Two years into the COVID-19 pandemic, a popular movement demanding an immediate end to vaccine mandates and other restrictions on daily life has shaken the Canadian state to its core. Its calls have deeply resonated with members of settler-colonial society in which public health measures and other forms of collective solidarity are seen by some as an affront to individual freedom and an undue hindrance on capitalist enterprise. While the movement is now facing the brunt of a massive wave of state repression, from which it is unlikely to recover, the contradictions it has exposed are only set to get worse.
Réfléchir aux menaces et aux perspectives face à une initiative d’extrême droite qui prend de l’ampleur
Les opposants à l’obligation vaccinale ont établi des campements de protestation à Ottawa et ailleurs au Canada, bloquant plusieurs routes qui traversent la frontière américaine. Des organisateurs d’extrême droite et d’anciens agents de police occupent des positions importantes dans ce mouvement, et la police a adopté une approche relativement passive jusqu’à présent ; il semble probable que le format actuellement testé au Canada apparaîtra bientôt ailleurs dans le monde. Dans le reportage détaillé qui suit, notre correspondant à Montréal explore la séquence des événements qui ont conduit à ces développements, examine les programmes des différentes forces qui se disputent le contrôle et réfléchit à ce que nous pouvons faire dans une situation où l’extrême droite a pris l’initiative.
En guise de préambule à ce reportage, il est nécessaire d’aborder brièvement la question de savoir si les manifestations contre l’obligation vaccinale à Ottawa représentent un mouvement pour la “liberté”, comme le soulignent les participants.
Le 25 octobre 2021, des agents du service de police de la ville de New York ont participé à la fermeture du pont de Brooklyn – où ils ont notoirement mis au pied du mur et arrêté les manifestants d’Occupy presque exactement dix ans plus tôt – pour protester contre l’obligation vaccinale des employés municipaux. Alors que nous croyons passionnément que les gens doivent être libres de prendre leurs propres décisions médicales et de déterminer leur propre tolérance face au risque, la police a en réalité revendiqué le droit d’exposer les personnes qu’elle arrête à un risque médical encore plus grand. Il s’agit d’un cas particulièrement clair qui montre que le mouvement contre l’obligation vaccinale n’est pas nécessairement un mouvement contre le contrôle de l’État ou en faveur de l’autonomie médicale.
Un authentique mouvement pour la liberté et l’autonomie médicale s’opposerait à toutes les forces qui contraignent les travailleurs à s’exposer au COVID-19 contre leur gré – en d’autres termes, il serait explicitement anticapitaliste. De même, un tel mouvement soutiendrait les étudiant·es en grève désireu·ses de déterminer elleux-mêmes les risques qu’iels souhaitent prendre.
Lorsque les manifestant·es anti-obligation vaccinale soutiennent que les frontières devraient être étroitement surveillées par des contrôles de passeport, mais décrient les passes vaccinaux comme étant du “fascisme” – lorsqu’iels se plaignent que la police vérifie les cartes de vaccination, mais soutiennent la police qui arrête et emprisonne des gens par millions – lorsqu’iels s’opposent à ce que le gouvernement impose des limites à l’activité économique, mais pas aux vastes disparités économiques qui obligent les travailleurs et travailleuses à faire face à des risques potentiellement mortels simplement pour payer leur loyer – iels ne prennent pas position en faveur de la liberté, mais changent délibérément de sujet, délaissant la critique des incursions du pouvoir de l’État dans son ensemble au profit de quelques détails de sa politique. Cela fait partie du processus par lequel une fausse opposition de droite contribue à rediriger les impulsions rebelles vers des ersatz de mouvements qui renforcent finalement les institutions étatiques.
Il est possible qu’un mouvement consistant, s’opposant au contrôle de l’État et prônant l’autonomie en matière de santé puisse servir d’espace dans lequel ceux qui s’opposent aux passes vaccinaux pourraient traverser un processus de politisation. Mais pour que cela soit possible, ces mouvements devraient favoriser une analyse systémique du pouvoir, alors qu’ils sont ici de fait dominés par des éléments de droite qui veulent limiter les horizons politiques. Il faut donc, au minimum, s’opposer et déborder les éléments de droite de ces mouvements – ce qui fait l’objet du texte suivant.
Les peurs paranoïaques concernant la vaccination et les théories du complot relatives au COVID-19 se rapportent entièrement à la question de la perte d’autonomie. Elles projettent de manière allégorique (et déformée) l’expérience économique et sociale réelle sur les corps. De cette manière, elles expriment et refoulent l’expérience, tout comme le font les rêves et, plus généralement, le langage de l’inconscient : ce n’est pas, paraît-il, que le petit commerçant ou le petit homme d’affaires a été écrasé par les économies d’échelle des grands États, mais plutôt qu’il existe un plan pour contrôler son cerveau, ou son corps, ou ses capacités de reproduction.
Parce que l’inconscient anti-vaccin est, comme toute forme d’irrationalisme de masse, l’exact opposé de ce qu’il croit être – parce que, en d’autres termes, c’est un mode de pensée profondément conformiste -, il est aussi un terrain particulièrement fertile pour le développement de formes de racisme, parmi lesquelles les éléments antisémites et sinophobes sont prédominants.
Commentaires fermés sur Nous vivons sous la Loi sur les mesures d’urgence
Fév172022
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Le 15 février 2022, le gouvernement de Trudeau annonce la mise en vigueur de la Loi sur les mesures d’urgence (ancienne loi sur les mesures de guerre dont le nom a changé en 1988). Pendant 30 jours, de nombreux privilèges seront accordés aux corps policiers et de nombreuses restrictions sur notre liberté sont désormais applicables. Que nous soyons d’accord ou non avec les mesures sanitaires, les convois de la liberté ou l’occupation à Ottawa, l’usage de cette loi est inacceptable et extrêmement dangereux.
Bien que son application vise, selon le gouvernement, à accorder de nouveaux privilèges à la GRC afin de contrecarrer le mouvement des camionneurs, la loi sur les mesures d’urgence accorde des privilèges partout au pays et n’empêche aucunement les corps policiers d’utiliser leurs nouveaux privilèges dans d’autres dossiers que ceux liés aux « convois de la liberté ». L’histoire démontre bien qu’accorder de nouveaux privilèges à la police mène nécessairement à des dérives aux conséquences catastrophiques.
Désormais, et pour un minimum de trente jours, « il est spécifiquement interdit d’organiser des rassemblements publics, qui prévoient nuire à la circulation des personnes et des biens, de perturber le commerce ou d’entraver les infrastructures essentielles ». Participer à de tels rassemblements peut se valoir une amende de 5000$ et une peine allant jusqu’à 5 ans de prison. Les personnes avec des statuts permanents pourraient aussi voir leur statut révoqué.
Il est nécessaire de réfléchir sur les motifs ayant mené à cet exercice de force. La police n’a pas eu besoin de l’usage de cette loi pour réprimer violemment toute mobilisation sociale de gauche depuis sa création, en 1988. La police n’a pas eu besoin d’une telle loi pour intervenir en escouades militaires dans les communautés autochtones résistant contre le colonialisme. Pourquoi maintenant? D’autant plus que les occupations à Ottawa ne semblent pas favoriser des tactiques de destruction de bien privés.
Il semble capital ici de souligner que le Canada est actuellement aux prises avec de nombreuses résistances face à son colonialisme, et que cette loi pourrait permettre une répression supplémentaire.
L’usage de cette loi crée un précédent que nous ne pouvons pas nous permettre de sous-estimer. L’occupation à Ottawa pourrait être faite par des écolos. Énormément de raisons nous permettent d’espérer un jour voir Ottawa et le parlement ravagés par les flammes. Nous ne pouvons ni accepter ni nous permettre que cette loi soit appliquée sans conséquence. Organisons-nous.
Pour ce premier épisode de la seconde saison du Verger au complet, on vous présente une entrevue avec Sandra Wesley, directrice générale de Stella, un organisme par et pour les travailleuses du sexe qui existe depuis plus de 25 ans et qui oeuvre à la défense des droits de ces travailleuses. Elle aborde notamment les relations entre la police et les travailleuses du sexe et les impacts des dernières lois sur leur travail.
MUSIQUE
Merci aux artistes qu’y nous ont donné la permission d’utiliser leurs chansons
Devon Michigan, « November 8th », tiré de l’album du même nom: https://devonmichigan.bandcamp.com/, utilisé avec la permission du groupe.
Les ogres de Barback, « Rue de Panam », tiré de l’album « Rue du temps » : https://lesogres.com/, utilisé avec la permission du groupe.
Claude L’Anthrope, « Les lumières ont tué la nuit », tiré de l’album du même nom : https://claudelanthrope.bandcamp.com/, utilisé avec la permission du groupe.
La deuxième saison du podcast « Le Verger au Complet » débutera bientôt !
Cette année il sera entre autres question de féminisme anticarcéral, de polices en territoires autochtones, de militarisation de la police et de justice transformatrice! En attendant, vous pouvez écouter ou réécouter les cinq épisodes (et demi) la saison 1 en cherchant « Le verger au Complet » sur votre plateforme de baladodiffusion favorite ou en visitant le site web.
Commentaires fermés sur Les frontières tuent. La négligence de l’ASFC tue: Décès au centre de surveillance de l’immigration de Laval – Rage et deuil collectif
Dimanche 30 janvier, nous avons appris avec rage et tristesse qu’un autre décès est survenu au centre de surveillance de l’immigration de Laval. Nous ne savons rien de l’identité de cette personne qui a perdu la vie sous la responsabilité de l’Agence des services frontaliers canadien. Tout ce que l’on sait c’est qu’elle était migrante et qu’elle était détenue à des fins administratives car elle n’avait pas les bons papiers. Elle en est décédée. Cette personne n’aurait jamais dû être détenue en premier lieu. Personne ne doit être détenu-e.
C’est une mort scandaleuse qui arrive à la suite d’une autre tragique nouvelle, celle d’une famille qui est morte de froid la semaine dernière en tentant de traverser la frontière au Manitoba. Les frontières tuent. La négligence de l’ASFC tue.
Ce décès n’est pas le premier dans les centres de détention gérés par l’ASFC et les compagnies contractantes (Corps des commissionnaires canadiens, Garda World) qui empochent les contrats pour s’occuper à tour de rôle « d’assurer la sécurité » des lieux. Depuis les vingt dernières années, c’est plus d’une quinzaine de personnes qui y ont perdu la vie, parfois par suicide mais aussi à la suite de mesures de contrôles corporels ou encore par manque flagrant de soin. L’ASFC laisse mourir les personnes qu’elle détient en ne leur portant pas assistance. Cette négligence se traduit par des décès évitables. Cette mort s’ajoute à la déjà très longue liste des personnes mortes aux mains de l’ASFC depuis les vingt dernières années.
Bolante Idowu Alo Abdurahman Ibrahim Hassan Fransisco Javier Roméro Astorga Melkioro Gahung Jan Szamko Lucia Vega Jimenez Joseph Fernandes Kevon O’Brien Phillip Homme non identifié Shawn Dwight Cole Homme non identité Joseph Dunn Personne non identifiée Sheik Kudrath Prince Maxamillion Akamai
Cela ne fait que quelques années que l’ASFC annonce publiquement lorsqu’un décès survient sous sa responsabilité. Cependant, les circonstances de ces décès demeurent souvent opaques et l’ASFC invoque la protection de la vie privée pour ne rien divulguer sur ses pratiques toxiques. Comme à l’habitude, ce sera un autre corps policier qui mènera l’enquête puisqu’il n’existe aucune entité d’enquête indépendante qui surveille l’ASFC. Sans surprise, des policiers enquêtent sur le travail de d’autres policiers. Pendant ce temps, le centre de détention demeure comme une boîte noire dont le public ne sait que très peu de chose et où la négligence, les abus et le manque de soin physique et psychique sont fréquents. Les dernières grèves de la faim entamées courageusement par des personnes détenues à Laval sont venues mettre en lumière les difficiles conditions de détention.
La construction d’une nouvelle prison et les investissements annoncés depuis 2018 pour “humaniser” le système de détention ne changeront rien. Que des arbres soient plantés dans le stationnement des visiteurs, qu’un cours de basketball et un module de jeux pour enfants soient ajoutés à la cour clôturée et cachée de l’œil du public n’y changent absolument rien; ces lieux sont des prisons où l’on enferme des personnes, des familles, des mineur-e-s. Nous les privons de liberté à des fins administratives. La détention n’est pas une mesure exceptionnelle mais bien une composante fondamentale de la matrice répressive qu’est le système d’immigration canadien.
Les conséquences de ces politiques migratoires répressives sont multiples et meurtrières. Aucune personne ne devrait être contrainte à vivre dans l’ombre en proie à l’exploitation, à la crainte d’une arrestation et d’un enfermement. La détention ne fait que favoriser l’exploitation de ces personnes en les cantonnant dans une économie informelle caractérisée par des abus et des violences et des conditions de travail médiocres.
Cette violence doit s’arrêter! Ça suffit! Pas un mort de plus!
Nous revendiquons l’ouverture des frontières et la libre circulation des personnes en quête de dignité et de justice. La libre circulation signifie avoir la liberté de pouvoir se déplacer, la liberté de pouvoir retourner et la liberté de pouvoir rester.
Arrêtons les détentions, les déportations et mettons en place un vrai programme de régularisation! Pas de prison, un statut pour tous et toutes!!
Commentaires fermés sur Invitation : 22.02.2022 – Vers la fin des mondes binaires – Réponse solidaire à la crise sanitaire
Fév042022
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Actions partout au Québec
Nous ne voulons pas de retour à la normale, nous voulons un vrai changement social !
Considérant qu’après presque deux ans de pandémie, plusieurs solutions proposées par les gouvernements sont superficielles et autoritaires :
… Ils démonisent les personnes non-vaccinées;
… Ils considèrent les gens individuellement responsables de la pandémie et de ses conséquences;
… Ils mettent en place le passeport vaccinal qui contrôle nos corps et nos déplacements;
… Ils obligent le code QR qui nous habitue à la surveillance informatisée;
… Ils favorisent l’enrichissement des compagnies pharmaceutiques par la protection des brevets sur les vaccins;
… Ils s’accaparent des doses de vaccin plutôt que de proposer une distribution égalitaire dans le monde;
… Ils adoptent un couvre-feu qui vulnérabilise les personnes déjà marginalisées et qui accroît les pouvoirs policiers;
… Ils défendent le mode de vie des familles nucléaires hétéro, cis-centristes et aisées pour qui l’impact du couvre-feu est minime.
Considérant que les problèmes sociaux qui étaient déjà là ont été exacerbés par la crise sanitaire :
…changements et injustices climatiques
…crise du logement, inflation et augmentation des écarts entre les riches et pauvres
…violence conjugale et de genre
…anxiété généralisée et troubles chroniques de santé mentale
… racisme systémique et colonialisme
(À vous de compléter la liste…)
Considérant que les politiques néolibérales ont sérieusement fragilisé notre système de santé.
Considérant que l’extrême-droite profite de la situation pour faire avancer son agenda pro-pipeline, raciste et misogyne.
Considérant que la gestion de la crise sanitaire se base et encourage des binarités dont nous ne voulons plus : homme-femme – bien-mal – riche-pauvre – malade-sain – valide-invalide – civilisé-primitif – (et bien d’autres)
Considérant qu’on cherche le trouble et le plaisir.
Mobilisons-nous pour :
• Abolir le capitalisme et le colonialisme
• Mettre fin aux binarités
• Transformer et se réapproprier le système de santé
• Refuser la société de surveillance
• Stopper l’écocide
• Solidariser nos communautés
Nous appelons à une multiplicité d’actions pour le 22 février 2022.
Notre objectif : reprendre la place publique de toutes les manières – soyons visibles!
Chant – Théâtre invisible – Memes – Vidéos – Murales – Bannières – Casseroles – Manifestation ET TOUTES LES ACTIONS AUXQUELLES VOUS PENSEZ!
Commentaires fermés sur Contre le deuxième couvre-feu aussi
Jan212022
Soumission anonyme à MTL Contre-info
Ce que vous avez peut-être manqué
Depuis le début de la pandémie de COVID-19, le gouvernement du Québec a imposé deux couvre-feux à sa population. Le premier a été annoncé le 6 janvier 2021 et est entré en vigueur le 9 janvier ; il a duré, avec diverses modifications et assouplissements, jusqu’au 28 mai 2021. Le second couvre-feu a été annoncé le 30 décembre 2021 et est entré en vigueur le lendemain, à la veille du jour de l’an. Un peu plus d’une semaine plus tard, le 7 janvier 2022, une contribution anonyme intitulée « Le couvre-feu fait-il l’unanimité ? » dont l’intégralité figure ci-dessous, est apparue sur ce site :
Depuis le 31 décembre 2021, un couvre-feu est imposé entre 22h et 5h au Québec.
Je suis fermement en désaccord avec cette mesure oppressive et je suis certain.e que beaucoup d’entre vous le sont aussi. Cependant, il n’y a eu aucun article critiquant le couvre-feu depuis qu’il a été réinstauré. J’aimerais que nous soyons plus nombreux.ses à nous opposer à cette mesure.
Nous avons assisté à une augmentation importante des mesures autoritaires dans la province. La santé publique a été utilisée comme un prétexte pour accroître le pouvoir de l’État.
Unissons-nous et combattons l’État policier !
Depuis cet appel, il n’y a eu aucun autre message sur MTL Contre-info au sujet de ce second couvre-feu, ni aucune résistance anarchiste visible et organisée. La « résistance » qu’on a pu voir à Montréal – c’est-à-dire les dizaines de personnes qui ont défié le couvre-feu et se sont rassemblées devant les bureaux de Legault à Montréal le soir du 1er janvier, ainsi qu’une manifestation de jour bien plus importante le 8 janvier – n’est pas du ressort de MTL Contre-info. Ces événements (les organisateurs, les personnes qui se sont présentées, la signalisation, etc.) n’étaient ni anarchistes ni anti-autoritaires. Ils semblent plutôt s’inscrire dans les tendances politiques dominantes qui s’opposent non seulement au couvre-feu au Québec, mais aussi aux mesures de mitigation de la pandémie quelles qu’elles soient, dans toutes les provinces du Canada et ailleurs dans le monde (notamment aux États-Unis, en Australie et en Chine). En termes clairs, je veux dire que les personnes qui ont manifesté étaient en grande partie des anti-vax, des nationalistes et des timbrés. On y reviendra plus tard.
Le jeudi 13 janvier 2022, le gouvernement a annoncé dans une énième conférence de presse que le couvre-feu prendrait fin le lundi 17 janvier. Je sais pertinemment qu’il y avait des initiatives de brassage pour s’opposer au couvre-feu de façon proprement anarchiste, mais elles ne seront évidemment pas mises à exécution, à présent. Il semble que ce deuxième couvre-feu se sera déroulé sans intervention anarchiste (publique). C’est un contraste avec la période du premier couvre-feu au début 2021, quand il y a eu au moins trois manifestations à Montréal – le 16 janvier, le 18 avril et le 22 avril 2021 – organisées sur le thème de l’opposition aux « solutions policières à la crise sanitaire ». De plus, au moins quelques anarchistes ont participé à la manifestation informelle, qui s’est transformée en une émeute montréalaise classique le soir du 11 avril 2021, date à laquelle le couvre-feu en « zones rouges » (qui avait été assoupli le 17 mars) a été renforcé. À part ça, quelques articles ont été publiés sur MTL Contre-info, dont l’essai très clair « Contre le couvre-feu » du 10 janvier 2021.
Le deuxième couvre-feu
J’ai tendance à penser qu’une des raisons pour lesquelles « il n’y a pas eu de messages critiquant le couvre-feu depuis qu’il a été rétabli », c’est qu’il n’y a rien de nouveau à en dire.
Il y a le fait qu’il est moins odieux de deux heures par rapport à celui de janvier dernier. Ce détail a son utilité pour les défenseurs du gouvernement, mais pas pour nous.
Et puis nous avons été très peu avertis de l’imminence d’un couvre-feu – moins que l’année dernière, en fait.
le gauchisme et la vision rationaliste qui en découle nous entraînent à voir le monde de manière irréaliste. Cela génère de fausses attentes et de faux critères pour évaluer nos luttes. Le nœud du problème est que nous ne sommes pas la valeur abstraite que le capital et la gauche voient en nous : nous sommes des êtres vivants avec nos propres rythmes autonomes qui se heurtent constamment aux stratégies managériales et à la mécanique sociale. […] l’obligation gauchiste de produire du mouvement nous prive de l’hiver. Tous les gens en lutte ont besoin d’un temps pour affronter leur désespoir, panser leurs plaies et se replier sur les liens réconfortants de l’amitié. Ne se rendant pas compte de cette nécessité animale, bien des anarchistes s’épuisent à essayer de maintenir un rythme constant, ou alors ils confondent ralentissement et affaiblissement, et laissent aller leurs acquis. Mais l’hiver peut être un moment important pour se retrancher, poursuivre les projets qui nous soutiennent (et apprendre à les reconnaître), pour tester la force de nouvelles relations et sonder la profondeur de notre communauté de lutte.
Je cite ces extraits car on ne saurait trop insister sur le fait que c’est le mois de janvier à Montréal, c’est-à-dire que l’hiver n’est pas qu’une métaphore. Mais surtout, la critique implicite du billet initial sur MTL Contre-info me semble révélatrice de cette même « obligation gauchiste de produire du mouvement », indépendamment de son utilité ou des circonstances plus larges. Il est évident que, dans une certaine mesure, le couvre-feu a diminué notre capacité à nous rabattre sur nos amis ou à tester de nouvelles relations car il devient plus difficile de se rencontrer. Mais ce couvre-feu, vraiment, n’est qu’une infime partie du plus grand ensemble de restrictions sur les rassemblements et la vie sociale normale.
Le couvre-feu s’est également avéré relativement facile à défier, pour ceux qui veulent bien essayer. Je connais personnellement beaucoup de personnes qui l’ont régulièrement bravé l’an dernier, et un peu aussi cette fois-ci, en traversant la ville en voiture ou en serpentant dans les ruelles de leur propre quartier, généralement pour aller et venir de chez des amis ou entre divers lieux de rencontre à l’extérieur – parce que bien sûr, il n’y a pas vraiment d’autre endroit où aller. Ce genre d’activité est loin d’être réservée aux anarchistes, mais nous avons beaucoup moins de chances d’être arrêté.e.s par la police en allant d’un point A à un point B après le couvre-feu que, disons, des adolescent.e.s de Montréal-Nord ou des juif.ve.s orthodoxes d’Outremont.
Il pourrait être intéressant d’organiser une contestation collective plus importante, mais bien sûr, comme dans le cas du 11 avril 2021 ou de la manifestation des anti-vax près du Stade olympique le 1er mai, il faudrait alors s’associer à des gens dont la vision de l’éthique et de la réalité de base se situe bien au-delà de ce que la plupart des anarchistes nord-américain.e.s jugeraient acceptable. Peut-être que si le gouvernement n’avait pas, de façon prévisible, annulé le couvre-feu relativement rapidement, nous en serions à nouveau là, et il y aurait des choses à dire sur le partage de l’espace avec de telles personnes. Mais de manière réaliste, cela n’arriverait qu’au printemps, comme l’an dernier. Il est peu probable que cela se produise maintenant – bien que tout soit possible, et il est clair que le gouvernement continuera (probablement) à imposer un couvre-feu à chaque nouvelle vague de covid.
On ne peut pas satisfaire tout le monde
Depuis le début de la pandémie, il existe un courant d’anarchistes qui rejettent en bloc toutes les mesures visant à atténuer la propagation du covid – pas juste celles qui donnent les coudées franches à la police, mais tout, y compris les vaccins. Le projet Nevermore est l’exemple le plus marquant de ce courant dans le contexte canadien. Personnellement, je suis d’accord avec les vaccins et beaucoup d’autres mesures qui me semblent sensées, et je ne vois pas de différence effective entre ces anarchistes (qui, dans de nombreux cas, sont des personnes impliquées dans nos scènes depuis des années) et le courant principal de la droite anti-vax. J’ai personnellement aidé à organiser une manifestation contre le couvre-feu le 18 avril 2021, parce que je sentais qu’il était nécessaire, à ce moment-là, de créer un nouveau pôle autour duquel rallier une résistance au couvre-feu autre que celle des anti-vax. Je ne pense pas que ça ait été une réussite spectaculaire, mais je ne regrette pas d’avoir essayé.
L’autre jour, j’ai pu avoir un accès privilégié à un groupe Signal composé de plus de 30 anarchistes et autres radicaux, où l’on discutait de certains événements du printemps 2021, notamment du 11 avril et de la manifestation du 18 avril. Une personne y affirmait :
De jeunes anarchistes et gauchistes ont organisé une deuxième manifestation contre le couvre-feu se distinguant de celle qui avait eu lieu plusieurs nuits auparavant et dont ils ont reconnu tardivement qu’il s’agissait des habituels bobards de droite sur la libre-entreprise et qu’elle n’avait vraisemblablement rien à voir avec les « jeunes Noir.e.s ». On a donc eu une « vraie » manifestation anarchiste contre le couvre-feu. Quelques jours plus tard [en fait, plus d’un mois plus tard], le gouvernement a de toute façon annulé le couvre-feu et les anarchistes et autres gauchistes sont retournés dormir, retrouver « leur » vie.
Ce commentaire (un peu épuré pour des raisons de lisibilité) n’a suscité aucune réaction de la part des autres participant.e.s.
C’est peut-être déplacé, mais je ressens le besoin de remettre un peu les pendules à l’heure. Personnellement, je suis toujours partant.e pour une bonne vieille émeute montréalaise – à peine cohérente politiquement et à laquelle participe un large éventail de la société. Et je déteste Rebel News, qui étaient présents le soir du 11 avril 2021, et ont un peu brassé à Montréal dans les jours précédant l’événement. L’un n’empêche pas l’autre. Il est possible d’avoir apprécié l’émeute du 11 avril (ou d’y avoir participé) tout en critiquant ses limites et son absence de but. Il n’est pas nécessaire d’embarquer à la suite des journalistes et des politiciens qui, pour les besoins de leurs propres agendas, ont déformé cet événement en le présentant comme une affaire d’hurluberlus anti-vax.
Il se trouve qu’on avait planifié la manifestation du 18 avril avant que le 11 avril ne se produise. Mais même si ça n’avait pas été le cas, je pense qu’il aurait été légitime – et tout à fait dans la lignée des efforts faits par les anarchistes au fil des ans pour maintenir une culture de combat de rue vivante et dynamique dans cette ville – d’organiser une opportunité collective pour affronter la police et/ou peut-être défier le couvre-feu (s’il durait jusque là) en cohérence avec nos idées et nos façons de faire. En d’autres termes, pas de Rebel News, pas de drapeaux nationaux, pas de prédicateurs chrétiens, et pas de dénonciations stupides et multiples des masques et des vaccins. Mais combattre la police ? Avec plaisir, merci !
Pour moi, il est tout à fait valable de critiquer les anarchistes d’ici de ne pas être parvenu.e.s à répondre à la pandémie de manière plus holistique, en développant notamment des pratiques plus approfondies de soutien mutuel – bien que je me demande où cette critique est censée aller et comment elle est peut être utile. Le vrai problème, c’est que nos mouvements ne sont juste pas aussi puissants qu’on voudrait, et nous n’avons pas réussi, tout au long de la pandémie, à développer des stratégies ou des pratiques qui pourraient nous aider à construire le type de pouvoir dont on a besoin pour réaliser nos objectifs à court ou long terme. Dans une large mesure, il s’agit d’un échec à surmonter l’isolement. La compréhension de base des faits, qu’il s’agisse des vaccins ou des caractéristiques démographiques des émeutiers, varie manifestement d’un silo d’information en ligne à l’autre. Il n’y a sans doute rien de bon dans tout ça.
J’aimerais qu’on s’améliore, car il y a bien des chances que la pandémie et l’état d’exception qu’elle a engendré soient loin d’être terminés.
Ici comme ailleurs dans le monde, la Police joue un rôle déterminant en réprimant les luttes anticoloniales, autochtones, environnemental, immigration, etc. La lutte et résistance des premières nations autochtones à travers la planète seront toujours présentes au front pour contrer les intérêts capitalistes et seront appuyés par des mouvements et de liens de solidarité internationales.
Le thème de l’année 2022 sera : « La police c’est colon en criss » – « shutdown the colonial police ».
Nous faisons donc appel à vous pour l’écriture de textes, de dessins, de bd, de photos, de poèmes ou toutes autres idées pour le journal « État Policier » de cette 26e édition de la JICBP. Vous pouvez aussi nous envoyer vos textes ou des liens existants déjà publiés.
Les textes pour le journal devront contenir un maximum de 2 pages et peuvent être écrits en français, en anglais ou en espagnol. Les auteurs-E-s qui tiennent à ce que leurs textes soient traduits doivent nous le mentionner dans un délai raisonnable afin qu’on puisse trouver des gens pour la traduction.
Aussi, nous vous invitons à nous envoyer des images pour accompagner votre texte, si vous le désirez. Les images ne seront pas comptabilisées dans les deux pages.
La date de tombée finale pour le contenu du journal papier est le 1er février 2022.
Veuillez soumettre vos textes et autres contributions à l’adresse suivante : cobp@riseup.net