestaient contre les conditions de vie atroces imposées par l’armée israélienne mais aussi contre le pouvoir local du Hamas, dont les partisans ont été la cible de jets de pierre et ont vu leurs drapeaux verts brûlés par les émeutiers. Les gazaouis chantaient notamment « Le peuple veut renverser le régime ».
Face à ces manifestations, le Hamas et sa police ont toujours répondu par une forte répression, en tabassant les émeutiers et en les mettant en prison, en tirant en l’air ou sur la foule. Le Hamas a constamment empêché la propagation des images et des appels sur les réseaux sociaux, même si nombre de témoignages nous sont parvenus et sont chaque jour partagés. Il a aussi, depuis sa prise de pouvoir, condamné à mort et/ou exécuté plusieurs palestiniens, et a beaucoup usé le motif de « collaboration avec Israël ». Le Hamas a en général cadenassé l’expression des désaccords dans l’enceinte de la bande de Gaza, avec une surveillance accrue des gazaouis matérialisé par : les Services de sécurité générale et de ses fichiers sur chaque individu où sont recensés ceux qui ont participé aux manifestations de 2023 ou ceux ayant jugé « immoral » ; un réseau d’informateurs étendu et un encouragement à la délation.
Solidarité avec tous ceux qui à Gaza, en plus de subir les assauts meurtriers répétés de Tsahal et le blocus israélien, descendent dans les rues contre l’autoritarisme militaire et religieux du Hamas. Les faits rappelés ici montrent qu’en Israël ou en Palestine, des individus se sont toujours battus et se battent toujours contre ceux qui tentent de contrôler leurs vies, qu’ils soient des soldats et des politiques de l’État israélien ou des partisans du proto-État du Hamas (ou même avant, du Fatah). Ces révoltés semblent pour la gauche campiste ne pas exister, tant la volonté est grande d’assimiler tout ce monde à son gouvernement respectif pour maintenir intact son idéologie.
Depuis le 7 octobre, une partie de la gauche et des aires subversives françaises et internationales se vautrent dans un campisme des plus débilitant. Alors que la droite et l’extrême-droite soutiennent de manière obscène le gouvernement israélien, Tsahal, et leur « droit » à la riposte militaire et aux massacres, la gauche sous anti-impérialine, des bouteldjistes de Paroles d’Honneur à Solidaires en passant par les trotskystes, a répondu par un soutien, « critique » ou pas, à ceux qui sont supposés être « le camp des palestiniens », en l’occurrence le Hamas, présenté comme étant la « résistance palestinienne ». Enfin LFI, qui soigne sa période électorale, tire son épingle du jeu en se présentant comme le parti défenseur des opprimés, après avoir fait maintes fois preuve de positions ambiguës sur la Syrie de Bachar al-Assad ou sur le génocide des Ouighours par la Chine.
Hors des plateaux-télés, les occupations étudiantes se succèdent et certaines des revendications qui y sont portées nous interrogent : l’arrêt des poursuites contre les étudiants mobilisés ne nous pose absolument aucun souci, mais une autre revendication qui revient concerne l’arrêt des partenariats avec les universités israéliennes, notamment parce que celles-ci auraient des filières en lien avec l’armée israélienne. Assez cocasse de la part d’étudiants de Science Po, dont une grande partie constitue les futurs politiques, ambassadeurs, bureaucrates des cabinets ministériels, qui collaboreront bientôt avec leur État et leurs armées et tous ceux du monde, quand ils auront enfin fini de boycotter des triple-cheeses. Si cette revendication était obtenue, cela reviendrait à empêcher notamment tout échange universitaire pour les israéliens désirant se rendre en France, peu importe ce que ces israéliens pensent de leur gouvernement, qu’importe apparemment si ces derniers sont des refuzniks ou des émeutiers ayant combattu l’État israélien depuis le printemps dernier ou plus longtemps encore. Récemment, un appel a été lancé à Paris pour demander l’annulation de la venue des exposants israéliens lors d’un salon de l’industrie de l’armement à Paris (« Aucune arme israélienne à Eurosatory »). L’antimilitarisme serait-il devenu sélectif, en fonction du pays qui utilise-vend-achète les nouvelles technologies militaires qui serviront à tuer tous azimuts ? Y a-t-il maintenant les bons et les mauvais missiles ? A-t-on enterré l’internationalisme le plus élémentaire pour de bon ?
Pire encore, une partie de ceux que nous avons cités se baignent lamentablement dans un antisémitisme sous couvert d’antisionisme dans la plus pure tradition soviétique (ou sorialienne). On en viendrait presque à confondre certaines déclarations de gauche avec des saillies dieudonnistes, surtout quand d’aucuns, perdurant ainsi la longue tradition de l’antisémitisme de gauche, viennent accuser de « sionistes » ceux qui critiquent une rhétorique confusionniste ou antisémite de la part de leurs idoles gauchistes qui reprennent le vieux poncif des « juifs nouveaux nazis » ou du lobby sioniste qui contrôle le monde. Ou que d’autres viennent déballer leur nouvelle forme de négationnisme pervers en affirmant que le nazisme ne fut pas « nécessairement antisémite » (vu sur Twitter).
Nous rappelons ici à ces raclures que critiquer Israël, ses massacres, sa colonisation en Cisjordanie et sa politique générale envers les palestiniens est possible sans en appeler à la référence sensationnaliste aux nazis, qui avaient une spécificité assez essentielle : vouloir éradiquer les Juifs (ce qui ne les a pas empêché d’exterminer d’autres impurs et indésirables du IIIème Reich).
En faisant ceci, ces raclures ne rendent service ni aux gazaouis et aux initiatives de soutien, ni à la lutte contre l’antisémitisme.
De l’autre côté de l’échiquier politique, le RN, parti de racelards créé par d’anciens collabos et Waffen-SS, se sent maintenant de tenter de faire gober à tous qu’il est un parti protecteur pour les juifs, en déversant par la même occasion sa bile contre les immigrés maghrébins et arabes.
Quelle époque détestable mais qui ressemble finalement à toutes les autres : comme toujours, la gauche comme la droite nous donnent envie de gerber.
Les actes antisémites ont augmenté partout en flèches et, devant la banalisation, à gauche notamment, de discours, d’actions ouvertement antisémites ou flirtant avec, il nous semble plus que jamais nécessaire de marquer une rupture.
Par ces quelques observations, nous voulons rappeler que la stratégie qui consiste à amalgamer les individus aux États ou aux organisations qui les oppriment est une arnaque factuelle et conceptuelle la plus complète, la réalité ayant toujours contredit ces analyses, et qu’elle équivaut à donner absolution à ces mêmes États, tant ces derniers se frottent les mains en voyant leurs discours si proprement diffusés. S’il doit sans doute être difficile de penser à autre chose qu’à sa survie quand on est sous les bombes comme les gazaouis le sont actuellement, s’il est sur qu’il est de plus en plus ardu en Israël, où le pouvoir politique mène une intense propagande de guerre et d’union sacrée, de résister aux sirènes nationalistes, nous savons qu’il existe toujours une potentialité pour la révolte là-bas, des deux côtés de la frontière. Il est une nécessité pour les révolutionnaires d’ici et de partout d’affirmer en solidarité que la défense d’un drapeau national n’a jamais émancipé personne dans ce bas-monde et que la bataille ne se mène pas entre nations, entre religions, entre « peuples » mais qu’elle se mène contre ceux qui nous exploitent et nous oppriment, qu’ils soient soldats, religieux, démocrates ou capitalistes !
Commentaires fermés sur Contribution au débat sur la question du genre, des femmes et du capitalisme
Juin182024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Ce texte se veut une contribution au débat sur la question du genre, des femmes et du capitalisme. Il a d’abord été envoyé au site de première ligne et il existe aussi une version papier disponible à la librairie l’Insoumise dans la section des brochures féministes. Bonne lecture !
Bonjour gens de Première Ligne,
j’ai bien aimé lire les différents textes du numéro 3 de votre revue collective. Je vous écris car je voudrais partager avec vous quelques-unes de mes réflexions concernant certains textes en particulier et j’espère que cette modeste contribution saura alimenter les discussions.
Je vais débuter avec le texte « Devenir lesbienne », car ce texte fait naître des questions essentielles qui seront abordées tout le long. C’est d’ailleurs là l’intérêt de ce texte et en quelque sorte sa réussite. Commençons par la question que se pose la personne qui a écrit le texte : que signifie « devenir une femme » ? Cette question qui semble anodine est pourtant au coeur de tout le débat sur la domination masculine, la subordination des femmes et la structure sociale du genre. Si nous voulons y répondre, il faut s’assurer de bien cerner la question.
À quoi se rapporte l’être ou le devenir de la femme ? « Être une femme – comme le dit le texte – n’a pas de signification positive : des aspects extérieurs, superficiels, peuvent êtres érigés en signifiants de l’existence féminine (corps, seins, sexe, maquillage, coupe de cheveux, habillement, voix, comportement). » Donc, ce qui définit les femmes en Femme c’est la rencontre de diverses assignations produites à partir d’éléments insignifiants et imposés de l’extérieur : ce qui en fait une construction sociale. Le texte « À qui profite la haine de nos corps ? » dans le même numéro est une très belle démonstration d’un point de vue subjectif de ce processus de construction de l’identité féminine. Mais la question demeure.
Le texte poursuit ainsi sa réponse : « Être une femme, c’est appartenir à une classe, prise et n’existant que dans un rapport d’exploitation avec une autre. » Autrement dit, les femmes ne naissent pas Femme, elles le deviennent mais ce « devenir » est un négatif, un problème que vivent toutes les femmes – définit ici comme classe – dans un rapport avec une altérité qui la définit comme subalterne. Il reste toutefois à définir cette altérité structurante qui construit l’identité Femme comme un outil de subordination. Et c’est là que ça se complique.
Poursuivons : « Devenir une femme est dénué de contenu positif, au-delà de la solidarité profonde ressentie envers la classe, envers toutes les femmes : transitionner, devenir transgenre, devenir transexuelle, c’est quitter la classe des hommes, et rejoindre volontairement la classe des femmes. » Est-ce à dire que l’origine de la subordination des femmes c’est la classe des hommes ? Dans ce cas, en se débarrassant des hommes, on élimine du même coup la source du problème qui concerne les femmes. Ça rejoint un peu le projet du SCUM imaginé par Valérie Solonas. Mais est-ce vraiment le cas ? Est-ce que pour se solidariser avec les femmes dans leurs luttes, les hommes doivent disparaître en passant à « l’étape suivante » et « rejoindre l’avant-garde de la classe, devenir lesbienne » ? C’est là une question très pertinente mais à laquelle il en manque une autre : qu’est-ce qu’être un homme ?
Si l’identité Femme est un construit social, celui de l’Homme l’est tout autant. C’est ce que confirme ce passage du texte : « l’élément perturbateur, dans mon existence de garçon, ne se trouvait pas au-dedans de moi-même, mais au-dehors : non pas dans ma subjectivité individuelle, expression de mon existence intérieure, mais dans mon existence extérieure, objective, dans mon existence sociale. » Être Homme c’est un peu « appartenir à une classe, prise et n’existant que dans un rapport d’exploitation avec une autre » – en occupant toutefois le pôle positif et dominant de ce rapport. Par conséquent, l’origine du problème pour les femmes – et aussi pour les hommes qui veulent se solidariser avec les femmes – ne se trouve pas chez les individus qui portent l’identité masculine mais dans le fait qu’il existe une identité, une domination masculine. Les identités de genre basées sur le mode binaire de l’Homme et de la Femme se construisent réciproquement comme un système d’assignation qui dépasse les individus et les détermine en même temps dans leur rôle respectif. Ce ne sont donc pas les hommes en particulier – porteur du phallus symbolique – qui fait la domination masculine mais plutôt la domination masculine qui conditionne et contraint un groupe d’individus possédant certaines caractéristiques – dont un pénis et une virilité – surdéterminées socialement à devenir ce que la société exige d’eux : être un Homme.
Il y a cependant un autre problème avec cette approche. En effet, que faire quand cette « existence extérieure, objective » est la seule réalité qui nous permet de construire notre « subjectivité individuelle » ? Le dedans n’échappe pas si facilement au dehors. À partir de ce constat, il est légitime de se poser la question : suffit-il de « devenir une femme » pour déconstruire l’identité masculine et sa domination ? Que se passe-t-il avec notre conditionnement social et ses schèmes de pensées que nous avons acquis depuis l’enfance et qui sont les seules références que nous avons pour définir et juger de nos comportements ? Il n’est pas plus facile de se défaire de son identité masculine pour un homme qui a grandi avec que ce l’ait pour une femme de se sortir de son conditionnement de subalterne. Comme le dit si bien le texte « C’est bien beau la libération sexuelle, mais… comment ? » toujours dans le même numéro : « Il est difficile de vouloir sortir d’un cadre et de vouloir le déconstruire en même temps. » La raison de cette difficulté c’est que le cadre dominant de nos rapports sociaux est le seul dans lequel nous pouvons expérimenter concrètement nos désirs, le reste n’est que la marge de manoeuvre que nous parvenons à créer par la résistance, la révolte et la lutte.
En suivant la logique du texte « Devenir lesbienne » nous arrivons à une impasse : quitter la classe des hommes pour transitionner vers celle des femmes ne résout en rien la problématique de la domination masculine et de la subordination des femmes, car pour déconstruire la masculinité il faut déconstruire la féminité et vice versa. Tout au plus, c’est un acte individuel de contestation et de solidarité qui peut en vouloir bien d’autres mais qui en même temps produit son lot de confusion qui a pour résultat de favoriser – comme le fait remarquer le texte « Esquisse d’une analyse féministe marxiste contemporaine » que nous allons analyser plus loin – « un discours de plus en plus relatif au développement personnel plutôt qu’une réflexion sur le cis-hétéro-patriarcat en tant que structure d’oppression dépendante des opérations générales du système de production capitaliste. » En somme, il nous faut revoir le sens de la question d’un autre angle.
Qu’est-ce qui définit le « devenir de la femme » alors ? C’est la domination masculine. Mais qu’elle est le fondement social de cette domination ? Car – nous l’avons vu – il ne suffit pas de s’en prendre aux hommes pour détruire cette domination, il faut s’attaquer aux racines, à la structure des rapports sociaux. De la même façon qu’aucune révolution ne pourra abolir l’exploitation capitaliste en se débarrassant seulement de la classe capitaliste sans transformer les rapports de production sociale – la révolution russe l’a suffisamment démontré. Donc, pourquoi la société a-t-elle besoin de structurer hiérarchiquement les individus sous la forme d’identités genrées ? Voilà ce que je voulais dire plus haut quand je parlais de bien cerner la question qui concerne la domination masculine et la subordination des femmes si nous voulons y répondre adéquatement.
* * *
Mais de dire que la domination masculine est une construction sociale qui a pour but la subordination des femmes ne suffit pas à expliquer ce qui fonde cette domination/subordination spécifique mais ça permet au moins de sortir la question du vécu et de la responsabilité personnelle. En même temps, cette question ne se pose concrètement que dans le vécu quotidien des femmes au travers leurs luttes et ce n’est pas simple pour personne de franchir le seuil de la remise en question de ce vécu quotidien. Car la remise en question de ce que la société fait de nous a pour effet de nous projeter dans la problématique complexe du changement social qui doit nécessairement coïncider avec la transformation de nos vies, ce qui évidemment créer plus de confusion que de solutions.
C’est ce qu’exprime le texte « C’est bien beau la libération sexuelle, mais… comment ? » avec cette phrase en particulier : « comment garder la tête hors de l’eau assez longtemps pour savoir si mes attentes et mes désirs dans une relation sont vraiment miens ou s’il s’agit seulement de codes auxquels je pense devoir souscrire ? » Plus loin le texte dit : « C’est bien beau la libération sexuelle, mais à quel moment devient-elle seulement de l’hypersexualisation et une centralisation de la sexualité dans nos vies, dans nos relations et dans nos priorités? Il y a pour moi un conflit entre la libération/l’émancipation du cadre et la destruction du cadre en même temps, dans ce cas-ci la libération sexuelle (coucher avec qui on veut, fin du slutshaming, actions contraires aux attentes) et la déconstruction (polyamour, redonner de la valeur aux connexions humaines, anarchie relationnelle). Ce ne sont pas des concepts contradictoires, mais le désir d’opposition n’est pas nécessairement toujours compatible avec la remise en question. » Pour finalement avouer : « j’ai de la difficulté à savoir si mes désirs sexuels sont vraiment miens ou s’ils sont seulement une continuation des dynamiques d’oppression genrée que je subis et dont je suis témoin depuis toujours. »
Est-ce que « mes attentes et mes désirs dans une relation sont vraiment miens ou s’il s’agit seulement de codes auxquels je pense devoir souscrire (…) une continuation des dynamiques d’oppression genrée que je subis et dont je suis témoin depuis toujours ? » En fait, les deux réalités sont vraies ; ou plutôt, c’est la seule et même réalité. Aussi frustrante que cette réalité puisse être, nos « attentes » et nos « désirs » sont toujours déjà le produit codifié par la société que je fais mien à chaque instant et avec lequel je suis en contradiction lorsque je ne veux plus être ce que je suis, lorsque je veux sortir « des dynamiques d’oppression genrée ». La remise en question a toujours quelque chose de frustrant dans cette société mais cette frustration doit nourrir notre révolte et notre volonté de changement social, pas notre haine ni notre résignation. Pour reprendre la métaphore de la noyade : le seul moyen de garder la tête hors de l’eau restera toujours de nager ou plus concrètement de se battre contre la fatalité d’être perdu au milieu de l’océan capitaliste.
Là où la remise en question devient source de frustration c’est lorsqu’elle s’illusionne d’un changement individuel, « dans ce cas-ci la libération sexuelle » sans « destruction du cadre ». Car occulter l’aspect fondamentalement social et structurel de la « libération/émancipation du cadre » ne peut que nous condamner à une lutte contre nous-mêmes, contre ce que nous sommes devenu dans cette société sans comprendre au final pourquoi il n’y a pas de réel changement qui s’opère dans nos relations quotidiennes malgré tous les efforts fournis et les combats menés. On ne fait que s’adapter en expérimentant des alternatives qui ne mènent jamais bien loin du cadre dominant – comme le fruit qui tombe de l’arbre. Il n’y a pas de contradiction entre le concept de « libération du cadre » et celui de sa « destruction » parce qu’ils vont de paire : il ne peut y avoir d’émancipation de l’individu sans détruire ce qui encadre cette individu.
Dans l’encadrement capitaliste de la vie, c’est seulement dans l’espace de la lutte sociale que peut se créer le moment d’un écart, d’une remise en question des codes, cadres et autres assignations normatives ; c’est seulement dans la remise en question collective – celle des grèves générales, des insurrections et des révolution – que l’individu peut faire ses premiers pas expérimentaux, faire le saut dans l’aventure. En retour, c’est avec le blabla de ces luttes que nous sommes en mesure de définir théoriquement ces écarts. Cependant, il ne faut pas faire des idioties et croire que celleux qui se spécialisent dans la théorie ont la vérité au bout des doigts, car la vérité est dans les luttes pas dans le doigt qui pointe la lutte. À bas les chefs !
* * *
Après avoir établi le fondement social de la subordination des femmes et réciproquement de la domination masculine, il reste encore une question : pourquoi la société capitaliste a-t-elle besoin de cette subordination spécifique des femmes pour fonctionner ? Répondre à cette question va nous permettre de définir l’enjeu à partir duquel se déploie la structure du genre comme subordination des femmes d’un côté et domination masculine de l’autre.
Sans la poser clairement c’est à cette question que cherche à répondre le texte « Esquisse d’une analyse féministe marxiste contemporaine » et pour y répondre le texte commence par « un retour aux esquisses théoriques des féministes marxistes et matérialistes des années 1970 ». Selon le texte, ces féministes affirmaient que : « l’oppression cis-hétéro-patriarcale opère selon la conjonction d’un système idéologique familial et d’une structure sociale relative au ménage. Ce complexe idéologique et structurel lié au domicile et à la famille détermine les conditions sociales et matérielles des sujets genrés subissant le capitalisme. (…) L’idéologie familiale a produit la définition du domicile entendu comme un lieu privé, hors de l’espace public, c’est-à-dire le lieu du travail et des appareils étatiques. »
L’enjeu ici semble se trouver dans la famille comme idéologie structurante du « privé » opposé au « lieu du travail » et aux « appareils étatiques » comme « public ». Mais où commence le privé et où finit le public n’est jamais vraiment clair. Par exemple : « le lieu du travail » comme « espace public » n’est-il pas aussi « un lieu privé » qui appartient juridiquement à son ou ses propriétaires ? Inversement, la nationalisation ne prouve-t-elle pas que « le lieu de travail » est entièrement « public » ? Mais jusqu’à un certain point le domicile familial aussi peut être investi et encadré par l’État et ses lois – les variantes fascistes et staliniennes du totalitarisme ont amplement démontré à quoi peut être réduit la « vie privé » dans le capitalisme. Dans le fond, le « privé » c’est toujours le privé du « public », de l’État. Néanmoins, la séparation entre la famille et le lieu de travail recoupe bel et bien celle de la sphère féminine et de la sphère masculine d’activités légitimes naturalisées. Sauf que rien nous dit que « la définition du domicile entendu comme un lieu privé » est le fondement de la subordination des femmes, ce n’est peut être qu’un élément de sa structuration, qu’une des conditions de sa réalisation. Selon moi, bien qu’étant constitutive de la structure de subordination des femmes, le concept de « privé » et de « public » n’est pas suffisant pour expliquer le fondement de cette subordination.
Mais ceci dit, voyons plus loin. « Auparavant, (…) les sujets féminins travaillaient dans, sur, et autour de leur maison, et ce travail était rythmé selon la cadence du sujet féminin exerçant la tâche en concordance avec les besoins de leur famille et de leur communauté. (…) L’arrivée des structures de production capitalistes change la régulation du rythme de travail : la force de travail des travailleur.euses est achetée par un patron et régulée selon les besoins de la production et du marché. Cela pose un problème pour les parents-travaill.eur.euse.s qui doivent composer avec les besoins familiaux dans ce nouveau rythme de travail. »
Ce qui rend ce passage sur la division sexuelle du travail intéressant c’est le problème que pose « l’arrivée des structures de production capitalistes » non seulement pour « les parents-travaill.eur.euse.s » mais aussi pour l’ensemble de la société. En fait, ce qui « pose un problème » du côté du prolétariat ce n’est pas le « nouveau rythme de travail » mais la séparation d’avec les moyens de subvenir à ses besoins essentiels – ce qui l’oblige à se soumettre au « nouveau rythme de travail » qu’impose le Capital – et du côté du Capital c’est la force de travail elle-même : il faut la reproduire car elle doit toujours être disponible en surpopulation sur le marché du travail pour être acheté à rabais par des capitalistes afin de mettre en mouvement les moyens de production qu’ils possèdent et qui ont pour seule utilité de produire du profit. C’est là tout l’enjeu du salaire de savoir quelle part de la valeur produite par le travail revient à la reproduction directe de la force de travail, le reste devenant de la plus-value. Mais c’est là aussi tout l’enjeu de la lutte de classes car le travail existe dans la mesure où le Capital s’efforce d’un côté d’augmenter la population ouvrière mais en même temps n’existe pas dans la mesure où le capital s’efforce de l’autre côté à diminuer la partie nécessaire du travail – le salaire – de cette population qui devient de trop. Et c’est à partir de là enfin que la question des femmes est devenu un problème qui se pose et un enjeu qui s’impose, car si « la division sexuée du travail s’est fixée en concordance avec les structures de production capitalistes » c’est parce que « les besoins familiaux » sont devenus un problème dans un monde où la force de travail est « régulée selon les besoins de la production et du marché ».
Ce n’est pas tout ! Si la question des femmes en est venue à se poser comme un problème dans la société capitaliste c’est aussi parce que la mobilisation impersonnelle de la force de travail globale par les capitalistes entre en contradiction avec le besoin essentiel de mobiliser une part importante de cette force de travail dans le seul but de produire et reproduire une classe d’individus qui ne possèdent que leur force de travail et qui – en vertu de cette qualité – doivent toujours être disponibles à se vendre contre un salaire. Pour la classe capitaliste, le travail ne possède qu’une qualité celle de produire de la valeur. Tout le travail de reproduction à domicile n’a donc aucune valeur pour le Capital et c’est pourquoi il est invisible pour la société. Sauf que cette uniformisation du travail sous sa forme abstraite de production de valeur fait en sorte que la division sexuelle du travail ne va plus de soi, qu’elle est constamment remise en cause par cette uniformisation. Et bien sûr, ce sont les femmes qui doivent supporter cette contradiction en étant à la fois exclues de la sphère productive afin de se vouer aux « tâches de reproduction » et à la fois contraintes au salariat comme les hommes ; ce sont elles qui subissent le double travail. Mais encore là, la question demeure : pourquoi ce sont les femmes qui doivent être assignées aux « tâches de reproduction ».
La réponse proposée par le texte selon le point de vue des « féministes matérialistes et marxistes des années 1970 » n’en est malheureusement pas une : « En vertu de l’idéologie familiale, les sujets féminins ont été relégués à la sphère du domicile pendant que les sujets masculins travaillaient. » Mais cette idéologie elle vient d’où, elle est l’idéologie de quoi au juste ? De la famille ? Mais nous ne sommes pas plus avancé. Qu’est-ce qui rattache les femmes à la famille, quelle nécessité ? Et ça n’apporte pas grand chose à la réponse de rajouter qu’« historiquement, les tâches de production ont donc été attribuées aux « hommes », et les tâches de reproduction aux « femmes »». Mais pourquoi en est-il ainsi historiquement ? Plus loin le texte poursuit : « l’idéologie familiale établie, renouvelle et détermine les conditions de possibilité de l’identité genrée. Le système famille-ménage et la division sexuée du travail qui en découle fondent les thèmes qui façonnent l’identité genrée des sujets : les sujets genrés sont le reflet des sphères qu’ils occupent. » En gros : « la production de sujets genrés » est une production qui a pour usine la famille. Tout part de la famille – « l’idéologie familiale », « la structure sociale relative au ménage », « la production de sujets genrés », etc. – mais rien n’est vraiment dit sur cette famille à part qu’elle est « entendu comme un lieu privé ».
En revanche, rien est plus vrai dans la société capitaliste que de dire que « les sujets genrés sont le reflet des sphères qu’ils occupent » mais encore faut-il expliquer pourquoi chacun et chacune occupe une sphère plutôt qu’une autre. Pour ça, il faut découvrir la fonction qui détermine la sphère occupée et par la même occasion détermine le statut du sujet ; même l’idéologie est redevable de la fonction qui la nécessite et la produit comme telle. Quelle est donc la fonction de la famille ?
Jusqu’à maintenant nous avons vu que le fondement de « l’inégalité entre les sujets masculins et féminins » ne se trouve pas « au sein de la sphère privée » mais nous avons également remarqué que la famille n’en reste pas moins la sphère que doit occuper les femmes, le lieu de leur aliénation contrairement aux hommes pour qui c’est le lieu de travail – car quand ils y sont c’est simplement pour y travailler donc ils y sont mais sans y être car ce qu’ils y font ne leur appartient pas, d’où leur aliénation. Mais concernant le fondement de « l’inégalité entre les sujets masculins et féminins » qui ne se trouve pas « au sein de la sphère privée » le texte en arrive à des conclusions semblable : « La différenciation genrée opérée par la démarcation entre la sphère publique et la sphère privée ne semble plus être une bonne figure d’analyse pour comprendre l’oppression genrée d’aujourd’hui. »
Maintenant voyons ce que le texte propose d’autre : « Ce qui produit l’inégalité et la différence genré se situe donc au sein de l’économique : plus précisément, c’est la démarcation entre la sphère du travail directement médié par le marché (DMM) qui se caractérise par un travail produisant de la valeur (…) et la sphère du travail indirectement médié par le marché (IMM) qui quant à elle est constituée d’un travail considéré comme produisant de la non-valeur. » Les femmes sont reléguées « à la sphère du domicile pendant que les sujets masculins travaillaient » parce que le travail des femmes est « considéré comme produisant de la non-valeur », comme étant « indirectement médié par le marché ». Mais comme le dit le texte lui-même : « Alors pourquoi les sujets féminins sont-ils ancrés dans un travail indirectement médié et distinct du marché ? » Est-ce parce que « les sujets féminins sont avant tout mères, et doivent reproduire et entretenir la force de travail future » ? Eureka ! Là nous avons une réponse qui fait sens car elle implique directement, spécifiquement les femmes.
En partant de l’idée que l’action d’avoir des enfants n’aura jamais le même contenu pour les femmes que pour les hommes, il est possible de saisir concrètement par où passe la fonction spécifique des femmes dans la société capitaliste : par le corps. Qui n’a pas déjà entendu dire que le corps des femmes ne leur appartient pas ? C’est parce qu’il est défini par une altérité structurante qui construit sa subordination. Il en est de même pour les hommes. Le corps c’est ce qui agit et peut donc être contraint au travail et celui des hommes est orienté vers une seul dimension : être une force de travail dont le corps – et l’esprit qui va avec – sera façonné par son « lieu de travail », par le « nouveau rythme de travail » qu’impose le mode de production capitaliste. Si les hommes ne doivent pas pleurer c’est peut être parce que la société capitaliste n’a que faire de leurs sentiments, c’est seulement leur savoir-faire, leur virilité au travail qui l’intéresse.
Pour les femmes, la mise en fonction du corps passe par sa capacité à enfanter et par sa disponibilité à l’accouplement. C’est d’ailleurs là tout l’enjeu qui pousse la société capitaliste à s’investir autant dans la propagande nataliste et dans la violence misogyne afin d’orienter la vie des femmes vers une seule dimension : faire des enfants. La famille est essentiellement le lieu où se déploie l’encadrement et le contrôle de cette capacité et de tous les dispositifs relié à la croissance et au développement du produit vivant. C’est finalement pour ça que la famille « établie, renouvelle et détermine les conditions de possibilité de l’identité genrée ».
Ce que nous n’avons fait jusqu’ici c’est de décrire la structure de genre comme subordination des femmes et domination des hommes sans jamais l’expliquer, mais maintenant nous sommes en mesure de le faire en répondant à la question que nous avons posé plus haut : pourquoi la société capitaliste a-t-elle besoin de la subordination spécifique des femmes pour fonctionner ? Parce que le procès de production capitaliste considéré dans sa reproduction ne produit pas seulement marchandise ni seulement plus-value mais produit et éternise avant tout le rapport social entre capitaliste et prolétaire et pour ce faire doit s’assurer de produire une masse de prolétaires suffisante pour rentabiliser sa production de marchandises par une part plus grande de plus-value sur le travail. Cette production de prolétaires ne peut toutefois se contenter de remplacer la main d’oeuvre existante qui s’épuise et se brise assez rapidement à cause des conditions d’exploitation qui n’ont jamais eu pour but d’améliorer la santé ni de nourrir sainement ses victimes, elle se doit aussi de l’augmenter sans cesse au même rythme qu’augmente la composition organique du Capital. De par leur position dans le procès de reproduction des conditions générales d’exploitation, les femmes ont donc pour fonction de regénérer et d’augmenter la principale force productive de la société : les travailleurs sans lesquels il n’y a pas de surtravail, et c’est parce que la reproduction de la force de travail est une condition essentielles à la valorisation du Capital que le travail invisible et gratuit qu’exécute les femmes dans la consommation ouvrière apparaît à son tour comme la reproduction non pas directement du Capital mais de certaines conditions qui seuls le mettent en état d’être du Capital.
Mais cela ne veut pas dire que la lutte contre le capitalisme est prioritaire et celle contre la domination masculine et la subordination des femmes est secondaire, bien au contraire : sans abolition de la structure de genres il ne peut y avoir d’abolition de la société capitaliste. C’est un peu à ce genre de questionnement que nous laisse la conclusion du texte : « la lutte actuelle se doit d’exiger un dépassement du capitalisme, qui, n’étant pas nécessairement la cause directe de l’oppression genrée, perpétue tout de même structurellement une oppression matérielle et réelle ». Bien que le capitalisme n’ait pas inventé « l’oppression genrée » – il n’as pas plus inventé la lutte de classes d’ailleurs – il est quand même « la cause directe de l’oppression genrée » dans la vie de tous les jours car il est tout ce qui se fait dans la société actuelle : le capitalisme est une phase historique de l’exploitation. Autrement dit, le monde qu’il faut changer est entièrement produit par la totalité du processus capitaliste. Il n’y a pas d’histoire parallèle entre les différentes oppressions, il n’y a que des oppressions – et les luttes qu’elles font naître – qui forme l’histoire du capitalisme.
Commentaires fermés sur Northvolt : l’arbre-empoisonné tombera
Mai152024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Que la hache, frappe à la racine, l’arbre-empoisonné tombera
Le dimanche 5 mai, cinq engins incendiaires ont été placés sur le site de construction du projet Northvolt au Québec. Cette action a été menée dans le but d’endommager les machines et de réduire la capacité du projet à se poursuivre. Malheureusement, ces engins n’ont pas pris feu. S’il y a une chose à retenir, c’est que lors du choix des matériaux, il faut tenir compte de la façon dont les conditions météorologiques (humidité élevée ou pluie) peuvent réduire les chances qu’un appareil s’enflamme. Plus la minuterie est longue, plus l’appareil est exposé aux facteurs environnementaux, ce qui réduit les chances de réussite.
Pourquoi chercher à attaquer et endommager de la propriété? Alors que Northvolt, une société transnationale, se présente comme le leader de la transition verte, elle en est en fait la pierre tombale. Les véhicules électriques que la compagnie planifie équipper avec ces batteries sont une fausse solution à la destruction environementale causée par la société industrielle; dans les faits, cette expension de l’industrie automobile ne fait que permettre aux effets dévastateurs de la production de voitures et des infrastructures qui soutiennent le transport en véhicules motorisés de perdurer. Avec ce projet, l’appétit insatiable du Canada pour les ressources naturelles ne fera que croître. L’exploitation minière du Lithium, étape essentielle dans le processus de production des batteries au Lithium Ion soit-disant « vertes » de Northvolt, empoisonne déjà des écosystèmes entiers et les communautés humaines qui les peuplent. Le lithium est déjà extrait de territoires autochtones non cédés ici au « Québec », avec de multiples mines supposées commencées leurs opérations dans les prochaines années. Avec ce type de mégaprojet, les lacs, les forêts et les zones humides disparaîtront sous de nouvelles routes et les mines à ciel ouvert. Les Premières Nations perdront l’accès à leurs territoires traditionels et avec cette perte, la possibilité de pratiquer et de maintenir leurs modes de vie ancestraux et les relations qui les attachent à la terre. Elles seront surveillées et harcelées par les travailleurs et les services de sécurité. Les animaux de ces territoires mourront ou devront migrer ailleurs au fur et à mesure que leurs habitats seront détruits.
A-t’on remarquer le calme anormale qui reigne aux alentours du chantier de Northvolt depuis qu’ils ont coupés la majoritée des arbres et détruit les zones humides? Un sinistre silence de mort.
Le Capitalisme et l’État se liguent, injectant massivement des fonds publiques dans les projets de corporations privées qui ne ferront qu’empirer la crise écologique à l’échelle mondiale. C’est pourquoi nous devont agir, et plus souvent qu’autrement sans tenir compte des loies imposées sur ces terres par les gouvernements. L’État québecois a déjà abandonné ses propres régulations environementales et ferme les yeux alors que Northvolt contrevient à nombre de loies et codes. C’est bien évidement parce que le gouvernement de Legault (comme tout autre gouvernement coloniale) a politiquement intérêt à ce que le projet ait de l’avant. Heureusement, le futur reste à écrire. Nous avons des choix à faire. Nous pouvons toujours agir! Nous ne devons pas nous laisser guider par d’injustes loies, mais par l’amour que nous et d’autres portons encore pour les êtres vivants, pour la terre et l’eau et par notre désir de nous battre pour un monde meilleur, à travers la lutte contre les structures coloniales. Armée de nos convictions, faisons nôtre la nuit et prenons les risques nécessaires pour combattre pour un future ou la vie est possible.
Commentaires fermés sur Feu de pneus pour la Palestine
Mai022024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Dans la nuit du 29 avril, les anarchistes ont fait un feu de pneu sur les voies ferrées à Saint-Henri. L’action a été effectuée pour perturber le trafic de train momentanément en solidarité avec la Palestine et le 1er mai anticapitaliste. Nous espérons que cette action inspire les autres à perturber l’économie et le flux de capital à travers le monde.
Commentaires fermés sur Locataires en crisse contre les Airbnb
Avr252024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
La colère des locataires a encore frappé !
En vue de la journée des locataires, on a décidé de prendre le relais de l’appel à la création d’oeuvres collaboratives sur des Airbnb, parce qu’on en a marre de passer devant des logements qui, au lieu de loger nos voisin.ne.s, servent avant tout à enrichir des ostis de proprios à marde. On ne fermera plus jamais les yeux sur ces nouvelles constructions qui servent uniquement à des locations de courtes durées, alors qu’on peine à se trouver un toit.
Selon la plateforme, l’immeuble qu’on a re-décoré appartiendrait à l’hôte Airbnb « Carli » qui dit habiter à Vancouver, et utilise le même numéro de license pour 24 logements. Néanmoins, au-delà des enjeux légaux, cette situation met en lumière la mainmise persistante d’une minorité sur nos logements et nos quartiers (historiquement) populaires, privant ainsi les locataires de leur droit fondamental à la ville.
Fuck Airbnb, fuck les proprios pis vive la décoration alternative !