Commentaires fermés sur À Montréal, la police bloque les antifascistes… pour permettre aux adeptes de black metal de célébrer les exploits militaires des nazis
Montréal, le 30 novembre 2024 — Hier soir avait lieu le deuxième des trois soirées du festival black metal de la Messe des Morts, au théâtre Paradoxe, dans le quartier Ville-Émard de Montréal. À cette occasion, une manifestation antifasciste a été organisée pour dénoncer la complaisance chronique du festival et de nombreux adeptes du genre à l’égard du courant NSBM (national socialist black metal), ou néonazi, qui traverse ce milieu, et plus particulièrement la présence dans la programmation 2024 du festival d’au moins quatre groupes liés à ce courant par leurs thématiques, leurs affiliations ou leurs collaborations.
Suite à la campagne de pression exercée sur le promoteur, Sepulchral Productions, et le locateur de la salle, le groupe Paradoxe, trois des groupes problématiques au programme, Horna, Sargeist et Chamber of Unlight — soit ceux dont les liens avec le NSBM sont les plus clairs — ont été refusés de territoire au Canada en raison d’un signalement de menace à la sécurité nationale, si l’on doit en croire le communiqué du promoteur. Deux autres groupes, Conifère et Phobocosm, s’étaient désistés de la programmation dans les jours précédant le festival, pour des raisons « évidentes » et « personnelles », respectivement.
Toutefois, le groupe suédois Marduk, dont nous avons relevé les obsessions thématiques pour les exploits militaires des SS et de la Wehrmacht durant la Deuxième Guerre mondiale, a non seulement pu jouer ses concerts prévus, mais a en plus remplacé au pied levé les groupes absents, montant sur scène les trois soirs du festival.
À l’extérieur du théâtre, au point culminant d’une campagne soutenue de dénonciation et de mobilisation initiée plusieurs semaines auparavant, environ 200 personnes ont répondu à l’appel et se sont jointes à la manifestation organisée par le collectif Montréal Antifasciste. Une foule diversifiée et combative était au rendez-vous, comptant des résident·es du quartier, des organismes communautaires du Sud-Ouest et plusieurs contingents autonomes formés, notamment, derrière les bannières du SITT-IWW et de la section locale de Voix juives indépendantes.
Une masse de porcs pour la messe des morts…
Malheureusement, la manifestation a été dès le départ paralysée et encadrée par un dispositif policier absolument démesuré : plusieurs centaines d’agents à pied, à vélo, en voiture et à cheval, répartis sur deux pâtés de maisons, formant un périmètre étanche tout autour du théâtre. Malgré qu’une cinquantaine de camarades soit parvenue à déjouer temporairement ce dispositif, celui-ci s’est avéré beaucoup trop imposant pour que nous puissions le défier efficacement ou durablement. La manifestation a donc été gelée sur place sur le boulevard Monk, à moins de 100 mètres du théâtre, vers 17 h 45. Les policiers ont ensuite érigé un point de contrôle plus au sud et opéré un tri au faciès pour diriger les festivaliers sur une rue parallèle de manière à contourner le périmètre d’insécurité et rejoindre l’entrée du théâtre. On peut dire que les policiers, ce soir-là, ont littéralement fait le jeu des fascistes. Fait à noter, de nombreux membres du SPVM placés en première ligne portaient l’écusson « Thin Blue Line », un signe de reconnaissance d’extrême droite dont l’utilisation est découragée, mais pas encore interdite par le service.
Autre fait cocasse, la mascotte stéroïdée du milieu néonazi local s’est présentée vers 18 h, juste pour « voir notre petit rassemblement ». Après cinq minutes d’un face à face tendu, il est reparti la queue entre les jambes. Dans les circonstances, une altercation physique aurait inévitablement déclenché une brutale intervention policière, laquelle aurait entraîné une fin désastreuse de la manifestation. Nous félicitons nos camarades d’avoir su garder leur sang-froid devant cette flagrante provocation.
(À ce propos, un message aux politiciens [et aux médias] qui hallucinent de l’antisémitisme dans chaque manifestation de solidarité avec la Palestine : les vrais antisémites, les foutus néonazis, sont là tout juste sous vos yeux, mais ceux-là, vous préférez envoyer vos chiens enragés pour les protéger.)
Après une heure sur place à scander des slogans antifascistes (« Siamo tutti antifascisti! », « Ville-Émard en a marre, des fachos et des bâtards! »), constatant que nous ne pourrions rien accomplir de plus en restant dans cette souricière étanche, le groupe est parti en manifestation vers le sud sur le boulevard Monk. Le SPVM a alors étroitement flanqué le cortège d’un peloton d’antiémeutes de chaque côté. À une centaine de mètres de l’édicule du métro Monk, un commandant de peloton, irrité par les remontrances légitimes d’un camarade, a inexplicablement décidé de mener ses hommes dans une violente charge contre la tête du cortège, à coups de bâtons et de boucliers, en plus de décharger libéralement une bonbonne de poivre. Histoire de bien faire comprendre qui est le boss, vous voyez! La manifestation s’est ensuite dispersée dans le métro, sous l’œil belliqueux des antiémeutes.
Le collectif Montréal Antifasciste tient à remercier chaleureusement toutes les personnes et les organisations qui ont participé à la campagne de dénonciation et de mobilisation.
Un bilan de campagne positif
Comme nous l’avions expliqué dans notre article publié le 27 octobre dernier, la communauté antifasciste de Montréal n’avait pas cru bon de monter une campagne de dénonciation contre la Messe des Morts dans les dernières années, comme elle l’avait fait en 2016, car la programmation ne présentait aucun groupe particulièrement problématique. Celle de 2024, au contraire, se présentait comme une provocation.
Au début d’octobre, nous avions communiqué avec l’administration du Théâtre Paradoxe (qui relève d’une entreprise d’économie sociale) pour l’encourager à prendre les mesures nécessaires afin d’empêcher les groupes en question de se produire dans son enceinte. Malheureusement, tous nos efforts diplomatiques n’ont pas abouti, l’administration du théâtre se disant captive d’un contrat avec le promoteur de la Messe des Morts, qui, dans tous les cas, est le véritable responsable de ce fiasco grotesque. Nous n’avons donc eu d’autre choix que de tenir notre promesse d’enchaîner avec une manifestation en marge du festival.
Quoi qu’on puisse dire des événements de vendredi soir, absolument dominés par le SPVM, nous estimons avoir atteint les objectifs de la campagne plus largement :
deux des quatre groupes visés, les plus proches du réseau NSBM, n’ont pas pu jouer au festival ;
nous avons efficacement alerté la communauté à une situation problématique ; tout particulièrement l’administration du Théâtre Paradoxe qui, manifestement, connaissait mal le vampire qu’elle avait invité chez elle ;
nous avons entraîné des conséquences économiques majeures pour le promoteur du festival, dont les activités au fil des ans dénotent une sympathie certaine pour le NSBM ;
En fin de compte, nous dressons un bilan positif de cette campagne de dénonciation et de mobilisation. Dans les prochains mois, nous allons maintenir la communication avec l’administration du Théâtre Paradoxe pour faire en sorte que l’édition 2024 du festival soit la dernière qui ait lieu dans cette salle. Nous allons également maintenir la pression sur le promoteur du Festival, qui a encore une fois donné la preuve de sa complaisance à l’égard d’une idéologie haineuse et de ses manifestations dans le genre black metal, malgré ses prétentions à la neutralité politique.
Et bien entendu, nous allons continuer à exercer une veille constante pour que Montréal reste, résolument, antifasciste.
Commentaires fermés sur De la violence? : Un communiqué sur la casse lors de la manifestation BLOQUONS L’OTAN*
Nov252024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
*Ce communiqué est basé sur le journal du même nom, organisé par la CLAC et D4P, mais il en est indépendant. Nous expliquerons ici le raisonnement derrière nos actions du vendredi soir 22 novembre 2024, parce qu’on sait pourquoi on fait ces choses et parce qu’on croit fort en ce que l’on fait.
Remettons nous d’abords en contexte : le vendredi 22 novembre marque le début de l’assemblée parlementaire du bras armé du Nord global, soit de l’organisation du traité de l’Antlantique Nord (OTAN), qui se tiendra à soi-disant Montréal jusqu’au 25 novembre. Alors que les gouvernements s’adonnent déjà à faire de la vie des exploité.e.s et des exclu.e.s un cirque mortifère, l’OTAN vient mettre pression pour que le soi-disant Canada consacre 50% de plus de son PIB aux forces armées. Évidemment, nos « démocraties » sont tout-à-fait à l’aise avec cet investissement. Ça représenterait 55 miliards de dollard. L’OTAN est une instance décisionnelle qui concrétise des intérêts militaristes et impérialistes. Elle est d’ailleurs complice du génocide en Palestine.
L’OTAN c’est une aliance militaire entre les pays les plus riches du monde, dont le Canada, l’Allemagne, les Étas-Unis, la France, l’Italie et l’Angleterre. Et elle conspire aussi avec des alliés non-membres comme le Japon et l’entité sioniste (Israël). Sa fonction est de protéger les hégémonies capitalistes du Nord global, ayant pour secrétaire semi-formel les Étas-Unis. L’OTAN concrétise la menace et la capacité d’agir de façon dévastatrice face à toute tentative de libération du Sud global. Ses intérêts sont parfaitement impérialistes : les États produits et guidés par le grand capital aspirent à étendre leur emprise en exploitant des territoires externes où voler des ressources, saccager la nature et asservir les gens par une domination politique, économique et/ou miltaire.
L’OTAN veut normaliser l’horreur des crimes de guerre comis par les forces militaires occidentales en les camoufflants en missions humanitaires et en en séparant les différentes tâches entre plusieurs pays, diminuant le coût politique de leurs actions et maintenant leurs bases démocratiques dans la duperie. Les interventions militaires soutenues par l’OTAN viennent protéger des gouvernements alignés sur les intérêts américains, et cherchent à écraser toute tentative de renversement. Ces décisions ont pour but de maintenir les pays les plus pauvres dans leurs situations d’exploitation par le Nord global, de les maintenir sous la contrainte capitaliste. L’alliance de l’OTAN avec l’entité sioniste est cohérente idéologiquement, comme entreprise colonisatrice, mais Israël développe et fournit aussi nombreuses armes et techniques et technologies de contrôles que les États de l’OTAN utilisent pour leur domination capitaliste à travers le monde, autant dans leurs missions impérialistes que pour contrôler leurs propres populations.
Le « problème » que nous combattons ici n’est pas spécifiquement la venue de l’assemblée de l’OTAN, ni les agissements de la Caisse de dépot et placements du Québec (CDPQ, qui force tous les salariés du Québec à financer le génocide palestinien), elles n’en sont que des symptômes. Ce « problème », c’est le système dominant auquel nous nous opposons, celui qui cause toutes ces horreurs : le capitalisme.
Oh et d’ailleurs, non nous ne défendons pas la Russie et ne l’apprécions pas plus que l’OTAN, les gens associent souvent l’OTAN à se défendre de l’empire Russe et pensent que s’opposer à ce sommet voudrait dire avoir une sympathie pour des plus petits États, mais ce n’est pas notre cas, chaque fucken colonisateur de cette planète doit tomber. N’oubliez jamais que nous détestons ce système capitaliste et ses ramifications du plus profond de notre coeur.
On a plus le temps de rester calme et de demander gentiment. La résistance est légitime, l’État et la police ne peuvent plus avoir le monopole de la violence – surtout si c’est la seule langue qu’ils entendront. Nous souhaitons faire cesser la duperie et exposer au grand jour, dans la rue et les médias, les dérives gouvernementales et leurs obsessions militaires, ces infâmités que nous tolérons sous nos nez. Nous blessons le grand capital, matérialisé le plus densément au centre-ville pour nous opposer symboliquement et matériellement à l’horreur capitaliste sous-jacente aux crimes les plus odieux :
les vitres du palais des congrès, où se tenait l’assemblée de l’OTAN,
une auto en feu,
des anti-émeute couverts de peinture,
des vitrines de commerces
Nos gestes sont chargés d’une rage qui nait face aux horreurs dont on est témoins et qu’on dénonce dans ce communiqué, mais aussi de notre misère : entre crises climatiques et crise du logement, inflation et jobs de marde, systèmes de santé et d’éducation en ruines, xénophobie, transphobie, covid et dépression, profilage et répression, montée du fascisme, etc. Tout cela répond du même système. C’est parce qu’on est à bout et horrifié-es qu’on se rassemble et qu’on affiche notre refus. Nos actions auront eu une portée symbolique et matérielle. Elles auront couté monétairement, auront dérangé, propoagé nos idéaux et visibilisé cette lutte légitime et nécessaire.
Avant même qu’il n’y ait de la casse, la police chargeait, frappait et gazait. Dans notre combat, nous avons bien vu la posture complice de nos gouvernements : la brutalité policière en est une matérialisation des plus limpides. La police, chien de garde de l’État, a utilisé ces armes et tactiques développées par l’entité sioniste et autres investissements de l’OTAN pour réprimer notre révolte. La police a encore, comme toujours, défendu les intérêts des riches et de l’État, poivrant, mattraquant, cassant des côtes et gazant, empoisonnant.
Elle tente, fort, d’étouffer les espoirs de libération des vies humaines et de la nature présentement massacrées, mais nous ne nous essouflons pas. Nous dénonçons les arrestations survenues hier et toutes les blessures encourrues (crâne fendu, bras cassé, projectiles dans les yeux, etc.), mais nous ne nous essouflons pas. L’automne a été chaud et l’hiver brûlera plus fort encore, parce que la lutte est tout ce qui nous reste d’espoir, parce qu’il faut faire tout ce que l’on peut, parce qu’on est profondément amoureux-ses de nos révolutions, amoureux-ses de nos camarades.
Les médias metterons l’accent sur notre violence, à nous, manifestant-es. Ils dénatureront nos messages qui confrontent les atrocités perpétrées par soi-disant Israël et l’OTAN, responsable de millions de morts. Alors il est crucial de rappeler que nous dénonçons la brutalité des structures d’oppression qui nous gouvernent, que la pire violence est celle des États et que cette violence est une conséquence du système capitaliste.
« Si à table se trouvent un nazi et dix autres personnes plaisantant avec lui, alors vous avez en fait une tablée de nazis. »
Ce dicton populaire se présente comme une boutade, mais l’idée qu’il exprime n’en est pas moins forte, juste et pertinente. Nous avons l’intime conviction que la complaisance à l’égard des courants les plus réactionnaires, les plus racistes et les plus haineux de l’extrême droite ne peut que vicier, par effet de contagion, les milieux où ils sont tolérés.
C’est la raison pour laquelle nous avons lancé dans les dernières semaines une campagne visant à dénoncer et à faire annuler la présence de plusieurs groupes adjacents au courant NSBM (néonazi) dans la programmation 2024 du festival black metal de la Messe des Morts, organisé par le label Sepulchral Productions et son principal responsable, Martin Marcotte[i]. Cette campagne culminera par une manifestation le 29 novembre à 18 h, devant le Théâtre Paradoxe, 5959 boulevard Monk, à Montréal.
Depuis la publication de notre dossier sur ces groupes, le 27 octobre, nous avons reçu une déferlante de commentaires ulcérés provenant d’adeptes du genre black metal qui nous accusent, suivant un script bien connu, de diaboliser ou de chercher à « canceller » le milieu tout entier. Pour l’essentiel, ces réactions ont en commun d’ignorer complètement la critique et de recourir à toute sorte d’arguments fallacieux pour défendre bec et ongles le milieu contre-culturel dont il est question.
Pour être tout à fait clairs, nous ne reprochons pas à ce milieu d’être foncièrement néonazi – nous n’opérons pas et n’avons jamais opéré cet amalgame, quoi qu’en disent nos critiques. Ce que nous lui reprochons, c’est sa trop grande tolérance aux éléments néonazis qui y persistent, comme en témoigne la présence d’au moins quatre groupes liés de proche ou de loin au NSBM dans la programmation 2024, dont la tête d’affiche, le groupe suédois Marduk, qui cultive une profonde ambiguïté à cet égard.
Le présent billet a pour but de répondre à nos critiques, en réitérant une fois de plus l’invitation lancée aux adeptes de black metal à faire le ménage une fois pour toutes dans ce milieu.
Tous ces événements ne sont pas produits dans les années 1930, ou dans les années 1980, mais en novembre 2024, au Québec, au Canada et aux États-Unis. Il serait absolument malhonnête de prétendre que les mouvements fascistes ne présentent pas une réelle menace aujourd’hui. Depuis une décennie au moins, la droite populiste monte en force un peu partout dans le monde, et dans son sillon l’extrême droite redresse la tête, avec son cortège de fascistes et de suprémacistes de tous acabits.
C’est dans ce contexte alarmant que s’inscrit notre campagne de dénonciation de la Messe des Morts.
Il est établi que le black metal est parasité depuis toujours par un courant néonazi, le sous-genre NSBM. Celui-ci ne s’affiche pas toujours ouvertement dans ce milieu, mais il le traverse de manière persistante et surtout, il y est largement toléré. Les éléments du milieu black metal qui condamnent et rejettent explicitement le courant néonazi (comme le courant Red and Anarchist Black Metal) y font figure d’exception.
L’attitude la plus répandue lorsqu’on dénonce cette réalité est celle que nous avons observée au cours des dernières semaines : une réaction épidermique caractérisée par un déni catégorique et une défense exorbitée du milieu black metal. Comme le type de musique qu’ils affectionnent constitue une partie centrale de leur identité, les fans le « prennent personnel » : iels sont fans de black metal; iels ne sont pas personnellement nazis, ERGO, le black metal ne peut pas être nazis. Or ce dont il s’agit au fond, ce n’est pas de l’adhésion de tel ou tel fan du genre aux principes du national-socialisme, mais d’un phénomène de complaisance au sous-genre NSBM qui traverse le milieu.
On retrouve essentiellement les mêmes quatre ou cinq arguments, qui ensemble forment une sorte de raisonnement circulaire :
« Même pas vrai! »;
Le NSBM en tant que tel ou son influence présumée au sein du milieu black metal seraient une sorte de mythe perpétué par « les communistes » et autres « mauvaises personnes ». C’est la position la plus facile à réfuter. Le NSBM est incontestablement un des courants constitutifs du black metal, et ce, depuis les débuts mêmes du genre.
Le NSBM existe bien (quelque part, ailleurs…), mais ici c’est une entité négligeable, du moins c’est inexistant à la Messe des Morts, qui est au-dessus de tout soupçon;
Le NSBM serait un phénomène hyper marginal, et mieux vaudrait l’ignorer complètement, selon cette ligne argumentaire. Comme toujours dans de pareils cas, nous contestons avec force cette position de l’autruche. Le courant NSBM est certes minoritaire dans son expression explicite, mais sa présence « culturelle » implicite dans le milieu est chronique et son influence y est diffuse. La présence au festival de ces trois ou quatre groupes aux associations notoirement louches et/ou aux obsessions douteuses pour le nazisme – tout comme la programmation de Graveland en 2016 – témoigne du fait que les liens avec le NSBM, et le cryptofascisme dans le cas de Marduk, ne sont jamais bien loin de la Messe des Morts. Nous savons par ailleurs que Martin Marcotte, le principal responsable de Sepulchral Productions et promoteur de la Messe des Morts, a lui-même distribué du matériel NSBM dans les années 2000, en plus d’organiser des spectacles avec des groupes néonazis à la même époque, et jusque dans les dernières éditions de la Messe des Morts! À notre connaissance, Marcotte et Sepulchral n’ont jamais publié de rétractation ou de déclaration dénonçant publiquement le courant néonazi du black metal ou adoptant une position antiraciste officielle, laquelle aurait à tout le moins pour effet de lever l’ambiguïté à cet égard. Les vagues prétentions au caractère « apolitique » de l’événement ne suffisent pas.
C’est vrai qu’il existe des éléments plus ou moins nazis dans le milieu, mais « vous ne pouvez pas comprendre », ça fait partie des codes du genre, c’est une culture de la transgression, et dans la plupart des cas, ça n’est « pas politique ».
Les éléments NSBM dans la scène n’auraient ainsi qu’un caractère folklorique, strictement pour le « shock value ». Cette position est absurde. Un événement et un milieu où des éléments nazis sont tolérés sont par définition politiques. Pour paraphraser la militante afro-américaine Angela Davis, dans un milieu où fourmillent notoirement des néonazis, il ne suffit pas de ne pas être nazi; il faut être activement antinazi. Faute de quoi le milieu sera chroniquement soupçonné de complaisance et de complicité. La défense de la manifestation culturelle ne tient pas la route : la culture et la politique sont en fait indissociables et souvent consubstantielles[ii]. Toute prétention à l’apolitisme au sein de mouvements culturels ou contre-culturels doit donc être prise avec scepticisme.
C’est vrai qu’il y a des nazis, mais c’est « pas grave », ils ont « bien le droit »;
Est-il vraiment nécessaire d’expliquer pourquoi cet argument est absolument merdique? Le fascisme, et a fortiori, le nazisme, ne sont pas des idées comme les autres. Ce sont des idéologies haineuses qui ont des effets concrets dans la vie des personnes et des groupes qu’elles prennent pour cible et qui, lorsqu’elles arrivent à leurs fins, ont des conséquences absolument catastrophiques. Là-dessus, l’histoire est sans appel. Il n’est peut-être pas étonnant qu’un genre musical cultivant une fascination pour la morbidité se laisse tenter par les aspects occultes ou « maléfiques » du nazisme, mais la ligne est fine entre la fascination morbide et la complaisance. Et c’est précisément cette complaisance que nous reprochons au milieu black metal.
C’est « juste de la musique »; j’en écoute, moi, du NSBM, et ça n’est qu’une question de préférences et de liberté individuelle; ça ne veut pas dire que je suis nazi;
Permettez-nous d’en douter fortement. Vous avez de sérieuses questions à vous poser si vous affectionnez de la musique prônant des idées génocidaires ou glorifiant les actions des nazis. En tous cas, il ne faut pas vous étonner que les antifascistes considèrent que vous faites partie du problème… La liberté d’expression n’est pas et ne doit jamais devenir un paravent pour la promotion et la banalisation d’idées haineuses. C’est bien sûr ce que cherchent à faire actuellement les nouveaux populistes d’extrême droite[iii], qui se servent de cette défense, combinée à la désinformation et au confusionnisme, pour faire valoir dans le courant dominant les pires réflexes réactionnaires, ce qui favorise bien sûr leurs avancées sur le plan politique. Ne nous laissons pas berner.
De toute façon les antifas sont bien pires (et bien plus violents); vous dites que vous êtes antifascistes, mais c’est vous les vrais fascistes!
Certains commentateurs ont monté en épingle des anecdotes personnelles d’altercations pour chercher à démontrer que les antifascistes sont globalement des êtres éminemment violents qui ne cherchent qu’à intimider et réprimer quiconque ne pense pas comme elleux. C’est un stratagème bien connu. Il est facile et bien pratique de décontextualiser des incidents isolés pour faire dévier la conversation et éviter de regarder le problème en face. Il n’est un secret pour personne que les antifascistes cherchent à « canceller » les nazis. C’est même dans la définition de tâches. Or en l’occurrence, ce que nous avons demandé à la direction du Théâtre Paradoxe, et indirectement au promoteur de la Messe des Morts, c’est de rayer de l’affiche les trois groupes examinés dans notre article (plus celui identifié par Pivot dans son article consacré à cette polémique). Nous ne cherchons pas forcément à faire annuler le festival au complet (quoiqu’à ce stade-ci, le problème semble chronique…), mais principalement à encourager un examen de conscience au sein du milieu black metal. Nous persistons et signons en ce sens.
Manifestement, au regard de la réaction qu’a suscitée notre campagne de dénonciation de la Messe des Morts, la mauvaise foi fait partie de cette sous-culture au même titre que la confusion et la complaisance. Bien trop souvent, ses adeptes déploient des efforts de contorsion considérables pour ignorer les éléments problématiques signalés, ou du moins pour en nier le caractère problématique.
Pour reprendre le dicton cité en exergue : si vous êtes dans un party ou un néonazi s’affiche librement, et que tout le monde tolère sa présence, s’accommode de ses frasques ou ne cherche pas activement à l’exclure, vous êtes en fait dans un party nazi. C’est d’autant plus vrai si les groupes engagés pour animer la soirée ont déjà eu des membres nazis, ont déjà joué avec des nazis, ou ont déjà acheté des articles de propagande nazie sur des sites nazis, ou se spécialisent dans les chansons glorifiant les exploits nazis. Et si le promoteur du party a lui-même déjà distribué la musique d’artistes nazis et organisé des spectacles de nazis… Vous commencez à saisir le pattern?
Il existe pourtant une voie de sortie. Il serait tout à fait possible pour ces groupes, ces événements, ces promoteurs, et même les adeptes du genre regroupé·es conséquemment, de prendre position de manière claire et univoque contre toute idéologie à caractère haineux, dont le racisme et l’antisémitisme, le sexisme et l’homophobie, et en particulier contre le fascisme et le nazisme. Une telle prise de position publique aurait pour effet de dissiper toute ambiguïté. Il y aurait bien sûr des conséquences rattachées à un pareil énoncé de principes – celleux des adeptes du genre qui adhèrent au NSBM se sentant sans doute trahis –, mais c’est le prix à payer pour nettoyer un milieu contre-culturel qui mérite mieux que de traîner en permanence ce boulet.
C’est possible, et ça s’est déjà fait. Dans les années 1980 et 1990, les milieux contre-culturels punks et skins étaient parasités par des éléments néonazis, et la communauté s’est mobilisée pour les en exclure définitivement. Ça n’a pas toujours été lisse et sans accrocs, mais aujourd’hui encore, ces éléments sont systématiquement ostracisés et les boneheads doivent encore se cacher pour jouer en circle jerk.
Ceci est donc une invitation à prendre position et à faire le ménage de cette scène une fois pour toutes. Pour cela, il faut d’abord cesser de se voiler les yeux et regarder le problème en face.
[ii] Il s’avère de plus en plus clairement aujourd’hui que les transformations politiques procèdent des transformations culturelles, et que les développements politiques que nous observons de nos jours, la montée en force de la droite et de l’extrême droite, sont le résultat d’une patiente manipulation des codes culturels de masse par d’habiles acteurs idéologiques au fil des dernières décennies.
[iii] Parmi les armes fourbies par ces idéologues (pensons au trumpisme et à Elon Musk) figurent au premier chef la désinformation et le confusionnisme, soit la méthode consistant à brouiller délibérément le sens des mots et des concepts politiques pour semer la confusion et ébranler le sens de la réalité chez les sujets, ce qui favorise leur adhésion à divers fantasmes de complot et aux fausses solutions promises par les démagogues. Une autre de leurs armes favorites est le « gaslighting », soit une forme de manipulation mentale consistant à manipuler ou déformer de l’information de manière à faire douter une personne de sa perception de la réalité. Un des principaux défis qui se présentent à nous à l’ère de la post-vérité est précisément de combattre les effets pervers de ces stratagèmes sur la sphère politique et sur la société de manière générale.
Commentaires fermés sur Alors, qu’est-ce qu’on fait maintenant?
Nov082024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Alors, les fascistes ont gagné aux états-unis, en france, en italie … et ils s’en viennent ici. Qu’est-ce qu’on fait maintenant? On fait ce qu’on a toujours fait: on s’organise!
Construire un réseau de support pour personnes immigrantes
Beaucoup de personnes vont être forcées de fuir les états-unis. La menace de la « dénaturalisation » (un gros mot pour dire la déportation des personnes non-blanches) implique que beaucoup de personnes racisées seront forcées de quitter les états-unis dans l’urgence. Beaucoup de personnes LGBTQ+, en particulier des personnes trans, vont devoir trouver des refuges rapidement, à cause des lois transphobes et queerphobes.
Il y a des américains qui travaillent présentement à construire un réseau souterrain pour amener les gens à des endroits sûrs. Nous devrions donc nous assurer d’avoir des endroits sûrs ici pour les accueillir. Tant que le canada marque les états-unis comme un tiers pays sûr, beaucoup de ces gens se retrouveront sans statut. Le problème d’un état plus social comme le nôtre est qu’on dépend beaucoup de lui pour nos services. Il n’y a donc pas beaucoup de ressources pour les personnes sans statut à Tio’tia:ke.
Le Centre des travailleurs et travailleuses immigrantes (iwc-cti.ca) travaille avec des personnes au statut précaire et aura besoin d’aide. Solidarité sans frontières (solidarityacrossborders.org) supporte aussi des personnes au statut précaire et aura besoin de notre aide.
Aider vos antifascistes locaux
Nous ne sommes pas dans un lieu sûr nous-mêmes. Le fascisme est en hausse ici aussi. Le gouvernement legault se faufile lentement vers le fascisme, et les conservateurs fédéraux seront probablement élus avec un mandat d’extrême-droite. Et c’est sans compter les nazis locaux et leurs supporteurs. Contactez votre collectif antifasciste local (à Tio’tia:ke voir montreal-antifasciste.info) pour voir comment vous pourriez aider, ou bien créez votre propre collectif! Au minimum, enlevez tous les signes de la présences des fascistes. Ne les laissez pas prendre racine dans votre quartier!
On remarque aussi une hausse du nombre de shows de punk et de metal, malgré la fermeture de plusieurs scènes camarades. Ces shows sont beaucoup apolitiques, et si nous ne sommes pas prudent-e-s, les scènes pourraient être investies par des fachos. Tenir des tables de merchs camarades pourrait aider à rappeler aux gens ce qui est en jeu, et l’importance de jeter dehors les fascistes et nazis de nos shows.
Construire des alternatives à nos services perdus
Un des gros enjeux aux états-unis, et possiblement au canada bientôt, c’est l’accès à l’avortement et aux hormones d’affirmation de genre. Mais il y avait un moment où on pouvait assurer ces services nous-mêmes. La génération plus ancienne de personnes trans se souvient peut-être de l’époque où les personnes trans se rencontraient afin d’apprendre comment faire leur propre estrogène et testostérone. Le collectif américain Four Thieves Vinegar Collective (fourthievesvinegar.org) offre ce service en enseignant aux gens des habiletés pharmaceutiques de base.
Une autre solution pourrait être de construire une coopérative de clinique de santé. La Clinique Communautaire Pointe-Saint-Charles (ccpsc.qc.ca) en est un exemple, et fournit des services à la Pointe depuis des décennies. Bien que ces coopératives doivent respecter la loi, il pourrait être plus facile d’offrir des services additionnels sur le côté qu’à un hôpital ou une clinique d’état. Cela pourrait être crucial pour des personnes sans statut, par exemple.
Se préparer pour des catastrophes climatiques
À ce stade, il faut s’attendre à des catastrophes climatiques. Les « leaders » actuels du monde ont fait leur politique d’ignorer la crise climatique. Nous ne devons pas nous attendre à ce que des actions concrètes soient prises dans un avenir proche. Des mesures de mitigation seront prises, mais probablement uniquement pour protéger les quartiers les plus riches, au dépens des autres. Nous voyons déjà des murs marins être construits pour protecter les maisons des personnes blanches, poussant l’eau vers les quartiers racisés.
Nous avons été frappé-e-s fort cet été à Laval, mais ce n’est rien comparé avec ce qu’on a vu à Asheville (caroline du nord) et Valence (espagne). Le collectif Firestorm Books à Asheville donne de l’information sur ce qu’ielles ont fait après la catastrophe. Il existe aussi des brigades anarchistes mobiles dédiées à intervenir rapidement après une tempête de tornades ou un ouragan. Ces brigades sont souvent plus rapides à intervenir que les ressources étatiques, en particulier dans les zones les plus pauvres.
Bien que nous ne sommes pas présentement dans une zone de tornades ni d’ouragans, cela pourrait changer bientôt. Nous aurions besoin de ressources de ce genre.
Apprendre à désobéir
Cela peut être tentant de se lancer dans une action très visible, mais ce n’est pas quelque chose que la majorité des gens peuvent faire. Cela ne veut pas dire que vous ne pouvez rien faire! Toutes les petites actions peuvent aider: Oublier de demander une preuve de résidence avant de donner un service. Marquer un médicament comme perdu, et le donner à une personne sans statut. Perdre la requête d’information de la police, ou bien leur envoyer la mauvaise information à la mauvaise adresse. Conspirez avec vos collègues pour refuser une politique raciste et/ou sexiste.
Le gouvernement legault a passé récemment la raciste loi 96, qui force les employé-e-s du gouvernement à parler en français aux personnes qui viennent demander des services. Ce qu’on voit en pratique, c’est que presques tou-te-s les travailleu-se-s désobéissent à la loi, malgré la réception d’une directive stricte en ce sens. La plupart des employé-e-s du gouvernement vont vous parler dans la langue que vous préférez, même si la loi le leur interdit.
Ce refus d’obéir est important. C’est ce que nous avons besoin dans un état fasciste. Enfin, on ne pleurera pas si certains (ou toutes!) les ambassades se mettent à brûler durant la nuit, mais ce n’est pas quelque chose que tout le monde voudrait faire. Apprendre à désobéir, c’est quelque chose que nous pouvons tou-te-s faire, et que nous devons apprendre à faire.
Conclusion
Le but de ce petit article est juste pour vous donner quelques indices sur ce que vous pouvez faire. Il y a cependant beaucoup d’autres choses dont on aura besoin! La clé est d’être curieu-se, observateur-rice, et imaginatif-ve. Regardez autour de vous, parlez à des camarades, regardez ce qui manque aux gens, déterminez ce qu’il faut faire. Les vieilles approches nous ont menées dans ce pétrin: peut-être qu’il est temps d’en trouver de nouvelles.
Une chose est certaine: ils veulent nous entraîner dans leur grande noirceur. Le moindre que l’on peut faire, c’est de les faire chier un max!
Ces lignes répondent à un article paru dans Tinderbox, un journal hors-ligne d’anarchie combative.
Fin 2010 un acte individuel de désespoir dans la ville de Sidi Bouzid a déclenché un bouleversement audacieux, enragé et joyeux qui a voyagé à travers l’Afrique du Nord jusqu’au Moyen-Orient et au-delà. Les populations ont défié les systèmes oppressifs dans lesquels elles étaient immergées depuis des générations et se sont rassemblées dans les rues pour renverser les élites politiques à leur tête. Les autorités, d’abord stupéfaites par cet esprit courageux qu’elles ne pouvaient pas comprendre, ont alors délivré une réponse cynique et brutale.
Cette défaite est toujours en train d’être infligée aux populations de la région, et elle est aussi ressentie dans le monde entier par celles et ceux qui se sont tenus en solidarité avec les soulèvements mais qui ont été pour la plupart incapables de surmonter leur impuissance tandis que les soulèvements étaient massacrés.
Les horreurs dans la région durant la dernière décennie sont nombreuses. Pour en nommer quelques unes qui me restent le plus en tête : Sissi a ramené l’Égypte au temps d’une dictature militaire avec le soutien matériel des États-Unis. Les régimes dans les autres pays nord-africains sont en train de paver tout signe de liberté pendant que les pays européens les persuadent de fermer les routes migratoires sur la Méditerranée. Sans les campagne militaires meurtrières du Hezbollah et du CGRI en Syrie, Assad n’aurait pas survécu au soulèvement. Le régime iranien lui-même a brutalement réprimé trois différents soulèvements dans le pays au cours de la dernière décennie. La plupart des gens au Liban sont dans une lutte quotidienne pour la survie à cause de la cupidité de ses dirigeants politiques pendant que des foules aux ordres du Hezbollah répriment des manifestations de rue. Au début des soulèvements, le Hamas, qui a abattu des opposants politiques en plein jour dans les rues de Gaza, a éliminé les tentatives d’un soulèvement en rassemblant les organisateurs des manifestations et les menaçant de meurtre. Les dirigeants dans la région ont compris une fois de plus qu’ils peuvent utilisé tous les moyens contre les populations sous leur contrôle sans réel empêchement de l’extérieur. Indifférence, cynisme et opportunisme l’emportent sur les appels moraux, et les alliances stratégiques sont toujours en jeu. Le monde continue de tourner. Pour celles et ceux d’entre nous qui n’ont pas regardé ailleurs, comment ne pouvons-nous pas voir un lien entre Assad bombardant des villes syriennes jusqu’à la saturation et Netanyahou en train de raser Gaza ?
Les auteurs et autrices de « Vers la dernière intifada » (Tinderbox n°6) ne reconnaissent pas ces expériences de la dernière décennie. Au lieu de cela, ils et elles proposent de rejoindre le camp opposé d’une alliance géopolitique américaine (en maintenant le centralisme américain à leur propre façon). Selon elles et eux, l’Axe de la Résistance montre la voie à suivre aux anarchistes pour lutter contre l’empire. Cet article semble confondre résistance avec « la Résistance ». C’est-à-dire, qu’ils et elles font tomber toute forme de résistance de gens en Palestine, et plus largement dans la région, dans une représentation particulière, adoptant un terme parapluie utilisé par les États, les militaires, les organisations para-étatiques/para-militaires pour décrire leurs propres activités. Les auteurs et autrices de l’article mettent en garde les anarchistes contre une trop grande sensibilité à la hiérarchie – comme si c’est le seul aspect de « la Résistance » que les anarchistes pourraient trouver difficile à accepter.
Cela fait maintenant un an après l’incursion sanglante du Hamas en Israël. À part les discours, les accomplissements de la Résistance jusqu’ici sont : le Hezbollah a lancé des roquettes inefficaces qui ont seulement infligé des dommages significatifs à un village druze, les dirigeants iraniens s’occupent en faisant des appels vers l’Occident pour régner en Israël, des milices en Irak ont attaqué quelques bases militaires US dans le pays au début et puis sont tombées dans le silence, tandis que seuls les Houthis semblent avoir pris « l’Unité des Fronts » de Nasrallah au sérieux. Ils ont réussi à perturber des routes maritimes mondiales et porté des attaques aériennes inattendues sur Israël. Entre-temps, Israël a anéanti la direction du Hezbollah, lance des bombes sur le Liban quotidiennement, bombarde régulièrement des sites en Syrie sans représailles, et commet des exécutions à Téhéran. L’Axe de la Résistance et l’Unité des Fronts sont de simples slogans qui masquent les affaires stratégiques entre les organisations politiques, autoritaires et les États avec leurs propres intérêts (souvent différents). C’est illusoire de le voir comme quelque chose d’autre. Et Israël qualifie de bluff « la Résistance » avec une escalade militaire exponentielle.
Les massacres d’Israël à Gaza, avec le soutien matériel des pays occidentaux, sont incessants. Le régime d’apartheid en Cisjordanie et Israël a été bâti pendant des décennies, laissant presque aucun oxygène à respirer pour celles et ceux vivant sous son contrôle. Face à cette triste réalité et une accablante impuissance d’y mettre fin, les anarchistes sont peut-être à la recherche d’une résistance efficace (ou plutôt, semble-t-il, d’une image de celle-ci). Mais si nous voulons combattre l’oppression, nous ne pouvons pas nous contenter avec une quelconque opposition. Choisir de rejoindre un système autoritaire, militariste contre un autre ne mettra pas fin aux horreurs de ce monde – ni dans ce conflit ni dans aucun autre. Ce n’est ni intrinsèquement défaitiste ni un signe d’indifférence privilégiée de refuser de prendre parti entre groupes et États belliqueux. Nous arrivons à cette conclusion seulement si nous réduisons la réalité à des représentations simplistes. Au lieu de cela, en s’ouvrant à la complexité et la spécificité, l’agir anarchiste peut être un effort libérateur. C’est là que nous pouvons trouver des affinités, construire des relations sur une base différente, et rassembler la force et le courage – ou peut-être, l’humilité et la passion – pour l’attaque. Les anarchistes trouvent leur efficience lorsque ils et elles peuvent ébranler et détruire des systèmes oppressifs. Nous ne la trouverons pas dans une prouesse militaire qui, en fin de compte, produit plus d’oppression et de misère. Et donc celles et ceux qui ont un esprit qui leur est propre et la mémoire des révoltes passées combattront pour un autre soulèvement. Depuis la côte nord de la Méditerranée, avec un cœur lourd et une âme en feu Début octobre 2024
La Messe des Morts (MdM) est un festival montréalais qui, selon la section « À propos » de sa page Facebook, se donne pour mission de « satisfaire ceux qui aiment leur Métal sombre et haineux! » L’événement est organisé par Martin Marcotte sous son label, Sepulchral Productions. Il est principalement consacré au Black Metal et à sa scène locale, le Métal noir québécois. Il s’agit d’une scène musicale assez underground, bien que très développée au Québec, qui affectionne particulièrement les thèmes choquants, comme le satanisme et le gore, par goût de l’anticonformisme, de la provocation et de la transgression.
Ce que nous révélons ci-dessous, toutefois, dépasse largement la simple provocation.
L’édition 2016 de la MdM avait déjà défrayé la chronique suite à l’annonce de la participation au festival du groupe polonais Graveland, un groupe de Black Métal associé au sous-genre du National Socialist Black Metal (NSBM). Rappelons que l’expression « national-socialiste » désigne le parti politique allemand mieux connu sous son abréviation courante : le parti nazi.
Le National Socialist Black Metal, comme son nom l’indique, explore (parfois de manière directe et explicite, mais souvent de manière oblique ou implicite) des thèmes aussi sombres que l’apologie du nazisme, la supériorité raciale des Européens de « race blanche » et la glorification de l’Holocauste, généralement conjugués aux thèmes du paganisme, des dieux nordiques et germains et de l’héritage des peuples scandinaves.
Suite au tollé provoqué par la présence de Graveland dans la programmation de la MdM, et après une intense campagne menée par des antifascistes dans les semaines précédent l’événement, laquelle s’est achevée par une manifestation devant le théâtre Plaza le soir venu et l’intervention de la police antiémeute, le groupe a été empêché de jouer et la soirée fut finalement annulée.
Après cela, l’organisation du festival, toujours sous la bannière de Sepulchral Productions, s’est faite plus discrète (même si l’édition 2017 a elle aussi posé problème)… jusqu’à cette année.
Sepulchral Productions semble vouloir opérer cette année un fâcheux retour aux sources : au minimum trois groupes appartenant au sous-genre NSBM (ou qui en sont à tout le moins proches à divers degrés) sont annoncés dans la programmation 2024, du 28 au 30 novembre.
Voici un aperçu des groupes prévus cette année et de leurs liens avec le sous-genre NSBM.
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Marduk :
Ce groupe suédois affectionne singulièrement les thèmes macabres liés à la Deuxième Guerre mondiale. Le groupe se défend bien de donner dans le NSBM ou de glorifier les nazis, et ses membres se décrivent eux-mêmes candidement comme férus d’histoire, mais curieusement, ils explorent systématiquement ces thèmes « historiques » du point de vue du Troisième Reich, de la Wehrmacht (l’armée allemande) et des SS (unités d’élite nazies, responsables notamment de l’extermination des Juifs). Le spectacle qu’ils souhaitent présenter au troisième soir de la MdM 2024 s’intitule d’ailleurs Panzer Division Marduk, d’après le titre de leur album de 1999, en référence directe aux divisions blindées des forces armées allemandes durant la Deuxième Guerre mondiale.
On constate rapidement la monomanie que cultive ce groupe pour le régime nazi en consultant les paroles de ses chansons, réunies sur cette page : [http://www.darklyrics.com/m/marduk.html]
Le plus récent disque de Marduk, Viktoria (2018), est un retour aux thèmes explorés dans leurs disques précédents, revisitant divers épisodes de la Deuxième Guerre mondiale… toujours du point de vue nazi. La chanson « Werwolf » fait référence au plan de résistance clandestine du même nom ourdi par les nazis en 1944 en cas de défaite; « Equestrian Bloodlust » fait directement référence à la 8e division de cavalerie SS Florian Geyer; « Narva » évoque la bataille de Narva, dite « des SS européens »; « Viktoria » fait référence au chant de marche militaire des troupes nazies « Sieg Heil Viktoria », etc.
Finalement, une recherche sommaire de la marchandise du groupe offerte en ligne révèle notamment des chandails ornés du Totenkopf (tête de mort) emblématique des SS, ou encore de l’emblème de l’aigle impérial du Troisième Reich, en plus de l’imagerie guerrière associée aux disques du groupe, dont Panzer Division Marduk.
Un échantillon des chandails de Marduk reprenant l’imagerie nazie, pour donner une idée de l’iconographie qui pourrait être aperçue aux abords du Théâtre Paradoxe les 29 et 30 novembre prochain…
Le nazisme et la glorification des combats militaires allemands durant la Deuxième Guerre mondiale, en particulier des unités SS, ne sont donc pas des éléments accessoires dans l’œuvre de Marduk, mais constituent un thème central, récurrent et persistant.
Le groupe a d’ailleurs connu plusieurs polémiques dans les dernières années (voir les liens ci-dessous). En 2017, deux de leurs membres ont été identifiés comme ayant acheté du matériel du Nordic Resistance Movement, le plus gros mouvement néonazi scandinave. Suite à cela, un spectacle de Marduk a été annulé à Oakland, grâce à la pression exercée par le groupe Anti-Fascist Action Bay Area. L’année dernière, le bassiste du groupe a été filmé en train de faire un salut nazi lors d’un spectacle, suite à quoi le groupe a été contraint de le limoger.
Ce groupe finlandais entretient des liens très clairs avec la scène NSBM. L’ancien chanteur de Horna est le fondateur et membre principal du groupe NSBM Satanic Warmaster. Le leader et guitariste de Horna a longtemps géré un label ayant endisqué d’autres groupes NSBM, en plus d’avoir lui-même participé à un groupe dont les paroles prônent la suprématie blanche. L’actuel chanteur de Horna a quant à lui été claviériste du groupe français Peste Noire, une formation phare du NSBM en Europe, dont la chanson « La bataille de Sarcelles », par exemple, fait l’apologie d’une bagarre de rue contre des Arabes en France (« les ennemis de nos terres ») à coups de « battes de baseball et d’autres bâtons de guerre », avec référence aux « fanions à croix celtique », le symbole de l’extrême droite identitaire (2021), alors que la chanson « Turbofascisme » fait l’apologie du « fascisme », de la « race des Seigneurs » et de la « race blanche » de la « Vieille Europe » (2018).
Un groupe québécois dont la notoriété est en partie due à ses collaborations passées avec des groupes NSBM. Ils ont produit en 2004 un disque en collaboration avec le groupe finlandais susmentionné, Satanic Warmaster], où figure la chanson « Six Million Tears » (six millions de larmes), en référence aux six millions de Juifs tués par les nazis durant l’Holocauste.
Dans une entrevue donnée en 2004, les membres d’Akitsa disaient n’avoir aucun problème avec la scène NSBM :
« [c’est] vrai que l’on doit mettre fin à l’immigration telle qu’elle est maintenant. La plupart de nos pays occidentaux sont envahis par des étrangers avec d’autres cultures que les nôtres. Ils détruisent la culture européenne. C’est la même chose pour les valeurs américaines (ce qui comprend les idées sionistes et les lois en matière de droits de la personne). La philosophie nationale-socialiste a des bons points concernant ces problèmes. »
Le logo du groupe ci-dessus est couronné du slogan fasciste « Me ne frego »; c’est aussi le titre d’un split du groupe sorti en 2013.
Le chanteur d’Akitsa, Pierre-Marc Tremblay, alias « Outre-Tombe », a fondé le label Tour de garde en 2001 (toujours actif), par l’entremise duquel il s’est empressé de diffuser la musique d’artistes néonazis québécois (Arnstadt et Mors Summa). À noter que le logo de Tour de garde évoque clairement les écussons militaires des SS… Sans doute une autre coïncidence.
Et par-dessus le marché, les groupes finlandais Chamber of Unlight et Warmoon Lord, aussi à l’affiche de la Messe des Morts 2024, sont produits sous le label NSBM Werewolf Records. L’ancien claviériste de Graveland joue maintenant avec Warmoon Lord…
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Tout cela, vous en conviendrez, dresse un portrait extrêmement problématique.
D’ailleurs les fans de black metal eux-mêmes ne s’y méprennent pas! Voici quelques-une des réactions trouvées sur les pages du festival et de Sepulchral Productions après l’annonce de la venue de Marduk et Horna :
Nous pensons évidemment que ces artistes ne doivent pas se produire à Montréal. Nous croyons aussi que les organisateurs du festival, au premier chef Martin Marcotte, ne peuvent plus se cacher derrière la licence artistique et doivent être mis devant leurs responsabilités : celle d’inviter année après année des artistes qui valorisent et mettent au goût du jour des idéologies haineuses, glorifiant le nazisme et le fascisme, dans notre métropole multiculturelle. Nous croyons qu’il est absolument primordial de préserver le caractère accueillant, diversifié et inclusif de Montréal, et par conséquent, de signifier sans ambiguïté que ce genre de contenu haineux n’a pas sa place dans nos salles de spectacles.
Mais justement, qui accueille ce festival?
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Le Théâtre Paradoxe
Depuis l’édition 2017 de la MdM, c’est le Théâtre Paradoxe, une entreprise d’économie sociale et solidaire, qui accueille le festival. Dans une entrevue accordée au magazine Sors-tu? en 2022, Martin Marcotte s’était d’ailleurs enorgueilli de ce partenariat inusité entre les adeptes du blasphème que sont les amateurs de Black Metal, et un ancien lieu de culte chrétien.
« J’ai parlé avec la directrice, on a discuté des controverses, de la médiatisation, je lui ai donné ma version des faits, et elle était OK pour donner une chance à l’évènement. »
Il y a trois semaines, nous avons communiqué avec l’administration du Théâtre Paradoxe en leur demandant de faire preuve de bon sens, compte tenu de la programmation 2024, et de rompre leurs relations d’affaires avec la MdM. L’administration nous a alors informés qu’elle était préoccupée par la situation et la prenait au sérieux.
Après quelques échanges de courriels, l’administration du Théâtre nous a récemment invités à une rencontre afin de dialoguer avec les différentes parties concernées. Or, du point de vue antifasciste, une rencontre avec les promoteurs de la Messe des Morts ne présente aucune espèce d’utilité. Il y a des situations où il faut trancher nettement, et celle-ci en est une. Il n’y a pas de dialogue possible entre apologistes et ennemis du nazisme, ce conflit ayant été réglé de manière définitive il y a 80 ans.
De toute manière, nous connaissons déjà par cœur les éléments de la ligne de défense de Martin Marcotte et Sepulchral Productions. Ça serait un enjeu de « liberté d’expression »; ces artistes nient publiquement être néonazis et n’appartiennent « pas vraiment » au sous-genre NSBM (bien que certains aient des parcours discutables); les paroles problématiques relèvent du « deuxième degré » et de la licence artistique; l’imagerie problématique fait partie intégrante de la sous-culture, les « vrais fascistes » sont ceux qui cherchent à les réduire au silence, etc.
Tous ces arguments sont fallacieux, relèvent du gaslighting, et servent en définitive à noyer le poisson.
Depuis 2017, malgré une sourde hostilité, le milieu antifasciste n’avait plus exercé de pression sur la Messe des Morts. Or cette année, Sepulchral Productions place en tête d’affiche des groupes extrêmement problématiques et largement reconnus pour cela. À notre avis, cela dépasse une ligne rouge, et il est évident que Martin Marcotte teste la limite de l’administration du Théâtre Paradoxe pour voir jusqu’où il pourra pousser la note douteuse dans l’enceinte même de cette entreprise à vocation sociale.
Nous comprenons bien évidemment que le Théâtre Paradoxe n’endosse pas les idées répugnantes véhiculées par le National Socialist Black Metal et ses apologistes. Cependant, l’organisme a le pouvoir d’agir avec fermeté en rompant ses relations d’affaires avec Sepulchral Productions, ce qui aurait pour effet d’envoyer un signal clair et de faire annuler la Messe des Morts, ou du moins de confronter Marcotte à ses responsabilités en le forçant à trouver un plan B.
Bref, l’heure n’est plus au dialogue, mais aux prises de position raisonnées, aux actions et aux conséquences.
Nous invitons nos sympathisantes à communiquer avec l’administration du Théâtre Paradoxe pour leur faire part (poliment, mais fermement) de leurs préoccupations.
Le 8 décembre 2023, la Gendarmerie royale du Canada annonçait avoir arrêté deux Ontariens, Matthew Althorpe et Kristoffer Nippak, et porté contre eux un certain nombre d’accusations découlant de leurs activités au sein de divers projets à caractère néonazi implantés en Ontario. Au premier chef, les deux hommes sont accusés de « participation aux activités d’un groupe terroriste », soit le réseau Atomwaffen Division, organisation classée comme terroriste au Canada. Dans son communiqué la GRC évoque également deux projets moins bien connus : le Terrorgram Collective et Active Club Canada. Le premier y est décrit comme « un groupe de chaînes sur Telegram en faveur de l’idéologie néofasciste qui publient des guides sur les moyens de se livrer à des actes de violence à caractère racial ». Active Club y est quant à lui présenté ainsi :
« Le réseau de l’Active Club est formé de cellules décentralisées de groupes néonazis et de suprématie blanche, qui sont actifs dans bien des États aux États-Unis et qui ont des chapitres ailleurs dans le monde, comme au Canada. Le réseau a été créé en janvier 2021 et préconise le recours aux arts martiaux mixtes pour combattre ce qu’il dit être un système qui cible la race blanche. Il encourage aussi le développement d’un esprit guerrier pour se préparer à la guerre raciale qui viendra. »
Active Club Canada, dont font partie les deux accusés, se présente donc comme un pôle régional du réseau Active Club international.
Quelques jours seulement avant ces arrestations, le 1er décembre, Vice News avait fait paraître un exposé détaillé du journaliste indépendant Mack Lamoureux sur Kristoffer Nippak et son rôle clé au sein du réseau Active Club au Canada, en particulier dans la région d’Ottawa. Dans son article, Lamoureux fait état d’une section régionale au Québec, mais jusqu’à présent, ce groupuscule local n’avait toujours pas fait l’objet d’un examen attentif. Le présent article a pour objectif de remédier à cette lacune en exposant le noyau dur du Frontenac Active Club (FAC), le principal projet « activiste » néonazi au Québec à l’heure actuelle.
Que sont les Active Clubs?
Les Active Clubs forment un réseau décentralisé de groupes locaux ancrés dans l’idéologie suprémaciste blanche et néonazie. Ils incarnent une renaissance du mouvement « nationaliste blanc » (parfois désigné comme White Nationalism 3.0), faisant suite aux courants white power des années 1990 et 2000 et à la mouvance Alt-Right des années 2016-2020, épousant une structure sans leadership formel. L’origine du mouvement est généralement imputée au militant américain Robert Rundo, qui avait déjà fondé le groupe activiste Rise Above Movement (RAM) en Californie, en 2017, au plus fort de la période Alt-Right. Le but exprès de RAM était d’agresser physiquement les ennemi·es du mouvement nationaliste blanc.
Suivant la même logique, l’activité principale des Active Clubs consiste à s’entraîner à différentes techniques d’arts martiaux en vue de se préparer à la guerre raciale à venir, jugée inévitable en raison de ce que les militants conçoivent comme un « génocide blanc », soit le remplacement délibéré (par une nébuleuse élite généralement assimilée au cosmopolitisme et à la « juiverie internationale ») des populations à majorité blanche par des populations non-blanches dans les pays du bloc occidental, au moyen de « l’immigration de masse ». Les militants d’Active Club adhèrent sans réserve à ce fantasme de complot, comme à celui du « Grand Remplacement », et sont profondément ancrés dans la sous-culture néonazie contemporaine, vouant par exemple un culte à la figure d’Adolf Hitler et au parti nazi, en plus d’épouser une interprétation négationniste de l’Holocauste et de la Deuxième Guerre mondiale. Il va sans dire qu’ils baignent dans un imaginaire violent imprégné d’antisémitisme, de racisme, de misogynie, d’homophobie/transphobie et de haine viscérale des mouvements sociaux inclusifs et égalitaristes – libéraux autant que radicaux –, lesquels sont généralement regroupés sous la catégorie fourre-tout de « communiste » (la détestation du communisme est une référence constante et une valeur fondamentale).
Les Active Clubs seraient implantés dans 33 États américains et au moins douze pays, probablement plus à l’heure d’écrire ces lignes. Selon Vice News, il y aurait au moins 11 sections locales Active Club au Canada, dont le groupe Frontenac Active Club, principalement implanté dans la grande région de Montréal.
En dépit de ses déboires judiciaires, Robert Rundo demeure une figure emblématique du mouvement, et la Californie du Sud semble toujours en être l’épicentre, puisqu’un rassemblement des sections Active Club y est attendu au mois d’août 2024 (un premier événement du genre s’est déjà tenu à San Diego en août 2022). Rundo anime un certain nombre d’initiatives, dont le projet médiatique Media2Rise et la distribution de vêtements Will 2 Rise (W2R), dont les membres des Active Clubs portent très souvent les couleurs en soutien à leur maître à penser.
D’où vient le Frontenac Active Club?
Le Frontenac Active Club a vu le jour au printemps 2023 (la chaîne Telegram a été créée le 16 février) et est l’héritier direct du projet White Lives Matter local, auquel nous avions consacré un article au printemps 2022. L’un des deux leaders du groupe mentionnés dans cet article est Raphaël Dinucci, de Laval, qui a visiblement poursuivi son parcours pour devenir le principal pilier du Frontenac Active Club et le militant clé sans qui le projet n’aurait sans doute pas tenu debout. Dans un premier temps, Dinucci a multiplié les liens avec des sections ontariennes du mouvement, avant de parvenir à réunir autour de lui un noyau de 5 ou 6 militants et de former ce qui est aujourd’hui le Frontenac Active Club.
On sait que le FAC entretient toujours des liens virtuels avec les autres Active Clubs canadiens, notamment avec le groupe ayant fait l’objet des perquisitions de la GRC, ainsi qu’avec le groupe Nationalist-13 implanté dans le sud-ouest de l’Ontario (13 = AC, pour anticommuniste).
Les activités du groupe sont centrées dans le grand Montréal. Ses membres y sont disséminés sur la rive sud (Saint-Hubert, Saint-Jean-sur-Richelieu), la rive nord (Laval) et jusque dans Lanaudière (Rawdon). Bien qu’une poignée de membres/sympathisants semblent aussi être présents dans la région de Québec, on ne peut pas parler d’une section dûment constituée, puisque leurs actions se sont limitées dans la dernière année à la pose d’autocollants et à quelques sorties sociales dans la Capitale.
Sans doute dans le souci de favoriser l’esprit de fraternité raciste et misogyne qui est à la base du mouvement, l’adhésion au FAC est strictement réservée aux hommes blancs.
Le compte Twitter/X du groupe a été créé en avril 2024. Raphaël Dinucci y a également un compte personnel.
(Il importe à cet égard de souligner que cette plateforme, sous la houlette du milliardaire Elon Musk, est [re]devenue un véritable safe space pour les individus et groupes suprémacistes et néonazis, après que l’administration précédente y eût opéré une relative épuration. C’est aussi un espace où la désinformation et les discours haineux ont aujourd’hui libre cours, pratiquement sans aucune contre-mesure. À tel point d’ailleurs qu’il nous semble inutile, voire contre-productif, d’y maintenir une présence.)
Que font-ils?
Dans la droite lignée du mouvement, les membres du FAC s’entraînent assez régulièrement aux arts martiaux, de façon inégale selon les membres, généralement dans un parc public près de chez vous, surtout en périphérie de Montréal (Longueuil, Laval). L’autre aspect central de leur activité consiste à se mettre en scène sur leur chaîne Telegram, en publiant des photos de groupe documentant leurs activités. En avril dernier, les membres du noyau dur se sont notamment photographiés en prenant la pose après un entraînement au parc Mackenzie-King, dans l’arrondissement Côte-des-Neiges de Montréal, tout juste en face d’une synagogue et d’une école confessionnelle juive, et à un jet de pierre du Musée de l’Holocauste de Montréal.
Cet événement coïncide d’ailleurs avec l’apparition à visage découvert de Shawn Beauvais MacDonald, dont nous soupçonnions déjà la connivence avec le club. Rien n’indique que Beauvais MacDonald ait été un militant sérieux du groupe avant cette année, mais il est clair que ni lui ni ses acolytes ne rechignent à ce que sa tristement notoire image soit associée au Frontenac Active Club. D’ailleurs, plus récemment encore, il semble que Beauvais MacDonald ait pris une place encore plus centrale au sein du groupe, le représentant notamment dans un tournoi de boxe amical contre les nazis de Nationalist-13 et donnant son contact personnel comme moyen d’entrer en lien avec le FAC.
L’ignorance consternante des membres du groupuscule n’a d’égale que leur extrême valorisation d’un culte du corps correspondant aux normes de la masculinité toxique qui s’imposent traditionnellement dans les milieux d’extrême droite. Outre les entraînements, le FAC se donne plus que jamais des allures de club social pour nazis rejects lorsque ses membres organisent des randonnées en nature les week-ends (par exemple au Mont Gorille, Laurentides, ou à la Montagne Noire, Lanaudière), ou se tapent une partie de badminton au Carrefour Multiport de Laval, souvent suivie d’une petite bière dans un pub local.
Outre les activités physiques et la représentation ostentatoire sur ses médias sociaux, le club cherche bien sûr à se donner de la visibilité dans la cité, notamment sur le mode déjà privilégié par White Lives Matter consistant à poser des autocollants un peu partout dans la région de Montréal et d’autres localités, dont Saint-Jean-sur-Richelieu, où réside notamment le militant David Barrette.
Quant aux mobilisations physiques, Raphaël Dinucci et David Barrette ont eu la curieuse idée de se pointer à une manifestation contre l’heure du conte en drag et la communauté queer et trans, à Sainte-Catherine, le 2 avril 2023. Ça s’est mal passé pour eux, puisque Dinucci s’est fait battre par les manifestant·es et interpeller par la police, tandis que Barrette a reçu des accusations pour voie de fait (abandonnées au printemps dernier). Dans le même ordre d’idée, le militant du FAC Martin Brouillette a envoyé des menaces explicites aux organisateur·rices de la manifestation « Nous ne serons pas sages », en mars dernier, sous son pseudonyme « Martin Leblanc ». Il n’a toutefois pas donné suite à ses menaces.
Une publication de juin sur la chaîne Telegram du groupe montre le militant Mathieu Grenier en visite en France, entouré de militants nationalistes de la région marseillaise.
Comment le Frontenac Active Club s’inscrit-il dans l’écosystème d’extrême droite au Québec?
Que ce soit sous la bannière Active Club ou, précédemment, celle de White Lives Matter, il est clair que ce petit noyau de militants néonazis cherche à se tailler une niche dans le milieu de l’extrême droite québécoise.
Le Frontenac Active Club s’inscrit avant tout dans la tradition du nationalisme blanc et du néonazisme made in North America, en droite ligne avec la frange la plus radicale de l’Alt-Right et les mouvements qui l’ont historiquement précédée. Il est aussi adjacent aux obsessions complotistes dominantes en Amérique du Nord (là où le « White Genocide » rencontre le Grand Remplacement), comme la panique morale entourant l’émancipation des minorités sexuelles et de genre. Les militants WLM/FAC ont notamment été aperçus durant la pandémie dans des manifestations contre les mesures sanitaires, puis, à partir du printemps 2023, en marge des activités transphobes organisées par les suspects habituels de la complosphère locale. Le FAC maintient aussi des liens avec le réseau Active Club canadien, dont les néonazis du groupuscule Nationalist-13, et avec le réseau Diagolon, principalement au moyen de communications chiffrées sur la plateforme Telegram. Lors de la récente « tournée canadienne » des militants de Diagolon, ceux-ci se sont d’ailleurs arrêtés à Montréal, où ils ont fraternisé avec les gars du Frontenac Active Club.
Mais ses membres flirtent également avec le fascisme en ceinture fléchée. Ils ont notamment participé au moins une fois à l’horripilante « Saint-Jean de la Race » de Nomos-TV, le programme de propagande ethnonationaliste dirigé par Alexandre Cormier-Denis. Depuis quelques années, ces festivités prennent la forme d’un enregistrement de Nomos en direct, le 23 juin, suivie d’une petite fiesta intime entre fachos. Raphaël Dinucci était définitivement présent à l’édition 2022 de cet événement à Québec (au Bar Le Duck), notamment aux côtés de membres du groupe néofasciste Atalanteet du Parti nationaliste chrétien (néonazi) de Sylvain Marcoux, avec qui le FAC semble en termes amicaux depuis l’époque de WLM. Nous avons de bonnes raisons de croire que Dinucci était à nouveau présent lors de la dernière édition de la Saint-Jean de Nomos, à Montréal le 23 juin dernier, qui se tenait pour une deuxième année consécutive dans les locaux de Lux Média, le projet de « réinformation » d’André Pitre. (Beauvais MacDonald y a quant à lui été aperçu l’année précédente.)
Le plus important à retenir ici est précisément que ces « activistes » néonazis qui se fantasment un rôle prépondérant dans une guerre raciale qu’ils imaginent imminente – du côté des croisés de la race blanche, bien entendu – font partie intégrante de l’écosystème de l’extrême droite au Québec. Bien qu’ils y soient encore relégués à la marge, ils y jouent définitivement un rôle, ne serait-ce que comme repoussoir pour les autres, qui peuvent à loisir se dépeindre comme « moins pires que ». Sans que tous leurs éléments spécifiques s’arriment nécessairement, il faut bien comprendre que tous les groupes et les courants mentionnés dans le présent article et dans les autres communications récentes de Montréal Antifasciste (des nazis 3.0 de WLM/FAC aux nationalistes ethniques de Nouvelle Alliance, en passant par les complotistes transphobes, les cryptofascistes de Nomos et les nationaux-socialistes déjantés du Parti nationaliste chrétien) occupent un espace particulier dans un seul et même écosystème, où ils tendent à se renforcer mutuellement.
Il importe aussi de rappeler le rôle clé que jouent certaines figures des médias dominants d’ici (est-il même besoin de les nommer?) pour normaliser l’extrême droite… en répétant aussi souvent que possible qu’elle n’existe tout simplement pas.
Raphaël Dinucci est fort probablement le fondateur et le principal animateur du Frontenac Active Club. Il apparait d’abord sur notre radar en 2022 comme coadministrateur du canal Telegram White Lives Matter Québec, sous le pseudonyme de « Whitey », aux côtés de Yannick Lachapelle, alias « Nord-Est ». Ils forment en fait à eux deux le noyau dur de l’éphémère groupuscule.
Dinucci se distingue dès le début par un activisme intense, notamment dans les rues de Laval, qu’il recouvre de stickers et de graffitis.
Après la sortie de l’article White Lives Matter : un nouveau projet néonazi fait des petits au Québec en mars 2022 et l’évaporation dans la nature de Yannick Lachapelle, Dinucci se retrouve seul aux commandes. Nous savons qu’il multiplie les liens avec des membres ontariens de WLM et Active Club, et c’est éventuellement à ce moment que lui vient l’idée et l’envie de passer à la vitesse supérieure et de fonder le Frontenac Active Club.
On le retrouve sur quasi toutes les photos des activités du groupe de Montréal et il est aussi celui qui s’occupe des relations publiques pour le FAC, que ce soit en rencontrant les membres du Parti Nationaliste Chrétien (PNC, basé à Drummondville), ou en participant aux différentes éditions de la « Saint-Jean de la Race » de Nomos-TV.
Il est présent le 2 avril 2023 au rassemblement de Sainte-Catherine avec David Barrette et Sylvain Marcoux (du PNC), et ils déploient quelques secondes une bannière « Sales pédos hors du Québec », qui leur est rapidement confisquée.
Il est toujours domicilié chez son père dans le secteur Auteuil de Laval.
David Barrette
Telegram : @NatSocSiD Adresse : 863 rue Saint-Jacques, Saint-Jean-sur-Richelieu
David Barrette est un néonazi du clavier hyperactif depuis des années, principalement sous le pseudo @NatSocSid (il en a plusieurs autres), sur de nombreuses plateformes virtuelles, dont Telegram, Discord et le serveur IRC #Montreal du réseau de clavardage Undernet. Il est également actif sur YouTube, BitChute, TikTok et plusieurs autres plateformes. Il était déjà membre du groupe White Lives Matter en 2020 et a naturellement fait la transition vers le Frontenac Active Club à sa création, avec Dinucci et d’autres sympathisants.
Son activité et son implication au sein du FAC sont limitées en raison d’une blessure chronique à la cheville. Cela ne l’a pourtant pas empêché d’accompagner Raphaël Dinucci lors d’une aventure « in real life » à Sainte-Catherine le 2 avril 2023, aventure qui s’est soldée pour lui par une arrestation et des accusations de voies de fait (accusations retirées en mars dernier par les autorités, pour des raisons que nous ignorons). Nous croyons que ces déboires judiciaires ont refroidi son enthousiasme pour l’activisme politique, mais il reste très proche du noyau dur du FAC.
David Barrette habite à Saint-Jean-sur-Richelieu et travaille à Montréal dans le domaine des technologies de l’information, pour la compagnie Globotech Communications, spécialisée dans l’hébergement Web. Les renseignements que nous avons recueillis nous portent à croire qu’il se sert de sa position privilégiée au sein de cette compagnie pour y héberger de manière clandestine des sites et services à caractère antisémite, néonazi ou suprémaciste blanc, à même les serveurs de l’entreprise.
L’employeur de Barrette sera sans doute intéressé de connaître les activités extracurriculaires de son employé, voire de procéder à un examen minutieux des serveurs placés sous sa supervision.
Globotech Communications :
sales@globo.tech/support@globo.tech / abuse@globo.tech / NOC@globo.tech Téléphone : (514) 907-0050 ou 1 888-482-6661 (À noter que Barrette reçoit lui-même les messages de demande de soutien et est susceptible de les filtrer; il est donc indiqué d’écrire à plusieurs adresses pour faire en sorte que le message se rende bien aux autorités compétentes…)
Nous avons eu les premiers échos de ce sinistre personnage en mars dernier, lorsque le comité Nous ne serons pas sages – un groupe grassroots formé pour contrer le ressac anti-LGBTQ et le soi-disant « Comité des sages » du gouvernement de la CAQ – nous a contacté pour nous signaler des menaces violentes et haineuses reçues d’un certain « Martin Leblanc ». Ce dernier disait vouloir « se rencontrer » pour « enlever des pédophiles et des trans de ce monde », et qu’il leur donnait « rendez-vous sur Fullum » (le lieu de la manif du Comité). Dans un autre message, tout aussi violent, il se disait « fasciste, violent, près (sic) à faire le ménage », qu’il avait « déjà cracher (sic) sur des juifs et des gay » et qu’il voudrait « continuer [son] cheminement ».
Nous avons assez facilement retrouvé un « Martin Leblanc » sur Telegram (chaîne associée, « My Ancestral Calling »), avec un profil dont le caractère suprémaciste blanc ne laisse aucun doute (hommage à Hitler, etc.). Sa photo de profil le montre dans un gym dont les murs sont tapissés de symboles néonazis et d’un drapeau du Frontenac Active Club; c’est d’ailleurs le même gym qu’on aperçoit sur certaines photos publiées par le groupe sur sa propre chaîne.
Ce profil nous a permis de trouver son vrai nom, Martin Brouillette – dont le compte Facebook est illustré par la même photo de profil que le compte Telegram de « Martin Leblanc » – où celui-ci se décrit carrément dans sa bio comme « fasciste ». (À ce propos, les robots de Facebook semblent de moins en moins capables de détecter les publications néonazies ou suprémacistes blanches, et même les profils qui écrivent « fasciste » en clair, en plus d’afficher du contenu haineux, ne semblent pas être détectés dans ce Meilleur des mondes placé sous le signe de l’intelligence artificielle.)
Les photos affichées par Brouillette sur sa chaîne Telegram nous enseignent également qu’il s’entraîne au gym Kanreikai Karaté Joliette, situé à Saint-Charles-Borromée. C’est par les mêmes moyens que nous avons pu déterminer que son gym privé, là où il invite ses potes fascistes à se rouler par terre, se trouve dans son propre garage, sur le chemin Bélair dans la municipalité de Rawdon.
(Nous vous invitons à faire preuve de mesure et de politesse si vous choisissez de communiquer avec les responsables de l’école; il s’agit d’une entreprise légitime, a priori gérée par des personnes raisonnables dont nous n’avons aucune raison de croire qu’elles sont au courant des activités politiques de Martin Brouillette.)
Shawn Beauvais MacDonald
Telegram : @FriendlyFash
Eh la la, comme on dit dans le milieu… Cet abruti saucé est littéralement de tous les mauvais plans, à tel point que les autres nazis devront bien, à un moment donné, se rendre compte qu’il est toxique et que tout ce qu’il touche se transforme en marde. Il n’a en tous cas aucune notion de sécurité opérationnelle et vit sa petite vie de nazi comme un livre ouvert, ce qui expose tôt ou tard ses petits camarades. Que dire encore sur cet énergumène que nous n’ayons pas déjà dit 100 fois?
Nous soupçonnions déjà depuis avril 2023 que Beauvais MacDonald jouait un rôle, soit au cœur, soit en marge du FAC, mais nous n’en avions aucune preuve. En avril dernier, il a toutefois commencé à s’afficher à visage découvert avec le groupe sur son compte Telegram, suite à quoi celui-ci a décidé d’en faire un poster boy sur sa propre chaîne Telegram. Il a récemment pris une place plus centrale au sein du groupe. Il convient de remarquer que son arrivée dans le décor a coïncidé avec une séance d’entraînement au jiu-jitsu tout juste devant une synagogue dans le quartier Côte-des-Neiges de Montréal.
Accessoirement, Beauvais MacDonald semble récemment plus que jamais en roue libre. On nous signale qu’il a été plus d’une fois aperçu en public à proférer des menaces contre des personnes l’ayant reconnu (qu’il assimile évidemment aux « antifas »). De plus, il semble s’être acoquiné avec la jeune Sandrine Girardot, de Châteauguay, qui s’est tristement fait connaître en mars dernier pour avoir commis une série de graffitis haineux dans cette ville, notamment sur son propre immeuble à logements. Cette dernière a elle-même publié sur ses comptes de médias sociaux une série de publications et de vidéos complètement déjantées où l’on aperçoit avec Shawn Beauvais MacDonald dans divers quartiers et dans le métro de Montréal, agressant verbalement des passant·es avec des invectives et des insultes racistes et homophobes, criant leur admiration pour Adolf Hitler et faisant des saluts nazis, hilares.
Lorsque nous avons signalé publiquement ce rendez-vous galant de néonazis en goguette, Beauvais MacDonald a répondu en formulant des menaces explicites :
Mathieu Grenier
Mathieu Grenier utilise l’alias « @matthewattic » sur Telegram. Nous savons peu de choses de lui, hormis qu’il est roux et qu’il fut jadis impliqué dans le (très éphémère et essentiellement virtuel) groupe Proud Boys de Montréal. Il a récemment fait un voyage à Marseille, où il a socialisé avec des fachos locaux.
Steven Khazanov
Khazanov utilise l’alias « @stvjms » sur Telegram. Il vit sur la rive-sud de Montréal et a participé à plusieurs activités du Frontenac Active Club au cours de la dernière année.
Sa photo de profil sur Telegram le montre s’entraînant dans les installations extérieures du Parc de la Cité, à Saint-Hubert. Il est domicilié au 3133, rue Ovila-Hamel, à Saint-Hubert.
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Afin de ne pas nuire à nos enquêtes, nous avons choisi de ne pas inclure tous les renseignements dont nous disposons dans cet article. Nous continuons bien sûr à recueillir des renseignements sur les membres actifs du Frontenac Active Club. Si vous avez des renseignements sur ces individus ou d’autres rattachés au groupe ou évoluant dans ce milieu, n’hésitez pas à nous écrire à alerta-mtl@riseup.net.
Au courant de l’année 2022 est apparue au Québec une nouvelle « organisation politique » séparatiste à caractère ultranationaliste baptisée Nouvelle Alliance (NA), en référence assumée à l’Alliance Laurentienne, une association d’extrême droite animée entre 1957 et 1963 par l’auteur et militant réactionnaire Raymond Barbeau (1930-1992)[i].
Depuis sa création, NA a mené à Montréal et ailleurs au Québec une série d’actions (commémorations solennelles, campagnes d’affichage, accrochages de bannières, veille au flambeau, etc. Voir l’annexe pour une liste non exhaustive des actions.) rappelant directement le modus operandi privilégié au cours des dernières années par d’autres formations d’extrême droite, comme le groupe néofasciste Atalante Québec et l’éphémère Front canadien-français (FCF). Les membres fondateurs et principaux militants de Nouvelle Alliance sont d’ailleurs d’anciens membres de ce dernier groupuscule, proche émule des cercles ultracatholiques fascisants du Québec, ce qui n’a bien sûr rien d’une coïncidence, quoi qu’en disent les principaux intéressés.
En octobre dernier, le média indépendant Pivot.media faisait paraître un excellent article sur Nouvelle Alliance (que nous vous encourageons fortement à consulter) exposant certaines des contradictions qui caractérisent le groupe.
Une prétention en particulier relevée dans cet article nous semble à la fois hautement saugrenue et digne d’une étude plus attentive : celle voulant que Nouvelle Alliance ne soit « ni de droite ni de gauche ». Cette affirmation, comme nous le verrons, n’a jamais vraiment résisté à l’épreuve des faits, mais un développement récent est venu la disqualifier sans appel. Le 16 février dernier, les militants de NA ont mené une action devant le bureau du ministre fédéral de l’Immigration en y déployant une bannière déplorant une prétendue « subversion migratoire », reprenant une obsession centrale de l’extrême droite, ainsi que la revendication nationaliste classique des « pleins pouvoirs » en matière d’immigration. Quatre jours plus tard, ils doublaient la mise en mettant en ligne une vidéo dénonçant « l’immigrationnisme », en soi un terme forgé par l’extrême droite en France et repris depuis par la droite libérale, la « submersion » migratoire ainsi que le « remplacement » de population, en référence voilée à la thèse du « grand remplacement », une autre affabulation développée au sein de l’extrême droite française.
On le voit bien, malgré sa prétention d’être « ni de droite ni de gauche », NA met de l’avant dans cette séquence d’actions un message qui reprend le vocabulaire de l’extrême droite française, lequel est également en vogue dans les cercles d’extrême droite européen et nord-américain. Ce cadre référentiel « nationaliste » (au sens euphémistique cher aux mouvements identitaires, fascistes et néonazis) explique aussi sans doute la popularité du groupuscule sur les médias sociaux auprès de très nombreux groupes et individus clairement affichés à l’extrême droite.
Le présent article a pour objet de démystifier une fois pour toutes la notion voulant que cette organisation soit politiquement neutre ou inoffensive, de démontrer qu’elle s’inscrit de plain-pied dans l’extrême droite contemporaine, de mettre en garde les jeunes militant·es indépendantistes qui, peut-être par naïveté, seraient tenté·es de succomber à leurs discours, et surtout, d’alerter la communauté au danger qu’elle pose afin de faire efficacement barrage à toute tentative d’infiltration des milieux progressistes.
Dans le but avoué « d’apporter la lutte pour l’indépendance dans la rue », Nouvelle Alliance se présente comme une sorte d’avant-garde séparatiste militante et adopte une mise en scène qui n’est pas sans rappeler les rituels de l’extrême droite historique, voire du néofascisme contemporain. Ses militants, presque exclusivement des jeunes hommes – et ce n’est pas fortuit –, semblent soucieux de projeter une apparence conservatrice classique, combinant des codes hypermasculins traditionnels (costumes coupés, apparence soignée, etc.) et une esthétique reprise en partie des mouvements de droite radicale (manteaux d’aviateurs ornés de l’emblème de l’organisation, veillée au flambeau, éléments pyrotechniques, etc.). Ils empruntent aux mêmes précurseurs leur allure bizarrement austère, leur posture quasi militaire et leur ton exagérément grave, souvent catastrophiste.
10 septembre 2023 – Hommage à Montcalm, avec flambeaux et drapeaux du Québec.
23 avril 2023 – Accrochage d’une bannière « Gouverner ou disparaître » avec drapeaux du Québec et fumigènes sur le Pollack Concert Hall de l’Université McGill.
26 novembre 2022 – Rassemblement à Saint-Denis-sur-Richelieu en l’honneur des patriotes.
22 mai 2023 – Manifestation pour la Journée nationale des patriotes.
15 Octobre 2022 – Accrochage d’une bannière « Je suis séparatiste » sur l’autoroute Décarie, dans une circonscription à majorité anglophone.
En plus de ces manifestations ostentatoires, il est avéré que les principaux militants de NA descendent directement de l’éphémère Front canadien-français, dont nous avons démontré les liens étroits avec l’extrême droite québécoise par sa proximité avec des individus comme Alexandre Cormier Denis et Philippe Plamondon (Nomos.tv, Horizon Québec actuel), Étienne Dumas (Mouvement tradition Québec) et la Fédération des Québécois de souche. En plus de l’Alliance Laurentienne de Raymond Barbeau, NA s’inspire aussi, de manière moins transparente, du journal La Nation de Paul Bouchard et des Jeunesses patriotes des frères Walter et Dostaler O’Leary, deux autres précurseurs « séparatistes » d’inspiration fasciste (ou « corporatistes ») et du Centre d’information nationale (CIN) de Robert Rumilly, en plus de faire régulièrement appel à la mémoire du chanoine Lionel Groulx, connu pour ses prises de position réactionnaires et son antisémitisme explicite. On devine aussi parmi leurs inspirations militantes des projets moins marqués à droite, comme le FLQ, les Chevaliers de l’Indépendance, le Mouvement de libération nationale du Québec (MLNQ) de Raymond Villeneuve et le Réseau de Résistance du Québécois (RRQ).
Action du Front canadien-français au printemps 2019, au monument à Dollard des Ormeaux, à Montréal. À l’avant-plan, François Gervais et Suleyman Ennakhili, aujourd’hui militants de Nouvelle Alliance.
Le « cœur laurentien » est une référence à l’Alliance Laurentienne et au journal Laurentie, une inspiration directe de Nouvelle Alliance.
Jean-Philippe Desjardins Warren, étudiant en histoire, est à l’évidence un leader organique de Nouvelle Alliance. Il est aussi le militant du groupe le plus marqué à l’extrême droite. Il relaie ici des copies du journal Laurentie et un livre de l’abbé Wilfrid Laurin, dont les fondateurs de l’Alliance Laurentienne se voulaient les continuateurs.
Le chanoine Lionel Groulx est une référence constante de Nouvelle Alliance, comme il l’était pour le Front candadien-français. Il est ici juxtaposé à des militants indépendantistes des années 1960.
Le slogan « Je suis séparatiste », évoque notamment (mais pas que) le projet politique (fasciste) du journal La Nation, de Paul Bouchard.
Nouvelle Alliance force ici un rapprochement entre Lionel Groulx (réactionnaire) et le syndicaliste Michel Chartrand (progressiste), que presque tout opposait sur le plan social. Cette image à elle seule reflète parfaitement l’impossibilité catégorique de la synthèse que NA dit vouloir opérer.
En outre, un examen rapide de leurs plateformes de médias sociaux (ici sur Instagram, là sur Twitter/X) révèle un très grand nombre de sympathisants (groupes et individus) identifiés à l’extrême droite, affichant par exemple des symboles du fascisme, des courants identitaires européens, de l’ultranationalisme ou du nationalisme blanc, de l’Alt-Right, etc. Il faudrait être bien naïf pour croire que la convergence de tous ces éléments relève du hasard et de la coïncidence.
Les animateurs du journal Le Harfang (l’organe de la Fédération des Québécois de souche) ne s’y trompent pas : Nouvelle Alliance n’est rien de plus qu’un inoffensif regroupement de patriotes! C’est pourquoi ces fascistes notoires leur témoignent toute leur solidarité!
Les frasques de Nouvelle Alliance leur ont attiré une certaine attention sur les médias sociaux, au-delà de leur cercle de sympathie.
Bien dit…
L’un des membres les plus flamboyants de NA, Aurélien Nambride, affiche quant à lui sa fierté de représenter au Québec le Rassemblement National (RN, anciennement Front National), une formation dont il est peut-être inutile de rappeler qu’elle a été fondée par d’anciens nazis et qui, malgré tous les efforts de « dédiabolisation » déployés au fil des ans, est à tout jamais ancrée dans l’univers culturel et politique néofasciste. Nambride ne cache pas non plus son admiration pour le parti Alternative für Deutschland (AfD), une autre formation résolument campée à l’extrême droite (vois le clip vidéo ci-dessous).
Le militant de Nouvelle Alliance, Aurélien Nambride, dit représenter l’aile jeunesse du Rassemblement National au Québec.
Aurélien Nambride est un habitué des congrès de l’aile jeunesse du Parti Québécois. À notre connaissance, le PQ n’a jamais pris acte des invitations qui lui ont été lancées à prendre ses distances d’avec ce petit facho.
Faux-culs et faux-semblants… le gaslighting comme stratégie politique
Les militants de NA insistent donc pour répéter à qui veut l’entendre qu’ils ne sont « ni de droite ni de gauche[iii] ». Pourquoi ce faux-fuyant? Ça ne devrait pourtant pas être bien compliqué pour ces jeunes réactionnaires de s’affirmer franchement pour ce qu’ils sont effectivement, plutôt que de louvoyer et de s’incruster dans un pitoyable déni. C’est on ne peut plus hypocrite pour une organisation de porter aussi clairement sur sa manche un projet politique, de le nier en même temps, puis de prétendre vouloir rapprocher les nationalismes par-delà la « gauche » et la droite afin de réaliser l’indépendance autour d’un projet à définir ultérieurement. Il est important de le reconnaître, puisque le procédé lui-même cherche à faire croire qu’ils n’ont pas d’intention ultérieure, qu’ils ne mettent pas eux-mêmes de l’avant une vision politique à laquelle ils voudraient faire éventuellement conformer « le pays » réalisé.
À notre avis, cette défilade repose sur une confusion délibérée, stratégique, des genres politiques : une redéfinition confusionniste des catégories « gauche » et « droite », assortie d’un gaslighting systématique (c.-à-d. que ce que l’on voit et perçoit par nos sens et notre raisonnement serait en réalité tout autre chose; il nous faudrait les croire sur parole!), visant à ouvrir sur la droite le faisceau des idées politiques acceptables (la fenêtre d’ Overton) dans le champ indépendantiste.
C’est essentiellement le même procédé qu’emploie systématiquement l’idéologue Mathieu Bock Côté à une échelle beaucoup plus grande. C’est en fait toute la thèse de son dernier livre[iv], qui semble précisément mis au point pour outiller conceptuellement la nouvelle génération de nationalistes réactionnaires que représente Nouvelle Alliance. MBC y répète par exemple – comme il le fait sur toutes ses tribunes – que l’extrême droite est une catégorie « fantomatique » que fabuleraient aujourd’hui le « régime diversitaire » dominant, qu’il assimile carrément à l’antifascisme[v]! Ce dernier, explique MBC, aurait en quelque sorte inventé la catégorie « extrême droite » dès les années 1920, non pas en premier lieu pour s’opposer à la montée du fascisme en tant que tel, mais pour diaboliser tous les ennemis du communisme en les regroupant sous une même étiquette!
« On en arrive ici au cœur de la thèse du présent ouvrage : ce n’est pas “l’extrême droite”, entité politique fantomatique et catégorie indéfinissable, qui menace notre démocratie, mais bien plutôt l’usage que le régime diversitaire fait du concept d’extrême droite pour frapper d’interdit, censurer ou fasciser toute forme de dissidence[vi]. (…) Au fond des choses, on retrouve ici la logique de l’antifascisme, qui conditionne profondément l’imaginaire politique démocratique, et structure encore son rapport au conservatisme. L’histoire de l’antifascisme n’est pas d’abord l’histoire de la lutte contre le fascisme mais celle de l’assimilation au fascisme des adversaires du communisme, et même du socialisme. (…) L’antifascisme dès son apparition, a d’abord eu pour fonction de désigner ceux qui s’opposaient résolument au communisme non pas en affirmant qu’il allait trop loin, tout en reconnaissant la noblesse de ses idéaux, mais bien parce qu’ils le rejetaient fondamentalement[vii]. »
Voilà un révisionnisme qui ne manque pas d’audace, quand on sait que le fascisme s’est d’abord et avant tout défini par son opposition au communisme, qui le précédait de plusieurs décennies et menaçait alors tangiblement l’ordre capitaliste un peu partout en Occident! De là à prétendre que le fascisme n’a jamais vraiment existé que dans l’œil de ses ennemis, il n’y a qu’un pas, que MBC franchit allègrement. Comme si ces mouvements politiques ne faisaient pas depuis maintenant un siècle l’objet de vastes champs d’études historiques et sociologiques, et comme si les résurgences contemporaines de l’extrême droite – de la Nouvelle Droite européenne à l’Alt-Right étatsunienne, en passant par les mouvances néonazies et les partis de droite radicale – n’avaient aucune substance réelle et n’étaient que le fruit d’une imagination communiste délirante!
Si l’étiquette peut effectivement être employée pour circonscrire un ennemi politique, de 1) c’est un procédé dont MBC fait lui-même abondamment usage (il qualifie par exemple ses ennemis de « wokes » ou Québec Solidaire de parti de « gauche radicale » pour mieux les disqualifier), et qu’il ne peut donc reprocher à personne, et de 2) il est absolument malhonnête de réduire l’emploi du terme à ce seul usage. L’extrême droite n’est d’ailleurs pas plus « indéfinissable » qu’elle est fantomatique. Au contraire, même sans être sociologue patenté ou sans se limiter aux sources de la gauche radicale, on peut sans difficulté en trouver des définitions raisonnablement consensuelles. Contentons-nous pour l’exercice de consulter la rubrique Wikipedia pour « extrême droite », qui est une source aussi légitime qu’une autre et regorge de références pour quiconque souhaite creuser la question davantage. MBC, qui est lui-même un des principaux passeurs des idées d’extrême droite dans des médias privés les plus consultés, écoutés et regardés au Québec, en plus de jouer un rôle considérable en France comme faire-valoir des formations d’extrême droite (le Rassemblent national et le parti Reconquête d’Éric Zemmour) sur les plateformes que contrôle le multimilliardaire ultracatholique Vincent Bolloré, ferait peut-être mieux de potasser ses définitions plutôt que de dire de la marde. À moins bien sûr que « the marde is the medium » et qu’il ne s’agisse en fait que d’un moyen pour lui d’empoisonner le puits et de favoriser systématiquement la résurgence de l’extrême droite dans les sociétés où il exerce son influence toxique. Toujours en le niant farouchement, évidemment.
L’une des innombrables chroniques de Mathieu Bock Côté où il donne la preuve qu’il vit dans un monde imaginaire.
Quoi qu’en disent les principaux intéressés, le rejet plus ou moins radical de l’immigration[viii] est un point commun à tous les mouvements d’extrême droite, et c’est un élément de discours central de presque tous les groupes et individus mentionnés dans cet article jusqu’ici[ix]. C’est en tous cas une obsession maladive de Mathieu Bock Côté et, manifestement, une préoccupation majeure de Nouvelle Alliance, comme nous le verrons plus loin.
Nous avançons ici l’hypothèse que les militants de Nouvelle Alliance forment en fait une espèce de « jeunesse bockcôtéienne » qui ne dit pas son nom; on retrouve chez eux comme chez l’autre le même déni confusionniste, le même gaslighting corolaire, le même nationalisme faussement libéral et le même jupon fascisant dépassant des mêmes atours bourgeois tenant de la même coquetterie rétrograde. La principale différence entre eux est la volonté exprimée par le jeune groupuscule de faire sortir le nationalisme (ou la « lutte pour l’indépendance ») dans la rue, ce qu’on ne peut certes pas reprocher à MBC[x]. Nouvelle Alliance est pour ainsi dire l’inévitable incarnation des idées que propage Mathieu Bock-Côté (et d’autres comme lui) depuis une quinzaine d’années, mais sur un mode militant reprenant les recettes déjà employées par des formations plus ou moins fascisantes, comme Atalante Québec, elles mêmes inspirées d’initiatives similaires en Europe (voir CasaPound, Groupe Union Défense, etc.).
L’essentiel à retenir ici est que sous une rhétorique faussement neutre, et en dépit du gaslighting qui sous-tend toute la démarche, NA est sans conteste une initiative rangée loin sur la droite du spectre politique et dont le projet immédiat est précisément de tirer le milieu nationaliste québécois vers la droite, notamment par une stratégie entriste dans les formations politiques traditionnelles comme le Parti Québécois et le Bloc Québécois. En se disant « ni de droite ni de gauche », elle cherche sans doute en partie à attirer vers elle des militant·es indépendantistes aux penchants progressistes, mais plus qu’un appel du pied aux « nationalistes de gauche », l’intention réelle de cette confusion cultivée est de consolider le bloc de droite en favorisant une tolérance accrue des éléments de discours de l’extrême droite nationaliste (notamment sur la question de l’immigration et de l’évolution démographique) parmi les segments conservateurs plus classiques ou libéraux. Le but visé est en réalité une tolérance mutuelle entre la droite traditionnelle et l’extrême droite et une normalisation culturelle de cette dernière de manière plus générale, qui doit à terme se traduire par des transformations politiques sur le plan institutionnel.
Le militant de Nouvelle Alliance, Émile Coderre, est visiblement très impliqué au Bloc Québécois. Il annonce ici son intégration à l’équipe du député bloquiste Martin Champoux.
Les militants de Nouvelle Alliance participent régulièrement aux congrès de l’aile jeunesse du Parti Québécois.
Plusieurs militants de Nouvelle Alliance au congrès du Comité national des jeunes du du Parti Québécois, en août 2023.
Ça n’est pas d’hier que les militants de Nouvelle Alliance visent à se rapprocher du Parti Québécois… Les voici avec Pascal Bérubé en 2019.
Le sympathique compte Twitter/X Le troupeau de petits Elon cherche depuis longtemps à attirer l’attention sur les tentatives par les militants de Nouvelle Alliance d’infilter les instances du Parti Québécois.
À certains égards, le pseudo-centrisme droitisant du régime politique actuel représente déjà une synthèse du libéralisme économique dominant et du repli identitaire que prônent des formations comme NA. La rivalité dans l’outrage observée ces derniers temps entre la Coalition Avenir Québec et le Parti Québécois sur diverses questions liées à l’immigration (généralement rabattues sur les seuils et la « capacité d’accueil ») donne à penser que le contexte actuel est particulièrement favorable à cette dérive[xi].
Et que propose concrètement cette soi-disant nouvelle alliance?
NA dit vouloir réaliser l’indépendance dans les plus brefs délais avant de définir un projet démocratique pour un Québec indépendant, au lieu de d’abord définir un projet pour le réaliser de manière démocratique par la suite. Autrement dit : faisons l’indépendance aujourd’hui, et le processus lui-même s’occupera de définir ce que cela implique concrètement. On ne peut donc inférer le genre de pays que ces messieurs aspirent à créer que sur la base de leurs influences, de leurs filiations, du milieu dans lequel ils opèrent et enfin, des positions qu’affiche plus ou moins ouvertement l’organisation.
Sur le plan de l’immigration et de la future composition de la société québécoise, l’affaire est entendue. Le nationalisme de repli identitaire que met de l’avant Nouvelle Alliance revendique explicitement un droit de priorité et de supériorité nationale de la majorité historique québécoise de souche canadienne française. De sa récente vidéo, qui recycle sur un mode paranoïaque la sempiternelle revendication nationaliste du rapatriement des « pleins pouvoirs » en matière d’immigration, on comprend qu’implicitement, le groupe milite en fait pour une réduction drastique de l’immigration dans le but de préserver la prédominance démographique de cette majorité historique. Dans l’éventualité où une telle « organisation politique » ou une autre formation inspirée par celle-ci venait à imposer son programme, il va sans dire qu’elle prendrait des mesures draconiennes pour restreindre l’immigration de manière générale, voire la freiner tout à fait, avec ce que cela implique de conséquences.
Capture d’écran tirée de la vidéo anti-immigration mise en ligne par Nouvelle Alliance le 20 février 2024.
Transcription de la vidéo
« Le 25 janvier dernier, le Québec a franchi la barre des 9 millions d’habitants. Qu’on se le dise, cette montée de la population est loin d’être un second baby-boom. Depuis trop longtemps, le Canada cherche à accomplir son utopie postnationale par une immigration toujours plus intensive.
Bien qu’on nous assure le contraire à Ottawa, c’est bel et bien la mise en œuvre des plans du « Century Initiative », qui se joue devant nous : faire du Canada un pays de 100 millions d’habitants en 2100.
Les élites politiques, économiques et médiatiques canadiennes ambitionnent d’aller au-delà de l’État-Nation pour devenir le premier pays sans attachement identitaire.
S’il s’agit du but premier de cette immigration de masse, elle en cache pourtant un autre : faire diminuer notre poids démographique et notre influence politique pour en finir avec nos revendications nationales. Cette tactique n’est pas nouvelle. Elle est directement héritée du Rapport Durham : diluer une population insoumise en la remplaçant par une autre qui sera fidèle au régime. Un truc vieux comme le monde. Un calcul froid et machiavélique. On n’est pas dupe : la démographie fait l’histoire. Notre nombre est notre force.
Quand sera-t-il de l’avenir culturel du Québec? Qu’en sera-t-il de la majorité canadienne française ? Si rien n’est fait pour renverser la tendance, ça sera un point de non-retour. Nous deviendrons une minorité sur la terre de nos pères, car c’est une véritable submersion qui se produit sous nos yeux.
Notre génération doit avoir le courage de nommer le réel tel qu’il se présente à nous, sans haine, dans une démarche constructive, et chiffres à l’appui.
On le fait par devoir citoyen, mais aussi pour laisser à nos enfants un endroit où ils demeureront maîtres chez-eux.
Il ne s’agit pas de condamner personnellement les gens qui sont nouvellement arrivés au Québec. Ce qu’on dénonce, c’est l’immigrationisme comme modèle de développement socioéconomique et ceux qui s’en servent comme outil politique.
Si on veut être pleinement maître de nos frontières et de nos politiques d’immigration, une seule solution s’impose : l’indépendance du Québec, maintenant, pendant qu’il en est encore temps. »
NA s’inscrit ici dans la longue histoire des récriminations au fédéral en matière d’immigration et reprend volontiers à son compte la théorie du complot voulant que le méchant Canada « inonde » le Québec d’immigrants « fidèles au régime » pour étouffer les aspirations du peuple québécois à sa souveraineté politique. Quand une organisation commence ainsi à parler publiquement de « submersion » et de « subversion migratoire », on conviendra qu’il est tout naturel d’évoquer, au minimum, sa parenté avec les mouvements d’extrême droite…
Sur le plan socioéconomique, quoi qu’en pensent les militants de NA, il existe des différences absolument irréconciliables entre visions « de gauche » et « de droite », et une infinité de nuances possibles entre les deux. Il va sans dire qu’avant d’accorder sa confiance à un regroupement marginal de petits messieurs nationalistes peignés sur le côté, on voudra savoir à quelle enseigne ceux-ci logent vraiment en matière de production et de distribution de la richesse, de rapports économiques, de solidarité et de protections sociales, de relations de travail, etc. Au-delà des poncifs sur les méchants banquiers anglais, rien ne porte à croire que NA envisage un avenir post-capitaliste pour le Québec indépendant, et si son approche socioéconomique repose d’entrée de jeu sur une collaboration de classe pour réaliser l’indépendance, il y a fort à parier que sa version d’un Québec souverain en est une où les rapports de classe resteront intacts.
Sur le plan de la décolonisation, NA ne dit rien de la souveraineté des peuples autochtones, et encore moins de sa préséance sur la souveraineté du Québec. Aucun projet de société en Amérique du Nord ne peut faire l’économie d’une réflexion approfondie sur la décolonisation, la restitution du territoire, la réconciliation des peuples et la guérison authentique des traumatismes générationnels. Les mouvements nationalistes québécois – généralement prompts à dépeindre le Québec en victime plutôt qu’en agent du colonialisme – ont plus souvent qu’autrement fait preuve de mépris à l’égard des revendications autochtones, ou dans les meilleurs cas, de considérations symboliques rarement assorties de démarches concrètes. Il s’agit à notre avis, d’une priorité absolue, et non d’un enjeu secondaire.
Sur la question écologique, rien de concret non plus. Leur vision d’un avenir écologique pour le Québec, pour peu qu’ils en aient une, pourrait facilement servir de prétexte à recentrer les préoccupations anti-immigration propre à l’extrême droite et aux courants écofascistes.
Sur le plan de l’équité de genre, Nouvelle Alliance ne laisse rien présager de bon non plus. Les femmes sont essentiellement absentes de leurs actions (à part sous forme de token, pour les photos), et celles dont on sait qu’elles sont liées à l’organisation affichent des positions d’extrême droite (voir ci-dessous). Ce déséquilibre dans le genre a sans doute à voir avec la présentation rébarbative du groupuscule, mais aussi peut-être avec la pression supplémentaire à la reproduction placée sur les femmes de la population majoritaire, la contrainte au « réarmement démographique », qui constitue un corolaire évident du repli identitaire et du discours anti-immigration…
Ce ne sont là que quelques unes des considérations essentielles qu’il faut examiner en profondeur AVANT de commencer à parler d’un projet d’indépendance, et non après. À plus forte raison si les individus qui se présentent aujourd’hui comme l’avant-garde séparatiste affichent déjà des tendances réactionnaires confinant au repli ethnique et au rejet de la diversité.
Qui sont les principaux militants de Nouvelle Alliance?
Section de Montréal
La section de Montréal est la première à avoir été créée, et la plus nombreuse si l’on se fie aux photos des différentes actions et évènements.
François Gervais est d’abord apparu sur notre radar lorsqu’il s’est pointé avec son ami Suleyman Ennakhili dans la grande manifestation pour le climat du 27 septembre 2019 en brandissant un drapeau Carillon Sacré-Cœur (emblème sacré du nationalisme réactionnaire). Tous deux faisaient alors partie du maintenant défunt Front canadien-français (FCF). Le jeune Gervais avait aussi signé le « Manifeste contre le dogmatisme universitaire » à titre d’étudiant en Histoire et civilisation au Cégep Lionel-Groulx. Nous soupçonnions qu’il était celui qui posait des collants FCF à Sainte-Thérése à cette époque-là.
Si l’on en croit sa signature de cette lettre ouverte d’avril 2021, il était à ce moment-là « représentant jeune » pour Mirabel du Comité national des jeunes du Parti Québécois (CNJPQ).
De simple membre du FCF, on l’a vu prendre du gallon et gagner en influence. Depuis le FCF, on peut dire que beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. En effet, on peut considérer François Gervais comme le principal artisan de Nouvelle Alliance. Il en est en tous cas le « président », le porte-parole et le principal visage public. Présent dans la plupart des activités, il semble s’imaginer en grand timonier menant ses hommes vers la gloire immortelle. Le noyau dur de l’organisation tourne autour de sa bande d’amis de la Rive-Nord, certains rencontrés dans le secteur de Pointe-Calumet, dont il est originaire, d’autres dans l’entourage du cégep Lionel-Groulx à Sainte-Thérèse, puis dans la frange brune du mouvement souverainiste. Il étudierait aujourd’hui à l’Université de Montréal et habiterait toujours chez papa et maman dans son secteur natal.
François Gervais a notamment joué une victime d’intimidation dans le merdique téléroman Destinées, à TVA.
Fait anecdotique, mais intéressant pour cerner le caractère théâtral du personnage et de son projet, Gervais a un passé d’enfant-acteur. Il est parfois difficile, en effet, de se concentrer sur le message politique de NA sans être complètement distrait par leur cosplay de masculinité grand-homme-important rétrograde… La principale question qui nous tenaille au sujet de Gervais reste pourtant la suivante : qu’a bien pu faire le « petit Loïc » à ses cordes vocales pour faire fitter cette voix de stentor dans ce frame de freluquet? Qu’en pensez-vous?
Un autre ancien du Front canadien-français, il est originaire de Pointe-Calumet et accompagne souvent François Gervais. Il a étudié au cégep Lionel-Groulx jusqu’à avril 2023, au minimum.
En 2020 nous écrivions à son sujet : « Présent aux actions du FCF, nous l’avions déjà aperçu à deux reprises arborant le Carillon Sacré-Cœur : à la manifestation islamophobe “La Vague bleue” le 4 mai 2019 à Montréal (ironiquement, sous la bannière prolaïcité des nationaux-populistes) et à la grande manif pour le climat du 27 septembre 2019. Originaire de Pointe-Calumet, on lui doit peut-être les autocollants du FCF apparus à Saint-Joseph-du-Lac. »
Suleyman Ennakhili parmi les boomers et les ti-counes assortis de la Vague bleue, le 4 mai 2019, brandissant un carillon Sacré-Cœur sous une bannière prônant la laïcité…
François Gervais et Suleyman Ennakhili dans la grande manifestation pour le climat du 27 septembre 2019, à Montréal. La première fois qu’ils voyaient des antifascistes de proche…
Suleyman Ennakhili exerce sa fougue oratoire à Saint-Denis, le 26 novembre 2022.
Ancien du FCF, il fait partie de la petite bande de François Gervais à l’origine du projet Nouvelle Alliance.
En 2020 nous écrivions : « Résidant de Longueuil et étudiant en Histoire à l’UQAM, ce proche de Jason Mc Nicoll Leblanc ne nous est pas inconnu. Passé par la scène punk, il a gravité quelque temps dans le milieu underground montréalais, à l’époque où il étudiait au Cégep du Vieux-Montréal. Il a ensuite transité vers le métal noir québécois, où il a dû faire de mauvaises rencontres… Plus tôt cette année, il a signé le “Manifeste contre le dogmatisme universitaire” avant de participer aux actions du FCF. Il s’impliquerait par ailleurs au Conseil Jeunesse de la Société Saint-Jean-Baptiste. ». Il a depuis rédigé une brochure sur les patriotes pour le compte du député Xavier Barsalou-Duval du Bloc Québécois.
Depuis, le portrait s’est encore noirci, puisque Jean-Philippe est maintenant le membre le plus ouvertement d’extrême droite de Nouvelle Alliance. Prenons pour preuve cette photo de lui accoutré d’un t-shirt de l’organisation ultraconservatrice (et en voie de dissolution par le gouvernement français) Académia Christiana.
Jean-Philippe Desjardins Warren porte un t-shirt de l’Academia Chistiana, une association d’extrême droite instituée par un des fondateurs de Génération Identitaire.
Jean-Philippe Desjardins Warren lors d’une opération d’affichage à Montréal, à l’hiver 2023.
Jean-Philippe Desjardins Warren à Saint-Denis-sur-Richelieu, le 25 novembre 2023.
Il habite sur la Rive-Sud de Montréal. À l’heure d’écrire ses lignes, il est toujours étudiant à la maîtrise en Histoire à l’UQAM. Il administre vraisemblablement les comptes FB et Instagram « Pensées Laurentiennes ».
Un autre ancien du FCF et suiveux de François Gervais. Il vient de Sainte-Thérèse et aurait étudié à Lionel-Groulx. Il ne brille pas par son courage lors des rencontres avec des militants antiracistes.
Le groupe de hangers-on du Front canadien-français qui allait bientôt former le noyau dur de Nouvelle Alliance. Au centre, Elliot Labrie Laplante, et à côté, avec la moustache molle, Jeremy Racicot.
L’une des recrues « de gauche », c’est aussi le seul membre qui dépasse (largement) les 30 ans. JF est membre du groupe folk Makinaw. Nous avouons avoir du mal à comprendre ce qu’il fait là. Probablement attiré par la fougue nationaliste de ces jeunes militants, il semble en pleine dissonance cognitive, puisqu’il est capable le samedi d’aller voir un show punk antifasciste du groupe Les Sheriffs, et le lendemain de manifester contre « la submersion migratoire » avec les petits racistes de Nouvelle Alliance. Il habite à Beloeil.
J.-F. Carrier, militant de Nouvelle Alliance.
J.-F. Carrier, militant de Nouvelle Alliance.
Ça se discute sans doute, mais pour l’extrême droite, ça ne sera pas possible…
Émile Coderre est originaire de Saint-Germain-de-Grantham, près de Drummondville (et y réside probablement toujours). En 2014, il entre au cégep de Drummondville en Comptabilité et gestion avant de commencer à s’impliquer au sein de son association étudiante (AGECD) en 2015, après s’être présenté pour le Parti Vert du Canada dans la circonscription de Drummond lors des élections fédérales de la même année. Il s’impliquera également au sein de l’ASSÉ, au Comité Régional Anti-Montréalocentrisme pour quelques mois, tout en assistant à différentes instances nationales de l’association. En 2016, il devient membre du SITT-IWW et est présent lors de la création de la branche Drummondvilloise de l’IWW, en 2017. Tout au long de cette période, de 2016 à 2019, Émile participe à des manifestations et événements antifascistes, syndicaux et de gauche au sens large.
Dès les débuts de son implication à l’AGECD, certains de ses comportements sont problématiques (fraude pour des remboursements, comportements antisyndicaux envers l’employé de l’association, manque de respect, de considération, et attitude contrôlante envers ses partenaires amoureuses et les femmes en général), ce qui l’éloigne de la majorité de ses camarades de l’époque. En 2019, il se fait dénoncer pour agression sexuelle, harcèlement et viol par au moins deux personnes. Cette nouvelle marque un tournant. Puis on apprend en 2022 qu’il gravite autour de Nouvelle Alliance, avec qui il fera plusieurs sorties publiques par la suite. Il s’implique présentement au sein du Parti Québécois dans la région du Centre-du-Québec. En mars 2024, il participe au Karaoké souverainiste du PQ dans la circonscription de Johnson en compagnie du très vocal François Gervais au bar la Sainte-Paix de Drummondville (https://www.facebook.com/reel/418171334059616).
Aux dernières nouvelles, il vit encore à Drummondville.
Audrey Gariepy
Ancienne membre du collectif anarchiste Libertad au Cégep du Vieux-Montréal, elle rejette maintenant le féminisme et « la modernité ». À partir de 2021, elle a commencé à faire du street art à saveur royaliste et duplessiste. Son autocollant avec des drapeaux antifascistes marqués du texte « Maîtres chez nous » est un bon exemple de son discours déjà pour le moins décousu à l’époque.
De plus en plus, on l’a vue s’opposer au féminisme, qui priverait les femmes de leur libre choix (celui d’élever des enfants, par exemple), alors que ce sont les politiques rétrogrades de type duplessistes qui cherchent concrètement à priver les femmes de leurs droits et de leur libre choix (celui d’élever ou non des enfants, ou d’avoir accès à l’avortement, par exemple). Son virage vers l’extrême droite se poursuit, avec une affinité affichée envers les groupes racistes et transphobes comme le Collectif Némésis en France.
Elle est souvent la seule femme présente dans l’entourage de Nouvelle Alliance lors de leurs événements.
Audrey Gariepy a souvent été mise de l’avant dans les actions de Nouvelle Alliance.
Audrey Gariepy, ancienne gauchiste, wannabe street artist, wannabe trad wife.
Audrey Gariepy ne cache pas son affection pour des groupes et des thèmes visuels néonazis.
Quelques-unes des références d’Audrey Gariepy sur Instagram. On reconnaît de nombreux projets d’extrême droite, tendances royaliste ou fasciste.
Audrey Gariepy rejette le féminisme et le libre choix des femmes. Elle suit le Collectif Némésis, une autre organisation française d’extrême droite.
Un échantillon des brillantes créations artistiques d’Audrey Gariepy.
Section de Sherbrooke
Une partie des membres de la section sherbrookoise de Nouvelle Alliance.
Nambride est responsable du Rassemblement National (FN) Jeunesse-Canada. Il est originaire de Saint-Germain-en-Laye, en France. Il étudie présentement à l’Université de Sherbrooke. Il appuie ouvertement les partis politiques d’extrême droite en Europe, comme l’AfD (Alternative pour l’Allemagne), un parti notoire pour son racisme, sa xénophobie et ses liens chroniques avec le néonazisme.
Nambride a créé une controverse en participant au congrès de la jeunesse du Parti Québécois, où il s’est présenté comme représentant du Rassemblement National Canada. Il s’est tout de même dit « agréablement surpris par la sympathie et l’accueil des membres du parti. Certains sont des amis personnels ». Son image figurait même sur l’Instagram du Comité national des jeunes du Parti Québécois. Le PQ ne semble pas avoir pris acte des nombreux appels à se dissocier de Nambride.
Aurélien Nambride au congrès de l’aile jeunesse du Parti Québécois.
On peut voir Nambride à son plus transparent dans les captures d’écran ci-dessous, où il déborde de joie en raison du score de l’AfD aux dernières élections régionales. Un parti de gens « prêts à défendre cette Europe des nations face à l’immigration ».
Aurélien Nambride ne cache pas sa joie devant les succès électoraux de la formation d’extrême droite Alternative für Deutschland.
Étudiant à l’Université Laval, originaire de Gaspé récemment arrivé à Québec, il n’est pas issu des milieux d’extrême droite à la base et, à sa décharge, s’emble s’être distancé du groupe dans les derniers temps. Il avait lui-même publié des photos de l’événement de fondation de la section de Québec sur son IG. (Cet événement a eu lieu au Café au temps perdu, sur Myrand.)
Membre de Nouvelle Alliance, ce résidant de Québec est aussi membre du PQ. Il milite au CNJPQ et fait partie de l’Équipe Mener la charge, qui se présente au conseil jeunesse du PQ.
Il a 23 ans et est bachelier en Sciences politiques appliquées. Il a été représentant jeune de l’exécutif du Parti Québécois de la circonscription de Montarville, puis a été président de l’association étudiante du PQ de l’Université de Sherbrooke durant deux ans. Il a également travaillé pour le député du Bloc Québécois Xavier Barsalou-Duval à son bureau de circonscription, et il travaille actuellement pour le Bloc Québécois. Il se présente au poste de conseiller au CNJPQ parce qu’il pense qu’il est grand temps que l’aile jeunesse mène la charge dans la reconstruction de la grande coalition souverainiste qui va de gauche à droite. Peut-être en raison de la remontée du PQ dans les sondages, Émile semble lui aussi s’éloigner un peu de Nouvelle Alliance, peut-être dans l’espoir d’une carrière au PQ…
Son alias « Ida marie de Lantagnac » nous est familier depuis… la fondation de Montréal Antifasciste en 2017. En 2018, elle s’est notamment fait remarquer dans l’orbite du duo antisémite DMS. Elle entame une maîtrise, après un baccalauréat en Sciences historiques et études patrimoniales. Elle est auxiliaire d’enseignement en études patrimoniales à l’Université Laval.
C’est avant tout une militante du clavier, qui fricote avec Nouvelle Alliance, dont elle prétend être l’une des fondatrices. Elle a participé à une action de graffitis stencils à Québec avec NA (photo sur son IG). Fait à noter, elle fréquente un certain Pierre Courcol, militant identitaire français qui s’est impliqué au Rassemblement National et au sein de la Cocarde étudiante.
Tout va bien mesdames et messieurs, l’honneur est sauf, il y a au moins une (1) femme dans ce party de saucisses…
Conclusion
Quoi qu’en disent ses militants, cette prétendue Nouvelle Alliance constitue une attaque frontale contre les populations immigrantes, les personnes issues de l’immigration, les personnes réfugiées, les demandeur·es d’asile et leurs familles ainsi qu’envers toutes les personnes au Québec qui portent une vision inclusive et égalitaire du vivre ensemble.
Nous ne pouvons pas en bonne conscience les laisser s’infiltrer dans nos espaces avec leur discours toxiques, et nous devons être particulièrement vigilant·es quant à leurs tentatives de recruter dans les établissements d’éducation supérieure. Ils ont déjà commencé à organiser des séances de tractage à l’Université de Montréal et à accroître leur visibilité en apposant des affiches et autocollants dans le secteur de l’université et ailleurs à Montréal, à Québec et dans d’autres localités.
Il est grand temps que le milieu antifasciste se dresse sur le chemin de cette nouvelle alliance réactionnaire.
Annexe
Voici une liste non exhaustive des actions du groupe jusqu’à présent, en ordre chronologique :
Fondation du groupe à Montréal le 26 mars 2022.
21 mai 2022 – Dépôt d’une gerbe de fleurs au Monument aux patriotes, photo de groupe et participation à la marche pour la Loi 101.
20 août 2022 – Altération des panneaux « STOP » de Ville Mont-Royal avec des autocollants « ARRÊT ». Cette action les a fait connaître d’une partie du public, car elle a généré beaucoup d’interactions sous la publication Instagram et plusieurs articles de journaux ainsi qu’une entrevue à QUB radio.
15 Octobre 2022 – Accrochage d’une bannière « Je suis séparatiste » sur l’autoroute Décarie.
26 novembre 2022 – Rassemblement/Marche à Saint-Denis-sur-Richelieu en honneur aux patriotes.
21 janvier 2023 – Rassemblement à la colonne Nelson pour fêter les 75 ans du drapeau québécois.
24 janvier 2023 – Campagne d’affichage à Montréal en l’honneur de Samuel de Champlain.
15 février 2023 – « Pendaison » symbolique de cinq pantins près du pont Jacques-Cartier pour commémorer l’exécution des patriotes le 15 février 1839.
25 février 2023 – Fondation de la section Sherbrooke.
30 mars 2023 – Opération de tractage à l’Université de Sherbrooke.
23 avril 2023 – Accrochage d’une bannière « Gouverner ou disparaître » avec drapeaux du Québec et fumigènes sur le Pollack Concert Hall de l’Université McGill en milieu de journée.
27 avril 2023 – Opération de tractage à l’Université de Sherbrooke.
2-3 mai 2023 – Tags à Québec et à Montréal. (Celui de Québec entraîne une « guerre de tags » à 3 joueurs, avec NA, Québec Antifasciste et Patriotes antifascistes!)
22 mai 2023 – Manifestation pour la journée nationale des patriotes.
1er juillet 2023 – Accrochage d’une bannière « Frontière internationale — Québec libre » sur le pont reliant Gatineau et Ottawa. Accrochage de bannières à Montréal, Québec et Sherbrooke.
12 juillet 2023 – Autocollants « Arrêt » apposés sur des panneaux « STOP » et autocollants « Loi 101 » à Lennoxville. Cette action génère un topo dans le magazine d’extrême droite Causeur.
24 juillet 2023 – Accrochage d’une bannière « 5 siècles de haut » sur la croix de Jacques-Cartier à Gaspé, pour célébrer le 489e anniversaire de la colonisation. (Prestement décôlissée par nos camarades du réseau Brume noire.)
30 juillet 2023 – Fondation de la section Québec.
Août 2023 – Participation de plusieurs membres, dont Aurélien Nambride, au congrès bisannuel du comité national des jeunes du Parti Québécois. La présence de NA irrite de nombreux membres du PQ, mais leur présence est tolérée.
22 août 2023 – Campagne d’affichage à la mémoire de Louis Hébert, premier colon québécois, avec slogan « Maîtres chez nous ».
10 septembre 2023 – Hommage à Montcalm, avec flambeaux et drapeaux du Québec. Leur action la plus codée « facho » à ce jour.
23 septembre 2023 – Nouvelle Alliance fait une apparition à la grande manifestation syndicale du Front Commun. (Ils se font un peu brasser et sortir de la manif par des camarades antifascistes.)
30 septembre 2023 – Accrochage d’une bannière « Le français ma culture, l’anglais la rupture » au Cégep Garneau de Québec.
25 novembre 2023 – Parade pour célébrer la victoire des patriotes à Saint-Denis-sur-Richelieu.
30 novembre 2023 – Opération de tractage à l’Université de Montréal.
10 décembre 2023 – Participation à une marche organisée par la SSJB en hommage aux patriotes à Saint-Eustache.
21 janvier 2024 – Drapeau québécois attaché à la Colonne Nelson pour célébrer les 76 ans du drapeau québécois
16 février 2024 – Manifestation et déploiement d’une bannière « Subversion migratoire » devant le bureau du ministre canadien de l’Immigration, Marc Miller.
20 février 2024 – Mise en ligne d’une vidéo déplorant le « danger de l’immigration » au Québec. (Voir la transcription ci-dessous.)
18 mars 2024 – « Projection politique » à Québec; projection lumineuse de différents messages pro-indépendance.
24 avril 2024 – Conférence intitulée « S’armer d’impatience » à la Librairie Le Livre Voyageur, à Montréal, portant sur les Chevaliers de l’indépendance et du Réseau de Résistance du Québécois (RRQ).
20 mai 2024 (prévue) – Marche pour la Journée nationale des patriotes à partir de la statue de Dollard des Ormeaux au parc Lafontaine, avant de se rendre au square Saint-Louis rejoindre la manifestation annuelle de la SSJB.
[i] Barbeau et l’Alliance Laurentienne cultivait une sympathie pour les mouvements fascistes, entretenait une correspondance avec le néonazi Adrien Arcand et comptait dans ses rangs des membres du PUNC, la formation politique de ce dernier. Barbeau avait notamment ouvert des « Clubs Laurentie » un peu partout dans la province, publiait la revue Laurentie et aspirait à faire du Québec la République de Laurentie. https://www.erudit.org/fr/revues/mensaf/2003-v3-n2-mensaf01359/1024646ar.pdf
[iv] BOCK CÔTÉ, Mathieu, Le Totalitarisme sans le goulag, Les Presses de la Cité, 2023.
[v] MBC opère ici un amalgame entre les positions libérales socialement progressistes et les valeurs révolutionnaires et internationalistes de la gauche radicale, comme si cette dernière avait une quelconque emprise aujourd’hui sur les institutions politiques, économiques et culturelles dominantes… C’est un autre procédé sophistique très répandu chez les passeurs d’idées de l’extrême droite.
[viii] En campagne électorale présidentielle, le chef du parti Reconquête, Eric Zemmour, promettait « zéro immigration » et MBC se lamentait alors qu’on ose associer ce politicien à l’« extrême droite »!
[ix] À l’exception peut-être du RRQ, qui n’en faisait aucune mention explicite dans son manifeste (2008), ce que lui reprochait d’ailleurs la Fédération des Québécois de souche à l’époque.
[x] MBC dénonce régulièrement les goons identitaires, et en retour, les boneheads d’Atalante lui ont reproché d’être un identitaire de salon! À un évènement de MBC à Québec, Atalante avait distribué un tract sur lequel on pouvait lire « La renaissance identitaire se fait par l’action et NON dans des dîners de galas! ». Sur Facebook, le groupe publiait ce commentaire à l’occasion de l’événement : « Mathieu Bock-Côté, sociologue et essayiste, qui pleurniche régulièrement sur la déchéance identitaire au Québec, mais qui est aussi le premier à cracher sur les initiatives qui répondent à l’appel, a eu droit à de cordiales salutations de la part de nos militants, que monsieur qualifiait dernièrement de : “bizarroïdes”, “folkloriques”, “caricaturaux” et “pelés”. […] Nous n’avons qu’un message à lancer! La renaissance identitaire se fait par l’action et NON dans des dîners de gala! Pourtant, c’est dommage, nous qui vous apprécions bien, M. Bock-Côté. » SOURCE : Isabelle Porter, « L’extrême droite de Québec sort de l’ombre », Le Devoir, 2 février 2017; et https://montreal-antifasciste.info/fr/2018/12/19/demasquer-atalante/.
Commentaires fermés sur Radio-Canada a du sang sur les mains : retour sur les vitrines détruites dans la nuit du 12 au 13 mars.
Mar152024
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Dans la nuit du 12 au 13 mars, les vitrines de la maison de Radio-Canada ont été détruites par des militant-es en réponse au choix de Radio-Canada d’utiliser sa large plateforme pour amplifier des discours transphobes proche de ceux de l’extrême-droite.
Le reportage TransExpress paru à l’émission Enquête le 29 février 2024 est une attaque intellectuellement et scientifiquement malhonnête envers les personnes trans et leur accès aux soins de santé. Ce reportage représente un glissement idéologique qui sert à légitimer les demandes transphobes de l’extrême droite, qui va attiser les violences envers les communautés trans, présentement de plus en plus ciblées. Radio-Canada et ses journalistes ont choisi d’entretenir une panique morale qui met la communauté trans, et en particulier les jeunes trans, en danger.
Ne nous laissons pas avoir par la prétention de neutralité journalistique et de « simple curiosité » : Pasquale Turbide et l’équipe de Radio-Canada ont choisi de laisser la parole à des pseudo-experts discrédités comme Lisa Littman et le SEGM. Leurs discours alarmistes sont déjà liés à une augmentation de la violence en Angleterre et aux États-Unis. La journaliste refuse de faire un réel effort de recherche et de compréhension de la réalité trans. Dans le reportage, elle utilise un langage transphobe et irrespectueux des communautés, mégenrant constamment les personnes trans. Même les passages qui se veulent reconnaître la réalité trans le font dans un cadre de psychiatrisation de la transidentité, invitant plus de contrôle médical de la part de l’état. Nous ne voulons pas du contrôle de l’état sur nos corps! Tout le monde devrait pouvoir expérimenter comme bon leur semble, quitte à faire des erreurs, sans avoir à demander la permission aux chiens de garde de l’état. Nous ferons de nos corps ce que bon nous semble, à tort ou a raison, n’en déplaise à l’état et à la petite bourgeoisie culturelle.
On voir clair dans l’agenda de Radio-Canada et son empressement à capitaliser sur cette panique morale pour augmenter ses cotes d’écoute. Comment expliquer autrement d’avoir fait venir Pasquale à Tout le monde en parle, sans lui opposer d’interlocuteur-ice informé-e pour opposer ses discours transphobes et sensationnalistes?
Comme toujours le capitalisme et l’état, face aux crises répétées et à la gronde populaire, cherchent à détourner l’attention des classes populaires. Plutôt que de parler de l’effondrement des services publics, de la crise du logement, de la crise climatique, de la montée du fascisme, de la violence policière ou du génocide en Palestine, il est plus facile de créer une menace imaginaire. La dérive fasciste de nos sociétés se sert de la communauté trans comme d’un bouc émissaire. L’état de plus en plus autoritaire et violent cherche a faire de nous un ennemi face auquel justifier son pouvoir et sa violence. Et ne vous attendez pas à ce qu’il s’arrête là tant qu’on ne les arrête pas.
Ces discours ont des conséquences réelles sur les décisions concernant l’accès aux soins de santé pour les personnes trans, mais aussi sur l’hostilité et la violence que les communautés trans vivent au quotidien, en particulier les jeunes trans. Ce n’est pas neutre que de répéter aux heures de grandes écoutes les discours poussés par l’alliance des forces d’extrême-droite. Quel honte de réentendre les propos de la droite religieuse, des néo-nazis, des masculinistes et du reste du camp de la haine sur une chaîne d’information publique! Ce reportage mensonger va encourager les mouvements haineux qui causent la mort des jeunes trans, par meurtre ou par suicide, comme c’est arrivé encore très récemment en Oklahoma. Quand un jeune trans tombera sous les coups de la transphobie, est-ce que l’équipe d’Enquête prendra ses responsabilités dans l’affaire? Feront ils une heure de reportage sur l’étendue des violence transphobes qui, contrairement à l’accès aux soins, tuent? Nous voyons clair dans leur jeu. Nous ne nous laisserons pas faire.
Il n’y a pas de « problème trans » mais il y a des trans qui ont un problème avec vous. En choisissant de participer à une campagne de désinformation et de propagande haineuse envers nos communautés, derrière un vernis pseudo-scientifique d’autant plus dangereux, peut-être ces journalistes se sont-ils dit que la communauté trans est une cible facile, peu nombreuse, isolée et multi-marginalisée.
Mais comprenez bien que nous ne sommes pas seul-es : Nos alliées sont nombreux-es et notre rage est profonde. Nous sommes déterminé-es et solidaires. Ce ne sera ni la première, ni la dernière fois que les queers bash back!
Entre 2017 et aujourd’hui, Montréal Antifasciste a régulièrement mentionné dans ses publications un néonazi local répondant au nom de Shawn Beauvais MacDonald. Nous n’avions toutefois jamais pris le temps de lui consacrer un article complet. Sachant que le principal intéressé n’a jamais remis en question ses convictions sous l’effet de l’attention négative qui lui a été portée, et que le bonhomme continue de traîner sa carcasse – habituellement décorée d’emblèmes néonazis – dans les rues de Montréal, nous avons décidé de corriger cette lacune. Cela est d’autant plus important que nous avons pris connaissance de ses récentes tentatives d’infiltrer les manifestations de solidarité avec la Palestine et d’autres espaces qui devraient pourtant être sûrs, inclusifs et solidaires des groupes et des personnes dont cet individu souhaite la destruction. Car, qu’on le comprenne bien, Beauvais MacDonald est un personnage éminemment raciste, misogyne, homophobe, transphobe et, bien sûr, d’un antisémitisme grossier.
Voici donc un portrait d’un des néonazis les plus visibles et les plus impénitents de la région de Montréal, qui a collaboré d’une manière ou d’une autre à la plupart des projets suprémacistes blancs et néofascistes du Québec de ces dernières années. Cet article a pour objet de démontrer que Beauvais MacDonald n’a rien d’une brebis autrefois égarée, aujourd’hui rentrée dans le droit chemin, mais qu’il reste à ce jour un militant suprémaciste blanc, idéologiquement fanatisé, endurci et irréformable. Nous espérons que ce dossier sera relayé largement, de sorte que ce méprisable individu ne puisse se sentir nulle part à l’aise dans notre ville.
[Note : cet article reprend en partie des renseignements déjà publiés au cours des dernières années.]
Avertissement : cet article contient des éléments de contenu à caractère raciste, misogyne, homophobe, transphobe et antisémite.
Une analyse subséquente des images captées lors de ces événements nous a permis d’apercevoir SBM dans la marche aux flambeaux du 11 août, scandant le slogan antisémite « Jews Will Not Replace Us! » [les juifs ne nous remplaceront pas]. Il est également aperçu, coiffé d’un casque de baseball rouge distinctif, dans les accrochages du lendemain, lors desquels, explique-t-il dans un épisode du podcast Alt-Right américain « Late Night Alt-Right », il a subi une blessure au coude.
SBM de toutes les sorties…
Nous l’ignorions encore à ce moment, mais nous avions déjà croisé son chemin à plusieurs reprises au cours des mois précédents. Les enquêtes sur SBM menées après Charlottesville ont révélé qu’il avait été membre actif de La Meute, la formation populiste islamophobe formée quelque temps plus tôt par des vétérans des forces armées canadiennes. Il en avait été pour un temps, semble-t-il, le responsable des médias sociaux anglophones. Il avait notamment participé au baptême de feu de La Meute à Montréal, le 4 mars 2017 (la première d’une série de manifestations islamophobes), où il s’était rendu avec plusieurs autres membres du petit groupe Alt-Right local dont nous n’allions découvrir l’existence qu’un peu plus tard (voir ci-dessous). À cette occasion, s’étant momentanément retrouvé du côté des contre-manifestant·es antiracistes avec un camarade, les deux larrons s’étaient fait montrer le chemin de la sortie à coups de pied au cul après avoir cru pertinent de traiter ces dernier·es de « race traitors » [traîtres à sa race]. Il expliquera par ailleurs à ses congénères nazis que son implication dans La Meute visait principalement à y propager une vision ethnique (raciste) du nationalisme.
Le 20 août 2017, quelques jours à peine après les événements de Charlottesville décrits ci-dessus, SBM marche à nouveau avec La Meute à Québec. Rappelons qu’à cette occasion, après avoir été coincé·es plusieurs heures dans un parking par la mobilisation antifasciste, les xénophobes n’ont pu que parader brièvement dans les rues de la Capitale, sous forte escorte policière. Il est à noter qu’à ce moment-là, les dirigeants de La Meute avaient affirmé aux médias que SBM avait été dûment expulsé de La Meute, ce qui n’était visiblement pas le cas.
Le 30 septembre 2017, il est à nouveau aperçu à une manifestation de l’organisation anti-immigration Storm Alliance près du poste frontalier de Saint-Bernard-de-Lacolle.
En décembre 2018, il est identifié dans notre article « Démasquer Atalante » comme étant membre de la section montréalaise de la formation fasciste.
Le 30 septembre 2019, il distribue des sandwichs dans le Quartier latin et le Village de Montréal. Quelques membres d’Atalante posent devant la station Berri et tentent d’intimider des clients du bar L’Escalier, sans grand succès.
Toujours en septembre 2019, SBM est nommé, parmi d’autres, dans notre nouvel article « Chasser Atalante pour qui travaillent les fachos? », qui dévoile ses emplois et son lieu d’étude. Il semble par la suite prendre ses distances d’Atalante, possiblement pour épargner la réputation de Raphaël Lévesque, qui se prépare alors pour son procès dans l’affaire Vice Québec. Il fait néanmoins partie de la garde rapprochée qui accompagne Lévesque à ses comparutions au tribunal.
On peut tout à fait imaginer que la présence de SBM ne faisait pas l’unanimité dans les rangs d’Atalante, puisque ce dernier est considéré dans son propre milieu comme un paquet de trouble dont la simple présence sulfureuse met ses camarades dans l’eau chaude. Quoi qu’il en soit, le procès de Lévesque ne se passe pas comme souhaité (l’affaire de l’agression au bar LvlOp de Québec venant assombrir le tableau), et le projet Atalante perd de la vitesse, jusqu’à s’immobiliser sans bruit quelque part durant la période pandémique.
Alt-Right Montréal
À l’hiver 2018, une fuite du salon de discussion « Montreal Storm » du groupe Alt-Right néonazi local (ARM) a mené à la révélation publique de l’identité de Gabriel Sohier Chaput, alias « Zeiger » et de plusieurs autres membres du groupe, dont SBM, qui y participait sous les pseudonymes « Bubonic » et plus tard « FriendlyFash ».
On déduit assez vite de l’analyse de ces discussions que SBM est au cœur du groupe et en est un des militants les plus actifs. Au cours de cette période, il a vraisemblablement participé à des campagnes d’affichage et de collage de matériel néonazi, notamment des affiches du designer graphique Patrick Gordon Macdonald, alias « Dark Foreigner », un prolifique propagandiste aujourd’hui accusé d’activité terroriste par la justice canadienne. La propagande de « Dark Foreigner » est notamment associée à la réédition du livre Siege, de James Mason, considéré comme la bible des mouvements néonazis contemporains, et à l’activité du réseau néonazi Atomwaffen Division, aujourd’hui reconnue comme organisation terroriste au Canada et dans de nombreuses autres juridictions.
SBM fait aussi la promotion du groupuscule identitaire ID Canada (issu des mêmes réseaux Alt-Right et modelé sur l’exemple européen de Génération identitaire et d’autres organisations similaires), qui est conçu par les militants racistes comme un véhicule plus « socialement acceptable » pour promouvoir le nationalisme blanc au Canada. Des collants ID Canada apparaissent notamment dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce, où SBM réside.
Sous le couvert de la fausse ironie qui caractérise les forums et babillards de l’Alt-Right extrémiste, SBM tient sur le serveur Discord « Montreal Storm » des propos agressivement racistes, antisémites et misogynes, de la manière la plus décomplexée. Comme pour confirmer sa participation à ce milieu, SBM était déjà sorti le 1er juillet 2017 dans le Vieux-Montréal avec d’autres membres du groupe Alt-Right Montréal, dont le leader présumé, Athanase Zafirov, alias « Date », pour haranguer une manifestation anticolonialiste.
À la même époque, il est encore présent sur la plateforme Facebook, où il publie d’abord sous son propre nom, puis plus tard, sous le pseudonyme « Hans Grosse », une référence à un pilote renommé de la Lufftwaffe (et à un personnage du jeu vidéo Wolfenstein).
Au printemps 2018, après la publication dans The Gazette d’une série d’articles sur Gabriel Sohier Chaput et le groupe Alt-Right Montreal (articles appuyés en grande partie sur le travail d’enquête de militant·es antifascistes), une campagne d’affichage sauvage est organisée dans le quartier NDG pour exposer SBM et son camarade Vincent Bélanger Mercure à la communauté. SBM est aperçu le lendemain en train d’arracher frénétiquement les affiches portant sa photo et ses coordonnées personnelles.
Lors des élections fédérales de 2019, SBM sert de garde du corps au candidat indépendant dans LaSalle-Émard-Verdun, Julien Côté Lussier, un employé d’Immigration Canada qui mène une double vie comme idéologue nationaliste blanc (il est notamment porte-parole d’ID Canada) et éminence grise du milieu Alt-Right local, où on le connaît sous le pseudonyme « Passport ».
Shawn Beauvais MacDonald sert de de garde du corps au candidat nationaliste blanc Julien Côté Lussier, à Verdun, le 19 octobre 2019.
Les années pandémiques
Durant la pandémie de COVID-19, on retrouve SBM sur la plateforme Telegram, où il sévit encore sous le pseudonyme « FriendlyFash ». Au moment d’écrire ces lignes, la « légende » de son profil est « Meine Ehre heißt Treue » [mon honneur s’appelle fidélité], soit la devise des SS. SBM est notamment actif dans le salon de discussion du groupuscule suprémaciste blanc local White Lives Matter Québec (WLM). On le retrouve ainsi avec d’autres membres de ce groupe dans une manifestation anti-mesures sanitaires à Montréal, le 22 janvier 2022.
Shawn Beauvais MacDonald dans la manifestations antisanitaire du 22 janvier 2022, avec d’autres membres du groupe White Lives Matter Québec.
En mars 2022, il discute dans le même clavardoir avec un autre indécrottable nazi, Sylvain Marcoux, au sujet du procès pour incitation à la haine de son ancien camarade Gabriel Sohier Chaput. Il fait aussi la promotion du réseau « Active Club » (AC), l’héritier direct du Rise Above Movement (RAM), affirmant explicitement la nécessité de développer une sorte de club de combat néonazi militant en vue de la guerre raciale à venir. SBM avait d’ailleurs déjà exprimé son soutien au fondateur du RAM et père spirituel des AC, Robert Rundo. Le Frontenac Active Club (section québécoise du réseau) voit d’ailleurs le jour à partir du groupe de discussion WLM Québec… Nous savons que le jeune Raphaël Dinucci, alias « Whitey », qui a sans doute subi l’influence directe de SBM, est aujourd’hui l’administrateur de la chaîne Telegram WLM Québec et un militant principal du Frontenac Active Club.
Shawn Beauvais MacDonald débat avec le néonazi Sylvain Marcoux au sujet de son « ancien chum », Gabriel Sohier Chaput.
Nous n’avons pas la preuve directe de l’implication de SBM dans le projet Frontenac AC, mais il est raisonnable de l’inférer, ne serait-ce que par ses publications passées. Il en est certainement une espèce de « parrain ». Un autre indice de sa participation est survenu le 21 avril 2023, lorsque des autocollants Frontenac AC sont apparus dans le Village de Montréal à la veille d’un événement antifasciste organisé juste à côté. Le soir même de l’événement, SBM a eu l’idée saugrenue de se pointer seul au bar Yer Mad, un établissement bien affiché à l’extrême gauche et proche du milieu antifasciste, sans doute dans le but d’en intimider la clientèle. Au lieu de cela, il en a été sorti sans ménagement par des antifascistes arrivés sur place peu après.
Des collants du Frontenac Active Club ont été collés dans le Village de Montréal en avril 2023, à la veille d’un événement antifasciste organisé à deux rues de là. Nous soupçonnons Shawn Beauvais MacDonald d’avoir participé à cette action.
Récemment…
SBM a régulièrement été croisé dans les rues de Montréal dans les derniers mois, systématiquement affublés de symboles néonazis, dont une épinglette de totenkopf qu’il porte au revers du col de son manteau. Quand il est reconnu, il réagit habituellement par la provocation, profitant de son physique imposant, en faisant des yeux méchants et en roulant des mécaniques comme un décérébré.
Shawn Beauvais MacDonald a fait l’objet de cette publication sur la page Facebook de Montréal Antifasciste en février 2021.Cette photo de Shawn Beauvais MacDonald nous a été envoyée par un sympathisant le 15 novembre 2023, soit moins de deux semaines avant la publication du présent article.
Récemment, SBM a été aperçu dans des manifestations organisées en solidarité avec la population de Gaza visée par la dernière opération de nettoyage ethnique menée par l’État d’Israël. Il importe de noter qu’il semble s’y présenter seul et marche dans la foule sans interagir avec quiconque, ce qui laisse croire qu’il n’a aucun contact réel avec le mouvement pro-Palestine. C’est dans ce contexte qu’il a notamment publié sur Instagram une longue diatribe antisémite après la manifestation du 13 octobre au centre-ville de Montréal… qu’il a modifié plus tard pour en ôter le passage explicitement raciste à l’égard des arabes. Il a d’ailleurs aussi changé son nom de compte Instagram de « FriendlyFash88 » à « Awakened_amalekite » (référence biblique aux ennemis du peuple israélite), dans la semaine du 20 novembre, c’est-à-dire tout récemment. (Il conserve toutefois le pseudo « FriendlyFash » sur Telegram, auquel il a acollé un icône nazi dans les derniers jours.)
Shawn Beauvais MacDonald a publié une diatribe antisémite sur son compte Instagram le 14 octobre 2023, au lendemain d’une manifestation de solidarité avec la Palestine. Notons qu’il a pris le temps d’éditer son commentaire pour en retirer un passage raciste et arabophobe.Shawn Beauvais MacDonald a changé le nom de son compte Instagram dans la semaine du 20 novembre, soit environ une semaine avant la publication du présent article.Shawn Beauvais MacDonald conserve le pseudo « FriendlyFash » sur Telegram, qu’il agrémenté d’un logo nazi dans les jours précédant la publication du présent article.
Il a été vu à nouveau dans la manifestation du 4 novembre, et cette fois-ci le service d’ordre de la manifestation l’en a expulsé à l’instigation de camarades antiracistes. Il a été vu et confronté à nouveau le 11 novembre, puis perdu de vue dans la foule. C’est en partie pour cette raison que nous avons voulu produire le présent article : pour communiquer à la communauté élargie et aux forces vives du mouvement de solidarité avec la Palestine l’intention de ce néonazi d’infiltrer leurs rangs. Il est hors de question que l’on permette aux adversaires du mouvement d’exploiter la présence de ce bozo isolé pour diaboliser le mouvement en entier. Il doit être expulsé sur-le-champ, et systématiquement, à chaque tentative d’infiltration des espaces de solidarité avec la Palestine.
Soyons parfaitement clairs : Shawn Beauvais-Macdonald est un suprémaciste blanc et un néonazi, jusqu’à ce jour. Il se fait encore voir en public orné de symboles néonazis; il n’est donc absolument pas raisonnable de croire qu’il est réformé, et toute prétention en ce sens devrait se heurter à une fin de non-recevoir. Il ne peut et ne doit être toléré dans aucun espace inclusif.
Multiplions les tracasseries…
Depuis qu’il est apparu sur le radar de la communauté antifasciste montréalaise, SBM a connu une série de revers et de désagréments. Il a d’abord perdu des emplois quand sa participation aux manifestations de Charlottesville a été révélée. Des affiches exposant ses activités ont été posées dans son quartier, il a reçu la visite d’antifascistes à son domicile (2045 rue Elmhurst, Notre-Dame-de-Grâce), puis des tracts le dénonçant ont été distribués au Centre intégré de mécanique, de métallurgie et d’électricité (CIMME), où il a été brièvement inscrit en 2019.
Shawn Beauvais MacDonald a reçu la visite d’antifascistes à son domicile en 2018; le drapeau nazi qui lui servait de rideau de salle de bain lui a été confisqué.Ces tracts présentant Shawn Beauvais MacDonald ont été distribué au Centre intégré de mécanique, de métallurgie et d’électricité (CIMME), où il a été brièvement inscrit en 2019.
Actuellement, nous savons que SBM s’entraîne régulièrement au Nautilus Plus de LaSalle (il fréquentait auparavant le Nautilus Plus du centre-ville). Des sympathisant·es nous communiquent régulièrement des renseignements à son sujet, notamment sur les lignes de bus où il est régulièrement aperçu. Nous n’avons bien sûr pas l’intention de le laisser tranquille. Si vous avez d’autres renseignements utiles à nous communiquer, notamment sur l’emploi actuel de Shawn Beauvais MacDonald, n’hésitez pas à nous joindre à alerta-mtl@riseup.net.
Pas de fachos dans nos quartiers, pas de quartiers pour les fachos!