Montréal Contre-information
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Avr 232015
 

De Groupe de soutien

Mercredi dernier, le 15 avril, mon ami s’est fait arrêter à l’UQAM en soirée. Ce sont des gardas qui l’ont suivi dans les couloirs. Illes ont contacté les flics qui sont venus l’arrêter. Il a passé la soirée au Centre opérationnel. Il devait être mis en liberté à la cour municipale, mais la procureure était intraitable, son enquête sur remise a été remise au lendemain. On l’a envoyé passer la nuit à Rivière-des-prairies (RDP), une prison pour hommes au nord de Montréal. Le lendemain, vendredi, nous avons organisé une vigile de soutien devant la cour municipale et avons passé la journée à attendre que vienne son tour. Nous étions une trentaine. Au terme de son enquête sur remise en liberté, le juge s’est opposé à le libérer avant son procès. D’ici là, il devra purger une peine sans procès à RDP. Le juge a invoqué comme argument principal que s’il libérait notre camarade, cela nuirait à l’opinion publique et que la population n’aurait plus foi en notre magnifique système judiciaire. Il a également parlé que la confiance du public en la gestion de la justice qu’il importait de préserver, concernait la “population bien informée”. En cela, il faisait référence à ceux et celles qui lisent les journaux et écoutent la télévision tous les soirs, bref un hymne aux médias de masse. Au contraire de ce que le juge a affirmé, il paie le prix individuellement d’un mouvement collectif déjà fortement réprimé, donc l’emprisonnement de notre camarade n’est rien d’autre que politique.

Avec la violence juridique et politique en cours à l’UQAM dans le contexte de l’injonction, avec le profilage incessant auquel font face les étudiant-e-s et leurs allié-e-s, avec l’état policier touchant tous les aspects de nos vies, nous ne pouvons que nous révolter de cette situation. Il est clair que notre camarade sert présentement de cas exemplaire pour faire régner la peur et taire les voix dissidentes. Nous ne croyons pas au système de justice comme il est, mais il est facile de se sentir seul-e ou impuissant-e face à sa toute puissance hégémonique. Nous reconnaissons que nous sommes dans une guerre où deux gangs aux intérêts divergents et irréconciliables s’affrontent, et donc, nous devons nous organiser et nous protéger davantage.

Sa remise en liberté a été refusée pour cause du maintien de la confiance du public dans l’administration de la justice. C’est un non sens absolu quand on pense qu’à ce moment, aucun média de masse ne parlait de son arrestation. Dans le contexte actuel, garder cette histoire le plus loin possible des médias et préserver son anonymat augmente les possibilités qu’il puisse être remis en liberté et que soit invalidée la cause fallacieuse qui le maintient présentement derrière les barreaux: une frayeur présumée de l’opinion publique. C’est pourquoi nous pensons qu’il est important de ne pas personnaliser le débat, afin de le protéger face au cirque médiatique et possiblement avoir une chance de le faire sortir plus rapidement de prison.

Ce n’est pas un martyr, ce n’est pas un héro, ce n’est pas un leader, ce qui lui arrive aurait pu arriver à n’importe qui d’entre nous.

C’est pourquoi nous appelons à la solidarité active sans dissociation ni condamnation avec toutes les personnes criminalisées par l’État, en tout temps et dans le cadre du mouvement de grève actuel, que ce soit en raison d’actions de perturbation, de manifestations ou dans les situations d’injonction. Cette solidarité s’exprime par une responsabilité collective vis-à-vis du sort de chacune et chacun. Dénoncer la criminalisation par des manifestations ou des vigiles, s’opposer aux arrestations ciblées et à la délation, apporter un soutien légal, financier et moral aux arrêté-es (envoi de lettres, levée de fonds) et exiger l’abolition de leurs chefs d’accusation, surveiller les pratiques de la police, soigner les blessé-es, se serrer les coudes. Tout ceci constitue les bases d’une culture de lutte qu’il faut entretenir et développer. On tente de présenter comme plus légitimes les tendances qui exigent le moins possible, qui sont les moins dangereuses pour le maintien d’un semblant de statu quo afin de diviser le mouvement et d’isoler les tendances plus radicales de celles plus réformistes. Nous croyons qu’au contraire c’est seulement par la continuité du mouvement, l’expansion et l’intensification de celui-ci que nous pourrons aspirer à une société plus juste. La répression policière et ses conséquences à court, moyen et long terme est une attaque sans commune mesure avec les actions qui ont ponctué le mouvement en cours. Ne cédons rien.

Vous pouvez aussi écrire une lettre de soutien à notre ami que vous pouvez déposer soit à l’Insoumise (coin Ontario/St-Laurent), au café Aquin de l’UQAM, au local de l’AFESH ou poster à la Déferle qui le transfèrera à notre ami. Toutes les formes de lettres sont les bienvenues (dessins, poèmes, lettres), mais elles doivent être manuscrites (à la main). Le groupe de soutien peut se charger de mettre un timbre et des enveloppes vides seront à côté des boîtes si vous n’en avez pas.

Vous pouvez aussi contribuer à la levée de fonds, écrivez-nous pour plus d’infos.

Une vigile aura lieu à la cour municipale le 29 avril à 9h30.

Tous les prisonniers et toutes les prisonnières sont des prisonnièr.es politiques!
À bas toutes les prisons!

des ami.e.s

Avr 212015
 

De Anti-dev

Notre traduction de « A Blast From The Recent Past », une entrevue avec un gréviste anarchiste sur son expérience et sa perception de la grève étudiante de 2012 au Québec, publiée dans le récent numéro de Fire to the Prisons (« Feu aux prisons »). On trouve que l’interview fait un bon retour critique d’ensemble en amenant une perspective historique plus large de la grève éudiante par ici (du moins depuis les derniers 10 ans… ’96 commence à être déjà une autre époque). À la lumière de la tournure plutôt dramatique des événements récents dans le milieu étudiant, on a cru bond de rafraîchir la mémoire de certain-es et éduquer d’autres sur le passé de cette lutte, surtout sur toutes les bonnes réalisations laissées derrière sur le chemin tortueux de la révolte, pouvant être reprises comme tous ces trucs cools et parfaitement réutilisables qu’on trouve souvent sur le bord des routes d’UNE SOCIÉTÉ DE MERDE QUI VEUT SIMPLEMENT PAS S’ARRÊTER… même avec des votes de grève. Surtout pas avec des votes de grève.

(D’autres textes de l’intérieur du Printemps 2015 seront retransmis ici prochainement. Vous êtes aussi invité-es à nous filer vos propres textes si vous avez des réflexions, sentiments, critiques, questionnements à communiquer.)

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En février 2012, lorsque le mouvement Occupy s’atténuait, une grève a éclaté contre les mesures d’austérité dans le système d’enseignement supérieur au Québec. Se voyant mpêché d’occuper des immeubles comme il a fait en 2005, le mouvement étudiant a développé une stratégie d’interruption économique: bloquer les entreprises, interrompre des conférences et des événements touristiques, et propager le chaos dans les rues. À son sommet, il a entraîné un désordre surpassant tout mouvement en Amérique du Nord depuis une génération. Ce qui suit est un interview avec Steve Duhamel, alias « Waldo », un ex-étudiant et Québecois frustré.

Feu aux prisons : Qu’est-ce que c’était le contexte pour les soulèvements, mobilisations et émeutes massives qui ont éclaté à Montréal en 2012 ? Qu’est-ce qui a eu lieu avant ces événements et les a propulsés?

Waldo : Le contexte initial a toujours été la tension croissante entre les étudiants et le gouvernement sur la question de la hausse des frais de scolarité et l’idée plus large de ce que devrait être une éducation publique. C’est assez ennuyeux, mais il s’améliore. Nous avons toutes et tous su, avec deux années d’avance, que cette hausse était prévue, et au fil des mois et années précédents il a eu diverses actions et manifestations pour avertir le gouvernement que ceci ne passerait pas. Ce gouvernement, au pouvoir déjà pendant 9 années, s’en fichait de ces manifs et a décidé avec arrogance de continuer d’avancer ses plans. Ils croyaient qu’aucune opposition  »politique » (au sens de la politique officielle et traditionnelle) pourrait les arrêter, quoi qu’ils faisaient, et que leur grande légitimité leur permettrait de réprimer toute  »politique de la rue » qui ne reconnaîtrait pas son autorité.

Pour offrir un bref survol du contexte, disons que ce qu’on appelle la société est devenue plus polarisé que jamais, parce que les deux partis politiques qui gouvernent le Québec ont un programme néolibéral de droite et qui se faisaient prendre à tour de rôle à faire des réformes de merde pendant 30 ans pour préserver leur maudite croissance économique. Le parti d’opposition du Parti Québecois (PQ) se présentait comme le défenseur des francophones contre l’hégémonie culturelle anglo-saxonne, mais ils avaient perdu quelconque légitimité qu’ils avaient à force de faire la même merde que les fédéralistes du Parti Libéral Québecois (PLQ). Donc les mouvements sociaux se sont peu à peu éloignés du PQ, qui lui-même est né de l’agitation des années 1960 (et sa récupération). Pendant longtemps, ceci a contribué à nuire à tout soulèvement et à justifier ce que certains traitent de collaboration de classe entre les patrons et les pauvres. Mais à présent, la PQ a du malheur à convaincre le public québécois que l’état pourrait bien les servir. Une hausse des frais a la dernière fois mené à une grève étudiante générale en 1996 pendant que la péquiste Pauline Marois (la même qui sera élue suite au mouvement de 2012) était ministre de l’éducation. Qui aurait pu croire en elle quand elle est revenue pour opposer Charest ?

Tandis que le PQ dissimule son agenda sous un mince verni social-démocrate, le très ‘libéral’ PLQ s’en fout des pauvres et ne s’occupe pas de fausses consultations publiques avant de vendre la province aux promoteurs, à les sociétés minières, pour la fracturation, et le reste. Le Parti Libéral du premier ministre Jean Charest est revenu au pouvoir en 2003 et aussi tôt qu’en 2005 une grève étudiante importante a lutté contre son plan de couper une grande partie des programmes de bourse (qui étaient censés être remplacés par des prêts, donc encore de la dette). La grève de 2005 était impressionnante dans ses formes d’action, et son esprit était toujours présent pour les participants à la grève de 2012 (par exemple, la grève de 2005 était beaucoup plus importante que ce qui c’est produit en Californie en 2009, mais les événements au Chili pendant ce temps ont inspiré certains). Dès le début du mouvement, beaucoup d’étudiants se méfiaient des fédérations réformistes et même des plus militantes, comme l’ASSÉ. Grand nombre de gens savaient également que la force de la grève venait de la multiplication incontrôlable de diverses perturbations économiques et institutionnelles. Et les actions et discours significatifs du mouvement ne provenaient pas de l’idéal ultra-démocratique de l’unité. Cela entraîne votre deuxième question.

FP: Quelle était la relation entre les anarchistes et groupes autonomes aux tendances insurrectionnelles et les associations étudiantes ?

Waldo: Il n’y avait pas une seule attitude parmi les anarchistes envers les fédérations. Ils-elles se sont tous-tes mises d’accord de critiquer même l’ASSÉ (la fédération la plus militante qui réclame l’éducation gratuite et une sorte d’autogestion) pour ses revendications réformistes, même les insurrectionnelles trouvaient ça cool que l’ASSÉ existait, ou moins la CLASSE (la coalition de l’ASSÉ et divers autres syndicats indépendants) parce que cela rendait plus facile la tâche d’organiser une mobilisation à grande échelle, de créer l’événement qu’on pourrait ensuite dépasser. D’un côté, certains anarchistes croient vraiment que le modèle de la démocratie directe dans les assemblés syndicales des fédérations est valide, qu’il ne faut qu’aller plus loin, et que le problème c’est le manque de conscience ou de perspective radicale de ses adhérents. Ils-elles croient qu’il est question de la radicalisation de ces milieux et de critiquer leurs discours sur la non-violence ; beaucoup d’entre eux souhaitent qu’il n’y eut pas de contradiction entre le black bloc et les fédérations. Il y en a aussi qui rêvent de la démocratie directe, mais qui sachent qu’on ne peut rien attendre aux fédérations à part la trahison, donc nous devrons établir nos propres espaces et assemblés, s’organiser hors les syndicats du genre  »formule Rand » dont on ne peut pas se débarrasser.

Les tentatives d’établir de telles assemblés parallèles ont largement fini en échec, en 2012, à l’exception d’une courte période à la fin de mai et en juin, quand des gens avaient de grandes assemblés de quartier, nés des manifs de casseroles énormes contre  »la loi spéciale ». De l’autre côté, des autres tendances anarchistes ne croient ni que les syndicats pourront être la base d’une société anarchiste à venir ni à toutes ces mythes de la démocratie radicale. Tandis que certains s’impliquent à une perspective nihiliste d’affrontement, contre toute formation et toute revendication possible, d’autres pensent qu’il n’a jamais été question de soutenir ou s’opposer aux syndicats, qu’il ne faut simplement jamais croire en eux et que nulle solution ne proviendra d’eux, ni de l’école en générale. Par contre, ils-elles posent la question de comment s’engager avec eux et voir le potentiel, au delà du moralisme et de la pureté radicale. Comment peut-on se composer avec les fédérations, s’ils existeront en tout cas ? Peut importe, les fédérations doivent être considérées comme des étrangères, avec qui on ne peut pas s’identifier mais où on peut intervenir, se retrouver, et les utiliser d’une manière ou d’une autre.

FP : Avant le début des grandes manifestations de rue, les étudiants-es ont occupé des immeubles. Comment est-ce que ces actions ont pavé le chemin pour la suite ? Est-ce que ces occupations initiales étaient influencées par les occupations étudiantes aux États-Unis et ailleurs ?

Waldo : En effet, je ne dirais pas que 2012 se distinguait par des occupations, à l’exception de la rue elle-même. Quelques actions impliquaient le barrage des écoles ou d’édifices publics, la perturbation des centres de finance et autres, mais aussi bien que je le sache, aucune des écoles en grève n’étaient vraiment occupées. Le premier jour de la grève, des gens se sont emparés du célèbre CEGEP du Vieux-Montréal (un collège pré-universitaire au centre-ville), dont les occupations étaient considérées le bastion du mouvement étudiant dans les grèves étudiantes précédentes. Mais cette fois-ci, des centaines de robo-flics entièrement équipés sont arrivés tout de suite pour rappeler aux jeunes que la révolution, ce n’est pas une partie de plaisir et ils les ont foutus dehors. Environ 45 personnes étaient incarcérés et bannis légalement des manifs pendant plusieurs mois. Les autres se dispersaient à force des grenades assourdissantes et de cayenne. Le collège fut ensuite verrouillé pendant les six mois de grève suivants. *

Ce qui n’est pas à dire que les gens ne voulaient pas occuper ou qu’il ne s’agit pas d’une partie de notre mythologie, mais en fait les gens n’utilisaient même pas les espaces universitaires pour réunir ou organiser le jour. En 2005, plein de gens organisaient des sleep-ins sur les divers campus et de préparer des tonnes de nourriture pour soutenir les occupations et permettre aux gens de faire front commun en première ligne. En 2012, la grève à surtout eu lieu dans les rues, les gens toujours en mouvement, défilant à l’infini ou jusqu’à ce que leurs feux finissent par se consumer – quand ces feux n’arrivaient pas à consumer d’autre chose. Oui, il s’agissait d’une occupation de la rue, mais j’ajouterais que c’était une occupation mobile en deux sens: 1) Il n’y avait que quelques tentatives de s’emparer d’un espace extérieur public et de la garder, et elles ne visaient jamais à durer plus long que quelques heures (j’ai entendu parler d’un camp ‘occupy’ en dehors de l’université de Montréal, mais ça n’a pas marché) et 2) à part cela, on pourrait dire que c’étaient les étudiants-es eux-mêmes qui se trouvaient occupés-es, par Twitter et Facebook et toutes ces conneries. Sans doute, la grève était vraiment ‘occupée’ par tous ces nouveaux outils de ‘communication’, livestream et tout cela.

FP : Les anarchistes et les autonomistes insurrectionnel-les ont avancé leurs idées au moyen de publications et ont vu plusieurs étudiants-es se joindre à eux pendant les manifs annuelles du 15 mars contre la brutalité policière. Peux-tu nous parler de comment les idées anti-autoritaires et insurrectionnelles ont répandu et ont acquéri une nouvelle importance pendant cette période de lutte ? Par exemple, les anarchistes et insurrectionistes ont beaucoup parlé de comment la pratique de porter des cagoules s’est répandue à force que les militants-es les portent au sein des manifs et émeutes et qui ont également expliqué à l’aide de tracts et de conversations pourquoi ils-elles faisaient cela.

Waldo : Moi je dirais, par contre aux mouvements précédents, que cette grève était énormément riche de littérature radicale, surtout pendant les mois avant son début, mais ensuite il n’y avait presque rien de constant produit durant le mouvement. Il semblait que chaque tendance politique ou cercle anarchiste ou quoi (souvent nés du mouvement de 2005) avaient leur propre publication toute prête avant la grève afin de clarifier certaines choses, de partager leurs leçons des autres luttes et d’avancer certaines propositions.

Une fois la grève lancée, peu de textes circulaient, à part certaines opinions sans valeur sur l’internet. Mais quand même, de ce que je me rappelle, à un certain moment (après une manif ou quelques connards sur-excités ont cassé la gueule à deux ou trois potes vêtus-es de noir) il circulait au moins une douzaine de tracts qui critiquaient l’idéologie pacifiste et autoritaire qui sapaient la solidarité parmi les manifestants-es. Portant sur les masques, je crois que c’est la pratique de se masquer plus que la littérature qui a entraîné l’usage répandu des cagoules, ainsi que l’habitude des flics de filmer les manifestants de manière systématique. Même chose pour la manif du 15 mars, je crois qu’elle a grandi à cause du contexte, où plein de gens subissaient la répression quotidienne aux mains de flics énervés et un type a perdu son œil quelques trois jours avant la manif. Même le maire a fait la publicité pour la manif au télé, en faisant l’appel aux gens de ne pas y aller!

FP : Comment est-ce que le mouvement étudiant c’est élargi pour occuper le terrain social plus large?

Waldo : Bref, il me semble que dès le début, les étudiants-es jouissaient d’un soutien populaire, rendu visible par les millions de gens qui portaient le carré rouge et par les manifs de 500 000 personnes, comme celle du 26 mars, en majorité non-étudiants-es, qui montraient l’impopularité croissante du gouvernement Charest. Les gens en avaient assez et les étudiants-es étaient les seuls-es capables de se mobiliser à une échelle massive, car les syndicats du travail et les lois qui les gouvernent sont tels qu’il est impossible d’organiser et de gérer une grève générale sur la base des syndicats.

Beaucoup de non-étudiants-es ne voulaient pas trop s’impliquer dans le mouvement, car ils-elles croyaient que ce n’était pas le leur, alors ils-elles sont restés-es dans une position de solidarité. Ce qui a transformé la situation c’était l’attitude arrogante et insolente du premier ministre Charest, ses provocations constants et surtout sa déclaration  »d’une loi spéciale », pendant la nuit du 17 au 18 Mai, qui a rendu illégale les manifs et a imposé de lourdes amendes contre les grèves, les occupations, les barricades et ainsi de suite. Cette loi a également fermé les écoles, ce qui permettait aux entreprises d’embaucher des travailleurs saisonnières pour l’été et de plus elle avait un effet démobilisateur, car il n’y avait plus de cours à bloquer. Le pire, c’était peut-être les élections annoncées pour la première semaine de Septembre. Les semaines qui suivaient l’annonce de la sale loi ont vu une réaction sociale sans précédente : de manifs quotidiennes dans diverses villes et quartiers, avec des milliers de personnes qui défiaient l’État ; on voyait nos voisins-es inconnus-es qui nous souriaient et répétaient le refrain commun :  »La loi spéciale, on s’en câlisse. »

Ensuite, je dirais que dès la semaine du Grand Prix (vers le 10 Juin), des gens commençaient peu à peu à prendre une pause, à partir en vacances jusqu’au commencement anticipé de la vraie guerre. Le gouvernement a exigé que les écoles s’ouvrissent le 13 Août, les CÉGEPs en premier, mais même la motivation des grévistes les plus déterminés-es n’a pas pu éviter que plusieurs assemblés votent, par une légère majorité et avec un sentiment de tristesse, pour ne pas poursuivre la grève. Beaucoup d’étudiants craignaient perdre leur semestre ou trouvaient ça inutile de rester en grève, car l’élection subite a fait qu’il n’y avait plus de gouvernement avec qui négocier. Cela nous a bien foutu. Les gauchistes commençaient à dire qu’il valait mieux se mobiliser pour les élections afin de chasser Charest du pouvoir. Ceci explique une grande partie de la diminution de soutien populaire ; beaucoup de gens pensaient qu’on devait laisser tomber nos briques et nos pierres pour passer aux urnes.

La suite n’a étonné personne. Le PQ a accédé au pouvoir, avec seulement une minorité de l’assemblé, la sotte Marois est devenue la première ministre et elle a proclamé l’abrogation de la loi spéciale et a annulé la hausse des frais de scolarité pour le moment. Mais cela n’était qu’un tas de merde: il lui a fallu quelques semaines avant de dire qu’il faudra bientôt négocier une hausse. Elle n’a pas non plus révoqué toutes les lois municipales mises en effet pendant le mouvement qui criminalisaient, par exemple, l’emploi des cagoules et les manifs sans permission policière. Le plus ridicule de cette histoire c’est que Marois, qui a survécu un attentat la nuit de son élection mené par un cinglé de plouc anglophone enragé, n’a pas pu survivre son geste réactionnaire et populiste l’année après: la tentative d’imposer une  »charte de valeurs » censé protéger la culture québecoise  »séculaire » contre les influences étrangères. Donc le PLQ multi-culturel est retourné au pouvoir moins d’un an et demi après la fin de la grève que nos drôles camarades syndicalistes traitaient de victoire.

FP : Pendant Occupy aux États-Unis, nous avons vu que lorsque l’État a attaqué, le mouvement a succombé rapidement. Cependant, à Montréal, nous avons vu des gens passer à l’offensive. Est-ce parce que les gens ont trouvé qu’ils-elles pouvaient gagner les combats dans les rues? Comme dans les moments célèbres où les porcs prenaient leurs jambes à leurs cous et fuyaient?

Waldo : Ni les Québécois-es ni les Montréalais-es sont plus courageux-euses, ou même plus anarchistes, que les gens ailleurs. La fin du mouvement a fait preuve de cela. L’explication de la situation est dans ses particularités: un gouvernement à la limite de l’arrogance face à un mouvement massif et résolu qui permettait à sa base une grande autonomie, le tout dans une société très soudée que les retentissements traversent rapidement. Ceci explique peut-être pourquoi les campus anglophones n’étaient pas tellement mobilisés, même s’ils l’étaient plus que jamais auparavant. Les gens étaient crinqués par Charest et les flics, qui avaient sous-estimé la détermination des étudiants et leur soutien populaire (la politique, c’est souvent un pari risqué). Ceci a entraîné facilement une escalade, car les gens se voyaient comme forts et ont décidé de casser la gueule à quelques flics.

FP: Peux-tu nous parler de comment la résistance au Plan Nord a réuni les luttes anarchiste, étudiante, et autochtone ? Peux-tu nous expliquer ce que c’est le Plan Nord et pourquoi les gens s’intéressaient à le détruire ?

Waldo: Le Plan Nord, ce n’est qu’un nom pour une nouvelle étape de la colonisation flagrante dans la partie nord-est du continent revendiquée par les États colonisateurs du Canada et du Québec. Il n’est pas clair à quel point les étudiants-es normales-aux qui manifestaient contre Charest prenaient le Plan Nord au sérieux, et combien parmi ceux et celles qui ont attaqué la conférence du Plan Nord le faisaient à cause de leurs convictions anti-colonialistes ou écologiques ou quoique ce soit. Bien sûr il y avait une sympathie officielle dans le mouvement pour ces luttes, mais la perturbation de la conférence et l’émeute qui s’ensuivit étaient possibles parce que tout le monde savait que ça ferait chier Charest, car il était tellement fier de son précieux Plan Nord, que toute personne décente reconnaissait comme du vol. Je pense toujours que ce genre de bouleversement social révèle combien les luttes qui apparaissent différentes sont liées et influencent les unes les autres. Les étudiants-es s’impliquaient dans la grève et c’est par cette voie qu’ils-elles se sont intéressés-es aux luttes des peuples autochtones et en particulier la bataille contre le Plan Nord.

FP : Quand le gouvernement a interdit les manifestations de plus de cinquante personnes, le mouvement s’accroissait et plus de gens s’impliquaient. Des assemblés populaires et communautaires s’établissaient. Peux-tu nous parler de ces réunions ? À quel point se sont-elles généralisées ?

Waldo : J’en ai déjà parlé, mais disons que ces assemblés se sont produites spontanément dans au moins une dizaine de quartiers à Montréal pendant un mois. Elles se réunissaient environ une fois par semaine, dans un parc ou centre communautaire et, selon le quartier, entre 30 et 300 personnes participaient. Ce nombre diminua au long de l’été et à force -il faut l’admettre- de formaliser et devenir semi-institutionnelles. Ce qui est intéressant c’est combien les questions d’organisations étaient différentes de quartier à quartier. Il y avait des groupes obsédés par la structure et des mécanismes complexes censés prévenir la domination et les habitudes oppressives; d’autres étaient plus détendus, mais pas pour cela plus efficaces; d’autres se concentraient sur des questions communautaires tandis que d’autres restaient en position de solidarité vers le mouvement étudiant.

Ben, c’était trop peu trop tard je suppose. J’imagine que ça aurait pu être différent si les assemblés auraient commencé plus tôt dans l’histoire du mouvement et surtout (avec réalisme) si la grève aurait continué en septembre. Elles auraient totalement changé le caractère du mouvement. Établir des espaces hors des assemblés des associations étudiantes pour discuter et organiser la lutte, ça aurait permis au mouvement de généraliser davantage aux questions et aux lieux non-étudiants. L’élection a vraiment nui à ce potentiel.

FP : Dans un interview avec Submedia, un-e anarchiste participant-e à la grève a discuté de l’emploi des projectiles pour créer et défendre l’espace contre la police et le rôle de l’attaque physique à étendre la grève. Peux-tu parler de ça ?

Waldo : Je ne sais pas trop quoi en dire. Est-ce le développement de la lutte qui permet l’attaque, ou bien est-ce l’inverse? Ou est-ce que l’influence va dans les deux directions? La capacité d’attaquer n’entraîne pas l’impunité. Beaucoup de gens ont été gravement blessés-es sans rien en tirer. Les anarchistes ont beaucoup parlé les quinze derniers années de  »la diversité de tactiques », mais peu de gens ont considéré une diversité de stratégies, ce qui laisse le problème aux chefs syndicaux, les Léninistes, et les social-démocrates. Et aux flics et aux capitalistes. Supposons qu’il y ait un affrontement. Nos actions, créent ou défendent-elles un espace ? Ce n’est pas évident. Je ne m’oppose pas à toute action directe, mais je note parfois une croyance dangereuse que l’action directe est bonne en-soi, mais souvent elle nous affaiblit. À un certain moment, le black bloc était une tactique, mais de nos jours il ressemble souvent à une idéologie, une identité. On ne doit jamais dénoncer les camarades qui s’impliquent dans ce genre d’action et il faut être prêt autant que possible de les protéger des flics et des pacifistes violents-es, mais l’attaque ne peut jamais remplacer la nécessité d’avoir une stratégie. Cela entendu, il ne s’agit pas d’une question d’attaquer ou non, mais de comment attaquer, de lieu et de tempsFIre. Comment peut-on attaquer d’une telle façon à nous renforcer au lieu de nous isoler? Ce sont des questions sérieuses.

Il ne faut pas négliger l’anxiété que provoquent les actions directes parmi les activistes et leurs amis-es, quand ça se fait de façon irréfléchie et est vu comme une vertu radicale. L’attaque toute seule ne rend pas les gens capables ou disposés à attaquer eux-mêmes, mais ce qui le fait c’est la puissance qu’on développe à travers nos divers liens, des expériences et des espaces communs, le partage de matériaux, d’outils, d’histoires, de langages, d’amour et de confiances. Beaucoup de choses entrent en jeu à l’heure du combat et c’est de ça qu’on tire notre force ; on ne peut pas risquer ceci pour une question de pureté ou d’une croyance romantique dans le pouvoir de l’action. Une action ne se révèle pas bonne parce qu’elle vise le bon ennemi ni parce que ces intentions sont bonnes: elle n’est bonne que lorsqu’elle nous rend plus forts-es. N’opposons pas une autre moralité à celle des pacifistes pathologiques.

FP : Qu’est-ce que l’avenir réserve pour ceux et celles à Montréal ? Verrons-nous des perturbations continues dans les universités et ailleurs ?

Waldo : Tout est possible. La hausse des frais de scolarité se fait montrer de nouveau et les assemblés se sont déjà mobilisées. L’expérience de 2012 est toujours proche et beaucoup de gens ne veulent pas perdre ce qu’ils-elles ont appris et créé. La machine de répression est mieux préparée et plus résolue qu’auparavant, et il est difficile de constater si les gens le sont aussi. Il y a des préparations qui se font hors des syndicats et la menace électoral ne devrait pas se présenter cette fois-ci. Il n’est pas clair s’il y aura autant de soutien populaire, mais il est possible que d’autres syndicats du secteur public feront la grève dans les mois qui viennent (même les flics protestent contre le gouvernement ces temps-ci). À mon avis, nous ne devons nous attendre à rien et faire ce qu’il faut faire. D’ailleurs, les choses arrivent toujours, il n’est que question de rester prêts-es.

FttP

* Note (pas des auteur-es): preuve que même quand ça échoue, une occupation peut avoir effet positif considérable du fait de la menace qu’elle peut faire peser sur les bureaucrates de l’établissement, les forçant dans une impasse stratégique. En étant sous verrou, il n’y avait plus besoin de levées de cours, ni d’absurdes votes de reconduction réguliers, et une suspension des activités lucratives pour les profiteurs de CÉGEPs

Avr 182015
 

De retour dans le quartier après une année et quelques mois de prison. Ce serait mentir que de dire que tout est facile. C’est un mélange entre des expériences magnifiques et des moments d’inconforts qui sont difficiles à partager. Après avoir perdu tout contrôle de son corps, toute autonomie physique, être en tête a tête avec soi-même est un combat quotidien. Un mélange de peur et de joie. Mais tout compte fait, les complices qui m’accompagnent au quotidien, d’ici et d’ailleurs sont conscients et très présents. La sensibilité est la force d’une solidarité sans limites.

J’aimerais avec cette courte lettre, envoyer un salut sincère aux ami-es et complices qui sont en cavale, ceux et celles qui restent séquestré-es dans les prisons du monde et également à ceux et celles qui se battent pour la liberté dans cette grande prison à ciel ouvert. J’ai quitté le monde carcéral mais chaque jour de nouvelles personne y rentrent, la répression ne fait que s’intensifier et après cette expérience, je dois remercier la solidarité sans frontière que nous avons reçu en soulignant que le combat continue avec tous ceux et celles qui luttent pour leur liberté.

Un cri de force rebelle et sincère pour toutes les âmes rebelles qui ont croisé mon chemin et qui m’ont touchée par leur sensibilité et leur force.

Un salut spécial à Chivo, compagnon, frère, j’espère que tu vas bien là où tu es, pour moi tu es toujours là. Et aussi un salut aux compagnonnes de Santa Marta, je les porte dans mon cœur.

Avr 172015
 

Le 8 avril, une banderole disant “Solidarité avec les prisonniers en grève de la faim en Grèce. Que vive l’anarchie” a été accrochée et des tracts ont été distribués :

Solidarité depuis Montréal

Aujourd’hui, le 8 avril, nous rendons hommages aux prisonnier.e.s en grève de la faim dans les prisons grecques depuis le 2 mars 2015.

Dans le contexte actuel, le parti au pouvoir en Grèce depuis les élections de janvier 2015 est le parti de Gauche radical Syriza; un parti promouvant des idées anticapitalistes et antipatriarcales. Il semble évident qu’en réalité, le parti a pour rôle la récupération électorale de la rébellion sociale. Plusieurs prisonnier.e.s anarchistes, prisonnier.e.s politiques et prisonnier.e.s sociaux.ales en sont bien conscient.e.s et subissent quotidiennement les conséquences de cette comédie.

Une grève de la faim massive est engagée depuis plus d’un mois afin d’exiger entre autre l’abolition de plusieurs lois fascistes et des prisons de Type C. Plusieurs compagnon.e.s sont dans des états de santé critiques. Les évènements révèlent le vrai visage du parti de Gauche qui continue de réprimer les luttes.

Voici les revendications des prisonniers en lutte :

• Abolition de la loi antiterroriste 187A et de la loi contre les organisation illicites 187
• Abolition de la condition aggravante d’une action réalisée en se couvrant les caractéristiques faciales (« loi de la cagoule »)
• Abolition des prisons de sécurité maximale (type C)
• Abolition de l’ordre du parquet par lequel on impose la prise violente de traces ADN
• Que les expert.e.s biologistes de confiance de l’accusé.e aient accès et puissent analyser les traces ADN si l’accusé.e le désire
• Abolition de l’analyse de traces qui contiennent des mélanges de matériel génétique de plus de deux personnes
• La libération immédiate de Savvas Xiros pour qu’il puisse recevoir le traitement médical dont il a besoin.

Force et courage à tous les compagnon.e.s en prison et en fugue!
Pour la destruction de l’État, du Capitalisme et de toutes les prisons.
Vive l’anarchie!

Pour plus d’information :
contrainfo.espiv.net
hunger-strike.espivblogs.net
www.non-fides.fr

Avr 162015
 

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Les Mohawks veulent ériger des barricades contre les pipelines de pétrole

Publié sur Mr Mondialisation, 16 avril 2015

Les grands projets pétroliers suscitent plus que jamais le ras-le-bol des populations locales qui doivent subir la détérioration de leur environnement direct, ainsi que les dérèglements climatiques, impacts indirects de ces activités. Les Mohawk, l’une des six grandes nations iroquoises, menacent d’intervenir pour bloquer la construction d’un pipeline, comme ce fut déjà le cas par le passé.

La construction de l’oléoduc de TransCanada pose problème depuis les débuts du projet. Des manifestations sous l’égide de groupes écologistes ont déjà permis, après des mois de lutte, de modifier le trajet et de supprimer certains terminaux pétroliers. Mais le passage du pipeline sur le territoire Mohawk reste maintenu et le grand chef de Kanesatake, Serge Simon, explique que la possibilité d’ériger des barricades n’est pas à négliger.

TransCanada avait récemment annoncé l’élaboration d’un nouveau projet d’oléoduc. Cet oléoduc « monstre » d’une longueur de 4600 kilomètres devait transporter environ un million de barils de pétrole par jour, des provinces d’Alberta et de Saskatchewan (ouest canadien) vers des raffineries de l’Est du pays pour transformation. Alors que le monde cherche en toute hâte, crise écologique oblige, comment faire émerger une ère post-carbone, les industriels du pétrole investissent plus que jamais dans de grands projets transnationaux.

Selon le tracé prévu, l’oléoduc devrait passer au nord du territoire Mohawk, au Québec, afin de relier l’actuel pipeline converti. Seulement, le chef Mohawk, Serge Simon, s’oppose catégoriquement au passage du pipeline de TransCanada sur son territoire et n’exclut pas la possibilité d’ériger des barricades, comme ce fut le cas 25 ans plus tôt lors de la crise d’Oka, pour empêcher la construction d’un terrain de golf et d’un projet immobilier. L’armée canadienne était intervenue pour contrer la désobéissance civile. Des conflits qui vont renforcer les tensions identitaires et les rancœurs entre les cultures jusqu’à nos jours.

Si aujourd’hui les Mohawk arrivent à se mettre d’accord avec certains québécois et canadiens, c’est bien concernant le sujet de l’écologie. La région du nord de l’Alberta est déjà polluée et de forts taux de mercure et d’arsenic (métaux lourds et dangereux pour la santé) ont été détectés dans la chair des animaux sauvages. La pollution de l’air est, elle aussi, une triste réalité dans cette région, au point de poser un risque de cancer plus élevé d’après un rapport de l’université de Toronto.

Les Mohawk rejoignent ainsi l’opposition à ce projet de 12 milliards de dollars, qui a pour but de favoriser le développement et le transport du pétrole le plus polluant qui soit, celui des sables bitumineux. De nombreuses manifestations et expositions ont eu lieu depuis l’annonce de l’édification du pipeline, soutenues par de grandes associations écologistes comme la Maison du développement durable, Equiterre, Greenpeace, Environmental Defence, ainsi que le Conseil des Canadiens.

Ces revendications forcées on fait plier TransCanada qui a abandonné son projet de terminal maritime de Cacouna. Si les habitants de Cacouna ont pu être épargnés (autant que les bélugas), cela n’est pas le cas des Mohawks de Kanesatake. Le passage de l’oléoduc est toujours maintenu au nord du territoire Mohawk, près de Mirabel, après avoir traversé la rivière des Outaouais et le lac des Deux Montagnes. Serge Simon, le chef de Kanesatake, s’inquiète surtout des conséquences d’un éventuel désastre si le pipeline venait à fuir ou à avoir un quelconque problème.

De son côté TransCanada affirme que la région « représente une occasion (de résistance!) pour toutes les collectivités situées le long du tracé » et souhaite trouver un compromis financier avec les Mohawks. Mais Serge Simon réplique qu’il ne veut pas prendre l’argent de TransCanada, car cela reviendrait à fermer les yeux et à exploiter à leur tour le pétrole des sables bitumineux qui représente un risque pour la santé des habitants du nord de l’Alberta.

Une bonne nouvelle est malgré tout arrivée le vendredi 10 avril, pour la planète, pour l’environnement et particulièrement pour les bélugas ( baleine blanche de l’arctique) : il n’y aura pas de terminal pétrolier de TransCanada dans le fleuve Saint Laurent. Mais Greenpeace est d’ores et déjà à l’affut pour continuer à s’opposer à la construction d’un autre terminal en d’autres régions.

Pour l’instant, aucune décision n’a été prise concernant le passage du pipeline sur le territoire Mohawk, ce qui est sûr, c’est que les habitants de Kanesatake n’hésiteront pas à empêcher le passage de l’oléoduc, même si pour le moment, cela ne constitue pas leur stratégie première.

Avr 132015
 

quebec

Appel mondial à des actions de solidarité du 13 au 17 avril
contre la répression à l’Université du Québec À Montréal (UQAM) et partout.

Le 21 mars 2015, des étudiant-e-s du Québec au Canada ont lancé un mouvement de grève politique contre les mesures d’austérité et contre l’extraction des hydrocarbures. Notre mouvement s’inscrit dans un climat répressif général où les manifestations sont interdites et durement réprimées en vertu de plusieurs règlements municipaux ou liés au code de la route. Des milliers des personnes ont ainsi été arrêtées ces trois dernières années, avec des amendes de 640$ pour les plus chanceux/euses et des accusations criminelles pour les autres.

Depuis des semaines nous subissons une répression encore plus importante, au sein même de notre université. Le mouvement dans son ensemble a fait preuve d’un grand courage, en répondant coup pour coup à cette répression, mais aujourd’hui nous avons besoin de votre aide.

Depuis quelques jours une série d’événements nous accablent :

  • fin mars, 9 étudiant-e-s ont reçu une convocation devant le conseil exécutif de l’UQAM. Sans aucune possibilité d’appel, sans que les procédures internes ne soient respectées, ces étudiant-e-s sont menacées de la sanction la plus grave, soit une expulsion définitive de l’université. Ils et elles sont accusé-e-s pour des faits remontant parfois à l’hiver 2013…
  • une injonction demandée par l’UQAM nous interdit de lever les cours et de tenir TOUTES activités liées à la grève.
  • le 8 avril, suite à des levées de cours, l’administration de l’UQAM a fait appel aux forces de l’ordre et 21 personnes ont été arrêtées. Elles ont désormais l’interdiction de s’approcher de l’université en plus de charges criminelles qui pèsent sur elles.

En réaction à tout cela, depuis le 8 avril, les assemblées générales des différentes facultés ont décidé de reconduire la grève générale illimitée en ajoutant les revendications suivantes :

Fin de l’injonction et de la judiciarisation du mouvement social

Plus jamais la police sur le campus

Fin des poursuites contre les 9 expulsé-e-s politiques

Nous avons besoin de vous!

Ceci est donc un appel à une semaine d’actions de solidarité du 13 au 17 avril 2015. Notre université, l’UQAM tient beaucoup à son image alors nous vous invitons à passer à l’action, à la hauteur de vos moyens et possibilités.

Quoi que vous décidiez, n’hésitez pas à nous relater vos événements à l’adresse suivante : solidariteactionuqam@gmail.com

Contre la répression, par tous les moyens nécessaires !

Signé : des étudiant-e-s et des employé-e-s étudiant-e-s de l’UQAM

Avr 082015
 

De Nonfides

Compagnons, j’écris ces quelques lignes dans l’intention de faire connaître ma situation de vie actuelle, que j’ai décidé, à partir d’une perspective très particulière, de mener à cause de la succession de situations qui se sont présentées dans le contexte récent de la lutte individuelle et/ou sociale, et la répression contre celle-ci.

La liste est longue de compagnon-ne-s qui ont été harcelés et sous le coup d’enquêtes à cause de l’activité anarchiste de ces derniers temps ici, et plus précisément dans le centre et le sud du pays, en les faisant suivre pour épier leurs moindres mouvements et voir avec qui ils s’organisent, en envoyant des saloperies de balances pour obtenir des informations, en accusant les compagnon-ne-s étranger-e-s de financer les luttes, et j’en passe. Et même lorsque j’ai été arrêté et emmené en prison avec mes compagnonnes d’affinité Amelie et Fallon, il y a eu une tentative de faire un lien entre de nombreuses personnes du milieu libertaire/anarchiste afin d’essayer de les lier à notre affaire (5E), perquisitionnant des maisons afin d’obtenir des « preuves » (sans y parvenir) et ainsi avoir plus d’arguments pour armer un coup fort à l’intérieur du petit monde acrate.

Ceci a mené à l’arrestation du compagnon « Tripa » (et la persécution d’autres compagnons qui ont aussi dû s’éloigner), où heureusement on a pu compter sur la réaction opportune des compagnonnes du GASPA [NdT : Groupe d’Avocates Solidaires avec les Prisonniers Anarchistes] pour le sortir immédiatement, vu que l’accusation ne reposait sur rien, et il n’a pas eu d’autre choix que celui de la cavale, vu qu’il était accusé pour ses antécédents « délictueux » auxquels s’additionnait un lien avec les enquêtes pour terrorisme, sabotage et autres affaires qu’ils ont voulu nous mettre sur le dos.

Pour les mêmes évidences et ayant la faculté de choisir librement, j’ai décidé de prendre le chemin de la fuite pour différentes raisons, principalement pour ma propre sécurité et celle des autres compagnons, vu le chemin que prend tout cela. Je ne serai pas le premier ni le dernier à le faire, en ayant pris un chemin de lutte qui m’amène à me réapproprier ma propre vie, et qui mène aussi sur un chemin violent, frontal et réfractaire à toute autorité. Et pas besoin d’être un érudit pour te rendre compte que tu seras dans le viseur de ces flics et procureurs qui essaieront de te lier et t’impliquer à n’importe quel cas d’action directe qui a lieu sur le champs de bataille, et dans mon cas, en sortant sous libération sous contrainte avec un pointage il est évident que j’aurais été à leur merci pour me rééduquer à leur goût, plaisir que je n’ai pas l’intention de leur procurer, au moins dans la mesure de mes possibilités.

En plus de ne pas avoir la moindre intention de collaborer à ce foutu petit théâtre juridique qui aurait continué après ma sortie de prison, dès les premiers instants de ma libération physique j’ai décidé de ne pas être leur proie contrôlée par la visite périodique de l’endroit où j’étais censé me présenter pour effectuer une horrible signature durant un an et demi de plus. Pour tout cela j’ai décidé de ne pas me présenter devant le tribunal les jours suivants, cherchant à rompre avec ce que j’appelle une ligne de conduite.

Ceci ne veut pas dire que je m’éloigne de la lutte ou que je me repente de ce que j’ai vécu pour la mener, au contraire, celle-ci continuera d’être le facteur principal qui continue de me pousser dans cette facette insurrectionnelles vers l’inconnu de la liberté. Depuis « dehors » aussi on peut continuer dans la quotidienneté de l’attaque permanente à travers ses diverses formes et contenus, en cherchant à poursuivre mes projets depuis d’autres endroits mais avec les mêmes visions, en sachant clairement que ça n’est pas avec la prétention de vouloir mener ma lutte dans la clandestinité volontaire ni de chercher une forme spécialisée ou supérieure d’attaque, mais en prenant en compte que celles-ci font partie des conséquences que nous devons affronter et assumer sur ces chemins du conflit, de faire les choses pour ce en quoi nous croyons et de la façon que nous le croyons possible et nécessaire.

J’ai toujours su que s’opposer fermement aux formes de subordination et aux contenus idéologiques que les techniques du mensonge démocratique emploient afin de maintenir leurs privilèges et l’état des choses, amènerait avec soi des situations opposées à ce que n’importe qui de « normal » voudrait pour sa vie. Mais comme moi je n’ai pas envie d’être ce genre de personne normale et d’accepter d’être un esclave de plus, j’ai voulu faire les choses de cette manière, comme le ferait n’importe quel irréductible à la recherche d’une vie meilleure à partir de sa façon de comprendre les choses.

Cela aurait été plus confortable pour moi, après être sorti de prison et marcher dans la rue, de voir la famille, les amis et d’être aux côtés de ma chère fille, tout comme d’être aux côtés des compagnon-ne-s et personnes de diverses tendances avec qui j’ai des affinités pour continuer d’agir ensemble. Mais comprenant que ceci n’est pas un jeu et que la lutte doit se mener jusqu’aux dernières conséquences, il faut lui donner le sérieux nécessaire, et donc parfois il faut prendre des décisions qui peuvent s’avérer douloureuses par la distance physique avec les êtres aimés. C’est pour cela que je ne vois pas la cavale comme la seule issue, mais comme celle la plus proche de la vision que j’ai de la situation. J’y ai vu une façon adéquate d’agir, et j’ai déjà dit auparavant, entre autres choses, de ne pas donner lieu à des enquêtes et tentatives de me lier à de futures actes violents similaires à celui pour lequel j’ai été emprisonné, et avec cela de me lier aussi à d’autres compagnon-ne-s et à ceux qui se trouvent sur le chemin, car nous savons de quoi se servent l’État et ses sbires de la loi et de l’ordre, et je ne dis pas ça par peur, mais en partant du fait que c’est aussi un acte insurrectionnel de prendre soin des nôtres.

Une part de mon insurrection individuelle consiste en une rupture avec toute forme d’entrave, et la destruction constante de n’importe quelle relation personnelle/sociale issue de l’ennemi tant abhorré, l’État/Capital, et de n’importe quelle autorité, est nécessaire et a un rôle prépondérant. Raison pour laquelle je continue de me déclarer en guerre permanente dans la mesure de mes possibilités. De telles relations se reflètent dans la société aliénée qui ne reproduit que ce qui s’apprend dans ses établissement éducatifs et religieux, ses moyens d’information et de production économique/technologique, de même que dans ses manières de se conduire dans divers aspects quotidiens, et ne mènent qu’à la domination et font que je refuse de participer au jeu juridique et à être un « bon citoyen » car cela pourrait prouver que la punition donnée par les lois et leurs mentors fonctionne très bien. Je les emmerde !

C’est pour cela que je préférerais mourir dans la tentative plutôt que de chercher une concession, médiation, aide ou pacte avec l’ennemi que je cherche à détruire. En comprenant que chacun a ses perspectives et façons de faire les choses, et respectant ce que chacun fait de ses luttes, et soutenant celles avec lesquelles j’ai le plus d’affinité ou qui au moins font preuve d’une certaine hostilité envers l’ennemi. Mais celle-ci est la mienne, et c’est à elle que je me tiens.
Sans rien d’autre à rajouter, je fais une grosse bise à ceux qui me liront, et plus particulièrement à mes amis, compagnon-ne-s de lutte, à ma famille et à tous ceux qui s’identifient dans la lutte contre le pouvoir sous chacune de ses facettes. La lutte continue, ne reconnaissant pas la situation comme prémisse de la fin, mais seulement comme la continuité de mes agissement libres.

Pour la liberté des prisonnier-es-s dans le monde !
Pour la solidarité avec les compagnon-ne-s en cavale, que le vent efface leurs traces !
Pour la destruction du pouvoir sous toutes ses formes !
Solidarité avec les compagnons en grève de la faim !
Guerre sociale de toutes parts !

Vive l’anarchie !

Carlos López “Chivo”
Depuis un recoin du monde
5 avril 2015

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[Traduit de l’espagnol par Camotazo.]

 

Avr 032015
 

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De le média de masse

Des entrepreneurs de Saint-Henri n’en peuvent plus d’être victimes d’actes de vandalisme de la part de ceux qui reprochent à leurs luxueux commerces d’embourgeoiser le quartier. Ils songent maintenant à embaucher un gardien de nuit.

«Si tu vends autre chose que des hot dogs à 25 cennes, à Saint-Henri, tu n’es pas toujours le bienvenu», affirme l’entrepreneur Corey Shapiro. Tous les jours, on crache dans les vitrines de son chic salon de coiffure et de sa lunetterie de luxe, tous deux situés sur la rue Notre-Dame.

En décembre, deux commerces de ce secteur, dont le salon de coiffure de M. Shapiro, avaient été aspergés de peinture blanche. Un blogue anarchiste avait alors revendiqué ce coup d’éclat. Malgré l’intervention des autorités, les commerçants qui possèdent des boutiques plus haut de gamme dans ce quartier populaire continuent d’être la cible d’actes de vandalisme et d’intimidation.

Fléau

Le Journal s’est entretenu hier avec quatre commerçants de la rue Notre-Dame aux prises avec ce fléau.

Tony Campanelli est l’un d’eux. L’homme d’affaires, qui possède un café et une boutique de vêtements pour hommes, est devenu malgré lui «un visage de la gentrification» de Saint-Henri, en pleine transformation depuis deux ou trois ans.

Aspergé d’huile

«On veut me faire porter le blâme de l’embourgeoisement du quartier. Ce n’est quand même pas de ma faute si les condos se multiplient et que les loyers augmentent», dit M. Campanelli.

Il y a deux semaines, on a aspergé d’huile la devanture de ses deux commerces, ce qui a taché la pierre de la façade.

«Je vais devoir appeler une entreprise de nettoyage pour faire disparaître tout ça», déplore l’entrepreneur.

L’entrepreneur a installé des caméras pour épingler ces vandales qu’il qualifie «d’anticapitalistes». Ses voisins et lui songent maintenant à se regrouper pour payer un gardien de nuit.

«Plus de 50 % de la population du quartier vit sous le seuil du faible revenu, rappelle le maire de l’arrondissement du Sud-Ouest, Benoit Dorais. Alors oui, il y a des gens qui trouvent difficile l’arrivée de gens plus aisés.»

Le maire dénonce vivement ces actes de vandalisme, mais estime que ce phénomène ne touche qu’un petit nombre de commerçants. «De façon générale, les nouveaux commerces sont bien accueillis», souligne-t-il.

Les autres actes de vandalisme ciblant les commerces haut de gamme de Saint-Henri :

  • Des vitrines cassées
  • Des graffitis disant : « Non à la gentrification »
  • Des crachats dans les fenêtres
  • Des excréments laissés devant la porte
  • Des affiches anticapitalistes collées dans les fenêtres
  • Un mélange de petits fruits visant à reproduire les entrailles d’un animal, qui avait été laissé devant la porte
Mar 302015
 

De Printemps 2015

La révolte gronde à travers le Québec et se propage jour après jour. Déjà 66 associations étudiantes ont voté la grève reconductible. Les manifs de soir s’accumulent. Le Vieux-Montréal et l’Université Laval se saisissent de leurs campus et les transforment en lieux politiques. L’UQAM a été bloquée aujourd’hui même. Alors que le Printemps 2012 avait pris plusieurs semaines pour se mettre en branle, le Printemps 2015 a pris son envol en l’espace de quelques jours. Le mouvement reprend là où 2012 s’était interrompu. La grève est en marche.

Et la répression, elle, ne s’est pas fait attendre. Des arrestations massives ont eu lieu aussi bien à Québec qu’à Montréal. Des chiens se sont rués sur les manifestant.es les plus pacifiques. Une jeune étudiante s’est même fait tirer à bout portant par les flics. Et la direction de l’UQAM menace maintenant d’expulsion politique neuf étudiant.es militant.es.

C’est dans cette conjoncture tendue mais enthousiaste que le comité exécutif de l’ASSÉ balance son pavé : un appel à la fin de la grève étudiante, alors que celle-ci bat son plein dans les universités, en démentant tous les pronostics pessimistes. La parole du comité exécutif de l’ASSÉ serait la parole raisonnable et paternelle qui appellerait à l’évidence stratégique. Le comité exécutif aurait son propre agenda, ses propres ultimatums : une méga-manifestation le 2 avril appelant une grève à l’automne qui agirait de pair avec une grève des travailleurs du secteur public, et plus particulièrement du secteur de l’éducation. Selon cette parole « raisonnable », nous serions aujourd’hui en déficit de puissance pour faire grève – sans allié.es parmi les travailleuses et les travailleurs – si bien qu’il y aurait apparemment danger de défaite aux lourdes conséquences.

Or, avec cet appel raisonnable et paternaliste, l’exécutif de l’ASSÉ vient de saper sa légitimité en remettant en question une grève adoptée par plus de la moitié de ses associations membres.

Depuis la naissance du mouvement Printemps 2015, ce comité exécutif martèle la même stratégie à travers toutes les assemblées générales et congrès, rappelant à chaque fois que la grève n’aura d’efficace qu’en automne. Et pourtant, ces mêmes assemblées ont refusé leur mot d’ordre en entamant une grève le 21 mars. Si bien qu’il est dorénavant hors de doute que ce même comité exécutif ne remplit pas les conditions minimales pour s’autoriser, aujourd’hui, un appel à la fin de la grève. Ironie suprême : l’ASSÉ s’était toujours démarquée des fédérations étudiantes (FEUQ-FECQ) par sa loyauté envers sa base militante, refusant de se servir des médias de masse pour influer sur elle. Or, c’est elle qui se salit aujourd’hui les mains en reproduisant les manœuvres qu’elle décriait jadis.

La grève du printemps 2015 s’est organisée sur d’autres bases que les traditionnelles structures de l’ASSÉ. En appelant à la fin de la grève sous prétexte de repli stratégique, l’exécutif cherche à museler une base qui tend de plus en plus à se dérober de sa mainmise.

À chacune de ses manifestations, la contestation n’épuise pas ses forces. Au contraire, notre force s’alimente et devient contagieuse. Parlerait-on de grève sociale en 2015 s’il n’y avait pas eu le mouvement de 2012 ? Et pourtant, aux premières semaines de 2012, personne n’aurait pu prévoir l’ampleur de ce qui est advenu. Une grève maintenant ne signifie pas l’impossibilité d’une grève plus tard, à l’automne. C’est bien cela que signifie un printemps rampant : un mouvement qui s’inscrit dans la durée, qui prend différentes formes et possède plusieurs moments de puissance effective. Le plus important est qu’au sein de ce mouvement des allié.es se rencontrent, des tactiques s’inventent et des forces s’organisent. Inversement, selon la conception de l’exécutif actuel de l’ASSÉ, ces forces seraient toujours à économiser, comme si nous étions de petits soldats à usage unique qu’il faudrait lancer au combat au bon moment (et au profit des centrales syndicales).

Mais plus profondément, cette confiance aveugle envers la mobilisation des centrales syndicales rend perplexe. Ces mêmes centrales qui, en 2012, au sommet du plus grand mouvement social que le Québec ait connu, n’ont jamais envisagé la grève. Ces mêmes centrales qui sont contre toute grève illégale, qui ont appuyé la Charte et qui ne se positionnent pas contre les projets d’hydrocarbures. Et si les syndicats ne partaient pas en grève à l’automne 2015, comme leur logique l’indique, quel est le plan de l’ASSÉ ? Va-t-on remettre entre les mains de dirigeant.es syndicaux, notre destinée politique ?

Les exécutant.es de l’ASSÉ à l’origine de cette « proposition » répondraient qu’eux non plus n’ont jamais cru aux dirigeant.es des centrales syndicales, mais qu’ils comptent sur les syndicalistes locaux pour déborder les dirigeant.es dans un mouvement contre l’austérité. Pas au bout de ses contradictions, l’exécutif de l’ASSÉ fait pourtant le même geste que les centrales : de peur d’être dépassé par ses membres ardent.es, l’exécutif les rappelle à la raison et à l’ordre. De plus, cette focalisation sur l’agenda de syndicats de la fonction publique met de côté toutes celles et ceux que l’appel à la grève sociale vise à rejoindre. Organismes communautaires, chômeurs et chômeuses, travailleurs et travailleuses du privé : autant de forces prêtes à se mobiliser et autant, sinon plus, touchées par l’austérité.

Dans le contexte actuel, abandonner ne signifie pas seulement mettre fin à un mouvement inédit dans la radicalité de ses revendications et l’autonomie de ses formes, mais surtout abandonner des luttes nécessaires : les neuf camarades sur qui plane la menace de l’expulsion à l’UQAM, qu’est-ce qui les sortira de là sinon un mouvement combatif qui met la pression pour que la direction abandonne les charges ? Et ces blessé.es que la police a déjà mutilé.es, qui portera leur parole, qui défendra leur honneur et qui accomplira leurs aspirations ?

Pour un syndicat « de combat », être dépassé par sa base devrait toujours être une bonne nouvelle, et non une menace au plan stratégique d’un exécutif autoritaire et condescendant. Parier sur une grève sociale, c’est parier sur la combativité des membres de la base, sur des gens qui résistent d’ores et déjà aux menaces, à la répression et à la bureaucratie syndicale grassement payée. Mais surtout, nous misons sur l’élan qui a déjà porté des milliers de personnes à sortir dans les rues, à plusieurs reprises en une seule semaine.

Cet élan ne s’arrête pas strictement à la grève étudiante. Il se prolongera lors du 11 avril, à la manifestation contre le Conseil de la Confédération sur les changements climatiques, lors de la grève sociale du 1er mai, puis pendant l’été en luttes localisées contre les projets d’hydrocarbures.

Vive le printemps! Vive la grève!

Printemps 2015

Mar 262015
 

Finalement, après avoir été acquittés le 27 février 2015 de l’accusation du parquet fédéral pour le délit de dommages sous forme d’incendies et en payant une caution pour la sentence de 2 ans et 7 mois pour les délits d’attaque à la paix publique et de dommages, les compagnon-ne-s Amélie Trudeau et Fallon Roullier ainsi que Carlos Lopez « Chivo » ont été placés en « liberté sous caution » le 13 mars.

 

Parce qu’elles sont de nationalité canadienne, les compagnonnes Amélie et Fallon ont été emmenées directement à une station de l’Institut National de Migration, une prison pour ceux qui n’ont pas les papiers nécessaires pour passer les frontières imposées par les États et le Capital. Une prison dans laquelle passent des centaines de personnes en attente d’une décision sur leur situation pour le fait de ne pas avoir de papiers. Une prison comme toutes les prisons, dans laquelle règnent la maltraitance, les humiliations, le harcèlement, l’insalubrité, etc. Elles sont restées plusieurs jours dans cet endroit. À cause des conditions du lieu –visites restreintes et peu d’informations– la situation des compagnonnes était peu claire, jusqu’à ce qu’elle furent déportées dans leur lieu d’origine le 23 mars.

Si plusieurs jours sont passés depuis la sortie de prison des compagnon-ne-s, il nous paraît important de diffuser cette information pour actualiser la situation de nos compagnons emprisonnés.

Le fait d’avoir été acquittés d’une des accusations, pour nous, plus que nous parler d’innocence ou de culpabilité, cela nous indique que l’État a mal monté son théâtre répressif et qu’à cause de cela il a fini par s’écrouler, comme cela s’est produit avec l’accusation de Terrorisme qu’ils ont eu pendant 40 jours et pour laquelle ils ont été au Centre National d’Arraigos [voir ici, NdT].

Nous pensons que peut-être que pour le prochain coup répressif l’Etat visera mieux, c’est pourquoi nous appelons à réaliser un exercice constant de réflexion sur nos pratiques de sécurité, ainsi qu’à être préparé-e-s, car nous sommes sûrs que la campagne anti-anarchistes de l’État mexicain continuera.

Cela nous remplit de joie que nos compagnon-ne-s soient de nouveau dans la rue !
Même si les prisonnier-e-s nous manquent !
Liberté pour Fernando Bárcenas, Abraham Cortés et Luis Fernando Sotelo !
À bas les murs de toutes les prisons !

Croix Noire Anarchiste Mexico

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[Traduit de l’espagnol par nos soins de Abajolosmuros.]